G. REGAIN DE TENSION AU PROCHE-ORIENT

Organisé en urgence à la demande de la commission des questions politiques, le débat sur le Proche-Orient visait à réaffirmer la position du Conseil de l'Europe en faveur d'un dialogue entre Israéliens et Palestiniens, à l'heure où le processus de paix semble une nouvelle fois au point mort suite à l'arraisonnement par Tsahal d'une flotille humanitaire en direction de Gaza.

M. Bernard Fournier (Loire - UMP) a souhaité rappeler l'impasse dans laquelle se trouvent aujourd'hui les négociations et les évolutions en cours dans la relation entre Israël et la Turquie :

« L'arraisonnement par Israël des sept bateaux de la « flottille de Gaza », qui s'est soldé par neuf morts à bord du paquebot turc Mavi-Marmara, le 31 mai dernier, vient confirmer, s'il en était besoin, la dégradation de la situation au Proche-Orient. Il révèle également les importantes évolutions géopolitiques en cours dans la région.

Ces événements dramatiques, résultats d'une réaction israélienne tout à fait disproportionnée et sans doute contraire au droit international, interviennent dans un contexte marqué par le blocage du processus de paix israélo-palestinien, en dépit des efforts de l'Administration américaine pour le ranimer.

Un tour d'horizon des principales parties en présence n'incite guère à l'optimisme.

Depuis la disparition, en 2004, de Yasser Arafat, dont la plasticité politique pouvait servir toutes les causes, les Palestiniens n'en finissent plus de se déchirer. L'Autorité palestinienne a perdu toute légitimité, notamment depuis que le Hamas a pris le pouvoir à Gaza, en juin 2007. La direction palestinienne, repliée en Cisjordanie, portée à bout de bras par la communauté internationale, et notamment par l'Union européenne qui paie les salaires des fonctionnaires, est discréditée. Tout un symbole : le mandat du Président Abbas court par défaut, faute de pouvoir organiser des élections. Une fraction croissante de la population ne se reconnaît ni dans l'extrémisme, et le conservatisme, du Hamas, ni dans les pratiques de l'Autorité palestinienne, touchée par une corruption massive.

Surtout, nous assistons à une véritable « dépalestinisation » du mouvement initié, en son temps, par l'OLP. Plus que jamais, la cause palestinienne est l'objet d'une instrumentalisation des puissances censées la soutenir, mais qui, en réalité, cherchent à servir leurs intérêts propres, qu'il s'agisse de l'Arabie saoudite, mettant un terme aux affrontements entre les deux principales factions palestiniennes, de l'Egypte, cherchant à gérer la réconciliation interpalestinienne, ou, aujourd'hui, de la Turquie.

Paradoxalement, du côté israélien, la situation n'est guère plus brillante.

La réaction de l'Etat hébreu, dans l'affaire de la flottille, révèle la mentalité de forteresse assiégée entretenue par ce pays. Israël n'a jamais été aussi fort et aussi vulnérable à la fois. En dépit d'une croissance démographique soutenue et d'une situation économique favorable dans le contexte de crise actuel, et alors que le pays conserve une capacité de dissuasion très forte, Israël est extrêmement fébrile. Obsédé par la menace terroriste, inquiet du programme nucléaire iranien et des capacités militaires du Hamas, moins en cour à Washington du fait de l'intransigeance du gouvernement Netanyahou sur le processus de paix, l'Etat juif est de plus en plus isolé sur la scène internationale, en particulier depuis l'opération « Plomb durci » dans la bande de Gaza, fin 2008/début 2009. Israël se sent menacé de toutes parts, par le Hamas et le Hezbollah, par la Syrie et l'Iran, avec lequel un conflit n'est pas à écarter. Les traités de paix qu'il a signés avec l'Égypte, en 1979, puis avec la Jordanie, en 1994, n'ont jamais débouché sur un véritable rapprochement. Le blocus de Gaza aggrave son cas dans l'opinion publique internationale.

De surcroît, les récents événements ont mis en lumière un revirement majeur au Proche-Orient : la fin de la relation privilégiée entre Israël et la Turquie. Certes, la flottille qui cherchait à forcer le blocus imposé à Gaza par Israël avait été affrétée par une ONG turque, dont les objectifs étaient sans doute plus politiques qu'humanitaires, mais on imagine mal qu'elle ait agi sans l'autorisation, même implicite, d'Ankara. Pour autant, cette évolution n'est pas récente.

Elle traduit le nouveau cours de la diplomatie turque, émancipée de ses attaches occidentales traditionnelles et affranchie de sa tutelle américaine, et qui privilégie les bonnes relations avec les voisins immédiats du pays : Syrie, Irak, Iran, comme l'a montré la récente médiation avec le Brésil sur le nucléaire iranien, et maintenant l'Autorité palestinienne. La Turquie, qui cherche à s'affirmer comme une puissance régionale, entend tirer parti de sa bonne image dans l'opinion arabe pour laquelle elle peut légitimement servir de « modèle », ayant réussi à combiner islam et démocratie.

On le voit, la perspective d'une paix israélo-arabe s'éloigne plus qu'elle ne s'approche. »

La résolution adoptée par l'Assemblée souligne que le raid israélien constitue une violation du droit international, au regard de la position des bateaux arraisonnés. Le droit à la légitime défense ne saurait à cet égard justifier une violation du droit international. L'Assemblée invite l'Etat hébreu à accepter de participer à l'enquête menée par une commission d'enquête internationale.

La résolution rappelle la légitimité des aspirations israélienne et palestinienne. Elle demande, en conséquence, une levée rapide du blocus de Gaza et l'arrêt des implantations de colonies dans les territoires occupés. Elle invite parallèlement le Hamas à faire cesser les tirs de roquettes contre les cibles israéliennes et à reconnaître le droit à l'existence d'Israël.

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