AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Il y a tout juste un an, le 1 er octobre 2012, votre commission des lois présentait au Sénat, lors d'un débat en séance publique, les conclusions du rapport de son groupe de travail sur la réforme de la carte judiciaire.

Les échanges nombreux auxquels ce débat a donné lieu ont montré que le constat dressé par ce premier bilan d'ensemble de la réforme était largement partagé : la réforme, toujours reportée, était nécessaire, mais, mal conçue à l'origine, elle a été conduite à l'envers, puisqu'elle a précédé la réforme de la répartition des contentieux et de l'organisation judiciaire dont elle aurait dû, en principe, découler. Si elle a permis des améliorations dans la localisation et la mise à niveau des juridictions, elle a considérablement pesé sur les personnels judiciaires. Trop souvent mise à profit pour réaliser des économies budgétaires, elle a parfois éloigné la justice du justiciable, ou allongé les délais de procédure.

Loin de se limiter à cet examen rétrospectif sur « l'occasion manquée » par cette réforme, le débat ouvrait sur l'avenir. Nos collègues se sont interrogés, avec les rapporteurs du groupe de travail et la garde des sceaux, ministre de la justice, Mme Christiane Taubira, sur les voies que pourrait suivre une future réforme de l'organisation des juridictions afin de remédier aux problèmes soulevés et améliorer l'efficacité de la justice.

Aussi votre commission a-t-elle confié à M. Yves Détraigne, déjà rapporteur du groupe de travail sur la réforme de la carte judiciaire, et à Mme Virginie Klès le soin de poursuivre la réflexion ainsi engagée 1 ( * ) .

Inscrivant ses pas dans le prolongement de ceux du groupe de travail sur la réforme de la carte judiciaire, la présente mission d'information s'est penchée sur la question de la justice de première instance aujourd'hui éclatée, selon le montant, le niveau ou le type de contentieux, entre juridiction de proximité, tribunal d'instance, tribunal de grande instance, tribunal de commerce, conseil de prud'hommes et l'ensemble des juridictions spécialisées, du tribunal des affaires de sécurité sociale au tribunal paritaire des baux ruraux 2 ( * ) .

Vos rapporteurs ont souhaité saisir cette question sous l'angle de l'accessibilité de la justice pour le justiciable, à travers le prisme du concept de tribunal de première instance, conçu idéalement pour réunir en une même juridiction toutes celles que nous connaissons actuellement.

Étudiant ce dispositif, dont le rapport sur la réforme de la carte judiciaire s'était fait l'écho, ils ont cherché non seulement à en évaluer l'intérêt ou les limites, mais aussi à définir la méthode qui pourrait être suivie pour mener à bien une réforme de l'organisation judiciaire qui assure au citoyen un accès facilité à son juge et une justice plus efficace.

Parallèlement à la démarche engagée par le ministère de la justice 3 ( * ) , ils ont ainsi souhaité contribuer à l'expertise propre du Sénat, s'il devait être, à l'avenir, saisi par le Gouvernement d'une réforme de ce type.

Au fil de plus d'une trentaine d'auditions, la mission d'information a entendu plus de soixante-dix personnalités qualifiées ou acteurs judiciaires ainsi que les organisations représentatives des magistrats et des personnels de justice.

Vos rapporteurs sont allés à la rencontre de ces mêmes acteurs, sur le terrain, à l'occasion de quatre déplacements dans les ressorts des cours d'appel d'Amiens, de Bordeaux et de Rennes, ainsi qu'au sein du tribunal de grande instance de Bobigny.

Au terme de leurs travaux, vos rapporteurs s'accordent sur l'intérêt d'une simplification de l'organisation de la justice de première instance. Le tribunal de première instance est, à cet égard, une perspective séduisante, mais qui ne peut être envisagée qu'à long terme, compte tenu des conditions préalables nécessaires à sa réalisation. En revanche, d'ores et déjà, il est possible de s'engager sur cette voie, à travers, notamment, le guichet universel de greffe, en offrant ainsi rapidement au justiciable la plus grande part du bénéfice qu'il pourrait tirer de cette réforme.


* 1 Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur avec M. Yves Détraigne du groupe de travail sur la réforme de la carte judiciaire ayant démissionné de son mandat le 30 septembre 2012, n'a pu prendre part aux travaux de ce nouveau groupe de travail.

* 2 Sur l'organisation judiciaire française, cf. infra , le titre préliminaire.

* 3 La garde des sceaux, ministre de la justice, Mme Christiane Taubira a en effet constitué deux groupes de travail, dont elle a confié la présidence à M. Pierre Delmas Goyon, premier président de la cour d'appel d'Angers, et M. Didier Marshall, premier président de la cour d'appel de Montpellier, sur, respectivement, le juge XXI ème siècle et la juridiction du XXI ème siècle. Ceux-ci devraient présenter prochainement le résultat de leurs travaux.

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