3. L'amorce d'une défense européenne ?

Le succès du pilier opérationnel de l'EATC est avéré et mérite d'être encouragé. C'est la raison d'être profonde de la mise en place de ce commandement. Mais c'est le succès du pilier normatif ou « fonctionnel » qui semble à la fois le plus surprenant et le plus porteur d'avenir.

Le développement de ce pilier s'est révélé indispensable pour permettre aux quatre nations de travailler efficacement, avec un socle règlementaire commun pour l'emploi des équipages. Cette nécessité a donné lieu à l'élaboration d'un document, principalement tiré de la règlementation européenne civile (EU-OPS), qui tient compte des recommandations de l'EASA, du GAE (groupe aéronautique européen - voir encadré infra) et des règlements militaires nationaux.

Cette harmonisation est le fruit d'un travail remarquable qui a permis un alignement par «le haut» et non «par le bas». Elle a également autorisé la mise en place de possibilités de parachutage croisées (parachutistes d'une nation sur un appareil d'une autre nation) et une procédure relative aux autorisations diplomatiques de survol. D'autres études sont en cours, concernant par exemple les règles relatives au transport d'oxygène liquide, l'harmonisation de la «gestion des ressources de maintenance» ( Maintenance Ressource Management ), les règles de relevage d'un avion accidenté, les procédures de transport de fret, de matériels spécifiques (ex : moteurs) ; le suivi des matériels de transport (palettes, filets...) et enfin la réparation des dommages de combat.

L'EATC assure également le suivi global de la disponibilité des aéronefs, comme le ferait un gestionnaire global de flotte. Le gestionnaire de la flotte EATC suit en effet les types d'aéronefs, leurs lieux de stationnement, les escadrons, les configurations possibles des avions et les indicatifs. Les gestionnaires locaux gèrent quant à eux la maintenance, prévue et non prévue, ainsi que la configuration réelle de l'avion. L'EATC assure également la gestion de la maintenance. Il peut de ce point de vue identifier les déficits en comparant les missions prévues au calendrier de maintenance. Il peut également transmettre les «événements techniques» 22 ( * ) aux nations partenaires, ce qui permet aux nations de partager l'information, d'améliorer la sécurité aéronautique et de gagner ainsi du temps et de l'argent.

Les autres structures ou processus de coopération aéronautiques en Europe

MCCE : Mouvement Coordination Centre Europe

Cette structure a été créée en 2007 et vise à coordonner et optimiser l'emploi des moyens de projection militaires par les voies aériennes, maritimes et terrestres. 25 états dont les USA sont engagés dans cette initiative. La France participe à hauteur de trois personnes. Les attributions du MCCE sont limitées à la mise en relation d'une nation désirant transporter quelque chose avec une autre nation disposant d'un moyen de transport. Il n'y a pas de transfert de contrôle opérationnel. Cette entité assure également des échanges de services dans le domaine du ravitaillement en vol. A cet égard, la France réalise par le biais du MCCE, des missions de ravitaillement en vol avec les K/C-135 au profit d'autres nations. Le MCCE est installé à Eindhoven, près de l'EATC.

ATARES : Air Transport, Air to air Refuelling and other Exchanges of Services

Il s'agit d'un accord entre les nations permettant d'échanger des heures de vols. Les calculs sont réalisés à partir d'un équivalent heure de vol (celui du C130). Cette balance permet le fonctionnement de l'EATC et du MCCE. Les comptes ATARES sont tenus également à Eindhoven dans les locaux du MCCE.

SALIS : Strategic Airlift Interim Solution

Face au déficit de capacité de transport stratégique, l'OTAN a lancé deux initiatives : SALIS et SAC-C17. Le contrat SALIS concerne 14 nations et 1 prestataire de services privé : Ruslan GmbH. Le titulaire du marché s'engage à mettre à la disposition des nations signataires jusqu'à 6 avions Antonov An 124 selon des délais précis.

SALCC : Strategic Arlift Coordination Cell

Installé à Eindhoven dans les murs du MCCE, a pour mission de faire fonctionner le contrat SALIS.

SAC-C17 : Strategic Airlift Capacity C17

Il s'agit de la deuxième initiative de l'OTAN qui se concrétise par un MoU entre une douzaine de pays dont les USA et qui a permis l'achat de 3 C17 stationnés sur la base de Pàpa en Hongrie. L'exploitation opérationnelle de cette flotte est assurée par une unité multinationale et se trouve autonome à l'égard du commandement de l'OTAN.

EATF : European air Transport Fleet

Créé initialement pour étudier la mise en place d'une unité multinationale d'A400M, ce groupe de travail de l'Agence Européenne de Défense a maintenant pour vocation d'offrir à ses 18 partenaires de l'Union européenne un forum permettant de traiter de toute problématique liée au transport aérien militaire : clairance diplomatique, entrainement tactique des équipages (création éventuelle d'un centre tactique de formation européen), optimisation de l'emploi des capacités de ravitaillement en vol.

EAG : European Air Group

Initiative lancée en 1995 par la France et le Royaume-Uni, ce groupe s'est ouvert à d'autres nations européennes à partir de 1999. Aujourd'hui, l'EAG compte 7 nations et a pour but d'améliorer l'interopérabilité entre les armées des 7 pays participants. Il ne concerne que très peu les questions de transport et son centre est basé au Royaume Uni.


* 22 Les événements techniques ou « faits techniques » sont des problèmes techniques que les nations considèrent comme importants en raison de leur nature, de leur occurrence fréquente, ou encore de l'impact sur la disponibilité des aéronefs , voire de l'arrêt d'une flotte.

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