B. CONTRAINTES JURIDIQUES ET FISCALES

Les risques de nature règlementaire existent, mais sont très difficiles à pondérer : les lignes directrices des politiques suivies peuvent évoluer très vite, tandis qu'une règle nouvelle emporte parfois des conséquences largement imprévisibles.

1. Le risque d'une protection excessive des consommateurs

La sécurité du cyber-acheteur apparaît comme globalement assurée au travers d'un arsenal juridique qui le protège dans des conditions de droit commun, tout en ajoutant des filets de sécurité adaptés aux spécificités du commerce électronique. Le droit européen participe à ce mouvement, en tendant parallèlement à une harmonisation des législations.

D'après la commission européenne, « Encourager le développement du commerce électronique est un des axes clés de la stratégie visant à faire de l'Union européenne l'économie basée sur la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde ».

Après que la directive « contrats à distance » (97/7/CE) a fixé des règles d'harmonisation minimale, « la directive 2000/31/CE a instauré le cadre juridique de base pour le commerce électronique dans le marché intérieur. Elle lève les obstacles aux services en ligne transfrontaliers au sein de l'Union européenne et apporte la sécurité juridique tant aux entreprises qu'aux citoyens ».

La directive sur le commerce électronique (2000/31/CE)

Adoptée en 2000, la directive sur le commerce électronique institue au sein du Marché intérieur un cadre pour le commerce électronique garantissant la sécurité juridique pour les entreprises et pour les consommateurs.

Elle établit des règles harmonisées sur des questions comme les exigences en matière de transparence et d'information imposées aux fournisseurs de services en ligne, les communications commerciales, les contrats par voie électronique ou les limites de la responsabilité des prestataires intermédiaires.

Le bon fonctionnement du Marché intérieur dans le domaine du commerce électronique est garanti par la clause « Marché intérieur » qui prévoit que les services de la société de l'information sont en principe soumis à la législation de l'État membre dans lequel le prestataire est établi . En retour, un État membre ne peut restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre État membre.

En outre, la directive renforce la coopération administrative entre les États membres et le rôle de l'autorégulation.

Comme exemples de services couverts par la directive, on citera les services d'information en ligne (comme les journaux en ligne), la vente en ligne de produits et de services (livres, services financiers, voyages), la publicité en ligne, les services professionnels (avocats, médecins, agents immobiliers), les services de loisirs et les services intermédiaires de base (accès à Internet ainsi que transmission et hébergement d'informations). Sont également couverts des services fournis gratuitement aux bénéficiaires et financés, par exemple, par la publicité ou le parrainage.

Une évaluation de la directive

La Commission européenne a ouvert une consultation sur l'impact de la directive sur le commerce électronique (2000/31/CE), en vue d'une possible révision.

Dans les motifs avancés, la Commission entend « comprendre pourquoi le commerce électronique reste limité à moins de 2 % des ventes du secteur de la distribution au niveau européen, et atteint seulement 4 % dans les quatre Etats membres ».

A cet effet, la consultation vise principalement l'identification des obstacles au e-commerce et l'impact économique et règlementaire de la directive.

Sur la base des réponses à cette consultation, de discussions avec les Etats membres et des rapports du Parlement européen (notamment le rapport de Pablo Arias Echeverria sur l'achèvement du marché intérieur en ce qui concerne le commerce en ligne), la Commission doit adopter une Communication sur le Commerce électronique, « y compris sur l'impact de la directive Commerce électronique ».

Source : Commission européenne

Par ailleurs, la loi pour la confiance dans l'économie numérique n° 2004-575 du 21 juin 2004, abrégée sous le sigle LCEN, a transposé la directive européenne du 8 juin 2000 sur le commerce électronique ainsi que certaines dispositions de la directive du 12 juillet 2002 sur la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.

Outre l'apport de la loi « Chatel » 151 ( * ) ( supra ), on mentionnera, en dernier lieu, le projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs 152 ( * ) qui comporte, dans son état actuel, un certain nombre de dispositions intéressant l'e-commerce.

Principales dispositions du projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs intéressant le commerce électronique

- Une boutique en ligne ne sera plus obligée d'indiquer la durée de validité de ses offres et de ses prix ;

- l'engagement de tout processus d'achat impliquera qu'au préalable, des mentions sur la garantie de conformité, la garantie commerciale et les coordonnées du service après-vente apparaissent clairement ;

- pour tous les supports d'enregistrement, la part du prix reversée à la Sorecop et à Copie France 153 ( * ) au titre de la rémunération pour copie privée devra être précisée aux consommateurs ;

- les conditions générales de ventes et d'utilisation devront être visibles depuis la page d'accueil du site marchand ainsi que sur les newsletters et les autres moyens de communication et de promotion ;

- dans le cas où le site marchand ne règle pas les frais au transporteur, ce dernier ne pourra pas en réclamer le paiement à l'acheteur final ;

- les agents de la DGCCRF pourront saisir le juge pour fermer un site ; leur situation sera confortée et clarifiée lorsqu'ils se font passer pour des consommateurs, grâce à l'encadrement de cette activité ;

- un cadre légal est mis en place pour la vente de produits optiques sur Internet.

La recherche d'une protection encore renforcée des consommateurs pourrait-elle, d'une façon générale, mettre en danger le commerce électronique ? De nouveaux degrés franchis dans l'amélioration des droits des consommateurs, souvent corrélative à un alourdissement des obligations des vendeurs, pourraient-ils déboucher sur un « jeu à somme négative » pour l'e-commerce ?

Rien ne permet de l'exclure. Quoi qu'il en soit, la défense des intérêts du secteur, à mesure qu'il s'organise, sera probablement de plus en plus efficace .

Par exemple, les termes initiaux de la nouvelle directive sur les droits des consommateurs 154 ( * ) ont inquiété la profession, car ils obligeaient les sites de commerce électronique à livrer dans toute l'Europe, tout en mettant les frais de réexpédition à la charge du vendeur (pour toute commande excédant 40 euros en cas de rétractation).

A ce stade, Marc LOLIVIER, Délégué général de la FEVAD, estimait que « ces mesures seraient lourdes de conséquences sur la santé financière de beaucoup d'entreprises en Europe, notamment pour les PME et TPE. Elles auraient un impact négatif sur la concurrence et donc la profondeur du choix disponible sur Internet, car si certaines structures auront la capacité financière d'absorber la hausse des coûts d'exploitation, toutes ne le pourront pas - en particulier les PME. Au total, des répercussions sur le niveau général des prix semblent inévitables ».

Mais en juin 2011, les représentants des États membres et la Commission IMCO 155 ( * ) du Parlement européen sont tombés d'accord sur un texte de compromis qui revient sur ces deux mesures, et la directive se contente ainsi de fixer au profit de l'acheteur un délai de rétractation de deux fois 14 jours (14 jours pour signaler l'intention de renvoyer un produit, auxquels s'ajouteraient 14 autres jours pour renvoyer effectivement ce produit) - au lieu de 7 jours en France et dans la plupart des pays européens 156 ( * ) .


* 151 Loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur.

* 152 Ce texte devrait arriver en discussion au Sénat les 20 et 21 décembre 2011 ; son adoption définitive est prévue début 2012.

* 153 Respectivement, société pour la rémunération de la copie privée sonore, et société pour la rémunération de la copie privée audiovisuelle.

* 154 Le 5 juillet 2011, le Parlement européen a donné son feu vert à son adoption définitive, et les gouvernements devront la transposer dans un délai de deux ans et demi.

* 155 Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs.

* 156 La FEVAD regrette encore, cependant, « une nouvelle mesure visant à imposer aux entreprises d'indiquer à l'avance les frais estimatifs de retour pour les produits encombrants ».

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