2. L'oubli : la fonction économique des collectivités territoriales

Le débat institutionnel et financier ne doit pas masquer la réalité : le potentiel économique de la décentralisation est une véritable chance de modernisation et de sécurité pour notre économie. Les collectivités locales jouent aujourd'hui un rôle économique incontestable qui donnera prochainement lieu à l'examen par votre Délégation d'un rapport de notre collègue Pierre-Yves Collombat.

L'État lui-même ne s'y trompe pas lorsqu'il leur fait appel pour réussir « un plan de relance » ou « des investissements d'avenir ».

Mais par-delà la conjoncture, sait-il, veut-il tirer tout le profit industriel, économique, de la décentralisation ?

A l'aide de différentes comparaisons, situons cette dépense publique locale.

a) Administrations publiques locales et Produit Intérieur Brut

Part des dépenses APUL dans le PIB

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

7,87

8,18

8,45

8,65

8,30

8,43

8,66

8,65

8,76

8,81

8,95

9,40

9,53

9,63

9,79

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

9,81

10,0

9,61

9,49

9,57

9,74

9,65

9,99

10,27

10,75

10,90

10,99

11,23

11,39

11,98

Nous constatons qu'en France, la part de nos collectivités territoriales dans le PIB n'a cessé de croître : elle passe de 8,65 en 1983 à 11,98 en 2009.

Pour comparer 160 ( * ) :

- les dépenses du secteur public infranational européen se sont élevées à 15 % du PIB ;

- les écarts vont de 33 % pour le Danemark à moins de 7 % pour Malte, Chypre, la Grèce et le Luxembourg ;

- la France se trouve dans une situation intermédiaire avec le Royaume-Uni, l'Irlande et les États membres qui ont rejoint l'Union européenne depuis 2004 (par ordre décroissant : Italie, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni, Lettonie, République tchèque, Hongrie, France, Estonie, Roumanie, Slovénie, Lituanie, Irlande...) ;

- pour la période 2000-2008, l'évolution des dépenses infranationales et locales ont été en moyenne annuelle plus rapide que celle du PIB, traduisant le rôle croissant du secteur public local en Europe.

Cette tendance est confirmée au sein de l'OCDE.

b) Dépenses des administrations publiques et dépenses publiques locales

Soulignons la part importante des dépenses des collectivités locales par rapport à celles de l'État 161 ( * ) et de la dépense publique totale.

2005

2006

2007

2008

2009

Ensemble des administrations publiques

921,5

952,1

991,3

1028,9

1067,7

Part des dépenses des collectivités locales

171,5

182

195,7

203,8

210

18,56%

19,11%

19,67%

19,74%

19,68%

Part des dépenses des collectivités locales par rapport à celles de l'État

44%

47,89%

51,72%

52,32%

51,98%

(en milliards d'euros) - Source INSEE.

c) Évolution de l'investissement décentralisé
(1) L'évolution globale

L'investissement des APUL a représenté en 2009 44,5 Mds €, soit près de quatre fois celui des administrations centrales.

1990

1995

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Formation brute de capital fixe 162 ( * )

23,90

25,80

31,30

31,60

31,30

33,20

36

39,40

41,60

45,30

45,70

44,50

(en milliards d'euros) - Source INSEE.

D'une base 100 en 1990, l'investissement décentralisé global atteint 193 en 2009 : effort appréciable et continu, même si dans le même temps le total des dépenses des APUL est allé de 100 à 247.

Le tableau suivant permet de comparer l'investissement des administrations centrales, dont l'État, des APUL et du total des administrations publiques.

2005

2006

2007

2008

2009

Administrations centrales

11,4

10,1

10,4

10,9

12,4

dont État

7,6

6,7

6,6

6,8

8,2

Administrations publiques locales

39,4

41,6

45,3

45,7

44,5

Total des administrations publiques

57

57,8

62,2

63,4

63,9

% APUL / Total administrations

78%

72,90%

73%

72,50%

70,60%

(en milliards d'euros) 163 ( * ) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

(2) L'évolution par niveau

- Évolution de l'investissement communal

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 164 ( * )

13,39

14,07

16,33

16,15

15,06

16,82

18,02

19,40

20,92

23,10

21,39

21,39

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

L'investissement communal suit donc une incontestable tendance à la hausse qui a, entre 1998 et 2009, fait passer son niveau d'une base 100 à une base 164,5.

Cette évolution est comparable à celle de l'investissement décentralisé global, passé de la base 100 en 1995 à la base 178 en 2009. La part de l'investissement communal reste donc sensiblement la même dans l'ensemble de l'investissement décentralisé : 52,67 % en 2000 ; 48,61 % en 2009.

- Évolution de l'investissement des groupements de communes à fiscalité propre

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 165 ( * )

2,07

2,87

3,02

3,39

3,17

3,50

3,97

4,96

5,59

6,45

6,32

5,97

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

Plus frappante encore que la hausse constatée au niveau des communes, la progression de l'investissement des EPCI à fiscalité propre a ainsi fait passer celui-ci de la base 100 en 1998 à la base 298 en 2009 (après avoir connu un pic à 322 en 2007). Ce mouvement est d'ailleurs ancien : il s'observe déjà au cours de la période 1984-1992, mais il s'accentue ultérieurement.

- Évolution des investissements du bloc communal (communes + groupements à fiscalité propre)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 166 ( * )

15,47

16,93

19,35

19,55

18,23

20,32

21,99

24,36

26,50

29,56

27,72

27,36

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

En base, l'investissement du bloc communal est ainsi passé de 100 à 182 entre 1998 et 2009. Base 100 en 1998 ; 2009 : 182 L'investissement Comme on l'a vu, il est dans une large mesure « tiré » par les groupements.

La part de cet investissement dans l'investissement global des APUL était de 62,4 % en 2000 ; il est de 62,18 % en 2009.

- Évolution des dépenses d'équipement investissements des départements

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 167 ( * )

5,02

5,16

5,48

6,09

6,33

6,66

6,90

7,30

7,76

8,33

8,54

8,60

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

Base 100 en 1998 ; 2009 : 172.

- Évolution des dépenses d'équipement investissements des régions

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 168 ( * )

2,14

2,13

2,13

2,15

2,28

2,44

2,68

2,58

3,10

3,44

3,76

3,81

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

Base 100 en 1998 ; 2009 : 190.

(3) Total des dépenses d'investissement des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre (équipement et subvention d'équipement, hors remboursement)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Dépenses d'équipement 169 ( * )

32,24

34,15

36,80

38,30

37,65

40,80

44,61

47,14

50,94

56,85

55,23

56,60

(en milliards d'euros) - Source INSEE, comptes nationaux - Base 2000.

Pris globalement, les investissements des collectivités territoriales et de leurs groupements sont donc passés, entre 1998 et 2009, d'une base 100 à 176. Base 100 en 1998 ; 2009 : 176

d) Analyse des dépenses des APUL par fonction de 1998 à 2009170 ( * )

Les dépenses des administrations publiques locales (en milliards d'euros)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Total des dépenses

125,7

130,9

140,5

144,6

154,8

164,2

178,4

188,2

198,5

212,8

221,9

228,5

Services publics généraux

30,9

32,1

34,2

34,7

32,9

30,9

32,7

34,9

36,7

38,8

42,0

41,8

Défense

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Ordre et sûreté publics

2,6

2,6

2,8

3,8

4,3

4,7

4,9

5,4

5,8

6,1

6,4

6,6

Affaires économiques

20,2

19,0

21,3

18,7

20,6

21,9

23,2

24,2

24,9

26,9

27,4

28,4

Protection de l'environnement

7,6

7,7

9,1

9,6

10,4

11,4

12,4

13,6

14,5

15,3

15,1

15,6

Logement et développement urbain

15,1

17,0

20,0

21,6

24,0

25,4

27,2

28,1

29,9

32,6

33,8

34,5

Santé

1,3

1,3

1,0

1,0

1,3

1,5

1,7

1,9

1,9

2,2

2,4

2,4

Loisirs, culture et religion

10,9

11,1

12,0

13,3

15,5

17,2

18,0

19,2

20,5

21,6

22,5

23,0

Éducation

21,1

23,8

24,5

26,2

27,7

29,4

30,0

31,4

31,9

34,9

36,6

38,0

Protection sociale

16,0

16,2

15,5

15,6

18,1

21,8

28,3

29,3

32,3

34,5

35,8

38,1

Source : Insee, Comptes nationaux - Base 2000

Poids relatif des dépenses par fonction (en %)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Services publics généraux

24,6

24,5

24,3

24,0

21,3

18,8

18,3

18,6

18,5

18,2

18,9

18,3

Défense

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Ordre et sûreté publics

2,0

2,0

2,0

2,6

2,8

2,9

2,8

2,9

2,9

2,9

2,9

2,9

Affaires économiques

16,0

14,5

15,2

12,9

13,3

13,3

13,0

12,9

12,5

12,6

12,3

12,4

Protection de l'environnement

6,0

5,9

6,5

6,7

6,7

6,9

7,0

7,2

7,3

7,2

6,8

6,8

Logement et développement urbain

12,0

13,0

14,2

15,0

15,5

15,5

15,2

14,9

15,1

15,3

15,2

15,1

Santé

1,0

1,0

0,7

0,7

0,8

0,9

1,0

1,0

1,0

1,0

1,1

1,1

Loisirs, culture et religion

8,7

8,5

8,6

9,2

10,0

10,5

10,1

10,2

10,3

10,2

10,1

10,1

Éducation

16,8

18,2

17,5

18,1

17,9

17,9

16,8

16,7

16,1

16,4

16,5

16,6

Protection sociale

12,7

12,4

11,0

10,8

11,7

13,3

15,8

15,6

16,3

16,2

16,1

16,7

Source : Insee, Comptes nationaux - Base 2000

En 1998, l'ordre d'importance des principales dépenses de nos collectivités était donc le suivant :

1. Les services publics généraux

2. L'éducation

3. Les affaires économiques

4. La protection sociale

5. Le logement -urbanisme

6. La culture

7. L'environnement

En 2009 :

1. Les services publics généraux

2. La protection sociale

3. L'éducation

4. Logement - urbanisme

5. Les affaires économiques

6. La culture

7. L'environnement

L'ordre de la hiérarchie a été modifié au profit de la protection sociale, du logement et de l'urbanisme. Il nous faut constater une très forte croissance des dépenses en matière d'ordre public et de santé.

La régression - relative - des fonctions affaires économiques, éducation, vient tout normalement de leur haut niveau de départ et donc tout normalement d'une moindre progression.

Les données qui précèdent nous aident à mieux cerner le rôle économique de nos collectivités territoriales.

Marie-Jacqueline Marchand, économiste, écrit avec justesse :

« Depuis la décentralisation, les collectivités locales, détentrices de compétences élargies et de moyens financiers accrus, sont devenues des acteurs clés de la vie économique. En prise directe avec les préoccupations essentielles de la population, elles sont soucieuses de mettre en oeuvre les réponses les mieux adaptées aux besoins et aux demandes de proximité qui leurs sont adressées de façon croissante dans le développement économique, dans l'aide sociale, le système éducatif... Elles jouent ainsi un rôle considérable et croissant dans la création et la répartition des richesses entre les individus et les territoires. Comme principal investisseur public et comme employeur, elles ont un impact macro-économique direct et indirect sur le niveau de la croissance. Par le financement fiscal de leurs budgets, elles participent à la redistribution des ressources publiques. 171 ( * ) »

Bien qu'il y ait débat sur la croissance des effectifs de la fonction publique territoriale, les collectivités territoriales sont des employeurs importants (cf. infra). À ce titre, elles financent une demande de consommation des ménages, leur épargne et leur investissement.

Eu égard au statut de leurs employés, elles assurent à ces personnes une certaine sécurité, particulièrement utile à tout le monde en temps de crise.

Par leurs commandes de services, de fournitures, de biens aux entreprises, elles participent au soutien de l'emploi privé. Leurs contributions à l'insertion, leurs aides à l'économie sociale par le biais de leurs liens avec le monde associatif et mutualiste y participent également.

Producteurs de biens et de services utiles à tous les acteurs économiques, nos collectivités territoriales contribuent à la création de richesses. Citons les communications, l'organisation des territoires, les services administratifs, la formation, la qualité de l'environnement, l'eau, l'assainissement, l'accessibilité, les services à la personne...

Régions, départements, communes et groupements sont également des consommateurs qui achètent, des entrepreneurs qui investissent, construisent et aménagent.

Les entreprises de bâtiment et de travaux publics en sont les grands bénéficiaires mais pensons également aux entreprises qui produisent du matériel de transport, des réseaux technologiques...

Logements, équipements relèvent pour une large part des collectivités territoriales. Elles sont donc nécessairement en interface avec les ménages mais aussi avec les banques, les entreprises... et l'État.

Pas un domaine de celui-ci ne leur est étranger, y compris les plus régaliens : la sécurité, la défense (exemple : l'accueil immobilier des gendarmes), les relations internationales (exemple : la coopération décentralisée).

Toute politique de l'État implique qu'on le veuille ou non, les collectivités territoriales. Prenons l'exemple de la maîtrise de l'énergie. Nous sommes au coeur d'une problématique transversale. L'établissement - et le succès - d'un plan climat-énergie va concerner le logement : des diagnostics seront nécessaires, la connaissance et l'application de la réglementation s'imposent tout comme l'observation d'un référentiel. Il faudra mobiliser les propriétaires, les entreprises, les circuits financiers. Ce plan intéresse les déplacements, les transports, la définition des circuits, les nouveaux carburants... Au départ ou à la fin nous trouvons le plan de déplacements urbains, l'implication des commerces (signalisation lumineuse), le développement des énergies renouvelables, la recherche d'autonomie énergétique du territoire, le développement des éco-activités, la déclinaison de chacun de ces éléments dans les différents politiques sectorielles... autant d'objectifs, d'actions qui demandent un personnel compétent.

Dans un tout récent rapport rédigé au nom de la Délégation du Sénat aux collectivités territoriales et à la décentralisation, notre collègue Marie-Thérèse Bruguière a démontré qu'il en allait de même pour la politique de la santé, bien que celle-ci relève formellement des compétences de l'État 172 ( * ) . Les exemples pourraient ainsi se multiplier à l'infini.

Il est une autre fonction économique des collectivités territoriales que nous devons citer : la redistribution.

Nous pensons bien évidemment au conseil général, avec sa politique de solidarité sociale, mais également à l'ensemble des collectivités qui, au travers de leurs politiques tarifaires, de subventionnement, de péréquation, disposent d'une panoplie efficace.

La décentralisation est certes un concept, mais elle est surtout un processus, une réalité sociale, politique qui nous amène au coeur de l'économie :


• économie spatiale : il existe une diversité de territoires. Ils ont leur pertinence, leur complémentarité, leur concurrence...et leur égoïsme ;


• économie fonctionnelle : chaque fonction a ses règles et son importance mais la transversalité s'impose. La recherche de rentabilité foncière n'est pas conciliable avec la mixité sociale ;


• économie institutionnelle : c'est toute la question de notre système institutionnel, de la meilleure affectation des compétences... et du rapport à l'État, de la conception que l'on a de l'équilibre État-collectivités territoriales ;


• économie temporelle : nous avons privilégié la gestion de l'espace, la gestion du temps a tout autant d'importance.

Finalement - et sans surprise - la décentralisation nous amène en même temps au coeur de la politique.

Autonomes, nos collectivités territoriales doivent faire vivre un partenariat dont l`État ne peut être absent, au nom même de ses missions de développement et de cohésion.

D'autres domaines illustrent l'action économique de nos collectivités. Citons particulièrement le logement et le transport.

Les collectivités territoriales et le logement

Aujourd'hui, toute politique de construction de logements ne peut réussir qu'avec la forte implication des collectivités territoriales. Ce sont elles qui sont les mieux à même de connaître la demande, de bâtir des programmes locaux de l'habitat, de constituer des réserves foncières, de négocier, de planifier, de conduire des mixités, de faciliter des processus résidentiels. Plus précisément, si l'on ne veut pas que la rétention foncière alimente la spéculation et la ségrégation, il importe que la collectivité territoriale arbitre par un bon usage de la taxe foncière sur la propriété bâtie et sa surtaxe. À elle de distinguer entre les terrains à bâtir immédiatement, nécessaires aux besoins de l'urbanisme et ceux qui le sont moins. Nous sommes là dans le registre sensible de la « planification fiscale 173 ( * ) ».

Par sa fonction d'aménagement, la collectivité territoriale joue un rôle déterminant en matière de logement en général. Toutefois, une référence particulière à l'action des collectivités territoriales au bénéfice du logement HLM s'impose.

Commençons par regretter les insuffisances statistiques en la matière 174 ( * ) . L'impact économique de la liaison « collectivités territoriales » « organismes HLM » dépasse le secteur « activités logement ». À titre d'exemple : des logements à bas loyers permettent aux locataires de bénéficier d'un pouvoir d'achat plus élevé, de sorte que l'État peut faire des économies sur les aides à la personne.

Construction neuve France, DOM inclus

Construction neuve

HLM

1990

320 900

41 800

1991

317 000

48 600

1992

292 500

56 800

1993

273 600

66 300

1994

325 500

66 300

1995

309 500

59 300

1996

294 800

46 000

1997

291 000

47 900

1998

307 200

40 800

1999

341 400

40 800

2000

355 000

35 800

2001

350 600

34 400

2002

335 300

36 500

2003

350 500

37 000

2004

397 700

38 400

2005

450 100

45 000

2006

473 900

52 300

2007

461 100

59 900

2008

358 900

61 800

2009

277 300

85 200

2010

287 000

81 100

Source : ministère du Logement (mises en chantier Sitadel) pour la construction neuve tous secteurs, fédérations d'organismes HLM pour les mises en chantier de logements sociaux 175 ( * )


• Subventions directes aux opérations locatives sociales :

Ce type d'aide, variable selon les collectivités, progresse, même si globalement il n'est pas chiffré. Une certitude : en dix ans, le prix de revient des opérations a augmenté de 80 %, la contribution des collectivités locales a triplé, passant de 4,6 % à 7,6 % du prix de revient prévisionnel.


• Exonération du TFPB :

Le tableau suivant donne une estimation du montant des exonérations de TFPB consenties par les collectivités locales au bénéfice des organismes HLM et des compensations versées par l'État, à partir du Compte du Logement. L'exonération à la charge des collectivités locales croît avec le parc concerné (environ 18 % du parc HLM bénéficie d'une exonération). En ce qui concerne la part prise en charge par l'État, elle a augmenté à partir de 2001 avec l'abattement de 30 % pour les logements situés en ZUS, puis avec la montée en régime des dégrèvements pour travaux d'économie d'énergie et d'accessibilité ; cette hausse devrait se poursuivre, compte tenu des nouvelles modalités de compensation adoptées dans le cadre du plan de cohésion sociale.

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Exonération de TFPB
à la charge des collectivités

287

295

315

329

345

365

329

359

386

390

Exonération et dégrèvements de TFPB
à la charge de l'État

31

120

96

95

106

109

111

116

110

152

Source : compte du Logement, estimation DEEF-USH


• Garantie des collectivités locales aux prêts sur fonds d'épargne :

La quasi-totalité des prêts sur fonds d'épargne (PLUS, PLAI, PLS) continuent à bénéficier de la garantie des collectivités locales concernées par ces opérations. À défaut, les organismes devraient recourir à la garantie de la CGLLS, pour un coût égal à 2 % du montant emprunté en PLUS. Le montant des opérations garanties par la CGLLS est inférieur à 200 M€ en 2009. Le gain financier de la garantie des collectivités locales est appréciable et représente, par exemple, une économie de 100 M€ pour les prêts PLUS signés en 2010 176 ( * ) .

Les collectivités territoriales et le transport

Dans ce domaine, les collectivités territoriales et leurs groupements, à tous les échelons, jouent un rôle incontestable, perçu au quotidien par nos concitoyens et qui fera d'ailleurs prochainement l'objet, sous la plume de notre collègue Yves Krattinger, d'un rapport spécifique de notre Délégation à la décentralisation.

Les collectivités territoriales sont organisatrices du transport public, qui intéresse chaque jour des millions de personnes. La continuité de ce service, le savoir-faire acquis, le montant des investissements, leurs diversités, leur extrême importance dans la vie du pays peuvent - et doivent - nourrir une politique industrielle dans un domaine en pleine expansion internationale mais à forte concurrence.

Nous verrons successivement le rôle des collectivités territoriales dans le domaine du transport urbain puis dans le domaine ferroviaire avec les régions.

Collectivités territoriales et transport urbain

Rappelons quelques données chiffrées :

- en 2008 l'investissement dans les réseaux de transport collectif a atteint, environ 3,42 milliards d'euros. La part du transport urbain dans cet investissement se chiffre à 1,86 milliards d'euros contre 3 milliards en 2006 177 ( * ) ;

- la part du matériel roulant varie : moins de 20 % dans les agglomérations de plus de 200 000 habitants, plus de 60 % dans les agglomérations de moins de 200 000 habitants.

Dans une grande majorité des cas, le matériel acquis par les autorités organisatrices est produit sur le territoire national.

Économiquement, « le transport » entraîne directement de nombreuses activités. À titre d'exemples, l'investissement transport urbain se décompose ainsi : 27 % en matériel ; 20 % en travaux ; 17 % acquisitions foncières et immobilières.

À la suite du Grenelle de l'environnement, un appel à projet est lancé en 2008 pour réaliser des TCSP. L'État propose 710 millions d'aides pour des projets dont les travaux commenceront entre la fin 2008 et la fin 2011. 57 projets ont été proposés par 41 autorités organisatrices de transport. Soit une dépense totale de 7 milliards d'euros. 50 projets ont été sélectionnés, portés par 36 agglomérations pour une dépense totale de 6,6 milliards d'euros (800 millions de participation d'État).

L'apport de l'implication des collectivités territoriales par l'intermédiaire de la compétence transport va bien au-delà de cet aspect investissement. Il participe à l'ensemble de la vie économique : par le transport des travailleurs, des consommateurs, des élèves... Avec le plan de déplacements urbains, les collectivités locales participent à la lutte contre la pollution, à l'économie du temps, à la sécurité, à la rationalisation de la dépense 178 ( * ) ...

Régions et transport ferroviaire

La régionalisation du trafic ferroviaire apporte une nouvelle preuve du bien-fondé de la décentralisation et des changements qu'elle a apportés.

De 1999 à 2008, le trafic TER a augmenté de 60 % (moyenne de deux extrêmes l'Auvergne : + 12 % ; la Bourgogne + 121 %) 179 ( * ) .

Chaque région négocie cette organisation et établit son schéma régional de transport. Nous sommes passés d'un système d'offre à un système de la demande : les espaces, les besoins ne sont pas les mêmes d'une région à l'autre. Ainsi a-t-on permis des choix de matériel, des horaires, des entretiens adaptés, débattus, retenus dans un cahier des charges régionalisé.

Avec la loi Pasqua-Hoeffel du 4 février 1995, une expérimentation a eu lieu : « expérimenter pour tester, puis ajuster pour convaincre et étendre » 180 ( * ) . Cette expérimentation a eu lieu dans 6 régions : l'Alsace, le Centre, le Nord-Pas-de-Calais, les Pays de la Loire, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Rhône-Alpes et Limousin (1999).

De nouvelles lois allaient conforter cette orientation 181 ( * ) .

Les succès sont incontestables : ainsi pour l'Alsace qui, de 330 trains régionaux en 1997 et 29 000 voyageurs/jour, passe à 688 trains et à 70 000 voyageurs.

L'effort financier des régions de 1986 à 1995 est passé de 46 à 450 millions de francs (État : 3296 milliards à 3996).

La Cour des comptes n'a pas semblé convaincue par la politique menée : son approche strictement financière limite la portée de son appréciation mais le respect de certaines de ses recommandations s'impose 182 ( * ) .

En voici quelques unes :

- le prix payé par les usagers représente (en 2005) environ 17 % du coût complet du TER ;

- pour l'État, l'activité TER s'élève à 1,9 milliard d'euros en 2007 (à comparer avec les 1,350 milliard d'euros précédemment alloués à la SNCF) ;

- les régions ont engagé 2,7 milliards d'euros en 2007, « soit bien au-delà du montant compensé par l'État » .

La Cour des comptes reconnaît que « du point de vue des usagers, ce transfert a marqué un progrès incontestable, en permettant la mise en place de services mieux adaptés aux attentes locales » mais l'opération reste « coûteuse pour l'ensemble des acteurs institutionnels concernés » : régions, État, RFF et SNCF.

L' « exploitation peut être améliorée, au regard de son bilan écologique et de son coût ».

La Cour espère en la concurrence et souhaite une clarification de la « répartition des responsabilités entre l'État et les régions » et du « financement entre contribuable national, contribuable régional et usager » en fonction des principes qui sous-tendent le système des TER : logique de péréquation, d'aménagement du territoire et d'efficacité économique.


* 160 Conseil de prélèvements obligatoires « La fiscalité locale », mai 2010, La Documentation française, p. 631 et suivantes.

* 161 En 1990, les dépenses des APUL représentent 46 % des dépenses de l'État (46 % en 1989 ; 44,9 % en 1988) - DGCL, 1992, p. 18 ; « Les collectivités locales en chiffres 2011 » DGCL, p.43.

* 162 Op. cit., p. 133.

* 163 Op. cit., p. 47.

* 164 Op. cit., p. 135. Pour les tableaux 2-3-4-5-6, il s'agit des dépenses d'équipement, hors subvention, attribuées par la collectivité. Par contre, le tableau 7 récapitule équipement et subvention (hors remboursement).

* 165 Op. cit. p. 136.

* 166 Op. cit. p. 137.

* 167 Op. cit. p. 138.

* 168 Op. cit. p. 139.

* 169 Op. cit. p. 140.

* 170 Op. cit. p. 134.

* 171 Marie-Jacqueline Marchand, « L'économie de la décentralisation », PUR, 1999.

* 172 « Santé et territoires : à la recherche de l'équilibre », rapport d'information n° 600 (Sénat, 2010-2011) du 14 juin 2011.

* 173 Il semble qu'il ne soit fait qu'un usage modéré du dispositif de la loi SRU et de la loi portant engagement national pour le logement du 13 juillet 2006. Cf. « Intercommunalité », Journal de l'ADCF, avril 2011, p. 70.

* 174 Un groupe de travail (ministère, collectivités territoriales et Union sociale de l'habitat) va s'attacher à combler ce vide.

* 175 Les organismes HLM peuvent acquérir des logements existants transformés en logements sociaux après travaux (soit 10 000 logements par an). Ils peuvent également procéder à des acquisitions en bloc auprès d'autres propriétaires (SEM, ICADE ou autres propriétaires traditionnels).

* 176 Direction des études économiques et financières de l'Union nationale des fédérations d'organismes HLM.

* 177 Note GART (Groupement des autorités responsables de transport) « Le poids des transports collectifs urbains départementaux et régionaux dans l'économie ». Décomposition du financement : 52,5 % emprunt ; 36,1 % autofinancement ; 5,8 % État ; 5,5 % collectivités locales partenaires ; 0,1 % Europe.

* 178 En 2009, il existait 115 PDU. Le PDU a été rendu obligatoire (dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants) par la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie (Loi LAURE de 1996). Le PDU, document de développement durable, vise à diminuer le trafic automobile. Dans les agglomérations de moins de 100 000 habitants, il existe un document de planification des déplacements (« Politique globale de déplacement ») qui cherche à maîtriser la circulation (sécurité, développement des modes alternatifs,...).

* 179 Hubert Haenel « Régionalisation ferroviaire, les clés d'un succès », collection Ville Rail et Transport, 2011.

* 180 Art. 67 de la loi « Afin d'assurer la mise en oeuvre de la politique nationale d'aménagement et de développement du territoire, une loi définira, après une phase d'expérimentation qui débutera un an au plus après l'adoption de la présente loi, les modalités d'organisation et de financement des transports collectifs d'intérêt régional et les conditions dans lesquelles ces tâches seront attribuées aux régions, dans le respect de l'égalité des charges imposées au citoyen ainsi que de l'égalité des aides apportées par l'État aux régions ». La loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI) marque le début de la décentralisation des transports collectifs en faveur des collectivités locales. L'Alsace et la Bourgogne signeront les premières conventions d'exploitation avec la SNCF.

* 181 La loi SRU du 13 décembre 2000 reconnaît pleinement toutes les régions comme autorités organisatrices des transports régionaux à partir du 1 er janvier 2002.

* 182 Rapport de la Cour des comptes : « Le transfert aux régions du transport express régional (TER) : un bilan mitigé et des évolutions à poursuivre », novembre 2009.

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