2. Les gains espérés de cette nouvelle stratégie d'achat
a) Les économies de moyens et de dépenses

S'engager dans une politique de mutualisation des achats présente pour les SDIS un double avantage : consacrer moins de ressources humaines à une fonction support et parvenir à une moindre dépense.

La fonction « achat » n'est pas au coeur du métier des SDIS. Or, elle est chronophage , notamment lorsqu'il s'agit d'investissements lourds. Le suivi de l'évolution des règles relatives aux marchés publics, le montage des cahiers des charges, la définition des clauses administratives et techniques, la mise en concurrence, l'ouverture des plis et l'analyse des offres... autant de taches susceptibles de mobiliser un ou plusieurs emplois, à temps plein ou partiel. En outre, ces taches requièrent une expertise technique et, surtout, juridique forte. Les SDIS ne disposent pas tous nécessairement de telles ressources en interne et elles doivent alors faire l'objet d'un apprentissage qui lui aussi freine le processus d'investissement. Cette dernière observation vaut notamment dans le cas des « petits » SDIS, les SDIS de grande taille étant confrontés à cette difficulté seulement dans une moindre mesure.

Mutualiser l'achat signifie alléger cette charge de travail , en la répartissant sur plusieurs SDIS (cas d'un groupement d'achats) ou en la délégant (au moins en partie) à l'UGAP. Ce processus permet également d'exploiter davantage de ressources d'expertise et d'échanger les bonnes pratiques.

Au total, la mutualisation des achats permet de dégager des ressources humaines sur les missions opérationnelles tout en évoluant en principe dans une plus grande sécurité juridique .

Par ailleurs, une telle stratégie permet d'espérer des économies de dépense . Le regroupement permet en effet de peser d'un poids supérieur dans la négociation avec le fournisseur.

Dans son rapport précité sur les SDIS, la Cour des comptes rend compte d'économies « restées modestes » jusqu'à présent. A titre d'exemple, elle cite le cas du SDIS 32 (Gers) ayant procédé à des achats de véhicules via un groupement régional mais n'ayant obtenu qu'un gain limité à 3 % du coût initial. Néanmoins, ainsi que le précise la Cour, « la mutualisation des achats ne produira son plein effet qu' avec des volumes financiers suffisamment importants ». Pour jouer à plein, la mutualisation des achats nécessite de bénéficier d'un effet d'entraînement : plus nombreux seront les achats d'investissement mutualisés, plus importants seront les gains réalisés.

Pour avoir une idée plus précise de cette espérance de gains, il est intéressant d'analyser les taux de remise obtenus par l'UGAP. Lors de son audition par votre rapporteur spécial, Alain Borowski, président directeur général de l'UGAP, a ainsi indiqué que « sur les véhicules en général, les taux de remise accordés par les industriels sont particulièrement élevés et peuvent aller jusqu'à 50 %. C'est toutefois moins le cas pour les véhicules de pompiers » 83 ( * ) . Toujours selon Alain Borowski, « le taux de remise peut être de 20 % à 30 % pour le prix d'une grande échelle » .

Il convient de souligner que l'accompagnement des SDIS par l'UGAP procède d'une démarche d'optimisation des coûts d'achat sans perte de contrôle des SDIS sur les spécifications techniques des matériels . L'UGAP travaille en effet en étroite collaboration avec les SDIS sur la définition des cahiers des charges techniques. Cet aspect mérite d'être précisé car, ainsi qu'Alain Borowski l'a rappelé lors de son audition, « tous les services techniques ont tendance à exprimer des besoins très spécifiques ». Les SDIS ne font pas exception à la règle, mais grâce à son expertise et à son savoir-faire l'UGAP parvient néanmoins à satisfaire très largement leurs attentes en la matière. Dans le même esprit, l'UGAP travaille avec la DGSCGC à l'harmonisation des normes.

b) La logique « gagnant-gagnant » avec les fournisseurs

La mutualisation accrue des achats, notamment via l'UGAP, permet une redéfinition bienvenue des relations avec les fournisseurs .

Sur le marché de l'incendie et du secours, la position des fournisseurs est en effet particulière, souvent marquée par une faible concurrence mais aussi la difficulté de standardiser les produits . D'une part, les entreprises présentes sur ce marché jouissent d'un important pouvoir de négociation du fait de barrières à l'entrée (expertise technique requise, réseau limité des services acheteurs, poids des habitudes de travail entre les fournisseurs et les SDIS, capital confiance acquis au fil du temps par certaines marques...). Ce pouvoir de négociation peut avoir pour conséquence un prix essentiellement fixé par le vendeur, avec à la clef de fortes marges supportées par les SDIS. D'autre part, les fournisseurs sont confrontés à une multiplicité d'interlocuteurs ayant chacun des requêtes techniques particulières justifiées par la spécificité des terrains d'opération. Dès lors, face à ce qui pourrait presque s'apparenter à une course aux prototypes et aux options, il est difficile pour les entreprises de standardiser leurs produits, ce qui aurait pourtant pour conséquences positives des économies d'échelle et une baisse du prix de vente.

Dans ce contexte, la mutualisation des achats permet à la fois de rétablir une relation plus équilibrée entre l'acheteur et le vendeur et de donner l'opportunité au fournisseur de travailler sur des produits vendus en plus grand nombre et donc plus standardisés.

Ainsi qu'Alain Borowski l'a indiqué lors de son audition, « le fait de travailler avec l'UGAP apporte une visibilité aux fournisseurs sur leurs volumes dans le temps, tandis qu'on travaille à la simplification de la commande (...). Le partenariat permet d'organiser et de normaliser la commande publique des SDIS ».

Ce partenariat « gagnant-gagnant » issu des achats groupés via l'UGAP se traduit non seulement dans un prix revu à la baisse mais aussi par des délais inférieurs à ceux auxquels sont soumis les SDIS du fait des règles du code des marchés publics. Les délais sont en effet ramenés à ceux traditionnels du fournisseur, sans que les délais de la procédure de mise en concurrence s'y ajoutent.


* 83 Audition du 18 avril 2012.

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