(b) Des personnels à diversifier

Les académies soulignent la faiblesse numérique du corps des enseignants et, en particulier des enseignants-chercheurs (en Guyane, on ne compte que 8 professeurs d'université) et le nombre encore plus faible d'enseignants d'origine locale.

D'où la proposition de la mission de diversifier les équipes pédagogiques de l'enseignement supérieur en attirant davantage de jeunes diplômés des universités locales et en élargissant les collaborations extérieures telles que celles de praticiens hospitaliers.

L'expérimentation sur l'annualisation du temps de travail dans les établissements de santé publics outre-mer a été introduite par amendement au projet de loi HPST (Hôpitaux, Patients, Santé, Territoires). Le dispositif offre la possibilité aux établissements publics de santé d'outre-mer de mener des expérimentations relatives à l'annualisation du temps de travail des praticiens hospitaliers à temps partiel.

Il vise à apporter une solution aux difficultés de recrutement et de fidélisation des praticiens hospitaliers à temps partiel que rencontrent plusieurs établissements publics de santé des DOM et des collectivités d'outre-mer.

L'enjeu de cette mesure est de permettre à un praticien hospitalier à temps partiel de remplir ses obligations de service à l'hôpital sur une période condensée de six mois et d'exercer une autre activité qui pourra être de l'enseignement en dehors de l'hôpital pendant les six derniers mois restants de l'année.

La mission propose aussi de renforcer l'attractivité des postes d'enseignants :

- en augmentant les allocations de recherche pour les jeunes doctorants locaux ;

- en multipliant l'intervention de professeurs ou assistants francophones ou étrangers (pour des séminaires ou des cycles courts de spécialisation) dans les enseignements par le biais de partenariats, notamment avec d'autres établissements universitaires métropolitains ou régionaux.

Proposition n° 78 : Diversifier les équipes pédagogiques de l'enseignement supérieur en attirant davantage de jeunes diplômés des universités locales et des collaborateurs extérieurs.

(2) Une vie étudiante matériellement plus difficile pour les jeunes ultramarins

Le nombre d'étudiants dans les DOM a été multiplié par six entre 1980 et 2008. Ils sont actuellement au nombre de 36 400 contre 6 300 il y a trente ans.

Les questions d'accueil, d'information et d'orientation sont des aspects récurrents des demandes formulées par les étudiants français en général, comme l'a montré le récent rapport sénatorial « France, ton atout jeunes : un avenir à tout jeune ».

Ces lacunes sont encore plus criantes dans les DOM, comme en ont témoigné de jeunes étudiants de l'UAG à Pointe-à-Pitre lors d'une rencontre avec les membres de la mission.

La vie des étudiants ultramarins s'apparente trop souvent à un véritable « parcours du combattant » : dispersion de l'information sur les possibilités d'études, problèmes de ressources financières et d'accès aux bourses, de déplacement, d'hébergement, de mobilité vers la métropole... avec, en outre, une faible « animation » des campus (en termes de vie culturelle, d'outils pédagogiques ou d'échanges).

Les représentants des organisations étudiantes ont fait part aux membres de la mission parlementaire de leurs initiatives pour mieux orienter et préparer les lycéens au cursus universitaire et ont formulé des propositions tendant à faciliter leur accès au monde du travail, comme les stages en entreprises avant la licence ou la mise en place de formations plus complètes.

§ La vie étudiante compliquée dans les DOM .

La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et le secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer ont commandé aux professeurs Hervé Baussart et Pascal Jan un rapport tendant à dresser un état des lieux précis de la condition étudiante dans les différentes collectivités ultramarines, et en particulier les DOM. Ce rapport, bien que remis depuis plusieurs mois aux ministres, n'a pas encore été rendu public.

Interrogé sur ce rapport, et plus précisément sur la situation des étudiants inscrits dans leur département d'origine , le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a simplement confirmé à la mission l'existence de difficultés liées à une absence d'environnement propice au développement de la vie étudiante, en particulier en matière d'infrastructures de transports ou d'équipements culturels. Il considère cependant que la recherche d'améliorations relève essentiellement de la responsabilité des départements ultramarins eux-mêmes.

En Guadeloupe, par exemple, les responsables de l'UAG n'ont pas nié devant les membres de la mission, des conditions assez difficiles, faute de locaux adaptés et de moyens financiers suffisants. Ils ont rappelé que le taux d'échec en première année est de l'ordre de 65 % et de 20 % en troisième année, d'où la mise en place de dispositifs de tutorat, d'orientation et d'apprentissage méthodologique.

Un des objectifs est donc que « le plan de réussite en licence » puisse s'appliquer bientôt pleinement aux étudiants ultramarins.

Le plan de réussite en licence

Présenté le 13 décembre 2007, le plan de réussite en licence a pour but de diviser par deux le taux d'échec en première année à l'université.

Doté de 730 millions d'euros en cumulé sur 2008-2012, soit une hausse de 43 % des moyens en cinq ans, ce plan prévoit un accompagnement personnalisé des étudiants. Il prévoit notamment :

- Cinq heures de plus par étudiant et par semaine :

Grâce aux moyens d'enseignement ou de soutien pédagogique dégagés, les universités disposeront d'un volume d'heures disponibles de cinq heures hebdomadaires supplémentaires par étudiant, pour chaque année de licence, destinées à un encadrement pédagogique plus soutenu. Il peut s'agir soit d'heures complémentaires d'enseignement, soit de tutorat rémunéré, soit de monitorat.

D'ores et déjà, 2 250 postes de "moniteurs" ou d'enseignants en thèse sont prévus dans le budget 2008 et la loi sur l'autonomie des universités permet de dégager plus facilement des emplois pour les étudiants qui peuvent assurer des tutorats ou des soutiens méthodologiques.

- Un contrat de réussite :

Les universités ont désormais la responsabilité de construire avec les élèves susceptibles de les rejoindre un parcours de formation en lien avec un projet d'insertion professionnelle. L'étudiant est accompagné grâce à la prérentrée et à la signature d'un contrat de réussite, qui contient des engagements réciproques, comme par exemple la mise en place d'un tutorat en cas de difficultés.

Les possibilités de réorientation sont ouvertes dès la fin du premier semestre et en fin de première année, les crédits acquis pouvant être transférés dans d'autres cursus de formation.

- Une première année pluridisciplinaire :

Pour les étudiants devant bénéficier de quatre à cinq heures d'études supplémentaires par semaine, la première année sera davantage pluridisciplinaire, avec plus de culture générale, d'informatique et d'apprentissage des langues. Durant cette première année, les étudiants bénéficieront du soutien d'un enseignant référent auquel ils pourront s'adresser.

En seconde et en troisième années, l'étudiant affine sa spécialisation et découvre le monde professionnel sous forme de séminaires, de forums, de tutorat d'entreprise. Tous les étudiants diplômés de licence devront avoir validé pendant leur cursus au moins un stage dans l'administration, l'enseignement ou l'entreprise.

- Les formations courtes professionnalisantes :

Si les Instituts Universitaires de Technologie (IUT) et Sections de Techniciens Supérieurs (STS) acceptent davantage de bacheliers issus des filières technologiques et professionnelles que la moyenne nationale, ils recevront des "bonus financiers".

Mais le Gouvernement souhaite aller plus loin en élargissant l'offre des IUT au profit des étudiants de licence générale et en mobilisant des places vacantes en IUT et en STS. Il souhaite ouvrir la licence professionnelle aux étudiants des filières générales.

Source MESR

§ Pour les étudiants ultramarins accomplissant leurs études supérieures en métropole, des aménagements existent en matière de finances, d'hébergement et d'accueil.

Les conditions de vie des étudiants ultramarins en métropole ont été très récemment améliorées, notamment depuis la mobilisation de la Délégation pour l'égalité des droits des ultramarins.

Au-delà des prestations sociales de droit commun offertes à l'ensemble des étudiants (restauration universitaire, logement, bourses attribuées sur critères sociaux), les étudiants ultramarins bénéficient de dispositifs spécifiques :

- le paiement d'un quatrième terme de bourse couvrant la période de juillet à septembre : cette disposition s'applique à l'étudiant qui n'a pas achevé ses études au 1 er juillet de l'année universitaire au titre de laquelle il a obtenu sa bourse. Ce dispositif concerne notamment les étudiants en métropole à la charge de leurs parents ou de leur tuteur légal lorsque ces derniers résident dans un département ou une collectivité d'outre-mer ;

- les étudiants ultramarins souhaitant accomplir leurs études supérieures en métropole bénéficient d'une attention particulière de la part des CROUS, compte tenu des difficultés liées à l'éloignement auxquelles sont confrontés ces étudiants.

Avant leur départ, une information leur est délivrée concernant l'ensemble des aides dont ils pourront bénéficier. À leur arrivée en métropole, ils sont invités à contacter le CROUS de leur académie d'accueil qui leur apportera toutes les informations utiles, notamment dans le cadre des guichets uniques d'accueil mis en place à chaque rentrée.

En outre, depuis la rentrée 2008, les dispositifs d'étudiants référents originaires des collectivités d'outre-mer sont encouragés dans les académies qui accueillent traditionnellement le plus grand nombre d'étudiants ultramarins (académies du sud de la France et de la région parisienne). Des conventions sont conclues à cette fin entre le CNOUS et les collectivités qui le souhaitent (avec le département de La Réunion en 2009). Ce dispositif permet aux étudiants ultramarins primo-arrivants de se tourner, pour toutes les questions pratiques qui se posent lors de l'installation, vers des étudiants eux-mêmes originaires d'outre-mer mais déjà présents en métropole ;

- enfin, l'attention particulière portée aux étudiants ultramarins primo-arrivants en métropole est également renforcée en matière de logement : à niveau de bourse équivalent, la priorité est accordée à l'étudiant ultramarin qui est pénalisé par un éloignement familial important.

Par ailleurs, les étudiants ultramarins bénéficient du passeport mobilité. Cette aide, financée par le secrétariat d'État à l'outre mer, consiste en la prise en charge d'un voyage aller et retour par année universitaire entre la collectivité territoriale d'outre-mer et la métropole ou une autre collectivité d'outre-mer. Il concerne près de 18 000 étudiants. Il est désormais intégré au Fonds de continuité territoriale depuis la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.

Au-delà, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche envisage d'adopter prochainement d'autres mesures spécifiques, en particulier pour faciliter la participation des étudiants ultra-marins aux concours d'entrée dans les grandes écoles : ils pourront composer les épreuves écrites en outre-mer, la prise en charge du confinement et de l'hébergement ne leur incombant que partiellement ; il est également envisagé de développer la visioconférence pour les oraux des concours, les étudiants qui le souhaitent conservant la possibilité de les passer en métropole.

M. Patrick Karam, délégué interministériel à l'égalité des chances des Français d'outre-mer, a insisté, lors de son audition devant la mission, sur l'importance de la question de l'hébergement. Il faut savoir que sur 157 000 logements en résidence universitaire, un quart est réservé aux étudiants étrangers mais que, jusqu'en 2008, aucune disposition spécifique n'existait pour les ultramarins. Or, sur les quelque 20 000 jeunes d'outre-mer qui étudient en métropole, la moitié sont boursiers et seuls 2 000 à 3 000, selon le CNOUS, seraient en cité U. Le taux de refus est à leur égard de 7 sur 10 comme pour les étudiants de l'hexagone.

Mais toutes ces dispositions, bien que constituant des avancées, restent lacunaires et ne constituent pas encore un véritable statut pour les étudiants ultramarins en métropole, comme dans les DOM, qu'il reste à définir précisément et à mettre en place.

La mission propose donc que soit mis à l'étude un véritable statut de l'étudiant :

- avec un guichet unique d'information et des dispositifs d'étudiants référents, de tutorat, d'orientation et d'apprentissage méthodologique, un guide pour étudier en métropole (accès aux CROUS, bourses, contacts...) ;

- en facilitant la vie étudiante : priorité d'accès aux logements et aux transports, aux dispositifs de la continuité territoriale.

Ce statut comporterait aussi un volet Erasmus pour la mobilité régionale, sur le modèle de ce qui existe en Europe. La création d'un « Erasmus régional » pour les étudiants ultramarins est souhaitable.

Le programme Erasmus européen en constituerait le modèle. Créé en 1987, il a permis en vingt ans à 1,7 million de jeunes européens dont 240 000 jeunes français, d'aller étudier quelques mois dans un autre pays.

En 2007-2008, ceux-ci ont été 22 556 à bénéficier de bourses Erasmus auxquels il faut ajouter les 3 389 jeunes bénéficiant d'un stage dans des entreprises européennes (en vertu du programme « Leonard de Vinci » intégré à Erasmus).

Toutes les universités françaises participent au programme Erasmus, ainsi que la plupart des établissements d'enseignement supérieur - grandes écoles, écoles moins prestigieuses, lycées préparant des BTS (brevet de technicien supérieur), etc. Les filières où les étudiants sont les plus demandeurs sont la gestion (29 %), les langues (16 %) et l'ingénierie et les technologies (14 %). Les étudiants peuvent s'inscrire à partir de leur deuxième année, pour des séjours minimum de trois mois pouvant aller jusqu'à douze mois - le minimum est ramené à deux semaines pour les formations courtes comme les BTS ou les DUT (diplôme universitaire de technologie).

Les étudiants Erasmus s'acquittent des droits d'inscription dans leur université d'origine, et non dans celle qui va les accueillir. L'Europe accorde une subvention de l'ordre de 180 € par mois. Les boursiers français continuent de percevoir leurs allocations. Le Gouvernement accorde des bourses de mobilité ( de 400 € maximum ), toujours sous conditions de ressources. Enfin, les collectivités locales et les établissements peuvent compléter cette somme.

Le dispositif « Erasmus régional » fonctionnerait pour la zone Caraïbe et celle de l'océan Indien sur le modèle du système européen afin de permettre le resserrement des liens interuniversitaires et de mobilité pour les étudiants afin de leur permettre de se former dans des programmes adaptés aux réalités régionales des DOM. Il comprendrait, comme pour les étudiants européens, une aide mensuelle d'un montant à adapter au coût de la vie dans chaque zone.

Il pourrait, en outre, s'inscrire dans le cadre d'une nouvelle programmation stratégique des crédits de coopération régionale de la France, qui vise notamment à renforcer l'intégration régionale des DOM, au resserrement des liens inter-universitaires et à la multiplication des échanges d'étudiants, de professeurs et de chercheurs.

Ce projet serait complémentaire de la création de grands pôles universitaires francophones dans ces départements.

Proposition n° 79 : Créer un véritable « statut de l'étudiant ultramarin » et un dispositif Erasmus régional spécifique pour leur mobilité géographique .

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