AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

En matière de sécurité publique, les responsabilités se veulent clairement établies : l'Etat en est le garant sur l'ensemble du territoire de la République. Le maire est chargé de la police municipale qui « a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques » 1 ( * ) .

Sur le terrain, cependant, les compétences apparaissent plus floues. Des dérives découlent d'un certain désengagement des forces régaliennes : leurs effectifs se sont affaiblis au cours des dernières années, leurs implantations territoriales ont diminué.

Les maires, confrontés aux légitimes préoccupations de leurs administrés, sont naturellement enclins, voire dans l'obligation, de pallier le retrait de l'Etat en étoffant leurs services de police. Tous statuts confondus (agents de police municipale, gardes champêtres, agents de surveillance de la voie publique), les polices des maires constituent aujourd'hui un effectif global de près de 25 000 agents soit environ 10 % des effectifs cumulés de ceux de l'Etat.

Au-delà du seul aspect quantitatif et budgétaire, la réalité conduit les agents territoriaux à assumer des missions auparavant assurées par la police et la gendarmerie nationales ou, tout simplement, à compléter les effectifs de celles-ci, à les suppléer.

Le paysage se révèle donc aujourd'hui confus, les rôles respectifs des uns et des autres brouillés. S'y ajoutent un certain nombre de questions statutaires concernant les personnels, des interrogations sur la coopération avec les forces régaliennes, des blocages quotidiens qui entravent l'action des agents, l'augmentation progressive des pouvoirs judiciaires des polices municipales.

L'ensemble de ces considérations conduit à s'interroger sur l'équilibre général des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

C'est pourquoi la commission des lois a missionné deux de ses membres pour établir un état des lieux des polices municipales, de leur cadre juridique et proposer, le cas échéant, des évolutions.

Vos rapporteurs ont voulu aborder cette mission avec pragmatisme.

Parce qu'on ne peut parler de la police municipale mais « des » polices municipales , chaque maire décidant du format et de la doctrine d'emploi du service qu'il a mis en place dans sa commune, ils ont interrogé l'ensemble des 3 935 collectivités qui s'en sont dotées. Les très nombreuses réponses -1 849- qui leur sont parvenues, ainsi que la qualité des observations qui les complétaient, ont contribué avec force à leurs travaux.

Que les maires et présidents d'intercommunalités qui ont accepté de contribuer à ces travaux trouvent ici l'expression de leur profonde gratitude, de même que l'ensemble des personnes qu'ils ont rencontrées (élus locaux, représentants de l'Etat, des institutions, des personnels, experts ...) au cours de leurs auditions au Sénat ou lors de leurs déplacements sur le terrain 2 ( * ) .

Voulant faire oeuvre utile, vos rapporteurs proposent des évolutions du cadre juridique des polices municipales et des mesures concrètes pour répondre aux blocages, aux freins qu'ils ont pu constater ou tout simplement pour permettre un fonctionnement et un emploi plus efficients de ces services.

Un quart de siècle après l'officialisation des polices municipales, il est temps de procéder aux ajustements nécessaires pour favoriser le maintien de la tranquillité publique sur le territoire national.

I. UNE POLICE DE TRANQUILLITÉ PUBLIQUE AUX MISSIONS DE PLUS EN PLUS LARGES

A. UNE POLICE AUX MISSIONS TRÈS DIVERSES

1. Des polices municipales

La loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales a consacré l'essor de ces dernières en étendant les missions et les compétences des agents. Elle a été complétée notamment par les lois du 15 novembre 2001 relative à la sécurité intérieure, du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure 3 ( * ) .

En dépit des quelques dispositions législatives qui définissent le cadre général des missions de toutes les polices municipales, il convient de souligner d'emblée la grande diversité des pratiques sur le terrain . Aux deux extrémités du spectre, on trouve ainsi :

- d'un côté la police municipale au format modeste, fonctionnant en régime hebdomadaire de jour avec un armement de 6 ème catégorie, exerçant les missions traditionnelles de prévention, de dissuasion, de dialogue et de médiation ;

- de l'autre la police dotée de nombreux agents, d'un système de vidéosurveillance et d'un centre de supervision urbain, organisée en brigades spécialisées et fonctionnant de nuit, disposant d'un armement de 4 ème catégorie et exerçant des missions axées sur les interventions, la répression (verbalisation), les flagrants délits avec mise à disposition des forces nationales.

Comme le relève le rapport de l'IGA/IGPN/IGGN 4 ( * ) , la physionomie de chaque police municipale dépend ainsi d'une série de décisions du maire portant pour l'essentiel sur les points suivants :

- la nature de l'armement : en particulier, le choix ou non de doter les policiers municipaux d'armes à feu de quatrième catégorie ;

- la présence d'un service nocturne ;

- l'existence de brigades spécialisées : brigade environnementale,cynophile, à moto, nautique, brigade équestre, etc. ;

- la politique immobilière (nature des hôtels de police, antennes dans les quartiers, accueil du public, cohabitation avec la police nationale ou la gendarmerie) ;

- la politique d'équipement (matériel de sécurité, automobiles, motos, matériel de type maintien de l'ordre, gilets pare-balles, etc.) ;

- l'existence d'un numéro d'urgence à la disposition des habitants ;

- l'organisation de patrouilles et de missions communes avec la police nationale ou la gendarmerie.

Source : Centre national de la fonction publique territoriale.


* 1 Cf. article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.

* 2 Cf. Annexe XXX récapitulant les auditions et déplacements.

* 3 Lois n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité intérieure, n°2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, n°2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

* 4 Rapport sur le rôle et le positionnement des polices municipales, décembre 2010.

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