B. COMMENT FINANCER LES COÛTS DU RENFORCEMENT ET DE L'ADAPTATION DU RÉSEAU ?

Votre commission a insisté sur les perspectives ouvertes par l'apparition de nouvelles technologies au niveau des réseaux et le développement des énergies renouvelables. S'agissant de tarifs étroitement surveillés par les autorités publiques, il existe une certaine latitude pour répartir les charges supplémentaires entre les agents économiques : consommateurs finaux, entreprises (encore faut-il préciser lesquelles ?) ou contribuables, sachant qu'il faudra arbitrer entre des considérations d'égalité devant un bien qui reste un service collectif et non pas un produit marchand comme les autres.

1. L'ajustement indispensable du TURPE

La CRE a commencé à travailler sur la structure du prochain tarif d'utilisation du réseau public d'électricité, le TURPE 4, qui sera applicable à partir de 2013 pour environ quatre ans. Elle a notamment lancé, en mars 2012, la consultation publique sur ce sujet.

a) Le timbre de soutirage
(1) L'introduction d'un tarif horo-saisonnalisé

Dans la consultation publique qu'elle a lancée, la CRE propose une nouvelle structure tarifaire de la composante soutirage du TURPE, en introduisant une variation du tarif selon la période de consommation.

Ce dispositif ferait varier à la hausse, par rapport au TURPE 3, la facture des consommateurs ayant une courbe de charge fortement corrélée à la courbe de charge du système, et inversement, ferait baisser la facture des consommateurs ayant une courbe de charge régulière ou centrée sur les heures « creuses ».

Comme le résume la CRE dans son document, « le rôle de la tarification serait idéalement de répercuter de la façon la plus transparente possible les coûts générés », et ainsi de contribuer à la maîtrise des pointes de consommation.

Votre commission soutient cette proposition, à même d'envoyer un meilleur signal-prix aux consommateurs.

(2) La mise en place d'une part fixe importante dans le TURPE

Dans son souci que les tarifs reflètent le coût réel de l'électricité, votre commission s'est également posé la question de mettre en place dans le TURPE une part fixe importante. Son objet serait de refléter le fait que les coûts de réseau sont essentiellement des coûts fixes : le réseau doit être dimensionné pour les périodes de pointe, même si elles ne correspondent qu'à quelques heures dans l'année.

Elle a cependant renoncé à une telle proposition pour plusieurs raisons. Tout d'abord, dans l'hypothèse où se généraliserait une différenciation des prix de l'électricité en fonction de l'heure et de la période de consommation, donner trop d'importance à la part fixe des coûts de réseau conduirait à étouffer cette variation de prix et donc à affaiblir le signal-prix pour le consommateur.

D'autre part, une part fixe trop importante conduirait à diminuer l'incitation aux investissements dans les mesures d'efficacité énergétique, en limitant la baisse de la facture d'électricité due à une baisse de la consommation.

Enfin, les pertes sur les réseaux, qui représentent 20 % des charges de RTE, sont directement liées à l'énergie consommée en aval.

(3) Un aménagement souhaitable du tarif pour le stockage de l'électricité

Votre commission s'est montrée soucieuse d'encourager le développement des solutions de stockage de l'électricité. Comme on l'a vu précédemment, le TURPE représente à lui seul 22 % des charges d'exploitation d'une STEP, contre 33 % pour les achats - dont l'électricité - et charges de personnel. Se pose donc la question de l'aménagement du TURPE pour ces installations.

Interrogée sur ce point par votre rapporteur, la DGEC a indiqué à votre commission qu'elle était consciente de ce problème mais a estimé que le futur marché de capacité pourrait y apporter une solution.

La mise en place d'une horo-saisonnalité dans le TURPE 4 pourrait apporter un autre élément de réponse, en étant favorable aux installations de stockage, qui consomment de l'électricité lors des heures de creux de consommation.

b) Vers un timbre d'injection modulable

La CRE envisage de faire évoluer la composante injection du TURPE, afin d'assurer une meilleure coordination entre les investissements dans les capacités de production et les investissements de réseau.

Faire varier cette composante en fonction de l'emplacement géographique du producteur permettrait de tenir compte des coûts de réseau associés à sa localisation.

Actuellement, la composante injection du TURPE est extrêmement basse - 19 c€ le MWh - et n'est pas différenciée géographiquement. Certes, les coûts de raccordement sont désormais à la charge des producteurs, mais ce n'est pas le cas des coûts de renforcement du réseau. Le signal-prix qui est envoyé est donc incomplet et n'envoie pratiquement aucune incitation aux producteurs dans le choix de la localisation de leur implantation.

La différenciation géographique du tarif d'injection permettrait d'apporter une solution à ce problème. La CRE imagine même que certaines zones, en situation de sous-production, puissent se voir appliquer un timbre d'injection négatif.

Cette proposition de la CRE a notamment été soutenue par l'ANODE devant votre commission, par la voix de son président M. Fabien Choné : « Nous sommes donc favorables à la proposition de la Commission de régulation de l'énergie, qui procède actuellement à une consultation sur le prochain tarif d'accès au réseau, de mettre en oeuvre un « timbre d'injection. [...] Les producteurs, par la localisation de leurs équipements et leur programme de fonctionnement, influent directement sur la structure des coûts du réseau, mais également sur l'importance des pertes. [...] S'il existait une tarification de l'accès au réseau pour les producteurs, on pourrait influer sur le plan global de production du parc français, et donc réduire les pertes dans notre pays ».

Votre commission ne peut qu'être favorable à une meilleure imputation des coûts réels générés, cette logique correspondant à son objet même.

Elle tient cependant à rappeler son attachement au principe de la « tarification timbre poste » pour le soutirage, c'est-à-dire que le tarif soit identique quelle que soit la distance parcourue par l'énergie électrique, et à la péréquation géographique, c'est-à-dire que ce tarif soit identique pour tous les consommateurs, quelle que soit leur localisation.

Elle souligne aussi la nécessité que le TURPE 4 prenne en compte d'une façon ou d'une autre l'apport bénéfique pour le réseau des installations de stockage de l'énergie.

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