Mercredi 12 mai 2010 M. Yannick Chenevard, Président de la Fédération nationale de protection civile, Mme Jacqueline Roy, Présidente, M. Pascal Miclot, Vice-président, M. Philippe Potier, Directeur de l'Association départementale de protection civile de la Vendée

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Présidence de M. Bruno Retailleau, président

La mission a d'abord procédé à l'audition de M. Yannick Chenevard, président de la Fédération nationale de protection civile, Mme Jacqueline Roy, présidente, M. Pascal Miclot, vice-président, et M. Philippe Potier, directeur, de l'Association départementale de protection civile de la Vendée.

M. Bruno Retailleau, président, a tout d'abord rendu hommage aux intervenants, ainsi qu'à l'ensemble des bénévoles s'étant impliqués, pour leur action sur le terrain. Il les a ensuite invités à présenter leur fédération et à relater la façon dont ils avaient vécu les évènements.

M. Yannick Chenevard a précisé que la Fédération nationale de protection civile (FNPC), première association agréée de sécurité civile en France, comportait 32 000 bénévoles répartis dans 500 antennes.

Interrogé sur le déroulement de l'alerte et le rôle de l'Association départementale de protection civile de la Vendée (ADPCV) par M. Bruno Retailleau, président, Mme Jacqueline Leroy a rapporté la demande du préfet, vers 4h00 le 28 février, de se mettre en situation de pré-alerte. Une cinquantaine de secouristes étaient prêts dans la matinée. 250 lits, qui n'ont finalement pas servi en raison des propositions d'hébergement faites par les résidents, ainsi que des couvertures ont alors été proposés aux victimes de la tempête. L'association a ensuite procédé au recensement et à l'évacuation des sinistrés, qui ont été dirigés vers le centre d'accueil provisoire de L'Aiguillon-sur-Mer. Puis elle a accompagné ceux souhaitant revenir à leur domicile pour constater les dégâts. Enfin, elle a procédé au nettoyage des habitations sinistrées à partir du troisième jour.

Interrogée par M. Bruno Retailleau, président, sur l'articulation des secours, Mme Jacqueline Leroy a indiqué que son association avait été chargée de coordonner l'action des bénévoles, arrivés après le premier jour, certains d'entre eux ayant ressenti une certaine frustration pour ne pas avoir été autorisés à s'investir davantage. Elle a précisé avoir travaillé avec le Secours catholique.

M. Philippe Potier a complété ses propos en indiquant que l'association avait, dans les premiers jours, orienté son action vers l'hébergement des victimes à court terme, chez des habitants de la commune, le conseil général prenant ensuite le relais pour le moyen terme. Puis la protection civile a opéré à trois reprises le recensement des besoins et moyens disponibles en nourriture, eau, chauffage et soutien psychologique. Des dizaines de bénévoles ont du être accueillis et encadrés afin de les distinguer de personnes offrant des services aux victimes à des coûts exorbitants. Après cette première phase, qui a duré une semaine, la protection civile a procédé au nettoyage des maisons, en mettant à disposition un numéro d'appel et en conseillant les victimes, souvent totalement désorientées. Au cours de cette seconde phase, qui a duré un mois environ, 1 000 secouristes ont été mobilisés et onze départements sont venus en renfort.

A la fin de la première semaine, a ajouté M. Pascal Miclot, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) a demandé à se désengager au profit de l'association, qui a accepté. Elle s'est alors occupée de la coordination des différents acteurs, dont les 250 bénévoles quotidiens, tandis que le Secours catholique a géré les aspects humanitaires.

A M. Michel Doublet, qui s'interrogeait sur l'articulation avec les services d'autres départements, M. Pascal Miclot a indiqué que les associations de protection civile de Loire-Atlantique et des Deux-Sèvres notamment s'étaient investies, tandis que la veille nationale avait assuré la coordination générale.

Mme Jacqueline Roy a précisé que les associations de onze autres départements avaient apporté de l'aide. Soulignant la gravité des dégâts à l'intérieur des maisons, où presque plus rien n'était récupérable, elle a témoigné de la grande détresse des victimes. Une cellule de soutien psychologique a rapidement été mise en place. Elle devra demeurer en fonction pendant longtemps.

Interrogée par M. Bruno Retailleau, président, sur les lacunes éventuelles de la procédure de secours, Mme Jacqueline Roy a fait état d'un manque de moyens pour le nettoyage, pallié par ceux mis à disposition par d'autres acteurs, que des aides devraient permettre de compenser. Elle a précisé que l'ordre de mission de la préfecture, avec laquelle les relations avaient été étroites, était de nature orale et avait évolué dans le temps, sans que cela n'ait posé de problèmes.

Après avoir à son tour remercié et félicité les intervenants, M. Alain Anziani, rapporteur, les a interrogés sur d'éventuels problèmes de communication.

M. Philippe Potier a indiqué que si des difficultés avaient été relevées dans les premières 48 heures, la fédération, qui possède son propre réseau radio et rendait compte au poste central des sapeurs-pompiers, lesquels en référaient à la préfecture, n'en avait pas été affectée.

Questionné sur ce point par M. Bruno Retailleau, président, M. Yannick Chenevard a insisté sur le manque de culture du risque. Si des dépenses substantielles sont engagées en vue de protéger les infrastructures, et si l'arsenal juridique et les moyens techniques sont suffisants, la formation des citoyens est, elle, en revanche très insuffisante.

A M. Bruno Retailleau, président, qui lui demandait la façon d'améliorer les procédures d'alerte, M. Yannick Chenevard a relevé l'existence du réseau national d'alerte (RNA), dont il toutefois souligné l'état dégradé. L'Etat s'est engagé à y venir en aide, sachant que le coût d'une sirène s'élève à 42 000 euros. L'abonnement à des systèmes d'appels groupés - fax, email, SMS et téléphone - se monte quant à lui à 15 000 euros par an et permet de communiquer avec potentiellement 70 000 personnes. Dès que le maire ou le préfet a pris une décision, il conviendrait de pouvoir activer ce type de dispositif.

Interrogé sur ce point par M. Bruno Retailleau, président, M. Yannick Chenevard a indiqué que les plans communaux de sauvegarde (PCS) étaient d'un contenu fort variable, tout étant question de volonté et de moyens. Estimant délicat pour les petites communes d'élaborer de tels plans, il a préconisé leur conception à l'échelle intercommunale, ajoutant que les services préfectoraux pouvaient apporter une aide.

Indiquant qu'elle avait fait adopter un tel plan dans sa commune de 16 000 habitants, en ayant recours à un contrat de mission pour son élaboration, et soulignant l'importance du temps et des moyens requis, Mme Marie-France Beaufils a estimé que l'Etat n'était plus en mesure d'y répondre en préfecture, et que les petites communes ne pouvaient y parvenir seules.

M. Bruno Retailleau, président, lui ayant demandé s'il était opportun de définir des PCS types et d'autres plus spécifiques, M. Yannick Chenevard a estimé nécessaire de conserver en ce domaine une certaine simplicité, source d'efficacité. Reflet d'une commande, ces plans doivent distinguer la gestion du quotidien et le traitement de l'alerte. A cet effet, ils analysent les risques auxquels est exposée la commune et recensent les moyens d'y faire face.

M. Alain Anziani, rapporteur, a fait valoir que l'Etat était en principe responsable de la protection de la population mais que les maires étaient chargés de mettre en oeuvre cette protection sans en avoir les moyens. Il s'est demandé s'il ne fallait pas réaffirmer plus clairement la responsabilité de l'Etat dans ce domaine.

M. Yannick Chenevard a considéré que l'Etat pouvait formuler des recommandations mais qu'une prise en charge de la protection au niveau intercommunal, par exemple par un syndicat mixte, pouvait permettre de promouvoir une approche à la fois humaine et méthodique.

Après avoir noté que le caractère inopérant des réseaux téléphoniques tenait à leur fonctionnement simultané, M. Yannick Chenevard a souligné la nécessité pour les maires de disposer des moyens de transmission véhiculant voix, image et géolocalisation des correspondants leur permettant de prendre des décisions à tout moment. Il a chiffré à deux millions d'euros le coût d'un tel réseau autonome de 10 pylônes et 500 postes.

Jugeant qu'il revenait aux maires de hiérarchiser les risques, Mme Gisèle Gautier a relevé les appréciations divergentes de deux préfets, l'un ayant décidé de faire évacuer les populations menacées tandis que l'autre leur recommandait de rester chez elles. Estimant que les maires auraient mieux apprécié les circonstances locales, elle a relaté que nombre d'entre eux n'avaient pas allumé ce jour là leur téléphone mobile. Déplorant l'excessif cloisonnement de l'administration, elle a plaidé pour des moyens techniques permettant de joindre les élus locaux en un minimum de temps.

M. Yannick Chenevard a précisé que le dispositif qu'il avait évoqué ne cessait que lorsque le message avait été reçu par son destinataire.

M. Bruno Retailleau, président, ayant fait observer que la procédure d'évacuation devait être correctement préparée pour se dérouler de façon satisfaisante, M. Yannick Chenevard a renchéri en ce sens, jugeant nécessaire d'aider les maires à apprécier leur déclenchement, tout en la dédramatisant.

Relatant le dispositif en vigueur dans sa commune où, à défaut du maire, un élu et un service d'astreinte doivent être joignables en permanence, M. Philippe Darniche a proposé de le rendre obligatoire. Il a distingué deux niveaux de responsabilité :

- le directeur de la sécurité publique à la préfecture, qui devrait être en mesure de mettre en oeuvre le PCS sur toutes les communes à risque ;

- le maire, appelé à prendre les décisions opérationnelles.

Rapportant par ailleurs avoir reçu sur son téléphone mobile, peu avant la tempête Xynthia, un message d'alerte ne comportant pas d'indication de surcote, il s'est dit désireux d'informations fiables et graduées selon les risques réels.

M. Paul Raoult a fait état de la multiplication des alertes auprès des maires, sous l'effet du principe de précaution. Or la plupart ne sont pas justifiées, ce qui tend à les décrédibiliser. Il a par ailleurs exprimé ses doutes quant à la possibilité d'obtenir des élus municipaux d'être joignables en permanence notamment pour ceux qui travaillent hors de la commune.

M. Alain Anziani, rapporteur, a fait remarquer que les difficultés se concentraient sur les nuits et les week-ends.

M. Michel Doublet a renchéri sur la multiplication des alertes inutiles. Il a indiqué avoir organisé, dans chaque commune de son département, une opération « référent tempête », et s'apprêter à en faire de même pour EDF.

M. Bruno Retailleau, président, ayant souligné la nécessité de mieux caractériser les alertes, M. Jean-Claude Merceron a suggéré qu'elles soient davantage graduées et pondérées selon les risques.

M. Bruno Retailleau, président, l'ayant interrogé sur les moyens de mieux diffuser la culture du risque auprès de la population, M. Yannick Chenevard y a vu la principale problématique en matière de prévention. Il a rappelé que la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004 faisait du citoyen le premier de ses acteurs, préconisant de rendre obligatoire pour chaque étudiant, entre la classe de seconde et celle de terminale, de choisir une association de sécurité civile pour s'y former et obtenir ainsi un pré-requis qui lui serait demandé lors des journées d'appel et de préparation à la défense.

A M. Bruno Retailleau, président, qui lui demandait s'il ne serait pas davantage pertinent d'intégrer cette formation dans les programmes éducatifs, M. Yannick Chenevard a répondu qu'elle y était théoriquement inscrite mais n'était pas suivie d'effet. Il serait en outre préférable d'obtenir des jeunes un acte volontaire de formation. Il conviendrait davantage de réintroduire, comme c'était le cas auparavant, un module de formation sur l'alerte des populations dans le programme de prévention et secours civiques (PSC), qui forme 100 000 jeunes citoyens chaque année, contre 200 000 à la protection civile. Pourraient également être envisagées, pour un coût raisonnable, des incitations à la formation dans les polices d'assurance.

M. Yannick Chenevard a conclu en insistant sur l'importance, dans la gestion des problématiques de sécurité civile, du lien avec les élus.

Mme Jacqueline Roy a évoqué, pour finir, l'importance du mouvement de solidarité spontanée né au lendemain de la tempête et ayant mobilisé 722 bénévoles, dont de nombreux jeunes, qui en ont retiré une expérience très enrichissante. Elle a souligné la le travail collectif réalisé par les 24 antennes du département et celles situées dans 12 autres départements.

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