II. DES DOTATIONS NÉCESSAIRES, MAIS UN VOLUME À MAÎTRISER ET DES MODALITÉS DE CALCUL ET DE PILOTAGE À PARFAIRE

A. UN PÉRIMÈTRE ET UN MONTANT GLOBAL QUI DOIVENT ÊTRE EN COHÉRENCE AVEC LA LOGIQUE DE LA T2A

Votre rapporteur spécial ne remet pas en cause la nécessité de maintenir le financement de certaines missions des établissements de santé en dehors de la tarification à l'activité. Néanmoins, il lui paraît impératif de maintenir un volume global de dotations MIGAC en cohérence avec la logique de la réforme de la T2A.

Loin d'être contraire à la tarification à l'activité, l'enveloppe MIGAC constitue son complément nécessaire pour autant que son périmètre soit affiné et son volume de crédits maîtrisé .

1. Un périmètre à affiner
a) La nécessité d'une redéfinition constante du champ des activités éligibles à un financement MIGAC

Mieux distinguer les prestations soins et les MIGAC doit, tout d'abord, constituer, pour votre rapporteur spécial, une priorité constante afin de vérifier continuellement la pertinence des dotations MIGAC à demeurer en retrait du modèle de la T2A .

La logique de la tarification à l'activité doit, en effet, demeurer le principe et le financement par dotation l'exception. Il s'agit certes d'un « travail de longue haleine » comme le rappelle la DGOS 14 ( * ) - on compte près de quatre-vingt missions d'intérêt général - mais indispensable pour garantir la pertinence de la réforme de la T2A.

Selon les réponses adressées à votre rapporteur spécial, toutes les missions d'intérêt général sont passées en revue chaque année par la DGOS et, sur la base de ces travaux, devraient évoluer à moyen terme vers les tarifs :

- le financement des SAMU et des SMUR ;

- le financement d'une partie des structures prenant en charge des consultations « complexes ».

Ces transferts potentiels ne sont pas négligeables compte tenu du poids financiers qu'ils représentent au sein des MIG. L'aide médicale urgente, correspondant principalement aux SMUR et SAMU, constituait ainsi la deuxième MIG la plus importante en 2009, soit 16,4 % de l'ensemble des MIG (MERRI comprises) 15 ( * ) .

A cet égard, votre rapporteur spécial insiste sur la transparence de la valorisation des redéploiements . Un transfert de crédits d'une enveloppe à l'autre doit en effet être précisément motivé, afin de garantir la crédibilité du système, son acceptabilité par tous les acteurs, ainsi que l'équité de répartition entre le secteur public et le secteur privé, ce dernier n'émargeant que faiblement aux dotations MIGAC.

La sincérité de la valorisation des enveloppes « Précarité » et « Permanence des soins », transférées en 2009 des tarifs vers les MIGAC, a ainsi pu être contestée par certains acteurs.

b) Une nécessaire clarification de l'articulation entre le périmètre des MIGAC et les autres supports de financement des établissements de santé

De la même façon, l'articulation entre les financements MIGAC et les autres sources de financement des établissements de santé gagnerait à être précisée afin de renforcer leur cohérence et d'éviter tout doublon de financement.

Votre rapporteur spécial a identifié, à cet égard, plusieurs zones de recoupements.

Il convient, tout d'abord, de rappeler que la recherche et l'enseignement en établissements de santé bénéficient d'autres sources de financement que les MERRI.

Selon le rapport précité de l'Inspection générale des affaires sociales, citant les données du ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur, en 2007, les centres hospitaliers universitaires (CHU) et les centres de lutte contre le cancer (CLCC) ont reçu, pour la recherche clinique, 30 millions d'euros de ressources publiques en sus des dotations MIGAC.

A cela s'ajoutent les fonds de l'emprunt national à travers notamment l'action « Instituts hospitalo-universitaires » présentée précédemment, ainsi que les crédits de la mission « Santé » destinés à rembourser aux CHU la rémunération des internes effectuant un stage extrahospitalier.

En effet, le CHU dont relève l'interne qui effectue soit un stage extrahospitalier, soit un stage pratique, continue pendant ce stage, à assurer le versement des émoluments forfaitaires et des charges sociales de l'interne.

Les MIG et le Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) peuvent également être amenés à financer des actions proches, notamment la permanence des soins et l'éducation thérapeutique.

Enfin, le Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), comme les aides à la contractualisation des MIGAC, constituent les deux leviers de financement des Plans Hôpital 2007 et 2012.

L'absence de support financier unique, s'agissant particulièrement de l'appui à l'investissement hospitalier, nuit à la lisibilité de ces financements et ne permet pas une maîtrise globale de ces aides.

C'est pourquoi, votre rapporteur spécial invite à une clarification du périmètre de l'ensemble de ces enveloppes, ainsi qu'à un suivi consolidé de ces différents supports de financement , ceci d'autant plus que les dotations du FIQCS et du FMESPP, comme les MIGAC, sont déléguées aux établissements par les ARS.

L'articulation entre le périmètre des MIGAC et certains autres supports de financement des établissements de santé

Source : commission des finances

2. La nécessaire poursuite de la maîtrise de l'enveloppe MIGAC et plus particulièrement de son volet « aide à la contractualisation »

Outre son périmètre, c'est le volume même de l'enveloppe MIGAC qui doit être maîtrisé.

a) Une forte croissance qui a pu s'expliquer au moment de la mise en place de la T2A

La forte croissance de l'enveloppe MIGAC, et notamment de l'enveloppe AC, a été expliquée par de nombreux interlocuteurs de votre rapporteur spécial par le nécessaire accompagnement des établissements de santé dans la réforme de la tarification à l'activité, qui a pu induire des effets revenus importants.

Certaines des personnes rencontrées par votre rapporteur spécial ont d'ailleurs parlé du « choc » qu'a constitué, pour certains établissements, le passage d'un financement par dotation à un financement à l'activité.

A cet égard, le guide méthodologique à destination des ARH /ARS indique clairement que des aides à la contractualisation peuvent être accordées en vue de « la montée en charge de la tarification à l'activité ».

Celles-ci peuvent prendre deux formes :

- des aides directes : une aide au développement d'une activité déjà existante en attendant que les recettes tarifaires permettent à l'établissement de financer les charges afférentes ou une compensation temporaire de l'effet revenu lié à un changement du modèle tarifaire ;

- des aides indirectes aux établissements déficitaires lorsque ces déficits sont, pour partie, la conséquence de la difficile adaptation de l'établissement au passage à la T2A.

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2010, la Cour des comptes notait, à cet égard, que les hôpitaux anciennement « sur-dotés » constituaient l'essentiel des établissements actuellement en difficultés.

b) La nécessité aujourd'hui d'une meilleure maîtrise au risque de fortement contraindre les tarifs et de détourner la T2A de sa finalité

Votre rapporteur spécial a noté la décélération de l'enveloppe MIGAC, notamment entre 2010 et 2011 ( cf. supra ) et invite à la poursuite de cette tendance.

En effet, sept ans après la mise en place de la tarification à l'activité, la maîtrise de l'enveloppe MIGAC apparaît indispensable sous peine de « dénaturer » la réforme introduite en 2004 .

La réforme de la T2A avait en effet pour objectif d'inciter les établissements de santé à procéder aux adaptations nécessaires de la structure de leur activité et de leurs dépenses. L'aide accordée dans le cadre de l'enveloppe MIGAC ne peut donc être que transitoire.

Autrement dit, de deux choses l'une : soit la tarification à l'activité est une réforme fondée et les établissements doivent être incités à s'adapter et à mener les réformes structurelles nécessaires, soit elle induit des effets non désirés et des aménagements du modèle sont, dans ce cas, indispensables.

A cet égard, votre rapporteur spécial estime souhaitable qu'un bilan de la T2A soit rapidement mené .

Surtout, comme l'ont souligné certains interlocuteurs de votre rapporteur spécial, l'enveloppe MIGAC ne peut croître indéfiniment au risque de contraindre trop fortement l'enveloppe sous tarifs et de « brouiller » les signaux tarifaires .

En effet, la construction de l'ONDAM hospitalier repose en quelque sorte sur la logique des « vases communicants ». Schématiquement, l'ONDAM hospitalier relatif aux établissements tarifés à l'activité voté en loi de financement de la sécurité sociale est ensuite décomposé en deux, l'enveloppe sous tarifs (l'ODMCO) et les MIGAC. Toute augmentation de l'enveloppe MIGAC suppose ainsi une moindre progression de l'ODMCO.

c) Vers la mise en place d'un nouveau sous-objectif de l'ONDAM ?

Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, notre collègue Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales, avait proposé, afin d'améliorer la transparence et l'information du Parlement que le montant de la dotation MIGAC soit fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale , l'Etat continuant de déterminer les dotations régionales et les critères d'attribution aux établissements.

C'est une piste de réflexion qui gagnerait à être approfondie. Elle va, en tout état de cause, dans le sens d'un renforcement du contrôle et du suivi de cette enveloppe par le Parlement .

A cet égard, il est à noter que l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale prévoit la transmission, avant le 15 octobre de chaque année, d'un bilan relatif à l'utilisation des dotations affectées aux MIGAC. « Ce bilan contient notamment une analyse du bien-fondé du périmètre des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements de santé, de l'évolution du montant annuel de la dotation nationale de financement de ces missions, de celle du montant des dotations régionales et de celle du montant des dotations attribuées à chaque établissement, ainsi que des critères d'attribution de ces dernières aux établissements ».

Cette information, bien qu'améliorée, demeure encore à parfaire. En effet, alors que jusqu'en 2010, le contenu des rapports annuels était assez peu différent d'une année à l'autre, le rapport 2010 présente, de façon pédagogique, l'évolution du volume et de la répartition des dotations MIGAC, ainsi que les méthodes de construction des différentes enveloppes. Votre rapporteur spécial encourage la poursuite de ces efforts d'enrichissement de l'information à destination du Parlement.


* 14 Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins - Guide méthodologique à destination des agences régionales de l'hospitalisation - 3 e édition (juin 2008).

* 15 Rapport 2010 au Parlement sur les missions d'intérêt général et l'aide à la contractualisation des établissements de santé.

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