III. LES DROITS DE L'HOMME EN EUROPE ET DANS LE MONDE

A. OBSERVATION DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES EN ARMÉNIE

La mission parlementaire d'observation des élections législatives en Arménie organisées le 6 mai dernier, a présenté ses conclusions devant l'Assemblée. La commission ad hoc a relevé que ce scrutin s'était déroulé dans une atmosphère relativement paisible, la campagne électorale étant jugée animée, concurrentielle et globalement pacifique, en dépit de quelques incidents. La couverture médiatique est considérée comme équitable. La mission a néanmoins relevé au cours de son observation quelques cas de détournements de ressources administratives en faveur du parti au pouvoir et fait état de pression sur des employés en vue de participer à des réunions publiques.

La commission ad hoc invite les autorités arméniennes à réviser les listes électorales, dont l'inexactitude pèse, selon elle, sur la confiance des électeurs. Contrairement aux différents indicateurs démographiques qui tendent à souligner une diminution de la population arménienne, le nombre de citoyens inscrits sur les listes a augmenté de 157 000 unités depuis 2008. La mission relève que le décompte des voix a été évalué de façon négative par les observateurs dans près d'un bureau sur cinq. Elle insiste, en outre, sur le fait que le traitement des plaintes électorales demeure insuffisant, un manque d'empressement à dénoncer les infractions étant également décelé.

M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UC) , qui a participé à la mission d'observation, a souhaité relever l'absence de recul de la commission dans ses conclusions, qu'il considère trop proches de celles de l'OSCE :

« Membre de la commission ad hoc chargée de l'observation des élections législatives en Arménie, j'ai pu relever le caractère pacifique du climat qui entourait ces élections législatives. Au terme d'une campagne relativement dynamique, ces élections n'ont pas donné lieu à de graves irrégularités, le nouveau code électoral semblant dans une large mesure appliqué.

Je ne vais pas rappeler le contexte pour exonérer l'Arménie des quelques défaillances qui ont pu être observées ici et là. Je tiens seulement à relever les nets progrès enregistrés dans ce domaine. Je m'interroge en fait surtout sur la relative sévérité du rapport présenté aujourd'hui.

A l'instar de nombre de mes collègues du Conseil de l'Europe, j'ai pu remarquer au cours de cette mission l'influence des équipes de l'OSCE sur celles du Conseil de l'Europe. Membre de la délégation française de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, j'ai pu y mesurer également le poids de l'influence américaine.

Je regrette en conséquence que le compte rendu présenté ce jour fasse siennes des assertions davantage dictées par la préservation des intérêts géostratégiques dans la région que par une réflexion sereine et apaisée sur les conditions d'exercice de la démocratie en Arménie et qui correspondent aux critères qui sont les nôtres au sein du Conseil de l'Europe.

À cet égard, je voudrais dire ma satisfaction des progrès accomplis en Arménie comme en Serbie. Car il nous appartient en qualité d'élus, de responsables politiques d'Assemblée parlementaire, d'apprécier de façon dynamique et non administrative ces progrès dans le cheminement démocratique de ces deux États. N'oublions pas qu'il a fallu des siècles à la Grande-Bretagne et 200 ans à la France pour parachever cette mutation, alors que l'Arménie et la Serbie étaient soumises au régime du parti unique et à la dictature soviétique il y a moins de trente ans et se débattent encore dans des problèmes de contestation de frontières.

Sans doute nos collègues ont-ils relevé ici la minceur des cloisons des isoloirs, et là des définitions incertaines des listes électorales, voire de propriété des médias... Il y a donc encore des progrès à faire, mais de quel État du Conseil de l'Europe ne le dirait-on pas ?

Je profite de mon intervention pour inviter notre Assemblée à veiller à mieux assurer l'indépendance du Conseil de l'Europe à l'égard des délégations de l'OSCE ou du Parlement européen, lors des prochaines missions d'observation. Je conçois que des impératifs pratiques nous conduisent à nous rapprocher des autres organisations internationales présentes sur place. Toutefois ils ne doivent pas déboucher sur la disparition de la singularité de notre démarche, généralement dépassionnée et soucieuse de faire prévaloir non pas les intérêts géostratégiques des uns ou des autres, mais la fidélité à notre référence primordiale aux droits de l'Homme et, en matière d'élections démocratiques, à la règle de scrutins libres, égaux et secrets, après des campagnes ouvertes et pluralistes.».

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