B. LES LEVIERS D'OPTIMISATION DE LA GESTION DU CMN

1. Une gestion des ressources humaines entravée

Plusieurs entraves à une gestion optimale des ressources humaines ont été identifiées par l'enquête.

Le CMN, comme d'autres opérateurs 14 ( * ) du ministère, pâtit tout d'abord du partage de ses effectifs entre agents du ministère affectés (37 % de l'effectif) et contractuels directement recrutés par l'établissement (63 %). Pour les premiers, le CMN est privé des leviers de gestion des ressources humaines que sont la rémunération, l'avancement ou les sanctions disciplinaires.

Ensuite, des taux de vacances problématiques (53 % en 2009 pour les cinq monuments parisiens) sont constatés au sein de la filière « Accueil et surveillance », qui souffre d'un défaut d'attractivité lié à des conditions de travail difficiles et d'une forte dissémination territoriale. Le CMN compense ces vacances par le recrutement de vacataires occasionnels, mais cette précarisation de l'emploi suscite des mouvements sociaux dans certains monuments.

Enfin le recours à des vacataires résulte également d'une sous-utilisation des leviers managériaux existants , et notamment d'une mauvaise gestion des tableaux de service et des congés (congés ou RTT pris au moment des pics de fréquentation, infractions régulières à l'interdiction de prendre plus de 15 jours de congés consécutifs...).

Ce constat a été partiellement corroboré par les déclarations de la présidente du CMN devant votre commission des finances : « Puis-je manager des agents mis à ma disposition par le ministère ? Non car ces agents ne sont pas réellement soumis à mon autorité. Je n'ai pas le pouvoir de choisir leur affectation, je n'ai pas le pouvoir de choisir les agents qui viennent travailler au CMN. Je n'exerce pas sur eux de pouvoir disciplinaire. Je pars donc du principe qu'on ne peut les manager comme ils devraient l'être, mais c'est propre à un système et non à l'institution, ni au traitement exercé par la tutelle. Une mission de réflexion sur ce sujet a été diligentée par le ministre. Il faut évidemment avoir autorité sur un personnel pour le manager ; c'est ce que nous appelons de nos voeux » .

Quant aux tensions sociales constatées dans l'établissement, elles sont mises sur le compte des réformes en cours et du contexte institutionnel très mouvant qu'a connu le CMN, ainsi que de la renégociation en cours du statut des contractuels, dans le prolongement de la nouvelle « grille » octroyée aux agents contractuels du ministère.

En tout état de cause, et sous réserve qu'il s'engage à mieux mobiliser les leviers dont il dispose, votre rapporteur spécial estime que le CMN devrait pouvoir bénéficier d'une délégation des actes de gestion à l'égard des personnels titulaires qui lui sont affectés et du transfert concomitant de la masse salariale correspondante.

2. Des excédents à résorber, des dépenses courantes à maîtriser

Le CMN présente un résultat d'exploitation en forte hausse, soit 8,4 millions d'euros en 2009 . Cette hausse est essentiellement imputable à l'augmentation des subventions de fonctionnement, qui ont quadruplé pour passer de 8 % à 23 % des produits de l'établissement 15 ( * ) . Ces subventions ont accompagné le transfert de la maîtrise d'ouvrage et sont venues compenser les pertes de ressources liées au transfert de monuments bénéficiaires ou à la politique d'accès gratuit aux monuments.

Par ailleurs, la Cour des comptes, tout en reconnaissant la progression dynamique des ressources propres sur la même période, identifie plusieurs marges d'amélioration et recommande d'augmenter la fréquentation grâce à l'aménagement ou à la rénovation de la muséographie des sites, d'accroître les ressources domaniales (lieux de restauration, lieux de tournage, de séminaires, comptoirs de vente et activité éditoriale) et de mieux mobiliser le mécénat.

Enfin, nonobstant le redressement et l'assainissement des comptes opérés depuis 2002, certains postes de dépenses (dépenses de manifestations culturelles, prestations de conseil et de communication, frais de réception) connaissent aujourd'hui une progression dynamique, qui apparaît peu compatible avec l'assignation aux opérateurs de l'Etat d'objectifs ambitieux d'économies de fonctionnement et d'intervention. Une meilleure maîtrise des coûts de fonctionnement requiert, à tout le moins, la mise en oeuvre d'instruments de pilotage et d'analyse de l'efficience des manifestations et actions culturelles.

Au total, l'accumulation de résultats positifs permet au CMN de dégager une capacité d'autofinancement régulière . En effet, la succession de bons résultats, les ressources d'investissement allouées par l'Etat et l'incapacité dans laquelle le CMN a été de mettre en oeuvre sa compétence de maître d'ouvrage (et donc de dépenser) ont conduit au gonflement de la trésorerie et du fonds de roulement du CMN . Le fonds de roulement net global est passé de 26,4 millions d'euros en 2003 à 63,1 millions d'euros en 2009, et la trésorerie nette représente 8,6 mois de dépenses.

Une fois de plus, l'élaboration et la conclusion d'un contrat de performances apparaissent comme la condition préalable à l'assignation au CMN d'objectifs de ressources propres et d'autofinancement précis, et plus encore à l'élaboration d'un calendrier de consommation des ressources d'investissement dont il dispose. Faute de formalisation à court terme d'un tel calendrier, l'établissement aurait vocation à restituer l'abondante trésorerie qu'il a accumulée 16 ( * ) .


* 14 Tel est notamment le cas du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, contrôlé par votre rapporteur spécial au cours de l'année 2010.

* 15 Elles sont passées de 5 à 19 millions d'euros de 2003 à 2009. Pour mémoire, à compter de 2011, le CMN est affectataire d'une fraction du produit du prélèvement sur les jeux en lignes dans la limite de 10 millions d'euros par an, gagée par la diminution à due concurrence de sa subvention pour charges de service public.

* 16 Ce calendrier semble néanmoins exister, puisque la présidente du CMN a déclaré, au cours de l'audition du 19 octobre 2010 : « Nous avons travaillé avec la tutelle sur une programmation extrêmement précise que l'on pourra vous communiquer ; elle porte sur les travaux sur les trois années qui viennent. Les études sont en cours, les premiers marchés lancés, les travaux commencent et c'est en 2012 que les premières opérations de grande envergure vont se voir avec, par exemple, la réouverture du château de Champs-sur-Marne à la visite, ou encore l'ouverture de la villa Cavrois de Mallet-Stevens ; on aura alors fini de restaurer le logis royal du château d'Angers, qui a brûlé dans un incendie dont la nature n'est pas établie ».

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