2. Des critères d'adhésion de plus en plus rigoureux

A l'initiative de la France, une réflexion sur la stratégie d'élargissement a été initiée au niveau européen en 2006, notamment dans le contexte du lancement des négociations avec la Turquie et des résultats négatifs des référendums français et néerlandais sur le traité constitutionnel. Cette réflexion se concentre, d'une part, sur les modalités de conduite du processus d'élargissement envers les pays candidats, et, d'autre part, sur la question de la capacité de l'Union européenne à absorber de nouveaux États membres. A la suite de cette réflexion, les modalités régissant le processus d'adhésion ont été renforcées.

Dans ses conclusions de juin 2006, le Conseil européen a souligné « qu'il convient de tout mettre en oeuvre pour préserver la cohésion et l'efficacité de l'Union » . Il a rappelé que « le rythme de l'élargissement doit tenir compte de la capacité d'absorption de l'Union » et invité la Commission européenne à établir, au moment de la présentation de ses rapports annuels, un rapport spécial sur la capacité d'absorption qui devrait également porter sur « la question de la perception actuelle et future de l'élargissement par les citoyens et tenir compte de la nécessité de bien expliquer le processus d'élargissement à la population de l'Union ».

Dans ses conclusions de décembre 2006, le Conseil européen a adopté un « consensus renouvelé sur l'élargissement » , qui rappelle et précise les principes directeurs de la politique d'élargissement de l'Union européenne. Aux termes de ses conclusions, la conduite de cette politique repose sur « la consolidation des engagements, une conditionnalité équitable et rigoureuse, une meilleure communication et la capacité de l'Union européenne à intégrer de nouveaux membres ». Rappelant que « l'élargissement a été un succès pour l'Union et l'Europe dans son ensemble » , le Conseil européen note qu' « afin de permettre à l'Union européenne de maintenir sa capacité d'intégration, les pays en voie d'adhésion doivent être disposés à assumer pleinement les obligations qui découlent de l'adhésion à l'Union et être en mesure de le faire, et l'Union, pour sa part, doit pouvoir fonctionner efficacement et aller de l'avant. Ces deux aspects sont essentiels si l'on veut gagner un soutien large et durable de l'opinion publique, qui devrait également être mobilisée par une plus grande transparence et une meilleure communication » .

Le Conseil européen rappelle que les dispositions régissant le processus d'adhésion ont été renforcées en prévoyant une stricte conditionnalité à tous les stades des négociations. Il « approuve les améliorations suggérées par la Commission européenne en ce qui concerne la gestion et la qualité des négociations (...). Le rythme du processus d'adhésion dépend des résultats des réformes menées dans le pays participant aux négociations, chaque pays étant jugé selon ses propres mérites. L'Union s'abstiendra de fixer d'éventuelles dates limites pour l'adhésion tant que les négociations ne seront pas sur le point d'aboutir ». S'agissant de la capacité d'absorption en particulier, le Conseil européen invite la Commission à évaluer les incidences de futures adhésions sur les principaux domaines d'action de l'Union et souligne que « la réussite de l'intégration européenne exige que les institutions de l'Union européenne fonctionnent efficacement et que les politiques de l'Union européenne soient développées encore et financées de manière durable » .

Avec la Turquie, la Croatie est donc le premier pays candidat pour lequel les négociations sont conduites conformément au consensus renouvelé sur l'élargissement, avec une conditionnalité rigoureuse à chaque étape du processus.

Le processus de négociation avec la Croatie est ainsi plus exigeant que celui appliqué lors des précédents élargissements de 2004 et de 2007 :

- augmentation du nombre de chapitres de l'acquis communautaire (35 chapitres au lieu de 31 antérieurement) ;

- création d'un nouveau chapitre 23 « pouvoir judiciaire et droits fondamentaux », spécifiquement créé pour renforcer les capacités du pays candidat en matière d'Etat de droit ;

- renforcement du nombre de critères d'ouverture et de clôture, qui insistent davantage sur la mise en oeuvre concrète de l'acquis dans le pays ;

- prise en compte de la capacité d'absorption.

Certains estiment que la sévérité accrue appliquée à l'égard de la Croatie par rapport aux précédents élargissements découle directement des précédents Bulgare et Roumain.

LE MÉCANISME DE COOPÉRATION ET DE VÉRIFICATION

Lorsque la Bulgarie et la Roumanie sont entrées dans l'Union européenne, le 1 er janvier 2007, il subsistait certaines faiblesses dans les domaines de la réforme judiciaire et de la lutte contre la corruption et le crime organisé. Un mécanisme de coopération et de vérification a été instauré, visant à aider la Bulgarie et la Roumanie à pallier ces manquements, mais aussi à suivre les progrès dans ces domaines grâce à des rapports périodiques.

Chaque année, la Commission présente deux rapports : un rapport intérimaire apportant une actualisation technique sur les avancées significatives des six derniers mois en Bulgarie et en Roumanie et un rapport final annuel, paraissant chaque année aux alentours du mois d'août, qui propose une évaluation complète des progrès réalisés. Ces rapports se fondent sur des contributions des gouvernements bulgare et roumain, des services de la Commission, des États membres et d'ONG.

Les critères de référence suivants ont été fixés pour la Roumanie :

1. l'assurance d'un processus judiciaire plus transparent et efficace, notamment en rehaussant la capacité et la responsabilité du Conseil supérieur de la magistrature. Rapport sur et surveillance des répercussions des nouveaux codes de procédure civile et pénale ;

2. la création d'une agence pour l'intégrité jouissant de responsabilités en matière de vérification des avoirs, d'incompatibilités et de conflits d'intérêt éventuels, et pour la prise de décisions impérieuses sur la base desquelles des sanctions dissuasives peuvent être adoptées ;

3. le développement grâce au progrès déjà réalisés, la poursuite des investigations professionnelles et impartiales des allégations de corruption de haut niveau ;

4. l'adoption de nouvelles mesures en faveur de la prévention et de la lutte contre la corruption, en particulier au sein du gouvernement local.

Les critères de référence suivants ont été fixés pour la Bulgarie :

1. l'adoption d'amendements constitutionnels supprimant toute ambiguïté en ce qui concerne l'indépendance et la contrôlabilité du système judiciaire ;

2. l'assurance d'une procédure judiciaire plus transparente et efficace par l'adoption et la mise en oeuvre d'une nouvelle loi sur le système judiciaire et d'un nouveau code de procédure civile. La rédaction d'un rapport sur les répercussions de ces nouvelles lois et du code de procédure pénale et administrative, notamment sur la phase préalable au procès

3. la poursuite de la réforme judiciaire afin d'accroître le professionnalisme, la responsabilisation et l'efficacité. Une évaluation des effets de cette réforme et la publication des résultats annuels ;

4. la réalisation d'investigations professionnelles et impartiales des allégations de corruption de haut niveau, suivies de rapports. L'établissement de rapport sur les inspections internes des services publics et sur la publication des avoirs des fonctionnaires de haut niveau;

5. L'adoption de mesures complémentaires en faveur de la prévention et de la lutte contre la corruption, en particulier aux frontières et au sein du gouvernement local ;

6. La mise en oeuvre d'une stratégie pour la lutte contre le crime organisé, avec une attention particulière sur la grande criminalité, le blanchiment d'argent et la confiscation systématique des avoirs des criminels. Rapport sur les nouvelles enquêtes ainsi que sur celles en cours, sur les mises en accusation et les condamnations dans ce domaine.

Source : site Internet de la Commission européenne

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