(2) Un accueil favorable à Zagreb, malgré une préférence pour des suivis internes

Vos rapporteurs ont pu mesurer à Zagreb qu'il était clair pour les hauts responsables croates que l'initiative française de proposer une clause de suivi était destinée à favoriser l'adhésion croate et, loin de constituer un frein possible, tendait au contraire à faciliter la conclusion rapide des négociations en levant les dernières réticences.

Les plus hautes autorités se sont d'ailleurs montrées très ouvertes à la proposition française.

Pourtant, il est vrai que certains responsables ont fait part d'une nette préférence pour un suivi interne des progrès réalisés.

Ainsi, Mme PUSIC et les parlementaires de la commission nationale du Sabor privilégient des mesures de contrôle interne, par le Parlement, du suivi de la mise en oeuvre des réformes par le Gouvernement. Un tel contrôle parlementaire semble en effet indispensable et tout à fait complémentaire d'un suivi au niveau européen.

De leur côté, les ONG rencontrées par vos rapporteurs (spécialisées dans les droits de l'homme, la lutte contre les crimes de guerre, la transparence de la vie politique et le devoir de mémoire) ont élaboré récemment une proposition conjointe proposant d'instaurer un mécanisme de suivi permettant de contrôler pendant au moins les trois années qui suivront la clôture des négociations les réformes entreprises dans le cadre du chapitre justice et droits fondamentaux.

Là encore, cette démarche, qui rencontre les propositions françaises, peut constituer un appui précieux de nature à consolider l'évaluation complémentaire qui pourrait être faite de Bruxelles.

Quel que soit le sort réservé in fine à la proposition française, vos rapporteurs ont déjà pu constater, pour s'en féliciter, que cette initiative a donné à chacun des États membres et à la Commission européenne la possibilité de se prononcer de façon claire sur la clôture des négociations, facilitant de fait le « passage à l'acte » pour un état prêt à rejoindre la famille européenne.

(3) Un catalyseur de la décision

La proposition française a en effet agi comme un catalyseur pour précipiter la prise de décision.

Présentée dans sa première version à Zagreb puis à Bruxelles et aux 26 autres États membres le 11 mai, la proposition française a par la suite évolué, à la suite des très nombreux contacts avec les principaux partenaires européens intéressés (Commission, Royaume-Uni, Allemagne, Hongrie, Pays-Bas). Une version révisée de la proposition française a ainsi pu être présentée aux autorités croates le 30 mai.

En particulier, si certaines mesures de la proposition initiale ne posaient pas de problèmes (rapports trimestriels de la Commission, lettres de mise en garde...), d'autres ne semblaient pas être en mesure de recueillir le plein assentiment de nos partenaires (comme par exemple la clause d'un report potentiel de l'adhésion, voire la clause de « rendez-vous » sur l'adhésion à l'espace Schengen). Au long des négociations, la France s'est montrée ouverte et pragmatique, se situant dans une logique d'harmonisation des positions et non de contrôle ou de sanction. Elle a proposé que le suivi se limite à 6 critères du chapitre 23, et le cas échéant si certains partenaires le souhaitaient, sur le chapitre 8.

Le 2 juin, l'Allemagne s'est jointe à la démarche de la France et la nouvelle proposition de suivi renforcé, désormais formulée par le couple franco-allemand, a pu être présentée à nos partenaires.

Cette proposition conjointe a certainement pesé d'un grand poids pour emporter la conviction. Examinée et reprise à son compte, sous une forme modifiée, par la Commission, elle aura sans nul doute fait faire des pas de géant à la négociation et permis aux États membres de s'assurer que la clôture des négociations s'accompagnerait bien d'un suivi le plus rigoureux possible des progrès en cours.

A la suite de cette initiative, les négociations ont en effet rapidement avancé.

Le Président de la Commission José Manuel BARROSO avait déclaré le mardi 7 juin à Strasbourg que la Commission allait proposer aux États membres la fermeture des quatre derniers chapitres en négociation ainsi qu'une date butoir - le 1er juillet 2013 - pour l'entrée de la Croatie dans l'Union européenne. La Commission a en effet présenté le vendredi 10 juin aux États membres ses projets de positions communes pour la clôture des 4 derniers chapitres.

Un « suivi pré-adhésion » est bien proposé par la Commission, qui reprend partiellement les propositions franco-allemandes, avec une périodicité différente pour les rapports de suivi, (tous les 6 mois au lieu de tous les 3 mois) et la possibilité de "lettres d'avertissement" de la Commission. Ce suivi serait focalisé en priorité sur le chapitre 23 mais porterait aussi sur les chapitres 8 voire 24 (libertés). Une « clause Schengen » est proposée, avec un rapport spécifique de la Commission avant l'entrée dans Schengen de la Croatie d'ici quelques années, et une décision des actuels États membres d'y accueillir la Croatie.

Le président du Conseil européen, Herman Van ROMPUY, a publiquement exprimé son soutien la conclusion des négociations d'adhésion avec la Croatie avant la fin du mois de juin, jugeant, le mercredi 8 juin à Bruxelles, que la Croatie était « sur la bonne voie pour achever ses négociations d'adhésion dans un avenir le plus proche possible », lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion avec le président JOSIPOVIC.

Les États membres doivent encore examiner et compléter ces propositions. La décision leur appartient désormais ; ils n'ont que trois semaines pour parvenir à l'unanimité sur cette question.

S'ils devaient arriver à un terrain d'entente, le calendrier prévisible de l'adhésion pourrait être le suivant :

DERNIÈRES ÉTAPES PRÉVISIBLES DE L'ADHÉSION CROATE :

10 juin 2011 - Début des débats au Conseil en vue de l'unanimité sur les quatre derniers chapitres de négociation

21 juin - Éventuellement, fermeture par la Conférence intergouvernementale (CIG) UE/Croatie de certains chapitres

23-24 juin - Approbation formelle par le Conseil européen d'une adhésion croate au 1er juillet 2013

Fin juin - Éventuelle CIG supplémentaire, si nécessaire, pour la clôture des chapitres restants

Second semestre 2011 - Approbation par le Parlement européen, signature du traité d'adhésion et lancement du processus de ratification

Au plus tard 30 jours après la signature du traité - Organisation par la Croatie d'un référendum sur l'adhésion

De fin 2011 à début 2013 : Ratification du traité d'adhésion par les 27 États membres, en fonction de leurs procédures constitutionnelles nationales (en France : voie parlementaire classique)

1er juillet 2013 - Date prévisionnelle d'adhésion de la Croatie.

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