3. La libéralisation du commerce agricole pose de redoutables problèmes de transition

La libéralisation des échanges passe par l'élimination des dispositifs susceptibles de favoriser certains producteurs nationaux au détriment d''autres. Considérées structurellement, ses conséquences sont neutres sur la production, les producteurs désavantagés par les distorsions prenant le relais de ceux qu'elles avantageaient. Dans les faits, compte tenu du temps, elles seraient sans doute bien différentes. La suppression des incitations à la production risque d'avoir des effets immédiats sur le niveau de la production, qui baisserait, tandis que les producteurs dont le désavantage serait supprimé pourraient ne pas être en mesure de combler le déficit de production induit. Dans un tel contexte, la production mondiale diminuerait ce qui créerait des tensions sur les prix et peut aboutir à un choc de demande en retour si la demande solvable devait se réduire.

Autrement dit, la libéralisation des échanges agricoles appelle un accompagnement que les organisations multilatérales où elle est un credo ne peuvent garantir.

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L'instauration d'échanges internationaux totalement dérégulés compliquerait la résolution de l'équation alimentaire.

Ce constat peut être posé même quand on raisonne dans les termes ultra-simplificateurs des modèles économiques construits à partir des termes abstraits de l'économie la plus classique.

L'adoption d'hypothèses plus proches de la réalité comprenant des acteurs de force très inégale et la considération des défaillances du marché changent encore plus l'appréciation des effets de la libéralisation.

Celle-ci n'en doit pas pour autant être systématiquement récusée. Mais, elle ne doit pas être l'a priori qu'elle est trop souvent. Il faut l'évaluer plutôt qu'évaluer le monde à partir d'elle.

Le renforcement des interdépendances alimentaires est inscrit dans les forces qui structureront la géo-alimentation de demain. Il faut en tenir compte. Mais, poser qu'il est un bien en soi relève d'un dogmatisme dangereux. À cet égard, il est heureux que l'OMC ait pu reconnaître l'exigence d'appliquer un traitement spécial et différencié aux pays en développement. Mais, la question est bien de savoir si ce n'est pas plus globalement l'agriculture qui devrait relever d'une telle démarche plutôt que d'en faire une exception à un principe de libéralisation consacré, à tort aux yeux de votre rapporteur, comme la pierre angulaire du développement agricole.

Les questions abordées ci-après sur les positions des acteurs et sur les contradictions des paradigmes du développement agricole ajoutent au scepticisme qu'inspire une approche reposant avant tout sur la dérégulation des échanges.

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