DEUX OBJECTIFS À CONCILIER : PROMOUVOIR LE DIALOGUE SOCIAL ET GARANTIR LA CONTINUITÉ DU SERVICE PUBLIC DANS LES TRANSPORTS TERRESTRES

I. LA CONTINUITÉ DES TRANSPORTS PUBLICS TERRESTRES DE VOYAGEURS N'EST PAS TOUJOURS ASSURÉE

A. LES MULTIPLES FACETTES DU TRANSPORT DE VOYAGEURS EN FRANCE

1. Le transport ferroviaire : le monopole de la SNCF

L'article 18 de la loi Loti du 30 décembre 1982 1 ( * ) , devenu l'article L. 2141-1 du code des transports, confie à la SNCF le monopole de l'exploitation des services de transport ferroviaire de personnes sur le réseau ferré national. La seule exception à ce principe concerne les entreprises ferroviaires qui exploitent des lignes internationales et qui peuvent, à cette occasion, assurer des dessertes intérieures dès lors que « l'objet principal du service exploité par l'entreprise ferroviaire [est] le transport de voyageurs entre des gares situées dans des États membres de l'Union européenne » (article L. 2121-12 du code des transports).

Établissement public industriel et commercial (Epic), la SNCF est l'opérateur des lignes ferroviaires nationales, que ce soit dans le cadre de son autonomie de gestion (pour les TGV) ou d'une convention passée avec l'État (pour les trains d'équilibre du territoire). Par délégation des régions, elle est chargée d'assurer le transport ferroviaire régional (TER) et les services routiers de substitution. Ces collectivités territoriales sont en effet, depuis le 1 er janvier 2002 2 ( * ) , l'autorité organisatrice des transports collectifs d'intérêt régional (article L. 2121-3 du code des transports). Elles fixent, par convention avec la SNCF, les conditions de leur exploitation et de leur financement.

La libéralisation progressive, sous l'impulsion de la Commission européenne, du trafic ferroviaire de voyageurs dans l'Union européenne devrait aboutir, selon le calendrier du quatrième « paquet ferroviaire » européen présenté au début de l'année 2013, à l'ouverture à la concurrence des lignes intérieures à partir du 31 décembre 2019. La SNCF constitue donc, jusqu'à cette date, l'unique acteur du secteur en France à devoir faire application de la loi du 21 août 2007.

Les autorités organisatrices de transport

L'institution et l'organisation des services de transport public réguliers et à la demande sont confiées, dans les limites de leurs compétences, à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements en tant qu'autorités organisatrices, comme l'indique l'article L. 1221-1 du code des transports.

La loi du 21 août 2007 définissait d'ailleurs ainsi les autorités organisatrices de transport (AOT) en son article 1 er : « toute collectivité publique, groupement de collectivités publiques ou établissement public compétent, directement ou par délégation, pour l'institution et l'organisation d'un service public de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique » .

Dans les faits, le statut d'AOT recouvre des réalités très diverses, de l'État aux communes en passant par les régions et les départements.

2. Le transport urbain et interurbain : plusieurs autorités organisatrices compétentes
a) Les autorités organisatrices du transport urbain

L'article L. 1231-1 du code des transports dispose que les communes, leurs groupements et les syndicats mixtes de transports sont les autorités compétentes pour organiser les services réguliers de transport public urbain de personnes, et qu'ils peuvent, en outre, organiser des services de transports à la demande.

Ces autorités sont couramment appelées autorités organisatrices de transport urbain (AOTU)

Ces structures prennent différentes formes : communautés urbaines, communautés d'agglomération, communautés de communes et syndicats de communes, ou encore syndicats mixtes 3 ( * ) .

En 2012, sur 286 AOTU recensées par le groupement des autorités responsables de transport (Gart), 63,6% sont des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Les communautés d'agglomération représentent près de la moitié des AOTU, comme le montre le graphique ci-après.

Forme juridique des AOTU en 2012

Source : Gart

Les transports publics urbains de personnes sont effectués dans les périmètres de transports urbains (PTU) qui correspondent au ressort territorial de la commune ou du groupement de communes.

Dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants, les AOTU doivent élaborer des plans de déplacements urbains (PDU) qui définissent les principes de l'organisation des transports de personnes et de marchandises, de la circulation et du stationnement sur le territoire, en vue de diminuer le trafic automobile. La priorité est accordée aux transports en commun et au développement de l'intermodalité.

Ces transports urbains désignent les transports routiers, fluviaux et maritimes et, sur les réseaux relevant de la compétence des AOTU, les transports ferroviaires et guidés.

b) Le département et le transport interurbain

Le département est l'autorité organisatrice des services routiers de transports publics interurbains réalisés principalement à l'extérieur des PTU.

La compétence départementale s'étend aux services réguliers et aux services à la demande , à l'exception des liaisons d'intérêt régional ou national, mais aussi aux services scolaires . Ces services sont inscrits au plan départemental de transport.

Le département est également compétent pour des projets d'infrastructures de type ferré ou guidé, à la condition qu'ils ne dépassent pas les limites territoriales du département et qu'ils utilisent des voies autres que celles du réseau ferré national.

En définitive, les limites institutionnelles de l'intervention du département se situent entre celles de deux autres types de collectivités :

- les régions, qui décident de l'intérêt régional ou non des lignes ;

- les autorités urbaines, qui fixent leur périmètre d'intervention sous l'autorité du préfet, après avis du ou des conseils généraux concernés, en vertu de l'article L. 1231-5 du code des transports.

3. Le cas spécifique de l'Ile-de-France : le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif), autorité organisatrice unique de tous les transports à l'échelle régionale

Du fait des caractéristiques propres à la région Ile-de-France en matière d'organisation administrative, de population, d'activité économique et de réseaux de transports, l'organisation du transport public de personnes y est confiée par la loi (article L. 1241-1 et suivants du code des transports) à un établissement public unique : le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif).

Regroupant la région, la ville de Paris et les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, de l'Essonne, des Yvelines, du Val-d'Oise et de Seine-et-Marne, le Stif est l'AOT de tous les modes de transports urbains et exerce les compétences habituellement dévolues dans ce domaine aux communes ou à leurs groupements, aux départements et à la région. Il organise, coordonne et finance les transports publics franciliens qui sont assurés par des opérateurs : la RATP, la SNCF et, pour les lignes de bus en dehors de Paris et des communes limitrophes, le réseau Optile.

À titre principal, le Stif a pour mission de :

- définir les conditions générales d'exploitation des lignes de transport, créer les titres de transport et fixer les tarifs ;

- déterminer l'offre de transport et le niveau de qualité des services, dans le cadre de contrats signés avec les transporteurs ;

- coordonner la modernisation du système de transports publics francilien et veiller à la cohérence des programmes d'investissement ;

- assurer la maîtrise d'ouvrage des projets d'infrastructures nouvelles et de modernisation du réseau existant, conjointement, le cas échéant, avec la RATP et Réseau ferré de France (RFF) ;

- et organiser les transports scolaires en Ile-de-France, les transports à la demande ainsi que le transport public fluvial.

Composé auparavant à parité de représentants de l'État et des collectivités territoriales qui en étaient membres, le conseil d'administration du Stif ne compte plus, depuis le 1 er juillet 2005 4 ( * ) , que des représentants des collectivités franciliennes. Dans le cadre de la décentralisation, l'État s'est retiré de sa gestion et de sa gouvernance. Il est donc désormais présidé par le président du conseil régional.

4. Des entreprises de transport de tailles très différentes : des entreprises familiales aux groupes internationaux

A la pluralité des AOT répond une forte hétérogénéité des entreprises de transport.

Cette notion regroupe aussi bien des PME que de grands établissements publics à caractère industriel et commercial (Epic) comme la SNCF et la RATP qui comptent environ, respectivement, 145 000 et 45 000 agents.

L'UTP : un rôle particulier au sein du transport urbain

L'UTP, qui compte 150 adhérents issus du transport urbain, est l'unique organisation patronale du secteur des transports urbains de voyageurs. La totalité des entreprises desservant les grandes agglomérations (plus de 250 000 habitants, ce qui représente 25 entreprises en 2013) et celles de taille moyenne (entre 100 000 et 250 000 habitants, soit 42 entreprises en 2013) sont adhérentes à l'UTP. C'est également le cas de la grande majorité des entreprises desservant des agglomérations de moins de 100 000 habitants.

Les effectifs des entreprises adhérentes de l'UTP représentent près de 95 % des salariés de la profession.

Un certain nombre de très petits réseaux de transport public non urbains sont également membres de l'UTP.

Dans le transport urbain, environ 70 % des entreprises sont de statut privé, 15 % sont des sociétés d'économies mixtes et 15 % sont soit des établissements publics industriels et commerciaux, soit des régies. Dans tous les cas, ces exploitants sont dotés de la personnalité juridique. Parmi les sociétés privées, certaines sont détenues majoritairement par des capitaux publics (la Caisse des dépôts et consignations pour Transdev, ou la SNCF pour Keolis), tandis que les petites structures sont souvent des entreprises familiales.

L'exemple du transport urbain de surface en Ile-de-France

Le transport urbain de surface en Ile-de-France est assuré par la RATP et par les entreprises adhérentes à l'association Optile.

La RATP est chargée de l'exploitation du réseau de surface de Paris et de sa proche banlieue, à travers sept sous-réseaux : les lignes de tramways ; les lignes de bus en site propre ; les lignes de bus Mobilien (Paris et Banlieue) ; diverses autres lignes de bus et les lignes de nuit (Noctilien).

Au total, la RATP exploite 353 lignes de bus (dont 31 de nuit), fortes de 4 300 véhicules, grâce à 13 000 conducteurs, assurant plus d'un milliard de voyages par an, et trois lignes de tramways, garantissant 661 000 voyages par jour.

Quant à l'association Optile (Organisation professionnelle des transports d'Ile-de-France), elle regroupe environ une centaine d'entreprises de taille très diverse (PME ou grands groupes comme Keolis ou Veolia), en charge de desservir 1 100 des 1 300 communes d'Ile-de-France, soit plus de 5 millions de Franciliens en particulier dans la grande couronne.

Ce sont ainsi 1 154 lignes régulières qui sont exploitées par les entreprises adhérentes à Optile, qui disposent de plus de 4 500 véhicules effectuant 330 millions de voyages par an.

À l'exception des réseaux de Versailles et de Creil, les réseaux franciliens sont en règle générale interurbains et sont donc adhérents à la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV).


* 1 Loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs.

* 2 En application de l'article 124 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

* 3 Les syndicats mixtes issus de la loi SRU exercent trois compétences obligatoires: la coordination des services organisés par les différentes AOT qui les composent, la mise en place d'un système d'information à l'intention des usagers, la recherche d'une tarification coordonnée et de titres de transport uniques et unifiés.

* 4 En application de l'article 38 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

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