2. Les études d'observation indirecte

Plus nombreuses sont les études d'observation indirecte, où on ne cherche pas à mesurer l'impact d'un champ électrique ou magnétique sur des animaux ou des végétaux sauvages mais où ce sont les variations de l'abondance et des habitudes qui sont inventoriées.

Ces études sont convergentes. Elles montrent que l'effet dominant est la modification du milieu - effet lisière par exemple -. Le plus souvent la mise en place de lignes électriques est favorable à la faune et à la flore.

a) La flore

Des études américaines des années 1980 et portant particulièrement sur les lignes à 1 200 kV ont montré l'impact de l'effet couronne sur les arbres qu'on avait laissés pousser pour l'expérience à proximité immédiate des lignes. Ces arbres étaient « auto-élagués ». De semblables effets ont également été observés dans la nature autour de lignes à 750 kV ou 500 kV.

Ces impacts sont aujourd'hui théoriques puisqu'aux États-Unis comme en France, l'entretien régulier des couloirs forestiers visent justement à empêcher toute possibilité de court-circuit par le contact entre un arbre et des conducteurs. Ce phénomène a été incriminé dans le grand black-out de 2003 qui a privé d'électricité 50 millions de personnes dans le Nord-est des États-Unis. En France, RTE s'est engagé dans son contrat de service public avec l'État à rétablir l'alimentation dans les cinq jours. Il est donc nécessaire pour éviter accidents et courts circuits et pour faciliter l'intervention de limiter la croissance des arbres et de maintenir l'accès.

Plus récemment, le conservatoire botanique national du bassin parisien (CBNBP), organisme dépendant du Muséum national d'histoire naturel (MNHN), a procédé à un inventaire floristique le long de 170 km de lignes à 225 kV dans l'Est de l'Ile-de-France, dans le cadre d'un partenariat avec RTE et la région.

Cet inventaire a été réalisé le long de tranchées forestières. Il présente un intérêt particulier puisque, en Ile-de-France, la forêt de hêtres, chênes et charmes est l'état final normal des différentes successions écologiques, le climax. Mais ce climax n'est pas l'état dans lequel la richesse spécifique est la plus importante. Les milieux ouverts, entretenus par l'homme par une activité agro-pastorale, sont favorables à une richesse spécifique beaucoup plus importante. Par rapport à ce phénomène, le mouvement simultané de déprise agricole et d'industrialisation de l'agriculture est défavorable à la biodiversité. Ce mouvement est renforcé par le mitage du territoire (urbanisation, réseaux routiers) qui peut empêcher des espèces d'atteindre leur milieu de vie, provoquer un isolement reproductif, augmenter la consanguinité, diminuer la taille des populations et accroître au final les risques de disparition.

Or, les emprises de RTE en zones forestières entraînent justement l'entretien d'un milieu ouvert pour maintenir une distance de sécurité entre les arbres et les câbles électriques. RTE procède à des travaux réguliers comme un gyrobroyage tous les trois ans et un chemin de visite et d'accès entretenu chaque année. Schématiquement, ces couloirs se décomposent donc en un ourlet herbeux à l'aplomb de la ligne, un cordon de buissons (10 m de haut max.) puis un manteau arboré étagé à 18 puis 25 m. La végétation y obéit donc à un cycle trisannuel.

Les résultats de cet inventaire sont très significatifs. On retrouve dans ces couloirs 1/3 de la biodiversité de l'Ile-de-France (500 espèces) dont 70 sont d'intérêt patrimonial. 7 espèces sont protégées à l'échelon régional, 1 à l'échelon national et 9 sont déterminantes pour le classement en Zone naturelle d'intérêt écologique, floristique et faunistique (ZNIEFF). Une espèce, la Polygala chevelu n'avait pas été revue depuis 1960. La dernière observation avait été faite dans une commune proche de la ligne.

Le couloir entretenu pour la ligne apparaît donc comme un milieu refuge pour des espèces et des habitats en régression . Elle provoque un « effet lisière » favorable par exemple quand elle est sèche, au géranium sanguin.

Il pourrait également fournir un corridor de migration et de diffusion de ces espèces, comme cela a pu être montré sur les tracés des gazoducs, justifiant pleinement leur intégration à une future « trame verte ».

Dès lors le CBNBP a formulé des préconisations pour favoriser cet effet refuge notamment en modifiant les techniques d'entretien : période, exportation des produits de coupe pour ne pas enrichir les sols au profit d'espèces invasives, attention particulière aux zones sensibles.

Cette étude limitée dans l'espace est particulièrement intéressante car près de 8 200 km de lignes RTE sont situées en forêt . Toutes les conséquences n'ont pas été tirées de ce travail. Cependant, d'ores et déjà, les pratiques de RTE en la matière ont évolué pour limiter l'impact sur le paysage. De coupes rases tous les trois ou quatre ans, RTE est progressivement passé à la signature de plans de gestion forestière sur 20 ans avec l'Office national des forêts (ONF).

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