Audition de M. Didier TABUTEAU, conseiller d'Etat,
directeur de la chaire « Santé » à l'Institut d'études politiques de Paris,
directeur du Centre d'analyse des politiques publiques en santé à l'Ecole des hautes études de santé publique
(mercredi 7 avril 21010)

M. François Autain, président - Mes chers collègues, nous accueillons M. Didier Tabuteau, conseiller d'Etat, directeur de la chaire « santé » à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris, directeur du Centre d'analyse des politiques publiques en santé à l'Ecole des hautes études de santé publique.

Conformément aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, M. Didier Tabuteau prête serment.

M. François Autain, président - Je vous remercie.

Je vous propose de commencer votre audition par un bref exposé liminaire puis de répondre aux questions de M. Alain Milon, rapporteur, et des membres de la commission.

Vous avez la parole.

M. Didier Tabuteau - Je suis très honoré d'être devant vous. Je travaille sur des aspects universitaires à travers l'examen des politiques de santé de manière générale ; les événements que nous avons connus sont donc particulièrement intéressants de ce point de vue.

Avant de centrer mon exposé sur la déontologie de l'expertise, sujet sur lequel j'ai eu l'occasion de travailler et sur lequel je continue à travailler, je voudrais préciser que je suis en disponibilité du Conseil d'Etat et que je ne suis ni professionnel de santé, ni membre de commission ou de groupe de travail ministériel.

Je souhaite cependant préciser que l'IEP de Paris, pour le fonctionnement des chaires d'enseignement, a des partenariats avec diverses entreprises parmi lesquelles le groupe IPSEN et Sanofi-Aventis et, jusqu'à une date récente, le Groupe Caisse des dépôts, ainsi que l'Association française contre les myopathies (AFM).

La question de la déontologie de l'expertise a émergé en France au début des années 1990, au moment de la création de l'Agence du médicament.

La création de cette Agence visait, non sans témérité, à atteindre trois objectifs : l'excellence scientifique, l'efficacité administrative, la déontologie de l'expertise.

Cette dernière préoccupation nous a conduits à constater qu'il n'existait pas de système de règles de déport en cas de délibération sur un sujet, que les dispositifs déontologiques n'étaient pas écrits et qu'il n'existait pas de déclaration d'intérêts... Nous avons donc, sans texte - mais le directeur général de l'Agence pouvait le prévoir dans le cadre du règlement intérieur - imposé des déclarations d'intérêts aux experts membres des groupes de travail et des commissions. Je suis allé personnellement devant chaque commission pour indiquer qu'il s'agissait d'une « règle du jeu » souhaitable pour tous. L'immense majorité des experts m'ont semblé soulagés par cette démarche.

D'ailleurs, les articles qui figurent aujourd'hui dans le code de la santé publique depuis la loi du 4 mars 2002, soit dans les dispositions relatives à l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (AFSSAPS), soit dans celles relatives aux groupes de travail et commissions du ministère, sont des reprises des textes établis par circulaire au sein de l'Agence du médicament.

La question de la déontologie de l'expertise a donc émergé dans le champ de la santé publique en France dans des conditions difficiles, dans le contexte qui a suivi l'affaire du sang contaminé ; nous avons pris en marche le train de la déontologie, traditionnel dans le monde anglo-saxon. Il a fallu l'acclimater au système français.

La construction réglementaire prévue pour l'Agence du médicament a été élargie en 1998 à toutes les agences sanitaires avant d'être généralisée, en tout cas dans la sphère de la santé et de la sécurité sociale, par la loi de 2002.

Cette première étape a constitué en quelque sorte la sortie de la préhistoire, les seules règles existant à l'époque relevant de l'article du code pénal interdisant de prendre partie dans une affaire dans laquelle on a un intérêt.

Ce nouveau droit s'est progressivement disséminé et, d'une certaine manière, peut-être plus vite que les mécanismes d'application, de contrôle et de vérification. On est donc aujourd'hui dans la phase où l'application de ces règles reste à parfaire.

C'est le sujet sur lequel s'est concentrée l'attention. Pour ma part, la déontologie de l'expertise me paraît reposer sur deux dispositifs, que j'appellerai l'impartialité objective et l'impartialité subjective.

L'impartialité subjective, c'est celle qui doit garantir que l'expert se prononce en son âme et conscience, qu'il rend, en toute indépendance d'esprit, l'avis que l'on est en droit d'attendre de lui compte tenu de ses connaissances. Mais il faut aussi veiller à garantir l'impartialité objective, qui dépend de la façon dont le système permet à l'expert d'exprimer son expertise.

C'est pour cela que l'efficacité administrative est importante : le bon fonctionnement des règles déontologiques dépend aussi du bon fonctionnement des structures et c'est vrai pour l'ensemble des structures de santé publique.

Si les délais fixés par la loi ou par les textes réglementaires ne sont pas respectés, la tentation de faire avancer un dossier un peu plus vite peut exister. Si on respecte strictement les délais, la tentation n'existe plus.

La dualité de l'expertise contribue aussi à l'impartialité objective.

A l'expertise interne par des agents de l'administration - médecins, pharmaciens dédiés à temps plein aux activités administratives - qui était un des enjeux de la création des agences de sécurité sanitaire, doit s'ajouter l'expertise externe et le recours à des praticiens dont ce n'est pas la mission principale mais qui sont également chercheurs hospitaliers, dans des industries ou dans d'autres systèmes.

Troisième élément d'impartialité objective : la diversité et le renouvellement des expertises, le fait de ne pas avoir de commissions composées de praticiens du même champ. Cette diversité est extrêmement importante, même si elle n'est pas toujours aisée à organiser. Je crains autant la corruption intellectuelle que la corruption financière. Le fait de ne pas oser contredire quelqu'un du fait de son statut ou parce qu'il a été un maître à penser durant une période de sa carrière peut avoir des effets importants sur l'expertise. Oser contredire une expertise sur laquelle on a des doutes est aussi important que les tentations liées à des liens financiers.

De même, la transparence de l'expertise, les procédures contradictoires, l'introduction dans les procédures d'expertise de représentants d'autres disciplines scientifiques - sociologues, représentants d'associations de patients, y compris dans les champs très scientifiques - me paraissent toujours une bonne chose. Cela organise la diversité des points de vue ainsi qu'un contrôle social au sein des instances.

Les règles déontologiques que j'ai rappelées, comme la disposition dont je crois être à l'origine sur l'obligation de déclarer ses liens d'intérêt lorsqu'on s'exprime publiquement sur un produit de santé, sont importantes...

M. François Autain, président - Le décret d'application de cette disposition n'est paru qu'en 2007 !

M. Didier Tabuteau - Il a fallu cinq ans en effet. Mais je ne suis pas sûr que le décret ait été indispensable ! Il apporte très peu de choses - mais c'est une question qu'il ne m'appartient pas de résoudre.

Ces dispositions sont, en tout état de cause, importantes. L'attention qu'on doit y porter est grande mais je crois qu'on ne doit pas se focaliser sur cette impartialité subjective ; il faut également que le système fonctionne sur des bases favorisant la déontologie de l'expertise.

J'ajoute qu'il existe sans doute aujourd'hui de nouvelles étapes à franchir. Je suis dans une situation d'observateur de ces questions ; j'ai bien compris et j'ai suivi les travaux du Sénat sur une partie d'un « Sunshine Act » à la française à travers une disposition prévoyant que les laboratoires pourraient déclarer les sommes, les contrats, les interventions et les liens d'intérêts qui peuvent exister. Je suis personnellement convaincu que c'est une disposition nécessaire. Il est d'ailleurs intéressant de voir que cette disposition a été intégrée dans la réforme de la santé aux Etats-Unis, qui constitue une réforme majeure. Elle s'appliquera en mars 2013 mais le dispositif a été repris avec une ampleur qui montre l'intérêt que l'on peut y attacher.

M. François Autain, président - Vous avez remarqué que le président du LEEM (les entreprises du médicament) était opposé à cette mesure ; il l'a fait savoir dans une interview récente dans l'Express.

M. Didier Tabuteau - Aux Etats-Unis, sauf erreur de ma part, les instances professionnelles se sont prononcées favorablement sur cette mesure. Je crois que certains ont même commencé à l'appliquer par anticipation.

Ce type de dispositif est extrêmement intéressant parce qu'il dédramatise la relation qui peut exister - et qui peut être légitime dans bien des cas - entre les experts et les laboratoires.

Une autre amélioration que l'on peut envisager serait de consolider le statut juridique de toutes les instances d'expertise. Je redoute beaucoup les instances informelles et les groupes, même s'ils se constituent avec bonne volonté. Quand on compose un groupe, il faut immédiatement l'institutionnaliser, lui donner des règles. C'est la meilleure façon d'assurer la transparence de ses travaux.

Par ailleurs - mais c'est une banalité que de le dire - je crois que la valorisation des fonctions d'expertise dans les carrières universitaires et la recherche est importante. Sinon, on ne rend pas justice à des experts qui se dévouent pour la collectivité et qui le font remarquablement bien.

Je crois également qu'il faut très simplement envisager un dispositif qui permette aux experts de se déplacer, de se rendre dans des congrès, de participer à un certain nombre de manifestations. Si la puissance publique a besoin d'experts pour des décisions extrêmement lourdes en matière de santé publique, il faut qu'elle s'organise pour qu'ils soient au meilleur niveau scientifique. C'est une réflexion qu'il faut avoir. Il est vrai qu'il existe d'autres façons de le faire mais je ne suis pas sûr que ce soient les meilleures.

Je m'étais également interrogé, lors de la réunion de travail à laquelle la Direction générale de la santé (DGS) m'avait invité dans le cadre du rapport de Mme Marie-Dominique Furet, sur l'idée - que j'avais également proposée - que le non-respect des règles de déclaration d'intérêts puisse donner lieu à des sanctions administratives pour les professionnels de santé. Les membres des commissions non professionnels sont, de mémoire, soumis à la même règle mais la sanction ne prévoit que l'exclusion de la commission.

M. François Autain, président - Y a-t-il eu de telles sanctions ?

M. Didier Tabuteau - Je l'ignore mais celles-ci devraient être également applicables à l'entreprise qui détient un lien d'intérêts avec l'expert, comme dans les cas de corruption. Les choses ne sont évidemment pas de même nature mais il existe dans ce domaine une corruption active et passive, les deux étant sanctionnées.

Cela aurait pour vertu de faire en sorte que tous les contrats que les entreprises concluent avec les experts comporteraient cette obligation. Cela pourrait être efficace, car les entreprises ne prendraient pas le risque d'être sanctionnées si la règle n'est pas respectée. Ce parallélisme ne me paraît pas choquant en soi.

Enfin, je suis convaincu que cette règle doit s'appliquer comme prévu dans le texte mais que l'on pourrait élargir ce champ. S'il existait un « Sunshine Act » à la française, il devrait, selon moi, s'appliquer à tous les professionnels de santé et à tous les experts s'exprimant sur le même sujet. Il n'existe aucune raison de ne stigmatiser que les professions de santé. Ceci n'est pas évident. Je me souviens de la disposition ajoutée pour les membres des commissions non professionnels de santé. C'est le minimum que l'on pouvait faire, sauf à considérer que les professionnels de santé présentent un risque particulier - ce qui n'est évidemment pas le cas.

Un certain nombre de sujets peuvent donc encore être pris en charge. Je crois également - mais cela tient sans doute au fait que nous sommes dans une phase d'application d'un droit relativement récent dans le domaine de la santé - que nous sommes dans un schéma dans lequel il est nécessaire, pour en contrôler l'application et en débattre, de former les professions de santé en matière de règles déontologiques.

La loi du 4 mars 2002 prévoit que les experts médicaux intervenant dans les procédures d'indemnisation ont l'obligation de recevoir une formation juridique et médico-légale afin de répondre pleinement aux questions qui leur sont posées. En matière de déontologie, c'est la même chose. L'expertise s'apprend. Lorsque qu'on entre dans la « carrière d'expert », quand on est nommé pour la première fois dans une commission, il paraîtrait légitime de recevoir une formation portant sur les règles juridiques et les dispositifs applicables.

M. François Autain, président - La parole est au rapporteur.

M. Alain Milon, rapporteur - M. Tabuteau a été fort complet sur le sujet de l'expertise. Mes questions vont donc certainement recouper ce que vous avez déjà dit. Il serait toutefois intéressant que vous puissiez compléter vos propos si vous l'estimez nécessaire.

Quels enseignements vous paraissent pouvoir être tirés de la gestion de la grippe pandémique en matière de liens entre les agences sanitaires, les experts et les décideurs politiques ? Quelles sont les conditions d'une expertise publique efficace et socialement reconnue ? Notre système d'agences sanitaires et d'instances de conseil doit-il être réformé, en dehors de ce que vous avez déjà indiqué ? Faut-il interdire aux experts qui conseillent les entreprises de siéger dans les instances publiques nationales et internationales, en particulier l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ?

M. Didier Tabuteau - Sur les liens entre agences sanitaires, experts et décideurs, je serai extrêmement prudent, ayant acquis la conviction, de par les fonctions que j'ai pu exercer, que lorsqu'on n'est pas à l'intérieur d'un dispositif, on le perçoit de façon très déformée. Il est donc difficile de porter des jugements sur un sujet aussi grave.

Lorsqu'il n'existait pas ou peu d'instances de santé publique - à la fin des années quatre-vingt ou au début des années quatre-vingt-dix - la question se posait différemment. Il fallait alors, à chaque fois qu'une question se posait, constituer un dispositif d'expertise.

On dispose aujourd'hui d'un réseau d'expertise et d'instances assez complet. Il est sans doute nécessaire de le réorganiser à la marge, encore que, lorsqu'on regarde les exemples internationaux, il n'est pas évident qu'il y ait encore beaucoup de transformations à réaliser. Le plus important est de l'utiliser pour les compétences qui lui ont été dévolues par les textes.

Je suis pour ma part favorable à une sorte de « main courante » de la sécurité sanitaire, de façon à avoir quelque chose de très clair, de bien encadré et de visible de l'extérieur. L'expertise comporte bien entendu une part de « scientificité » et d'apport de connaissances mais sa crédibilité ne découle pas strictement de sa « scientificité ». Elle peut être excellente et ne pas être crédible ou très mauvaise et crédible, on l'a déjà vu.

Cette procédure de « main courante » permettrait de suivre, de l'extérieur et à chaque instant, la gestion du processus.

Ce n'est pas facile à faire dans l'urgence car on peut être tenté, sous la pression ou dans l'urgence, d'agir de façon informelle. Cela nuit à la crédibilité du processus de décision et cela présente surtout l'inconvénient de ne pas permettre, au bon moment, aux contradicteurs de s'exprimer.

Or, la leçon que l'on peut retenir de l'expérience des crises, c'est que la contradiction est indispensable. Les meilleurs systèmes d'expertise peuvent se tromper, on le sait, et les réactions d'associations, de chercheurs dissidents ou d'autres organisations peuvent apporter un élément qui va transformer la vision que l'on a des choses.

Plus on affiche le processus de décision, plus on explicite les motifs pour lesquels on fait ce que l'on fait, plus on a de chances que les opinions divergentes puissent s'exprimer. Elles seront prises en compte ou non - c'est à l'Etat de gérer la crise - mais il est important de permettre, à chaque étape, à l'ensemble du corps social de réagir.

J'ai d'ailleurs - et je ne le regrette pas - signé l'appel publié par un journal en septembre, non pour remettre en cause le dispositif mais pour demander un débat public et des explications sur les décisions prises. C'est un aspect de la gestion des crises que l'on peut améliorer, qui se trouve au coeur du lien entre les agences, les experts et les décideurs.

M. François Autain, président - Cette pétition a-t-elle servi à quelque chose ?

M. Didier Tabuteau - Je n'ai pas entendu parler de ses effets mais je ne regrette pas de l'avoir signée !

Faut-il interdire aux experts de siéger dans les instances internationales ? Je connais très mal le droit de l'OMS et serai donc en peine de répondre à votre question. Sur le principe, il est impossible d'interdire à des experts qui ont des liens avec des entreprises de siéger dans ces instances. Ce lien peut exister pour certains sans créer de problème insurmontable. J'ai connu des situations complexes où, même pour des raisons déontologiques, il était difficile d'envisager que les experts compétents dans le domaine n'aient pas, dans le cadre d'une nouvelle thérapie, fait participer leurs patients à des essais cliniques. Dans ce cas, on peut élargir l'évaluation à des méthodologistes et à d'autres scientifiques qui n'auront pas de liens et qui siègeront dans le pool évaluateurs. C'est une façon de ne pas se priver des compétences des experts de haut niveau qui interviennent sur le champ, et néanmoins de disposer de personnes entièrement neutres en la matière.

Une réflexion complémentaire à propos des consultants ou des conseils des entreprises : tous les liens d'intérêts ne sont pas de même nature. Faire des essais cliniques, de la formation ou être conseil stratégique de l'entreprise, cela n'a rien à voir. L'expert conseil ou le consultant largement engagé, ou quasi-salarié de l'entreprise, me paraît poser un véritable problème en cas de participation à des travaux d'expertise pour les pouvoirs publics.

M. Alain Milon, rapporteur - Y a-t-il eu, à votre sens, une application excessive du principe de précaution dans la gestion de la pandémie ? Quelle différence faites-vous entre principe de précaution et principe de prévention ? Quelle aurait dû être, selon vous, la méthode d'évaluation du risque pandémique ?

M. François Autain, président - La prévention est-elle un principe, celui-ci n'étant pas inscrit dans la Constitution ?

M. Didier Tabuteau - Je ne sais pas répondre à votre question ; je ne suis pas épidémiologiste et je suis incapable d'apprécier si les éléments de l'alerte ont été correctement évalués.

En ce qui concerne le principe de précaution, j'en distinguerai deux. Le premier est le principe de précaution au sens environnemental, inscrit dans le préambule de la Constitution. En matière de santé publique, il faut plutôt parler de ce que j'appellerai l'« obligation de précaution ». C'est une notion près ancienne : la loi confiait déjà aux corps municipaux, en 1790, le soin de prendre des précautions convenables pour prévoir certains évènements et y porter remède. La loi de 1884 a confirmé les obligations sanitaires de l'autorité municipale.

La notion de précaution est ainsi incluse dans la santé publique depuis l'origine. Cette obligation de précaution en matière de santé est liée à l'appréciation du rapport bénéfice-risque : il incombe au décideur d'évaluer la situation et de chercher à prendre la décision permettant d'optimiser ce rapport.

Cette « obligation » impose aussi que les moyens soient proportionnés au risque identifié. Est-ce que l'on identifie correctement le risque ? C'est une autre question - que l'on s'est posée à propos de nombreux problèmes de santé publique, par exemple la vache folle.

C'est pourquoi la question que vous m'avez posée - à laquelle je ne sais répondre - est déterminante. C'est l'évaluation du risque qui permet de savoir si on en a trop fait ou non. Cela demeure pour moi une interrogation.

Quant à la distinction entre précaution et prévention, je comprends la démarche qui veut que, lorsqu'un risque est certain, on est dans le domaine de la prévention et lorsqu'il est incertain, dans celui de la précaution. Le problème est qu'en matière de santé publique, on n'est jamais dans une situation de certitude absolue dans tous les domaines. J'ai donc tendance à penser que « l'obligation de précaution », qui impose d'essayer d'évaluer le mieux possible les bénéfices-risques, est l'attitude la plus efficace en matière de santé publique - mais c'est une appréciation extrêmement difficile. Dans certains cas, la décision doit se faire en âme et conscience.

M. François Autain, président - Etes-vous d'accord avec cette interprétation du professeur Marc Gentilini, qui considère que, dans le cas de l'épidémie de grippe, le principe de précaution a été utilisé beaucoup plus pour protéger les décideurs que la population ?

Je m'en suis ouvert auprès de la ministre de la santé, qui a considéré cette affirmation comme une insulte. Je me garde donc bien de faire mienne cette appréciation, me contentant de citer le professeur Marc Gentilini.

Il est vrai qu'il fait partie de ces experts dissidents qui sont allés à l'encontre des avis exprimés par l'ensemble de la communauté scientifique. Il a eu le tort d'avoir raison ! Je ne sais si on lui en tient rigueur mais peut-on reprocher aux autorités sanitaires de ne pas avoir suffisamment pris en compte la voix de ceux qui, très tôt, se sont émus de la dramatisation et de l'importance que l'on donnait à cette épidémie qui, finalement, s'est révélée moins grave que prévu ? N'a-t-on pas cherché à les marginaliser ou à les décrédibiliser plutôt que de les intégrer à la réflexion ?

Au début, on s'est référé au principe de précaution ; on s'y réfère aujourd'hui beaucoup moins. Selon moi, il y a toujours une certaine confusion entre la précaution et la prévention. La précaution consiste en un certain nombre de mesures que l'on prend face à un danger ou à une menace dont on ne connaît ni la nature, ni la gravité, ni l'échéance, alors que la prévention correspond, au contraire, à l'ensemble des mesures que l'on peut prendre parce qu'on connaît la nature, la gravité de la menace et qu'on a une idée sur la date de sa survenue. On doit alors tenir compte du rapport bénéfice-risque mais aussi du rapport coût-efficacité.

Or, il me semble que l'on est plus, dans le cas de la grippe, dans une situation de prévention que dans une situation de précaution. Mais le résultat est là ! On a acheté 94 millions de doses de vaccins et on n'en a utilisé que 6 ! C'est pour le moins, quoi qu'on en dise, une erreur de prévision.

Vous parlez dans un de vos écrits de « pusillanimité » d'un pouvoir traumatisé par le sang contaminé, la canicule, ou tétanisé par des mesures de réorganisation du système de soins ou d'équilibrage des comptes de l'assurance maladie.

En l'occurrence, l'équilibrage des comptes ne peut constituer un traumatisme puisqu'on n'a pas hésité à dépenser des sommes colossales qui équivalent - on l'a dit - au déficit annuel de nos hôpitaux publics !

On a évoqué l'éthique. Lorsqu'on achète des vaccins simplement parce que l'on veut que tous ceux qui le désirent se fassent vacciner, je n'ai plus d'arguments - encore qu'on aurait pu vacciner tout le monde en en commandant moins. Les références utilisées - méningite, vaccination obligatoire - ne sont peut-être pas les bonnes. Peut-être eût-il suffi de procéder à un sondage pour ajuster les commandes afin que tous ceux qui le souhaitaient puissent être vaccinés, quelles qu'en soient les conséquences. Aujourd'hui, on n'est pas sûr que ceux qui ont été vaccinés puissent bénéficier, le moment venu, de la protection ainsi conférée.

C'est finalement le professeur Daniel Floret qui a eu la bonne réponse en reconnaissant que cette décision d'achat, intervenue bien avant que les avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) ne soient connus, était de nature politique. C'est peut-être pour cette raison qu'on a du mal à la situer dans le cadre d'une réflexion de santé publique.

Il s'agit là moins d'une question que d'une réflexion que je tenais à vous livrer.

M. Alain Milon, rapporteur - La préparation à des risques de grande ampleur qui est mise en place empêche-t-elle de voir des risques de moindre ampleur ?

M. Didier Tabuteau - Les questions que vous posez - qui sont celles que tous les analystes de santé publique se posent afin de savoir comment notre pays peut s'adapter à des politiques de santé publique modernes les fois prochaines - sont centrales.

Aujourd'hui, je ne puis faire que l'analyse rétrospective des éléments dont je dispose, c'est-à-dire essentiellement ceux parus dans la presse, n'étant pas dans les circuits de décision.

Quand je reprends l'information sur le risque dont on disposait dans la presse, j'ai le sentiment que, jusqu'en juillet, août et pratiquement septembre, on était sur une menace sérieuse.

Certaines informations étaient plus alarmistes que d'autres mais on pouvait se poser des questions sur la mortalité indirecte ou sur la virulence du virus. Il existe également des dépêches sur le recours aux soins intensifs en Australie ou en Nouvelle-Zélande, plus important que dans le cadre d'une grippe saisonnière.

Il ne s'agit pas de la grippe espagnole, mais le sujet est sérieux, au moins autant sinon plus que la grippe saisonnière.

Selon les éléments publiés dans la presse, dont je suis un lecteur assidu, aux dates auxquelles ont été passées les commandes de vaccins, je ne puis personnellement dire que l'on ait été dans une démarche excessive a priori ou complètement délirante.

Peut-être existe-t-il des informations que je n'ai pas et qui permettraient de dire autre chose, mais il m'est impossible de le dire !

En revanche, je réagirais beaucoup plus à propos de l'organisation du dispositif de vaccination car je pense qu'on a raté là une occasion importante, dans un système de santé moderne, de mobiliser les associations et le corps médical sur des missions de santé publique nouvelles, ce qui aurait peut-être pu changer l'appréciation portée après coup sur la vaccination - même si la gravité de la grippe n'en aurait pas été modifiée.

Je suis obligé de dire, parce que c'est ma conviction aujourd'hui au vu des éléments dont je dispose, que jusqu'à l'été, je ne considère pas qu'il était fantaisiste de prendre cette décision. Je ne connais pas les avis éclairés des experts sur ce qui se passe en cas de méningite, de vaccination obligatoire, de nombre de doses mais je suis convaincu que, jusqu'à l'été, il était normal de se dire que toute personne souhaitant être vaccinée devait pouvoir l'être.

M. François Autain, président - Ils n'ont pas été très nombreux !

M. Didier Tabuteau - Le dispositif de vaccination est un élément majeur de l'acceptabilité de celle-ci. En tout état de cause, je serai très intéressé par les études qui seront faites sur ce thème.

Quant aux décisions politiques, je reste convaincu qu'en situation d'incertitude - sous réserve qu'elle n'ait pu être levée par d'autres moyens - seul le politique est légitime pour prendre les décisions. C'est le seul qui puisse prendre une décision de risque - qu'il soit sanitaire ou financier - basée sur la légitimité du suffrage universel.

Dans les champs où la décision est difficile à prendre, l'expert et le décideur administratif cèdent nécessairement la place aux décideurs politiques. Je ne vois pas qui d'autre pourrait le faire. Lorsqu'on a des éléments de certitude plus grands, il me semble également revenir aux politiques de décider, même en situation de prévention, au vu de l'avis des experts.

Cela ne signifie pas pour autant, en fonction des données, que je partage la décision mais je m'en félicite car je redoute toujours beaucoup, dans notre système de santé publique renforcé - auquel j'ai contribué autant que j'ai pu - que l'expert devienne le paravent du politique et que celui-ci prenne ses décisions en se retranchant derrière les avis des experts. Il y a une responsabilité incessible de l'Etat et du pouvoir politique dans ce genre de situation.

M. François Autain, président - A partir de septembre, vous avez donc eu, en lisant les journaux, le sentiment que le risque était moins grave qu'on l'avait imaginé. Le nombre de vaccins commandés apparaissait peut-être plus disproportionné qu'au début. On peut se demander pourquoi on n'a pas fait à ce moment ce qu'on a fait en janvier...

M. Didier Tabuteau - Il me semble qu'en septembre, octobre et novembre, beaucoup de gens souhaitaient être vaccinés. Ce que je regrette le plus, c'est le fait que les gens qui ont voulu se faire vacciner - à tort ou à raison, c'est un autre problème - n'aient pu le faire avant janvier ou février, le dispositif ne l'ayant pas permis ! En termes de santé publique, si on décide de vacciner tous ceux qui le souhaitent, il faut se mettre en état d'y parvenir ! Sur ce plan, cela a constitué un échec.

M. François Autain, président - Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous : ce n'est pas seulement un problème d'organisation. On a disposé d'une petite partie des premiers vaccins début octobre. La vaccination des professionnels de santé a commencé immédiatement et le succès n'a sans doute pas été à la hauteur des espérances - pour des raisons que je ne connais pas mais qu'il serait peut-être intéressant de connaître.

En outre, on n'a pu commencer à vacciner les enfants qu'à partir du 25 novembre du fait du manque de vaccins adéquats. Cela tient aussi à des délais incompressibles, entre le moment où l'on connaît la souche du virus et le temps qu'il faut pour réaliser les vaccins. Cela signifie que la vaccination ne constitue peut-être pas le moyen le plus efficace et le plus rapide pour s'opposer ou enrayer une épidémie. Les autres moyens auxquels le Gouvernement a recouru - hygiène, lavage des mains, etc. - sont sans doute aussi importants, sinon plus, que la vaccination.

Je n'ai pas le sentiment que cela ait été ressenti comme tel dans l'opinion publique Le virus est arrivé trop tôt et il est parti trop tôt ! Pour qu'une vaccination soit réellement efficace pour enrayer l'épidémie, il ne faut pas qu'elle intervienne trop tard. Je m'interroge donc sur l'efficacité de cette vaccination en termes de mesure barrière et de protection individuelle. Si elle avait été organisée différemment, compte tenu de ces délais incompressibles, je ne suis pas sûr que l'on ait obtenu un résultat supérieur, d'autant que ce virus est parti très vite - mais pas plus que dans les pays australs, où il est resté environ dix-sept semaines. On avait là la chance d'avoir cette référence, qu'on n'aura peut-être pas une prochaine fois !

Il existe donc un certain nombre d'interrogations concernant la vaccination et les achats de vaccins, qui me semblent être sans doute une mesure de précaution mais qui m'apparaissent complètement disproportionnés par rapport à la menace.

M. Didier Tabuteau - Je vous rejoins sur le fait que la riposte de santé publique ne faisait du vaccin qu'un élément parmi d'autres. Le dispositif était global.

Je ne suis pas convaincu, en tant qu'observateur extérieur - cela n'a donc pas grande valeur - que si le dispositif de vaccination avait été construit avec les médecins, les associations, l'ensemble des professionnels, en juillet août, la vaccination n'aurait pas pu être plus massive et rapide.

A posteriori , cela n'aurait peut-être pas changé grand chose en matière de morts directs ou de victimes - c'est aux épidémiologistes de le dire - mais en termes d'organisation de santé publique, pour se préparer à la prochaine épidémie, s'il y en a une, je pense qu'on a raté une occasion de mettre tout le monde autour de la table et de construire un dispositif. J'ai dit qu'il était dommage d'avoir inventé le médecin généraliste de premier recours le 21 juillet, et le médecin généraliste de dernier recours le 21 août par la circulaire d'organisation administrative de la vaccination !

Les effets de ce choix, compte tenu d'un virus moins dramatique que prévu, n'ont pas été majeurs, mais cela mérite une réflexion pour savoir comment on fait de la santé publique moderne dans un pays doté d'un système de santé étoffé.

Quand on est face à une épidémie qui se déroule presque comme prévu, on a les moyens de s'organiser, lorsqu'on se trouve dans un système de santé développé et dense ! On doit réfléchir aujourd'hui différemment à la prise en charge de la population dans ce type de situation. C'est ce débat que j'appelle de mes voeux. Je préfère en tirer les conséquences plutôt que me demander ce que j'aurais fait dans cette situation. Ce n'est pas sur ce point que je fais porter ma critique.

M. François Autain, président - L'un n'exclut pas l'autre !

M. Didier Tabuteau - Certes, mais, pour ma part, je ne dispose pas d'éléments déterminants pour affirmer que l'incertitude était levée et qu'on aurait pu faire différemment. En revanche, j'ai plus de critiques à formuler sur la gestion.

La question sur les risques de petite et de grande ampleur est une des vraies difficultés. Je me souviens d'avoir proposé à M. Joël Ménard, pour la revue « Tribune Santé », de revenir sur son expérience de DGS en lui demandant ce qui l'avait marqué et les réflexions qu'il en tirait.

Il a estimé qu'il faudrait pratiquement une direction de la santé publique et une direction de la sécurité sanitaire. Il ne s'agissait pas pour lui de scinder la DGS en deux mais cela montre que la pression de la menace ponctuelle, grave ou de grande ampleur, a des conséquences majeures sur la gestion des politiques de santé publique de petite mais aussi de grande ampleur, sur les politiques au long cours, comme l'obésité ou le dépistage du cancer.

Majeures, ces conséquences le sont en termes d'impact non seulement financier mais également en termes de focalisation des priorités de politique de santé en faveur de sujets d'urgence, par rapport à des sujets tout aussi importants, voire beaucoup plus, en termes d'impact sanitaire et qu'on a du mal à gérer parce qu'ils s'inscrivent dans la durée.

C'est aussi une réflexion qu'il faut avoir. Il fallait rééquilibrer les choses parce que le système de santé n'avait pas de dispositif de sécurité sanitaire il y a 25 ans et qu'il fallait le construire mais il faut trouver un équilibre entre les politiques de santé publique du quotidien, de long terme - obésité, cancer, réduction des inégalités sociales, qui sont des priorités majeures - et la sécurité sanitaire.

J'ai essayé de contribuer à ce dispositif mais il ne faut pas qu'il devienne envahissant par rapport aux politiques de fond, où les grands enjeux de santé publique se traitent pour l'avenir.

L'équilibre, aujourd'hui, est très difficile à tenir et on peut dire que ces événements - mais on peut le dire aussi pour d'autres - ont pour effet de polariser l'attention sur des sujets d'urgence sanitaire. Il ne s'agit pas de faire oublier le reste mais il existe une question d'équilibre politique dans la gestion de la politique de santé qui n'est pas évidente dans ce type de situation. C'est un sujet majeur pour la suite.

M. Alain Milon, rapporteur - On le ressent bien actuellement.

J'ajoute que la directrice de l'Institut de veille sanitaire (InVS) nous a bien dit que si le virus H1N1 était présent de manière isolée, les autres virus ou germes n'étaient pas là au même moment. Au bout du compte, l'épidémie n'est pas apparue aussi importante qu'elle pouvait l'être parce que le virus H1N1 n'était pas ce qu'on pensait qu'il était et parce que les autres virus n'étaient pas présents en même temps, en particulier du fait des conditions climatiques.

M. Didier Tabuteau - Il sera extrêmement intéressant de comparer la façon dont les choses se passent en cas de méningite ou de grippe saisonnière ainsi que les bilans sanitaires et économiques. Il est utile pour notre système d'engager cette démarche comparative, qui reste encore aujourd'hui difficile à mettre en oeuvre.

M. François Autain, président - Pensez-vous que la gestion de cette crise a fait progresser dans l'opinion la cause de la vaccination ou a, au contraire, plutôt alimenté les ligues anti-vaccinales ?

M. Didier Tabuteau - La vaccination, dans ce domaine, a manifestement été malmenée mais cela va bien au-delà : la santé publique a surtout perdu une occasion de franchir une étape dans sa maturité.

M. François Autain, président - Si je vous comprends bien et pour paraphraser un livre sur le sang contaminé qui a eu beaucoup de succès à l'époque, « La défaite de la santé publique » , on pourrait qualifier la façon dont cette crise a été gérée d'« occasion manquée pour la santé publique »...

M. Didier Tabuteau - En effet, mais ceci n'a pas de lien avec « La défaite de la santé publique » de M. Aquilino Morelle à laquelle vous faites référence !

M. François Autain, président - C'est un titre qui n'est pas inintéressant.

M. Alain Milon, rapporteur - C'est le rapporteur qui choisira le titre !

Au moment du sang contaminé, Internet n'existait pas. Or, les informations non scientifiques qui sont arrivées sur Internet à propos de la grippe A étaient bien plus nombreuses et crédibles que les informations scientifiques ! C'est un aspect des choses qu'il faudra essayer de régler concernant les informations à faire passer à propos des dangers sanitaires à venir.

M. Marc Laménie - Vous avez évoqué la formation des experts. Qui pourrait assurer cette formation ?

M. Didier Tabuteau - Il faut distinguer au moins deux types de formation. La première concerne la formation à la méthodologie de l'expertise dans les domaines où les experts vont oeuvrer. Il existe en général une méthodologie particulière à chaque secteur - environnement, alimentation, médicaments, etc. La méthodologie peut être développée avec les agences par le biais des universités afin d'acquérir la compétence propre à ces métiers.

La formation que je m'étais permis d'évoquer est la formation déontologique, au droit de l'expertise et aux missions de service public.

A l'Agence du médicament, nous avions monté une formation au service public pour les agents contractuels afin que les personnes recrutées par l'établissement puissent avoir de grandes notions sur les principes du service public et la déontologie de la fonction publique.

Ces éléments généraux sont applicables aussi bien aux experts de l'environnement, des produits de santé, de l'alimentation, que de la vaccination. Les éléments de droit, de déontologie, de fonctionnement du service public pourraient être dispensés par de grands établissements universitaires comme l'Ecole des hautes études en santé publique, qui a un rôle naturel dans ce sujet. Ce sont des modèles très généraux qui sont applicables, me semble-t-il, à des experts qui interviennent dans des instances régionales, nationales, très scientifiques ou moins scientifiques mais pour lesquelles il est tout aussi nécessaire de connaître les principes fondamentaux du service public, l'intérêt général, le fonctionnement de l'Etat, la déontologie de l'expertise. Ces formations pourraient être facilement mises en place.

M. François Autain, président - Trois pays ont refusé la vaccination : la Pologne, la Lettonie et la Slovaquie. Je tire cette information de l'intervention de Mme la ministre, il y a quinze jours.

En tant que spécialiste de la sécurité sanitaire et de santé publique, quelle réflexion vous inspire cette décision qui se situe dans des pays qui font partie de l'Union européenne ? On peut se poser des questions surtout lorsqu'on s'aperçoit que ce choix risqué n'a pas eu des conséquences plus dommageables sur l'état de santé de la population que les décisions différentes prises par les autres pays.

Il est trop tôt, me direz-vous, pour se prononcer mais je m'interroge. On m'a expliqué qu'ils avaient agi ainsi parce qu'ils n'avaient pas d'argent ; est-ce à dire que ceux qui en ont peuvent le gaspiller, comme je serais tenté de le dire pour un pays comme le nôtre ?

Je n'ai pas de réponse, d'autant que nous avons l'intention de nous déplacer dans ces pays pour voir comment cela se passe mais il y a là un vrai sujet, qui suscite un certain nombre de questions.

M. Didier Tabuteau - Je vais sans doute beaucoup vous décevoir - et je lirai les conclusions de la commission avec beaucoup d'intérêt, notamment sur ce point - mais je ne connais pas les données dont disposaient les gens qui ont pris cette décision. Disposaient-ils des mêmes informations sur le risque que celles que j'ai évoquées tout à l'heure ? Je ne sais pas et je ne puis donc pas apprécier la décision qu'ils ont prise.

J'ai répondu avec la plus grande honnêteté possible sur la décision française, compte tenu du contexte français et des données qui m'ont été accessibles - ce qui ne signifie pas que d'autres données n'existaient pas et qu'elles n'auraient pas pu changer mon jugement. J'essaye de me placer en situation.

Je ne sais de quelles données disposaient ces trois pays. Je ne m'estimerai pas dans mon rôle si je répondais.

M. François Autain, président - Je ne sais si nous serons dans le nôtre pour tenter d'y répondre mais nous essaierons !

Je vous remercie pour la qualité de votre intervention et des réponses - ou de l'absence de réponse - que vous avez apportées à nos questions, une absence de réponse valant parfois une réponse !

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