CONTRIBUTION DU GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN

La conjoncture économique héritée des événements de l'été 2008, dont la crise obligataire que traverse la zone euro ces derniers mois est l'un des prolongements, a mis en lumière le rôle particulier joué par les agences de notation quant à la manière dont les acteurs des marchés financiers, les investisseurs avaient tendance à interpréter les situations et orienter leurs choix d'intervention et d'investissement.

Ce qui fut aussi révélé et que le rapport de la mission ne fait que confirmer, c'est que les trois agences oligopolistiques et singulièrement deux d'entre elles, ont une expertise certes reconnue sur les places financières et boursières mais d'aussi évidents liens avec ce qui fait l'objet de leur travail de notation, c'est à dire les entreprises d'investissement et, de manière plus générale, les acteurs même des marchés.

L'indépendance de jugement des agences de notation est donc, dans l'absolu, d'ores et déjà interrogée de par la nature de ces liens.

S'agissant de la question des dettes obligataires, sur lesquelles les agences de notation interviennent également, il est courant de constater la critique principale qui peut être formulée à l'encontre des agences.

Celle qui voudrait qu'à raison de l'appréciation ou de la dégradation de la notation d'un pays, on se retrouve confronté à une difficulté nouvelle pour émettre des titres obligataires dans des conditions satisfaisantes, renchérissant d'autant le coût de la dette du pays concerné.

Si cette critique est tout à fait recevable, elle souffre toutefois, à notre sens, d'une limite.

Celle qui veut qu'avec une notation dégradée, les États-Unis peuvent se retrouver, malgré tout, à pouvoir emprunter sur les marchés financiers à des conditions moins défavorables que celles de la France et que notre pays, pour donner un exemple précis, a étrangement bénéficié d'une détente relative de ses taux d'intérêt malgré une dépréciation de notre fameux « triple A ».

Ceci dit, plus encore que ce « terrorisme » de la bonne note en soi critiquable, il semble bien que le plus problématique demeure les outils et méthodes retenus pour procéder à l'évaluation d'une dette obligataire.

Le nombre réduit d'analystes attachés à la situation de chaque pays analysé, le fait qu'il est probable que les critères intangibles de notation soient les mêmes et participe, de manière générale, d'une certaine conception de l'économie comme de la gestion des affaires publiques, aux dépens de toute autre considération sont autant d'obstacles, nous semble t il, à reconnaître une parfaite indépendance des agences de notation.

Le problème se double d'ailleurs d'une question récurrente : qu'est-ce qui peut motiver qu'un organisme, défini comme indépendant au motif qu'il n'est pas public et ne procède pas d'une puissance publique, peut, de fait, donner une opinion sur la gestion des affaires publiques d'un pays, qui se détermine à raison des choix opérés par les gouvernements en place et/ou en fonctions, choisis par les citoyens démocratiquement consultés ?

L'hypothèse d'une plus grande concurrence dans le secteur de la notation ne doit, à notre sens, aucunement laisser de côté la possibilité de constituer une plate forme de notation publique, mettant d'ailleurs en évidence d'autres critères que ceux en général retenus par les agences de marché et dont les services de la Banque de France, d'ores et déjà occupés pour partie à ces activités de notation des entreprises, pourraient fort bien constituer l'ossature.

Notre législation ayant consacré l'indépendance de la Banque de France, on pourrait enfin y trouver avantage plutôt que n'en subir que les inconvénients pour la gestion des finances publiques, tels qu'ils découlent du Traité fondant l'Union Européenne.

Si tant est que la mission d'information puisse proposer une innovation, ce serait sans doute dans le développement de cette activité de notation publique.

À condition de faire évoluer les critères de notation en ajoutant aux critères de solidité financière habituelle, des critères sociaux et environnementaux, par exemple.

Ce sont là les points qu'il nous paraissait utile de préciser dans cette contribution, en saluant le travail de la mission d'information qui nous semble appeler de nécessaires prolongements législatifs.

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