Collectif des associations des victimes de l'après Xynthia Association des victimes de La Faute-sur-Mer (AVIF)

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La mission a entendu, pour le compte du collectif des associations des victimes de l'après Xynthia, MM. Olivier Schmitt (commune de Boyarville), Michel Le Bozec (village des Boucholeurs), Pierre Beurel (commune de Loix-en-Ré), Michel Ceressia (commune de Port-les-Barques), Jean-Luc Guilmard (commune de Fouras-la-Fumée) et Thierry Demaegdt (commune de Charron), et, pour le compte de l'Association des victimes de La Faute-sur-Mer (AVIF), M. Xavier Machuron-Mandard (vice-président de l'AVIF), Mmes Evelyne Deregnaucourt et Mireille Guillet, et MM. Raymond Roucheyrolle et Éric Racofier.

À titre liminaire, chacun des intervenants a rappelé brièvement les caractéristiques et les souhaits de l'association qu'il représentait.

M. Michel Ceressia a fait état de la situation particulière de la commune de Port-des-Barques, où certains habitants demandent que leur maison soit classée en « zone noire » plutôt qu'en « zone jaune », à l'inverse de la plupart des sinistrés qui réclament à voir leur habitation exclue de la « zone noire » ;

M. Thierry Demaegdt a exposé que, sur environ 150 habitations classées en « zone noire » dans la commune de Charron, 27 propriétaires contestaient ce classement ;

Les représentants des associations de victimes ont souligné que l'action de l'État n'avait pas suffisamment tenu compte des problèmes humains et sociaux rencontrés par les sinistrés, et que les propriétaires de maisons classées en zone noire ou orange étaient soumis à un stress intense et souffraient, de ce fait, d'une fragilisation psychologique pouvant entraîner la survenue de maladies mentales (dépressions, etc.).

M. Michel Le Bozec a précisé que, dans le village des Boucholeurs, classé en zone orange, des pathologies physiologiques associées au stress (maladies cardio-vasculaires) étaient apparues chez les habitants, notamment parce que, chaque semaine, les pouvoirs publics promettaient aux sinistrés de leur donner des réponses précises sur un éventuel classement en « zone noire » dans les quinze jours, sans que cette promesse ne soit jamais réalisée.

Interrogé par M. Bruno Retailleau, président, M. Michel Le Bozec a indiqué avoir rencontré des experts envoyés sur le terrain par la préfecture de Vendée pour réaliser des expertises complémentaires, mais que ceux-ci s'étaient bornés à interroger les habitants et à effectuer des relevés pour connaître la hauteur d'eau constatée lors du passage de la tempête Xynthia sur certaines parcelles, et qu'ils ne semblaient pas tenir compte des causes du drame (à savoir, selon lui, l'existence d'une lacune d'un kilomètre de long dans la digue protégeant la zone où se situe le village des Boucholeurs).

Ayant indiqué que le zone orange tracée sur la commune de Fouras comprenait 104 maisons, dont 17 résidences principales, M. Jean-Luc Guilmard a précisé qu'aucune information n'avait été transmise aux sinistrés par la préfecture depuis le dévoilement de la cartographie des « zones noires », le 8 avril dernier, alors même que, à cette occasion, l'engagement avait été pris de régler définitivement le sort des « zones oranges » dans les quinze jours. S'associant aux propos de M. Michel Le Bozec, il a affirmé que des experts étaient venus sur le terrain pendant une demi-journée et qu'ils avaient demandé la hauteur d'eau dans certaines maisons, mais qu'aucune expertise parcellaire complète n'avait été réalisée.

M. Olivier Schmitt a précisé que, sur l'île d'Oléron, les sinistrés n'avaient reçu aucun courrier depuis le passage de la tempête Xynthia, et qu'ils n'avaient vu aucun expert. Il a souligné que, malgré l'envoi de plusieurs courriers à M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'Écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, aucune information précise n'avait été communiquée aux sinistrés sur l'avenir de leur maison à moyen terme. Enfin, il a estimé que les « zones noires » étaient dénuées de fondement légal.

M. Bruno Retailleau, président, a souligné que cette situation contrastait avec celle de la Vendée, où des lettres ont été envoyées aux sinistrés dont la propriété était classée en « zone noire » dès le début du mois d'avril.

M. Pierre Beurel a observé que, de même, aucun des sinistrés de la commune de Loix-en-Ré n'avait reçu de courrier nominatif officiel, les propriétaires de maisons classées en « zone noire » ayant seulement été prévenus par téléphone, par le maire de la commune, le 7 avril 2010. En outre, il a affirmé que, selon les déclarations des délégués à la solidarité nommés en Vendée, aucune étude n'avait été réalisée pour justifier le classement de certaines habitations de Loix en « zone noire » et que cette décision avait été prise sur le fondement des informations communiquées à la préfecture par le maire de la commune. Ayant exposé que sa maison avait été classée en « zone noire » bien que la hauteur d'eau constatée sur le terrain ait été de 73 centimètres, qu'elle soit dotée d'une zone-refuge et qu'elle soit située à plus de 500 mètres de la digue -cette dernière ayant d'ailleurs été réparée et rehaussée depuis le passage de la tempête Xynthia-, il a estimé que la cartographie était injuste, puisque, sur neuf communes inondées sur l'Île-de-Ré, seules deux avaient été partiellement classées en « zone noire », alors même que ce n'est pas dans ces secteurs que les dégâts les plus importants ont eu lieu.

M. Jean-Luc Guilmard a marqué son accord avec ces propos et a déclaré que, dans certains secteurs qui n'avaient même pas été classé en « zone jaune », des hauteurs d'eau de 1 mètre 80 à 2 mètres avaient été constatées pendant Xynthia.

M. Bruno Retailleau, président, a interrogé les représentants des associations de victimes sur l'action des délégués à la solidarité.

M. Thierry Demaegdt a considéré que les délégués à la solidarité, malgré la qualité de leur intervention, n'étaient pas compétents pour répondre à la demande principale des propriétaires de maisons classées en « zone noire », à sa voir la réalisation d'expertises maison par maison et en présence des sinistrés, et que leur présence ne remplaçait pas celle de véritables experts et ne permettait pas aux sinistrés d'obtenir des réponses à leurs interrogations sur le zonage.

M. Olivier Schmitt a indiqué que les délégués à la solidarité avaient contacté les résidents secondaires pour les pousser à faire expertiser leur maison par le service des Domaines, ce qui exerçait une véritable « pression à la vente » sur les sinistrés.

Mmes Evelyne Deregnaucourt et Mireille Guillet et M. Michel Le Bozec ont souligné que les délégués à la solidarité de Vendée n'avaient pas contacté les sinistrés et ne s'étaient pas rendus sur le terrain.

Répondant à une remarque de M. Michel Ceressia, qui rappelait que les habitants de Port-des-Barques demandaient un élargissement du périmètre des « zones noires », M. Bruno Retailleau, président, a souligné que la mission était actuellement mobilisée pour que la procédure d'acquisition amiable soit étendue à de nouveaux secteurs et que, plus particulièrement, la mission avait émis le souhait qu'une acquisition amiable soit proposée à une quarantaine de propriétaires de Gironde, dont l'habitation est située dans une zone soumise à un risque d'inondation grave et mettant en danger la vie humaine. En outre, ayant fait valoir que les engagements récemment pris par le gouvernement allaient dans un sens favorable aux sinistrés, il a estimé que des expertises complémentaires devaient être réalisées avant la constitution du dossier d'enquête publique préalable au lancement de la procédure d'expropriation et que la délimitation des zones soumises à l'enquête publique devrait être expliquée et justifiée, afin de la rendre aussi incontestable que possible. Enfin, il s'est étonné que les délégués à la solidarité de Vendée ne soient pas présents sur le terrain et qu'aucune mission n'ait été diligentée pour réaliser des expertises complémentaires : il a souligné que cette situation était contraire aux engagements pris par le gouvernement devant la mission et que la lumière devrait être faite sur les raisons de ces dysfonctionnements.

En réponse à M. Michel Ceressia, qui émettait des craintes sur l'attitude des compagnies d'assurance face aux propriétaires de maisons dans lesquelles des hauteurs d'eau conséquentes avaient été constatées, M. Bruno Retailleau, président, a rappelé que les assureurs étaient soumis à une obligation d'assurer, mais qu'ils pouvaient augmenter leurs tarifs pour tenir compte du risque.

Répondant à une question de M. Bruno Retailleau, président, sur le processus d'indemnisation :

- M. Pierre Beurel a souligné que les évaluations réalisées à Loix-en-Ré avaient été effectuées à l'initiative de la mairie, et non des sinistrés, et que le courrier envoyé par France Domaine aux sinistrés laissait entendre que, pour l'État, tout sinistré faisant une demande d'estimation de sa maison manifestait, ce faisant, le souhait de quitter son habitation ;

- M. Raymond Roucheyrolle a exposé que les sinistrés ne pouvaient pas prendre une décision éclairée, dans la mesure où ils ne connaissaient pas les termes du plan de prévention des risques d'inondation qui devait prochainement être approuvé, et que cette situation était extrêmement problématique dans un contexte où l'offre de France Domaine était valable pendant seulement trois mois. Il a donc estimé que le délai de réflexion accordé aux sinistrés devait être allongé ;

- ayant observé que certains sinistrés sollicitaient une évaluation du prix de leur maison par peur de subir des pertes financières importantes en cas d'expropriation, M. Thierry Demaegdt a rappelé que la question de l'indemnisation ne pouvait pas être séparée de celle du relogement. En outre, il a exposé que l'établissement public foncier régional créé pour répondre aux conséquences de la tempête Xynthia était une structure lourde, et donc inadaptée à la gestion d'une situation d'urgence comparable à celle que subissent les sinistrés ;

- M. Michel Le Bozec a déclaré que les évaluations de France Domaine avaient pu être utilisées comme un moyen de faire pression sur les responsables des associations de victimes, auxquels il était proposé de racheter leur maison à des prix correspondant au double du prix du marché ;

- Mme Evelyne Deregnaucourt a rappelé que le montant de l'indemnisation des résidents secondaires serait diminué si ceux-ci ne rachetaient pas un bien similaire dans un délai d'un an ; elle a estimé que cette condition était injuste vu la pénurie de terrains dans les zones touchées par Xynthia -cette pénurie ayant, en outre, été aggravée par la mise en place de « zones noires » ;

- Mme Mireille Guillet a déclaré que les agents de France Domaine avaient visité son habitation le 5 mai, mais qu'elle n'avait à ce jour reçu aucune évaluation.

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