CONCLUSION

Si l'ampleur des perspectives offertes à la mutualisation par la Cour de Justice ne peut, à ce jour, être définie avec certitude, celles-ci n'en sont pas moins réelles.

Il est évident que, par ses récents arrêts, la Cour de Justice a été sensible aux appels (au réalisme et au bon sens) que plusieurs de ses avocats généraux lui lançaient depuis le milieu des années 2000. Rappelons, à cet égard, ce que disait l'avocat général Trstenjak VERICA dans ses conclusions sur l'arrêt « Coditel Brabant » :

« Le droit des marchés publics est et reste l'un des instruments politiques les plus influents des États membres et des institutions communautaires dans le cadre de l'intégration européenne. Ce potentiel ne peut toutefois pas être utilisé de manière inconsidérée, sa finalité devant être conciliée avec les valeurs d'autres domaines politiques. (...)

Le droit à l'autonomie locale se retrouve non seulement dans les dispositions légales des États membres, mais aussi (...) dans la charte européenne de l'autonomie locale, signée, dans le cadre du Conseil de l'Europe, par tous les États membres de l'Union européenne ainsi que ratifiée par la plupart d'entre eux. Dans le traité CE, le comité des régions, composé de représentants des collectivités régionales et locales, est consacré à l'article 263 CE. Cette disposition contient, outre la possibilité institutionnalisée de donner des points de vue régionaux et locaux, une certaine reconnaissance de l'autonomie. Enfin, le traité de Lisbonne souligne le rôle de l'autonomie régionale et locale pour les identités nationales respectives, qu'il convient de respecter. (...)

La réalisation des nombreuses missions traditionnelles et nouvelles des communes et des collectivités territoriales en général n'est pas toujours facile, notamment en période de budgets serrés, en particulier pour les plus petites d'entre elles. En outre, plusieurs missions, notamment dans les domaines de l'environnement et du transport, ne sont pas limitées au seul niveau communal. En revanche, la coopération intercommunale sans participation du capital privé est, du fait de ses effets de synergie, un moyen, souvent utilisé dans de nombreux États membres, d'accomplir de manière efficace et bon marché des missions de service public . »

Quelques années auparavant, sur l'arrêt « Parking Brixen » (2005), un autre avocat général avait développé la thèse suivante :

« Si les communes devaient « toujours respecter les dispositions du droit des marchés publics, (elles) devraient dans la mesure du possible confier l'accomplissement de leurs missions à des tiers mieux offrants. En pareilles circonstances, la simple délégation de missions à de telles sociétés, y compris dans des domaines aussi sensibles que, par exemple, l'adduction d'eau, équivaudrait en substance à un début de privatisation forcée de ces missions. (...)

Le droit des marchés publics vise en effet à garantir un choix transparent et non discriminatoire des cocontractants dans tous les domaines où la puissance publique a décidé d'accomplir ses missions avec l'aide de tiers. Le droit des marchés publics n'a en revanche pas pour but de privatiser «en catimini» même les missions d'ordre public que la puissance publique souhaite continuer à assumer avec ses moyens propres »

On ne peut donc pas le nier : c'est délibérément, en toute connaissance de cause, que la Cour de Justice a offert aux responsables politiques des opportunités pour développer la mutualisation. Ceux-ci ont le devoir de les saisir .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page