ATELIER 3 - AUTONOMIE LOCALE, QUELS MOYENS POUR L'OUTRE-MER ? - Sous la présidence de Valentin Josse

Valentin Josse, Conseiller général de la Vendée - Autonomie locale, quels moyens pour l'outre-mer ?

Nous avons défini ce matin, non sans difficulté, la notion juridique, administrative et politique de l'autonomie locale dans ses déclinaisons continentales, européennes, insulaires et même départementales.

D'un point de vue pratique, j'observe un double mécanisme de décentralisation et de concentration qui éloigne et restreint les relations entre l'État et les collectivités. La décentralisation s'exécute par de nouvelles compétences, charges et matières sans les transferts de moyens y correspondant. Cela peut atteindre l'équilibre financier des collectivités en question.

Nous avons également débattu de la clause de compétence générale. Du point de vue des moyens, il est à noter que la suppression de la clause générale de compétence conduirait à la fin des financements croisés, essentiels au portage des projets des collectivités.

Nos intervenants vont développer, dans le cadre de cet atelier, la question des intérêts financiers sous ses différents aspects.

Antoine Delblond, Professeur de droit public à l'Université de Nantes - Autonomie dans la propriété des personnes publiques outre-mer

Par finalité, l'autonomie locale vise une administration proche de l'usager et mieux adaptée pour régler des affaires d'intérêt local. Une collectivité territoriale autonome conforte sa légitimité lorsqu'elle s'avère plus efficace que l'État dans l'administration du territoire et des hommes. Tel serait le cas de la gestion locale autonome de la propriété des personnes publiques.

S'il est un domaine où toutes les administrations doivent fortement s'impliquer aujourd'hui, c'est la préservation de l'environnement et de la ressource naturelle. En particulier la protection de l'eau comme source de vie, élément indispensable de notre environnement quotidien, lieu d'activités professionnelles, etc.

À plus forte raison, dans l'environnement insulaire des collectivités d'outre-mer, la gestion de l'eau est une question cruciale, à laquelle les collectivités ne peuvent pas rester indifférentes. L'autonomie locale dans la propriété des personnes publiques pourrait conduire à une gestion rationnelle et avisée de l'eau dans la perspective d'un développement durable.

À cet égard, le droit positif opère de nombreux transferts étatiques, qui donnent à ces collectivités autant de compétences non négligeables en la matière. Reste à mettre en place les moyens d'une véritable politique de développement local.

I. - Administration territoriale autonome de la ressource en eau

Avec la décentralisation, appuyée par le nouveau code de la propriété des personnes publiques, l'administration des eaux domaniales passe progressivement de l'État vers les collectivités territoriales

Dans l'administration de l'eau domaniale, l'État choisit une première forme de décentralisation, par des établissements publics. Les Voies navigables de France administrent le domaine constitué par les voies navigables (8 500 kilomètres). Les agences financières de bassins, créées par la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution, sont requalifiées ultérieurement en agences de l'eau. Elles réalisent des opérations d'intérêt commun dans les bassins : équilibre des ressources, qualité des eaux, protection contre les inondations.

Ensuite, l'État partage avec les collectivités territoriales la gestion des cours d'eau, domaniaux ou non domaniaux, qui demeurent propriété étatique. Avec l'accord du préfet, ces collectivités interviennent de façon subsidiaire sur le domaine : entretien des cours d'eau, aménagement et exploitation de barrages-réservoirs, exploitation de canaux et digues de protection contre les crues.

La décentralisation fait des collectivités des propriétaires du domaine public fluvial. Elles sont donc amenées à administrer de plus en plus les eaux domaniales. Avec toutefois une adaptation dans les collectivités d'outre-mer.

La loi du 22 juillet 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État autorise les régions intéressées à administrer le réseau fluvial de l'État ainsi que les ports situés sur ces voies. Ce fut le cas des régions Bretagne, Pays de la Loire et Picardie, à des fins essentiellement touristiques.

L'acte II de la décentralisation accentue le transfert du domaine public fluvial de l'État vers les collectivités territoriales ou leurs groupements. C'est le cas avec la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, mais également la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Viennent ensuite le décret du 16 août 2005 relatif à la constitution et à la gestion du domaine public fluvial de l'État et des collectivités, et la circulaire du 24 avril 2006 relative à la mise en oeuvre du transfert du domaine public fluvial de l'État vers les collectivités territoriales et leurs groupements.

Sur ce fondement légal et réglementaire, les collectivités peuvent constituer leur domaine par classement ou par transfert de l'État.

Outre-mer, la législation comporte des adaptations puisque toutes les eaux stagnantes ou courantes appartiennent à l'État, à l'exception des eaux pluviales. De même, par dérogation aux dispositions du code civil, les eaux souterraines lui appartiennent également. Pour administrer cette ressource rare, la loi sur l'eau du 3 janvier 1964 institue des comités de bassins. La décentralisation permet d'aller plus loin. La loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer institue un office de l'eau, établissement public local placé sous la tutelle du conseil général.

II. - Développement territorial autonome de la ressource en eau

Le développement d'une propriété publique territoriale permet d'envisager un projet de développement local autour de la ressource en eau. À cet égard, les collectivités subissent des obligations, pour insérer la gestion de l'eau dans un véritable projet environnemental.

En tant que propriétaire des eaux domaniales, les collectivités territoriales disposent de prérogatives, mais sont également confrontées à de nouvelles contraintes.

En vertu du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), les collectivités propriétaires du domaine public fluvial ont la propriété du lit et le droit d'usage des eaux. Elles utilisent des prérogatives diverses. Notamment les autorisations liées aux travaux exécutés sur ce domaine, ainsi que les prises d'eau (L. 2124-8 CGPPP). En contrepartie, elles doivent organiser les services nécessaires pour administrer cette ressource. Elles ont une obligation d'entretien (L. 2124-11 CGPPP), ainsi que la responsabilité des mesures de police sur leur propriété (article L. 2124-6 CGPPP).

Les impératifs environnementaux imposent un véritable projet de développement de la ressource en eau par la propriété des personnes publiques.

La diversité des acteurs et des instruments juridiques nécessitent une planification. C'est le principe évoqué à l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Une gestion équilibrée et durable de l'eau doit « permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population ».

Les collectivités territoriales devront pour cela mettre en place des dispositifs adaptés et des outils opérationnels. Depuis la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, elles disposent du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE). Ce document est obligatoire.

La ville de Nantes est au centre d'un réseau fluvial important. La Loire, l'Erdre et la Sèvre appartiennent à l'État. Elles contribuent à la « trame bleue », avec d'autres dépendances du domaine fluvial, qui appartient aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Sur les eaux domaniales et non domaniales, la communauté urbaine de Nantes intervient sur tout son territoire, pour l'aménagement des berges comme pour la restauration des cours d'eau. Une structure ad hoc est mise en place : la direction du « Cycle de l'eau ». Des bassins de rétention sont installés en zones urbaines pour stocker le surplus en cas de forte intempérie (exemple : Bottière Chenaie). Ces quelques réalisations traduisent une prise de conscience qui valide les transferts étatiques.

Les collectivités d'outre-mer ont les moyens d'impulser une politique territoriale responsable de l'eau. Avec la loi du 27 juillet 2011, elles peuvent demander des habilitations pour créer les normes nécessaires à une administration locale adaptée. Le régime actuel de domanialité exclusivement étatique est un élément favorable à une telle demande.

Joël Boudine, Maître de conférences en droit public à l'Université des Antilles et de la Guyane - Autonomie financière des collectivités territoriales outre-mer

Très simplement, l'autonomie financière se résume en la capacité pour les autorités financières locales à déterminer librement leur niveau de ressources et de dépenses. Certains estiment qu'elle va de pair avec l'autonomie de gestion qui correspond aux marges de manoeuvre dont disposent ces mêmes autorités pour définir les modalités d'exercice de leurs compétences 234 ( * ) . En réalité, l'autonomie financière serait une notion davantage attachée au budget, alors que l'autonomie de gestion va plus loin en mesurant la capacité décisionnelle des élus locaux, en termes de trésorerie, de patrimoine, de participation au capital de sociétés, de fixation de taux d'imposition, de tarif des services publics... Cependant, un troisième aspect, fondé essentiellement sur l'élément fiscal, semble aujourd'hui s'affirmer. L'autonomie fiscale est en quelque sorte une composante de l'autonomie financière en ce sens qu'elle marque le pouvoir régalien de lever l'impôt et d'en fixer le produit. Elle n'a certes pas de valeur constitutionnelle, mais elle conditionne largement, voire prioritairement, les questions liées à l'autonomie financière de nos jours.

En effet, lors de la réforme constitutionnelle de 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République 235 ( * ) , le constituant n'a pas cherché à définir la notion, mais à dégager un principe général attribuant à la fiscalité ou, plus précisément, aux ressources propres de chaque catégorie de collectivités, une place déterminante 236 ( * ) par rapport à l'ensemble de leurs ressources.

Ce ratio d'autonomie financière est également étendu aux départements et régions d'outre-mer relevant de l'article 73 de la constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion), c'est-à-dire aux collectivités dont les lois et règlements s'appliquent de plein droit mais qui peuvent être adaptés au regard de leurs caractéristiques et contraintes particulières. Néanmoins, il faut reconnaître que si le volet fiscal s'avère indispensable, il ne peut être considéré comme étant suffisant pour appréhender les contours de l'autonomie financière dans ces collectivités quelque peu atypiques 237 ( * ) . Autrement dit, le facteur dépense mérite une considération particulière, dans la mesure où il génère parfois des masses budgétaires assez impressionnantes compte tenu de l'environnement institutionnel, géographique, économique et social de ces collectivités.

En revanche, dans les collectivités régies par l'article 74 de la Constitution (la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna) ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie qui, elle, relève du titre XIII, même si on y retrouve certains particularismes (notamment au niveau économique et social), le système institutionnel commande une interprétation différente de l'autonomie financière, dans la mesure où ces collectivités bénéficient d'un large pouvoir normatif au niveau fiscal. En effet, elles disposent de leur propre législation ou réglementation et par conséquent de leur propre code fiscal. Cependant, il faut observer que l'autonomie fiscale profite essentiellement à la collectivité majeure, les autres, à savoir les provinces et communes, ne bénéficient que d'une compétence limitée en la matière, du fait que leurs ressources dépendent en grande partie des reversements effectués par l'autorité territoriale.

Il résulte de tout ce qui précède une vision binaire de l'autonomie financière outre-mer, de sorte que pour les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, on insistera à la fois sur le volet fiscal et le volet dépense alors que, pour celles régies par l'article 74 et le titre XIII de la Constitution, l'accent sera mis principalement sur leurs ressources, c'est-à-dire sur la marge de manoeuvre fiscale des autorités locales.

I. - Les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution

Dans ces collectivités, on note la présence d'une fiscalité spécifique qui s'analyse plutôt comme une compensation de la moins-value résultant de la fiscalité de droit commun. Certes, on ne saurait contester son apport budgétaire, mais il est permis de s'interroger sur l'adéquation qui en résulte entre le volume des ressources propres et l'ampleur des dépenses auxquelles sont confrontées ces collectivités. Nous écarterons, naturellement, la collectivité de Mayotte de nos propos, compte tenu de l'absence d'éléments statistiques liée à sa récente transformation en département d'outre-mer 238 ( * ) .

A. Une fiscalité indirecte spécifique qui compense substantiellement les insuffisances de la fiscalité directe locale.

Dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, il est assez frappant de constater que les bases d'impositions relatives à la fiscalité directe locale, à savoir celle de droit commun, demeurent beaucoup plus faibles qu'en France hexagonale, une insuffisance allant du tiers à plus de la moitié selon les impôts locaux pris comme référence. Ainsi, dans le cas des communes et de leurs groupements, les bases en matière de taxe d'habitation pour l'année 2012 se chiffraient à 1 264 €/habitant en France hexagonale contre 636 €/habitant en outre-mer (soit une moins-value de 50 %). La différence est légèrement moins marquée pour la taxe foncière sur les propriétés bâties qui représentait à la même période un montant de 1 178 €/h dans l'hexagone contre 701 €/h en outre-mer (près de 40 % d'écart). Seule la cotisation foncière des entreprises donne un résultat à peu près similaire au montant perçu par habitant en France hexagonale : 398 € contre 312 € 239 ( * ) . Comment expliquer ce phénomène ? Par les allègements d'impôts non compensés, l'évaluation effectuée depuis 1975 et qui ne tient pas compte de l'évolution des logements malgré les successives revalorisations annuelles intervenues après 1980. Sans doute la révision des valeurs locatives des impôts fonciers, amorcée déjà en matière de cotisation foncière des entreprises, devrait corriger certaines tendances.

La faiblesse des bases d'imposition incite parfois les autorités locales à augmenter de façon considérable leurs taux d'imposition, à l'image des communes et surtout des départements de la Guadeloupe et de la Guyane qui sont, depuis quelques années, placés en tête du classement des départements surfiscalisés de France.

À titre d'exemple, le taux moyen d'imposition des communes d'outre-mer pour l'année 2012 en matière de taxe d'habitation était de 27,33 % contre 23,78 % en France Hexagonale et pour le foncier bâti de 26,92 % contre 19,92 % 240 ( * ) . S'agissant des départements, précisons que celui de la Guyane se trouve en première position sur 99 départements pour la taxe foncière sur les propriétés bâties en 2013, soit 32,92 % devant le Gers (32,86 %), l'Aisne (31,72 %), l'Aude (30,69 %), le Tarn-et-Garonne (28,93 %), le Tarn (28,20 %), l'Orne (27,07 %), la Meuse (25,72 %), la Somme (25,54 %), la Seine-Maritime (25,36 %) et la Guadeloupe (25,27 %) 241 ( * ) . Comme nous le verrons, la faiblesse des bases d'imposition n'est pas la seule à expliquer ce phénomène de hausse, le volet dépense favorise également de tels dérapages. Cependant, ces derniers méritent d'être relativisés si l'on se réfère aux taux d'imposition votés en matière de foncier bâti par les départements de la Martinique et de La Réunion, soit respectivement de 19,49 % et 12,94 % 242 ( * ) .

On écartera nécessairement de nos propos les collectivités régionales du fait que la plupart des impôts directs locaux ont été supprimés lors de la réforme de la taxe professionnelle.

En revanche, s'agissant des impôts spécifiques, les trois catégories de collectivités sont concernées et leur produit paraît compenser parfois assez confortablement la moins-value fiscale observée en droit commun. Parmi ces impôts, on note le reversement par la région aux communes d'une part importante de l'octroi de mer et, exceptionnellement, au département de la Guyane. Mis à part ce dernier cas, généralement les départements ne sont bénéficiaires que de la taxe sur les tabacs et d'une part de la taxe sur les carburants. Enfin, ce sont les régions qui profitent largement de ces impôts en percevant une partie de l'octroi de mer, la taxe sur le carburant, la taxe sur le rhum et la taxe d'embarquement. Tout porte à croire que le conseil régional serait devenu, depuis le transfert de ces impôts en 1984, l'échelon privilégié financièrement et sans doute la collectivité la mieux placée pour assumer pleinement ses responsabilités 243 ( * ) . C'est ainsi que le montant total par habitant des impôts et taxes dépasse largement celui des régions hexagonales, soit 375 €/habitant contre 180 €/h pour l'année 2013 244 ( * ) .

Parmi ces différents impôts, c'est l'octroi de mer qui occupe incontestablement la première place. Ainsi, la part de l'octroi de mer dans l'ensemble des ressources fiscales des communes se situe autour de la moitié, soit 41 % pour la Guadeloupe, 44 % pour la Guyane, 50 % pour la Martinique et 39 % pour La Réunion 245 ( * ) . Pour le département de la Guyane qui est le seul à percevoir une quote-part, le pourcentage est de 12 % et pour les régions la situation est presque similaire à celle des communes, soit 31 % pour la Guadeloupe, 41 % pour la Martinique et 43 % pour la Guyane et La Réunion. On peut donc considérer sans entrer dans des calculs précis que l'insuffisance de la fiscalité directe est compensée pour les communes et assez largement pour les régions. Quant aux départements, la compensation peut être considérée comme étant insuffisante du fait des montants limités qui leurs sont attribués au titre des impôts spécifiques, alors que parallèlement ils doivent faire face à des dépenses sociales incompressibles, voire inflationnistes.

B. Une interprétation de l'autonomie qui ne saurait faire abstraction des dépenses supplémentaires liées aux particularismes locaux

Il convient tout d'abord de préciser que le budget des collectivités territoriales, compte tenu du contexte économique et social des DROM, embrasse des sommes considérables. C'est ainsi que les dépenses départementales d'outre-mer sont, à population équivalente, une fois et demie supérieures à celles des départements de l'hexagone, que les dépenses des régions représentent plus de deux fois celles des autres régions de France.

En clair, les charges exceptionnelles consistent pour ces collectivités, en fonctionnement, à recruter un nombre assez élevé d'agents, à augmenter sans cesse les dépenses d'aide sociale et de formation professionnelle et, en investissement, à faire un effort important en raison des coûts plus élevés qu'en France hexagonale.

S'agissant des communes et groupements de communes, c'est le poste dépenses de personnel qui impressionne par le pourcentage qu'il représente au sein des budgets, soit près de la moitié des dépenses de la section de fonctionnement. Par ailleurs, il constitue l'équivalent d'une fois et demie celui des communes et groupements de l'hexagone : 806 €/h contre 598 €/h 246 ( * ) . Deux raisons majeures peuvent expliquer ce phénomène : une réponse sans doute nécessaire à la situation de l'emploi dans l'outre-mer où parfois les collectivités territoriales sont considérées comme les premiers employeurs et une part de clientélisme politique. Au final, les dépenses de fonctionnement en moyenne sont plus élevées dans ces collectivités, avec un montant de 1 489 €/h contre 1 235 €/h pour celles de l'hexagone 247 ( * ) .

Pour les départements, la situation est sensiblement la même en charge de personnel par habitant, soit 307 € pour l'outre-mer contre 179 € dans l'hexagone selon les budgets primitifs 2013 248 ( * ) , mais plus significative pour les dépenses à caractère social 1 056 €/h contre 541 €/h 249 ( * ) ! Si, en réaction, les dépenses de fonctionnement par habitant sont relativement supérieures à celles de France hexagonale (1 434 € contre 865 €) 250 ( * ) , celles d'investissement restent légèrement inférieures, ce qui montre une certaine difficulté à maintenir un niveau acceptable de leurs interventions, eu égard à l'ampleur du budget de fonctionnement. Rappelons que la section d'investissement des conseils généraux d'outre-mer se situe autour de 15 % contre 25 % en moyenne dans l'hexagone.

Pour les régions, les dépenses réelles par habitant représentent le double de celles de leurs homologues de l'hexagone (961 € contre 427 €). L'écart est encore plus significatif pour les charges de personnel (121 €/h contre 45 €/h) et presque autant pour les dépenses d'enseignement (150 €/h contre 96 €/h) et de formation professionnelle (135 € /h contre 85 €/h) 251 ( * ) . Par rapport aux autres catégories de collectivités territoriales, les régions d'outre-mer sont les seules à maintenir le cap en matière d'investissement, ce qui correspond tout à fait à leur mission : 279 €/h contre 43 €/habitant en France hexagonale 252 ( * ) .

De tous ces éléments, on observe dans les DROM une nette importance en volume des dépenses d'éducation et d'interventions sociales quelle que soit la collectivité de référence, situation qui se justifie par un contexte économique et social fragile nécessitant la prise en charge de certaines catégories vulnérables de la population (les personnes âgées, la petite enfance et les jeunes sans emplois). Du coup, il en ressort une incapacité structurelle, notamment pour les communes et départements, à dégager des excédents significatifs de fonctionnement pour financer leurs projets d'investissements. Cela amène parfois les responsables locaux à présenter des comptes peu sincères afin d'éviter des déséquilibres budgétaires et par voie de conséquence le contrôle des chambres régionales des comptes 253 ( * ) .

II. - Les collectivités régies par l'article 74 et le titre XIII de la Constitution

Les règles de droit commun ne sont applicables à ces collectivités que sur mention expresse du législateur, système dit de la spécialité législative. Elles sont donc dotées d'un statut qui leur est propre et qui leur permet de fixer leurs propres règles fiscales et d'en percevoir le produit. Dans ces conditions, il devient difficile d'appliquer les ratios de France hexagonale tant en ce qui concerne la collectivité majeure principale bénéficiaire que pour les autres collectivités du territoire. On écartera les terres australes et antarctiques françaises (TAAF) 254 ( * ) qui, certes, bénéficient d'une autonomie fiscale, mais dont les recettes fiscales ne constituent que 2 % du budget.

A. Une large autonomie fiscale de la collectivité territoriale majeure

Que recouvre la notion d'autonomie fiscale pour ces collectivités ? Il s'agit d'un pouvoir de création d'impôt, c'est-à-dire de détermination du champ d'application, de la base d'imposition, du taux ainsi que des modalités de recouvrement et de contrôle. Cela revient à dire que l'État n'a aucune compétence fiscale dans ces territoires, sauf à lever certaines taxes découlant des activités qu'il continue d'exercer (la taxe de sécurité et de police aéroportuaire 255 ( * ) , la contribution de sécurité immobilière 256 ( * ) et en vertu des dispositions de la loi organique de 2007 257 ( * ) , la perception des impôts sur le revenu des personnes physiques et morales domiciliées depuis moins de cinq ans à Saint-Martin (ainsi que la CSG et la CRDS).

Dans ces collectivités, l'État verse également des dotations, mais elles restent insignifiantes en pourcentage par rapport aux produits fiscaux 258 ( * ) . En effet, la fiscalité représente en moyenne 80 % des ressources totales de fonctionnement, ce qui est manifestement plus élevé que les taux hexagonaux prévus pour les communes, départements et régions, soit respectivement de 50 %, 66 % et 54 % en 2011 259 ( * ) .

En Nouvelle-Calédonie, la part de la fiscalité de la collectivité territoriale représentait autour de 90 % du total des recettes de la collectivité en 2011 avec des prélèvements tels que l'impôt sur les revenus des personnes physiques, l'impôt sur les sociétés et les activités métallurgiques ou minières, la taxe de solidarité sur les services, la taxe générale à l'importation, les droits d'enregistrement, la contribution des patentes et la contribution foncière.

À noter que cette collectivité, à compter du 1 er juillet 2014, autorisera la perception d'une nouvelle taxe de type TVA du nom de taxe générale sur les activités et sera la seconde collectivité pourvue de l'autonomie fiscale à instituer une telle fiscalité. En revanche, cette collectivité est la seule à disposer d'un pouvoir législatif en matière fiscale dénommé « lois du pays ». Elles ont une valeur juridique équivalente à celles régies par l'article 34 de la Constitution et font l'objet d'un contrôle de la part du Conseil constitutionnel. Le pouvoir législatif du congrès du territoire est toutefois limité par les normes fiscales de nature constitutionnelles et organiques 260 ( * ) , les normes internationales (traités et conventions ratifiés par la France et applicables en Nouvelle-Calédonie) et le respect des grands principes généraux du droit (principes d'égalité, de non rétroactivité de la norme fiscale notamment).

En Polynésie française, la part des recettes fiscales au sein de l'ensemble des ressources du budget de la collectivité est sensiblement moins importante qu'en Nouvelle-Calédonie, soit près de 80 %. Mais la fiscalité indirecte représente plus de 70 % alors qu'en Nouvelle-Calédonie les produits des impôts directs et impôts indirects s'équilibrent. Parmi les principaux impôts, on note la taxe sur la valeur ajoutée, seule collectivité à l'avoir adoptée au prix d'une longue expérimentation (cinq années), l'impôt sur les bénéfices des sociétés, la taxe à l'importation, la taxe sur les transactions, les droits d'enregistrement, la contribution des patentes et l'impôt foncier. Observons que l'État contribue au budget de la Polynésie depuis 2011 par le versement d'une dotation globale d'autonomie (90 millions d'euros) 261 ( * ) .

Dans cette collectivité, les délibérations prises dans le domaine législatif sont dénommées « lois du pays » sans avoir toutefois les mêmes caractéristiques que celles de la Nouvelle-Calédonie. En effet, les actes de l'assemblée délibérante intervenant dans le domaine législatif, comme celui de la fiscalité, sont soumis à un contrôle juridictionnel que la Constitution qualifie de « spécifique » et qui est exercé directement devant le Conseil d'État, sous certaines conditions qui distinguent ce contrôle de celui de la légalité de droit commun.

La collectivité de Saint-Martin présente la particularité d'exercer les compétences d'une commune, d'un département et d'une région. Les impôts et taxes constituent près de 70 % du total des ressources budgétaires parmi lesquels on retrouve les taxes foncières, droits de mutation, l'impôt sur le revenu, la taxe générale sur le chiffre d'affaires, la taxe sur les carburants et la contribution sur les patentes. Ici, le droit de l'Union européenne, notamment en matière fiscale et douanière, s'applique dans les mêmes conditions que dans les DROM, compte tenu du fait que ce territoire a opté pour le statut de région ultrapériphérique.

Saint-Barthélemy présente les mêmes caractéristiques que sa voisine dans la mesure où le budget du territoire regroupe celui d'une commune, d'un département et d'une région, mais là s'arrêtent les ressemblances puisque plus de 85 % des recettes budgétaires proviennent des impôts et taxes essentiellement indirects comme les droits de mutation, la taxe de séjour et la taxe sur le carburant. Ils représentent plus de 95 % des recettes fiscales du territoire, soit le plus fort taux enregistré dans les collectivités à autonomie fiscale 262 ( * ) .

La collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, moins peuplée que les deux nouvelles des Antilles françaises (6 000 habitants), comprend un budget en ressources composé de 75 % des impôts et taxes avec un relatif équilibre entre impôts directs et impôts indirects. Ces principales recettes sont l'impôt sur le revenu des personnes physiques et morales, les droits de douane à l'importation, la taxe spéciale à l'importation, la patente et l'impôt foncier. Il s'agit d'une collectivité qui bénéficie d'un statut réduit du fait que c'est l'État qui continue d'exercer certaines compétences 263 ( * ) .

Enfin, le territoire de Wallis-et-Futuna comprend un budget spécial par rapport aux autres dans la mesure où les impôts et taxes constituent seulement 39 % du total des ressources contre 18 % pour les dotations et 40 % pour les produits des services et du domaine 264 ( * ) . Le système fiscal territorial exclut toute forme d'imposition sur les revenus et le capital, ce qui signifie une forte présence des impôts indirects, soit 90 % des recettes fiscales du territoire. Les principaux prélèvements sont les droits de douane, la taxe intérieure sur les alcools et les tabacs, la taxe intérieure sur les hydrocarbures et la patente. Il faut noter que cette collectivité ne bénéficie que d'une compétence d'attribution limitée à certains secteurs de l'activité économique et sociale 265 ( * ) et en l'absence de révision de son statut depuis la réforme constitutionnelle de 2003 266 ( * ) , l'exécutif de la collectivité demeure toujours exercé par le préfet.

Malgré ces éléments réjouissants pour ces collectivités au niveau des recettes, il n'en demeure pas moins que leur situation financière reste fragile selon les observations fournies par les chambres territoriales des comptes. Celles dont la fiscalité repose essentiellement sur les impôts indirects, donc liés à la conjoncture, sont en ligne de mire (la Polynésie et Saint-Martin). Saint-Barthélemy est, semble-t-il, la seule collectivité à échapper à une telle dégradation 267 ( * ) .

B. Des collectivités infra-territoriales dotées d'une compétence fiscale limitée

L'autonomie financière des collectivités infra-territoriales est largement altérée par le fait que c'est le territoire qui reverse le produit des impôts qu'il perçoit, cela relativise la marge de manoeuvre fiscale de ces entités qui repose sur d'autres impôts peu significatifs au plan budgétaire.

C'est ainsi que le budget de la Nouvelle-Calédonie est constitué pour une large part de recettes qui doivent être reversées principalement aux provinces et aux communes, soit un peu plus de 72 % des recettes de fonctionnement distribuées en 2011 268 ( * ) , ce qui permet de relativiser le degré d'autonomie financière de la collectivité centrale. Les communes sont alimentées par deux fonds intercommunaux de péréquation affectés pour l'un en fonctionnement et pour l'autre en investissement 269 ( * ) . Pour les provinces, il est question de dotation de fonctionnement et d'équipement. Au plan fiscal, ces deux catégories de collectivités perçoivent des centimes additionnels sur certains impôts droits et taxes qui représentent à peu près 7 % des recettes fiscales du budget du territoire 270 ( * ) ainsi que certains prélèvements, dont la taxe provinciale sur les communications téléphoniques et la taxe communale sur l'électricité.

En Polynésie française, les communes sont elles aussi alimentées essentiellement par la fiscalité perçue au niveau du territoire grâce à un fonds intercommunal de péréquation et disposent, également, d'une fiscalité additionnelle assise sur des impôts territoriaux. Dans le premier cas, il s'agit d'un prélèvement sur les impôts, droits et taxes du budget général fixé par décret à 17 % depuis 2006 271 ( * ) et d'une contribution de l'État dont le montant est fixé par la loi de finances. Selon la Cour des comptes, ce fonds est en régression depuis quelques années compte tenu du fait qu'il dépend de prélèvements fortement liés à la conjoncture 272 ( * ) . Dans le second cas, il s'agit de centimes additionnels assis sur la contribution des licences, de l'impôt foncier sur les propriétés bâties et de la contribution des patentes, y compris la perception d'une taxe additionnelle sur l'électricité. Pourtant la loi statutaire du 23 février 2004 (article 53) avait prévu la possibilité de transférer des impôts aux communes, mais cela n'a pas été suivi d'effet.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, où il existe deux communes (Saint-Pierre et Miquelon-Langlade), la situation leur est plutôt favorable dans la mesure où elles disposent de leurs propres impôts. En effet, elles bénéficient de prélèvements comme les taxes foncières, le droit au bail, la taxe locale d'équipement pour la première et la taxe de résidence pour la seconde 273 ( * ) . Elles fixent elles-mêmes les taux d'imposition dans les limites fixées par le code local des impôts. Enfin, les communes perçoivent une partie de la taxe sur l'essence, de l'octroi de mer, des droits de navigation ainsi que des centimes additionnels aux produits de la patente et des licences de première et de seconde classe. Compte tenu de ces éléments, on peut considérer qu'elles disposent d'une marge de manoeuvre fiscale et par conséquent d'une autonomie financière plus visible que celle de leurs homologues des autres territoires. Mais, on pourrait tempérer cette observation en faisant remarquer que la notion de fiscalité partagée en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française permet, malgré tout, une certaine emprise sur la fiscalité recouvrée par le territoire.

Enfin, à Wallis-et-Futuna, il n'y a que des circonscriptions qui bénéficient d'un budget réduit financé par la dotation de fonctionnement et les subventions d'investissement versées par l'État, alors qu'à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les collectivités infra-territoriales sont inexistantes.

En guise de conclusion, pour la première catégorie de collectivités étudiée, il faut observer que l'article 73 alinéa 3 nouveau de la Constitution permet aux régions et départements (à l'exception de ceux de La Réunion) de fixer les règles applicables sur leur territoire dans un certain nombre de matières relevant du domaine de la loi et du règlement, de même, de procéder à des adaptations de règles prévues par la loi et le règlement dans les matières où s'exercent leurs compétences. Il s'agit de la procédure dite des habilitations qui serait de nature à renforcer les compétences de ces collectivités, c'est-à-dire aggraver leurs dépenses par rapport aux recettes, surtout lorsque l'on sait que le domaine fiscal n'a jusqu'ici obtenu aucune décision favorable en la matière 274 ( * ) . Ce vide pourrait, sans doute, se voir combler avec la transformation de la Guyane et de la Martinique en collectivité unique à l'horizon 2015.

Pour les collectivités autres que celles régies par l'article 73 de la Constitution, on peut aussi considérer l'autonomie fiscale prétendument annoncée comme étant relative au fait que, dans certains cas, l'administration fiscale continue de relever de l'État 275 ( * ) . La Nouvelle-Calédonie est la seule collectivité à assurer l'administration de l'impôt, de la création de la norme fiscale jusqu'au recouvrement et au contrôle des prélèvements, l'État n'intervenant que dans le cadre d'accords conventionnels. La Polynésie présente une situation similaire, sauf que les opérations de recouvrement sont assurées par la Direction générale des Finances publiques (DGFIP), c'est-à-dire l'État 276 ( * ) . Parfois, les taux de recouvrement sont assez modestes notamment en Polynésie française 277 ( * ) et à Wallis-et-Futuna 278 ( * ) .

Enfin, comment parler d'autonomie fiscale réelle de certaines collectivités lorsque l'on sait que le système fiscal de Wallis-et-Futuna est assez pauvre en prélèvements 279 ( * ) , que celui de Saint-Barthélemy refuse, pour des raisons tirées de l'histoire, d'instituer des impôts traditionnels comme l'impôt sur le revenu des personnes physiques et morales 280 ( * ) et que celui de Saint-Martin reste encore insuffisamment alimenté, cela d'autant que les autorités locales ont affiché leur volonté de ne pas créer de distorsion importante avec la partie hollandaise de l'île, plus attractive fiscalement.

Arlette Pujar, Docteur en droit, directrice du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) Martinique - Autonomie dans le management des fonctionnaires territoriaux d'outre-mer

Après les interventions d'Antoine Delblond et de Joël Boudine, il me paraît pertinent de compléter leurs analyses par les ressources humaines qui gravitent dans la fonction publique territoriale et sans lesquelles aucune politique publique ne peut être mise en oeuvre.

Le choix que j'ai retenu ici dans le délai qui m'est imparti est de démontrer que les aspects juridiques et/ou politiques de l'autonomie se complètent harmonieusement par les aspects managériaux et/ou sociologiques de l'autonomie.

Le juriste évoque l'autonomie du droit administratif qui est restreint par le contrôle juridictionnel. On peut dès lors penser le droit administratif comme un droit autonome qui va se concrétiser par une séparation des autorités administratives et judiciaires. L'intérêt du concept d'autonomie managériale se manifeste au niveau des organisations administratives et de la mise en oeuvre des politiques publiques et de l'efficacité du management de leurs ressources humaines. C'est la raison pour laquelle le constat de l'absence de délimitation doctrinale interpelle le chercheur. Il s'agit là d'un sujet polysémique qui touche à la fois aux sciences humaines, aux sciences juridiques et aux sciences politiques.

Le concept d'autonomie managériale sera donc présenté en deux temps, par la déclinaison du projet politique au projet d'administration et par la démarche de développement durable et de responsabilité sociétale.

I. - Du projet politique au projet d'administration : le concept d'autonomie appliqué au management

« Les managers publics territoriaux exercent leur métier d'encadrement de façon spécifique notamment par le fait qu'ils sont en interaction constante avec des élus, qu'ils ont à mettre en oeuvre des politiques publiques dans le cadre d'agendas influencés par des élections, qu'ils gèrent des agents sous statut, qu'un dialogue social est souvent présent, qu'ils se réfèrent à des valeurs du service public et des valeurs professionnelles mais aussi à des textes régissant les services publics, que contrairement au secteur privé ils n'ont pas de clients, mais des citoyens-usagers-électeurs-utilisateurs-résidents-habitants-contribuables à multiples facettes et qu'ils sont directement liés à des territoires et à des relations multiples avec l'État et d'autres services publics. 281 ( * ) »

En France, l'inflation du nombre de réunions interministérielles souligne la complexité croissante du processus décisionnel indispensable à l'élaboration du projet politique. Ce constat est valable pour les collectivités territoriales et se traduit par un programme d'actions.

Le mot « management » est une déclinaison du verbe « to manage », réussir, se débrouiller, qui prend sa racine dans le mot latin « manus », main, impliquant un travail manuel, la manipulation. Il fait appel à une grande diversité de disciplines.

« Manager c'est d'abord établir une vision, établir une stratégie, conduire à la réalisation d'objectifs, d'activités, de projets, en mobilisant des ressources humaines, techniques et financières. » 282 ( * )

Selon Serge Delplace, manager est un mot « valise », c'est-à-dire que chacun, en fonction de son environnement, de sa culture, de l'organisation dans laquelle il est, traduit de manière différente.

A. Les fondamentaux du projet politique

Il appartient aux collectivités territoriales de définir les axes fondateurs du projet politique par la déclinaison devant les commissions sectorielles pour avis consultatifs et prise de décision devant les instances politiques (commission permanente, assemblée plénière, conseil municipal, conseil communautaire...) qui disposent de la force juridique des actes administratifs.

Quatre fondamentaux sont susceptibles d'être retenus :

- l'humain comme première richesse de l'organisation

- des valeurs partagées autour d'un service public de qualité

- l'innovation et la prospective comme moteur de l'administration

- le meilleur service au meilleur coût.

La prise de décision dans le projet politique relève souvent du rapport entre le politique et le cadre dirigeant. En effet, plus le cadre se situe près du pouvoir exécutif, plus il dispose d'une plus ou moins grande opportunité d'autonomie qui se manifeste sur les projets, les propositions, les initiatives, la présentation des rapports, les rapports entre élus/administratifs.

Nous pouvons dire au risque de nous tromper que l'autonomie décisionnelle des cadres se situe au niveau du projet entre le politique et l'opérationnel.

B. La définition du schéma directeur du projet

Pour définir un schéma directeur du projet, il convient avant tout de se mettre d'accord sur les grandes étapes clés, les objectifs, le choix d'une structure possible, les délais réalistes et l'estimation des coûts et des moyens.

Quelle autonomie de l'équipe projet par rapport aux responsables hiérarchiques permanents ? Quelles sont les zones d'autonomie et de responsabilité ? Le cadre dirigeant doit avoir une vision claire de son champ d'autonomie et d'initiative qui peut se décliner dans les principes d'innovation et de créativité impliquant de valoriser l'initiative, la recherche, l'expérimentation et la capitalisation des expériences ce qui nécessite :

- d'avoir une marge de manoeuvre suffisante au plus près de l'usager

- de travailler en équipe pluridisciplinaire pour créer de la compétence collective qui soit supérieure à la somme des compétences individuelles.

Le développement d'une culture du sens commun va de pair avec l'endogamie administrative, c'est-à-dire l'insularité qui crée une proximité très importante entre les élus et les administrations.

C. Le lien entre le projet politique et la mise en oeuvre opérationnelle

Il appartient au DGS 283 ( * ) de traduire le projet politique en mise en oeuvre opérationnelle par les équipes. C'est pourquoi l'action de la direction générale (1) et l'autonomie du cadre (2) seront analysées.

1. L'action de la direction générale

La direction générale des collectivités territoriales dispose, à ce titre, d'une autonomie décisionnelle. Il lui revient, en effet, de définir les stratégies à suivre, en concertation avec les élus et les cadres, de garantir la cohérence d'ensemble, d'identifier les projets qui justifient une organisation transversale et un pilotage spécifique et enfin de faire respecter la hiérarchisation des priorités afin de perturber au minimum l'organisation du travail des cadres et des services.

La définition de l'action de la collectivité peut se résumer par la somme du souhaitable de l'élu et du possible du DGS.

2. Autonomie et pouvoirs du cadre dans la mise en oeuvre opérationnelle

En résumé, le cadre territorial doit posséder une culture du service public et de l'intérêt général. L'administrateur(trice) territorial(e) est souvent généraliste ce qui lui permet d'appréhender de manière globale la gestion d'un territoire en termes de politiques et services publics, de fiscalité, d'organisation et mise en oeuvre des moyens. À la différence des administrateurs de l'État, il(elle) est responsable de l'élaboration et de la réalisation du budget de la collectivité en dépenses comme en recettes et doit veiller aux équilibres à court comme à long terme. Dans le cadre de cette posture, le cadre doit être à l'écoute et à la conjugaison des points de vue de ses collaborateurs. En permanence, il doit assurer l'adaptation des normes aux réalités locales et, en cela, il détient une parcelle d'autonomie conférée par son expérience. Là où le cadre d'État doit faire respecter l'égalité des citoyens et la cohésion nationale. L'autonomie managériale peut se définir par la clarification des compétences et du rôle des élus pour atteindre la cohérence et l'unicité de l'autorité maire/président/adjoint/vice-président/conseiller municipal/conseiller territorial.

De l'autonomie de la prise de décision, on s'interroge sur le discours de promotion des valeurs de service public d'équité, de non-discrimination, de neutralité et d'impartialité.

Pour Pierre-Charles Pupion 284 ( * ) , dans les pays occidentaux, l'autonomie d'action va de pair avec la responsabilisation accrue des dirigeants et la généralisation de la logique d'efficacité et de résultats. Il montre que, de façon croissante, les cadres construisent eux-mêmes leurs marges de manoeuvre et leur autonomie mais que celles-ci trouvent leurs limites dans les ressources qui leur sont allouées. Il explique comment les cadres publics se trouvent en situation de responsabilité directe face aux différentes parties prenantes vis-à-vis desquelles il leur faut faire preuve :

- de pragmatisme, en répondant aux attentes

- de vision, en donnant du sens à leur stratégie

- de pédagogie en permettant aux acteurs de comprendre leur politique.

II. - Mise en oeuvre de l'autonomie managériale des collectivités territoriales dans une démarche de développement durable et de responsabilité sociétale

Nous pouvons affirmer que le concept d'autonomie dans le management des collectivités territoriales a suivi l'évolution des organisations modernes. À partir de là, le juriste doit s'attacher à en circonscrire le contenu pour mieux en évaluer les contours en tenant compte de toutes les compétences de l'organisation de travail et des nouveaux sujets d'échanges entre les acteurs.

A. Contenu de l'autorité managériale pour les collectivités territoriales

L'autonomie managériale permet le choix du mode de management approprié au contexte, permettant l'épanouissement des agents territoriaux et la recherche permanente de l'intérêt général et de la satisfaction du plus grand nombre.

Selon l'INSEE, les collectivités territoriales se définissent comme des structures administratives françaises distinctes de l'administration de l'État, qui doivent prendre en charge les intérêts de la population d'un territoire précis. Il appartient donc au manager de donner du sens à l'équipe qu'il manage mais à chacun des membres de l'équipe.

Il est primordial pour l'élu et le cadre que leurs relations s'inscrivent dans une volonté de co-production ou de co-construction reposant sur une exigence réciproque et un respect mutuel de valeurs visant à répondre de la meilleure façon possible à la satisfaction de l'intérêt général et des besoins des bénéficiaires du service public.

De nouvelles problématiques portant sur l'éthique, la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE) et le développement durable sont apparues et représentent les enjeux majeurs du métier de manager. Le recours à des codes d'éthique, des chartes de valeurs (RESP) 285 ( * ) politique de RSE et de développement durable, labels et certifications « éthiques » sont des instruments de gestion « responsables ».

Laisser une certaine autonomie aux collaborateurs et un degré de responsabilité permet d'être plus efficace dans le travail quotidien. La délégation et l'autonomie sont deux techniques managériales qui ont fait leur preuve.

Selon Christine de Lafare, il convient de développer l'autonomie managériale en renforçant les compétences, en responsabilisant les managers de proximité, préoccupation majeure actuelle des organisations. Au-delà des discours convenus et des bonnes intentions affichées dans les chartes et autres projets d'entreprendre, la réalité est bien là, les managers même les plus frondeurs peinent à prendre des risques, à oser décider, à sortir des sentiers battus, tant il est vrai que systèmes d'information aidant, les managers n'ont jamais eu autant de comptes à rendre, et n'ont jamais bénéficié d'aussi peu de marges de manoeuvre.

Nous pouvons donc dire qu'au sein d'une collectivité, il n'existe pas d'autonomie de décision de l'exécutif et du cadre dirigeant mais une autonomie collective ou collégiale . L'appropriation du temps et du rythme de travail doivent répondre aux besoins d'immédiateté des populations. Le temps administratif n'est pas le temps politique. Il existe une distanciation entre le projet politique et la mise en oeuvre administrative. L'agent administratif est dépossédé de son autonomie temporelle. Il est désormais sujet de contrôle. LE TEMPS C'EST DE L'ARGENT. Le manque de temps nuit à l'écoute et à la reconnaissance.

La transformation du rôle de manager peut conduire vers deux directions :

- une pathologie de l'encadrement qui conduit à des risques psychosociaux : le nihilisme : le travail perd tout sens ; le clientélisme : on privilégie la paix sociale à tout prix ; l'arrivisme : utilisation de responsabilité pour servir sa carrière ; le compétitivisme : rechercher des prouesses personnelles et la valorisation d'exploits individuels au détriment des réalisations collectives ;

- et une autre direction qui est la « philosophie de la responsabilité » : la responsabilité de l'organisateur : observer, concevoir, décider, mettre en oeuvre, suivre, contrôler et évaluer ; la responsabilité de contribution aux différentes politiques mises en oeuvre ; la responsabilité sur la qualité des relations professionnelles.

B. Le cas particulier de l'autonomie managériale dans un environnement complexe ultramarin

L'évolution institutionnelle outre-mer 286 ( * ) conduira pour ce qui concerne la Martinique et la Guyane à la mise en oeuvre de « cultures professionnelles différentes » qui vont se confronter (fusion administrative). Pour certains, une tendance à vivre « le regard rivé sur le rétroviseur » génère une forte résistance au changement. Cette future collectivité territoriale de Martinique (CTM) est une opportunité pour les cadres territoriaux d'interroger son organisation en tenant compte des expériences des deux collectivités d'origine (conseil général et conseil régional) à savoir le capital de savoir, de patrimoine et la transmission ; le savoir-faire, les relations sociales, les réseaux et le capital des relations entre parties prenantes (élus, agents territoriaux, administrés, citoyens, entreprises...).

Une reconnaissance de l'ensemble des cadres est indispensable et justifiée à la fois par leur place dans l'organigramme, par les nouveaux métiers qu'ils exercent et leurs exigences mais également par la force de proposition qu'ils représentent.

Sans clarification des rôles, des missions et des processus de décision, l'organisation administrative risque de développer des sources de blocage ou des systèmes parallèles, d'empêcher la prise en compte sereine des évolutions managériales et organisationnelles nécessaires.

De plus, le management se trouve confronté à un paradoxe à gérer : « faire plus, innover, initier de nouveaux projets avec des moyens budgétaires constants ou en régression », ce qui pose la question du dispositif de négociation, d'autonomie et de contractualisation des allocations de ressources humaines et financières. Les collectivités territoriales ultramarines sont particulièrement handicapées par l'absence de marges de manoeuvre financière qui ne leur permet pas de procéder à des recrutements de cadres de la haute fonction publique et par des charges liées à l'insularité et à la vulnérabilité de leurs territoires. Dans des environnements complexes et incertains, l'autonomie constitue aujourd'hui à la fois un enjeu et un défi pour les organisations et les managers. Au-delà des décisions organisationnelles et managériales de principe, c'est dans la manière de communiquer, d'échanger, de piloter, de recruter, que l'autonomie peut être cultivée.

Appliquer l'autonomie managériale revient à mettre en pratique les sept principes de la responsabilité sociétale 287 ( * ) : la transparence, le comportement éthique, le respect des intérêts des parties prenantes, internes et externes, le respect de la légalité, le respect des normes internationales de comportement, le respect des droits de l'homme et la responsabilité de « rendre compte ». Le cadre dirigeant doit avoir un comportement transparent et éthique. Il doit contribuer au développement durable y compris à la santé et au bien-être de la société.

Il faut donc oser l'expérimentation sociale et se poser la question de savoir de quels managers nous aurons besoin pour mener à bien le chantier de la collectivité territoriale de Martinique et de Guyane en 2015 ? Dans ce nouveau monde, le management ne s'applique plus sur des ensembles organisationnels mais sur des systèmes socio-humains sans cesse en métamorphose, la métamorphose d'Édouard Glissant.

Dans les faits, le lien social dans une petite collectivité où la proximité est de mise (tout le monde se connaît) permet au cadre dirigeant de détenir un lien de contrôle social et une autonomie de gestion des agents territoriaux. Les fonctionnaires territoriaux en posture de direction doivent repenser les modalités de reconnaissance de l'engagement durable et de la performance individuelle et collective.

- Autonomie et anthropologie

L'anthropologie antillaise 288 ( * ) des postures hiérarchiques met en lumière le modèle de management qui sera retenu au sein des collectivités territoriales ultramarines. La notion de proximité familiale (on est tous plus ou moins parent) a des incidences sur le degré d'autonomie. Le concept de mobilité des cadres est quasiment absent sauf pour ceux qui ont fait le choix de s'installer ailleurs en début de carrière ou en cours de carrière et font le choix ensuite de rester « ailleurs ». L'antillanisation 289 ( * ) des cadres a-t-elle au cours du temps des répercussions sur leur autonomie managériale ?

Les cadres dirigeants doivent être sensibilisés aux objectifs pédagogiques de compréhension du fondement des comportements et des pratiques de la société antillaise ; des dynamiques à l'oeuvre dans tous les aspects de la vie sociale aux Antilles.

Ces questionnements nous renvoient vers le poids de notre histoire, vers les postures hiérarchiques et les niveaux d'encadrement. Difficultés de se projeter à long terme ? Difficultés de prendre la bonne décision ? Sommes-nous prêts à l'autonomie managériale ? La dynamique des milieux, le management des hommes et la fragmentation des besoins permettent de mieux appréhender le degré d'autonomie managériale.

La symbolique du « travail du béké 290 ( * ) » est propre à nos territoires. Deux types de « travail » existent : le travail pour soi (élevage de boeufs, de moutons et cabris, poules et canards et jardin créole...) et le travail pour les autres, qui est assimilé au travail du béké ! Le travail contraint et salarié est le seul reconnu. Les « coups de main 291 ( * ) » renvoient au travail dans la plantation.

La compréhension des systèmes de valeurs qui régissent le fonctionnement différencié des hommes et des femmes favorise une lecture plus incisive de la dynamique des milieux (enjeux, stratégies). La contextualisation de l'arrière-plan culturel et historique représente une introduction à l'anthropologie de la posture hiérarchique. Mieux comprendre le rapport à l'autorité, à la hiérarchie et tout simplement au travail dans le contexte des Antilles pour un management apaisé et une plus grande autonomie décisionnelle. Pour accompagner la mutation profonde qui s'opère dans les organisations publiques, il ne s'agit plus pour les cadres de focaliser leur action sur le respect des normes mais sur les résultats.

Selon Yves Cohen 292 ( * ) , l'autonomie managériale relève de la spécificité du co-pilotage politico-administratif des collectivités territoriales et de la mise en oeuvre d'une politique publique que l'on soit opérateur des actions ou facilitateurs pour ceux qui exercent des métiers dans des fonctions ressources.

L'évolution du concept d'autonomie managériale révèle que la notion d'autorité est aujourd'hui moins liée au savoir, à l'excellence, à la « capacité d'être le meilleur » qu'à la capacité à donner du sens, entraîner, donner envie de convaincre pour vaincre les résistances et de faire s'épanouir des talents.

De façon générale, le degré d'autonomie managériale des cadres dirigeants des collectivités territoriales dépend de la structuration du dispositif de management des équipes mis en place. Les conditions d'exercice du management sont modifiées par les différentes évolutions économiques, techniques, organisationnelles et sociologiques. Du fait de l'incertitude de l'environnement et de la dématérialisation du travail, le cadre dirigeant se doit de manager autrement par les valeurs et par les compétences, combinaison de ces notions. Ce concept d'autonomie managériale mérite une poursuite de l'analyse en tenant compte de tous ces paramètres. Le manager de demain doit compléter sa démarche quotidienne par une approche sociologique des personnes et des relations qu'il entretient avec elles.

Pour Jean-Marc Le Gall 293 ( * ) , cette ambition, centrée sur la prévention, la coopération, l'échange et le compromis, est au coeur de cette recherche indispensable d'une nouvelle écologie du travail humain.

Je ne saurais clore mon propos sans vous inviter, après cette année de centenaire de la naissance d'Aimé Césaire, à relire la lettre à Maurice Thorez qu'il a rédigée le 24 octobre 1956 dont il me plaît de vous citer un extrait :

« Dans ces conditions, on comprend que nous ne puissions donner à personne délégation pour penser pour nous ; délégation pour chercher pour nous [...]. Qu'aucune doctrine qui ne vaut que repensée par nous, que repensée pour nous [...]. »

André Néron, Administrateur territorial à la retraite, chargé de mission au conseil général pour la mise en place de la collectivité territoriale de Guyane - L'autonomie confrontée à des contraintes particulières : l'expérience de la Guyane depuis la départementalisation

Succédant à la colonie en 1946, le département de la Guyane, en dépit de la décentralisation mise en oeuvre en 1982, n'a jamais su se défaire de certaines particularités et pratiques coloniales qui s'invitent aujourd'hui dans le processus de mise en oeuvre de la collectivité unique créée par la loi ordinaire du 27 juillet 2011 .

La fusion ainsi envisagée entre le département et la région offre d'intéressantes perspectives de réflexion sur une démarche expérimentale de gouvernance et d'autonomie outre-mer qui ne saurait négliger en effet l'existence d'un contexte souvent atypique d'un point de vue territorial, économique, social, sociologique, culturel, mais aussi historique.

C'est ainsi que le travail actuel d'investigation et d'identification des missions et des moyens de la nouvelle collectivité territoriale de Guyane met en évidence des contraintes particulières qu'il semble difficile de solutionner avant le mois de mars 2015, et qui ont de fortes chances de suivre le courant de la fusion, avec toutes les conséquences liées à leur réalité. Il s'agit principalement :

- de la question de l'indemnisation des autorités coutumières autochtones ;

- de la question de la rémunération des prêtres du clergé catholique ;

- de la situation juridique des biens immobiliers du département de la Guyane hérités de la colonie, et dont la collectivité ne peut disposer à ce jour en pleine propriété.

Pour les autorités coutumières et les prêtres, il y a une problématique financière de nature salariale qu'il nous faut apprécier, mais ne cache-t-elle pas une vraie réalité statutaire à prendre en compte aujourd'hui tant du point de vue de la fonction publique que du fait coutumier ?

En ce qui concerne les biens immobiliers, l'enjeu, dans le contexte actuel de l'évolution institutionnelle, est de garantir à la nouvelle collectivité l'usage effectif de tous ses moyens patrimoniaux.

Pour ces deux catégories de contraintes que nous allons traiter successivement, un éclairage historique s'impose au préalable, afin de mieux comprendre ensuite leur impact juridique ainsi que leurs conséquences financières, matérielles, humaines, politiques ou autres, pour tout projet d'évolution institutionnelle ou statutaire intéressant la Guyane.

Première partie :
L'autonomie à l'épreuve de contraintes coutumières et cultuelles

L'examen de la masse salariale du budget du département montre que le conseil général assure mensuellement la rémunération de 2 300 agents environ, parmi lesquels figurent à côté des statutaires et des contractuels une cinquantaine de chefs coutumiers, amérindiens et bushinengue, ainsi que 32 prêtres et un évêque. Si ces derniers perçoivent un vrai salaire correspondant à celui d'un rédacteur territorial pour les prêtres, et d'attaché territorial pour l'évêque, les chefs coutumiers bénéficient par contre d'une simple indemnité mensuelle.

Ces éléments prouvent à l'évidence l'existence d'un réel lien administratif entre ces personnes et la collectivité départementale, mais qui se situe manifestement en marge des règles traditionnelles de la fonction publique.

En effet, si l'on s'en tient à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale, on constate qu'elle concerne « les personnes nommées dans un emploi permanent et titularisées dans un grade de la hiérarchie administrative des communes, des départements, des régions ou des établissements publics en relevant ».

Cette définition juridique du fonctionnaire est par ailleurs assortie d'un certain nombre de droits et obligations qui s'imposent également aux agents publics non titulaires ; en particulier, l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, précise que la rémunération n'est due qu'après « service fait ».

En quoi consisterait le service fait pour les autorités coutumières et pour les prêtres dans le cadre des missions légales relevant de la collectivité ?

Il se trouve aujourd'hui qu'au titre XI chapitre III de la loi du 27 juillet 2011 relative à la collectivité territoriale de Guyane, il est mentionné en « dépenses obligatoires », « la rémunération des agents de la collectivité ».

Cette seule mention implique-t-elle la charge salariale des membres du clergé catholique et des autorités coutumières ?

A. Le cas des autorités coutumières

Dans un souci de simplification, nous allons volontairement parler des communautés autochtones de Guyane, autant pour identifier les amérindiens que les « noirs marrons », même si l'autochtonie concernerait plus particulièrement les populations amérindiennes.

1. Les amérindiens, premiers habitants de la Guyane

Répartis aujourd'hui sur l'ensemble du territoire en six groupe (ou peuples), la première vague venant du Brésil remonterait au II e siècle de notre ère. Les migrations progressives de sociétés différentes ont eu pour conséquence de rendre difficile la constitution d'un vrai bloc culturel soudé par une langue commune et des pratiques identiques de l'exploitation du milieu.

Dans un ouvrage paru en 1990 Les amérindiens, des peuples pour la Guyane de demain , Pierre et Françoise Grenand, ethnologues, faisaient la remarque suivante :

« Le problème indien demeure, parce que l'administration peu soucieuse d'écouter les avis des spécialistes des questions tribales commet la fatale erreur de confondre les indiens en tant qu'individus, et les nations indiennes en tant qu'entités constituées. Or, c'est bien en tant que nations que les amérindiens de Guyane nous côtoient depuis la conquête, non en tant qu'individus. »

Il semble en effet que la revendication amérindienne porte moins sur la reconnaissance de certains avantages administratifs, que sur celle de leur droit coutumier, et surtout leur existence en tant que peuples au sein du peuple français.

Si aujourd'hui leurs autorités coutumières bénéficient des indemnités versées par le conseil général, ce n'est pas là le résultat de démarches pressantes auprès des pouvoirs publics, mais bien plus la conséquence des pratiques établies dans les rapports entre l'administration et les communautés « noires marrons ».

2. Répartis en quatre groupes, les « noirs marrons » ou « bushinengue », ou encore « noirs réfugiés » sont majoritairement installés sur les berges du fleuve Maroni entre la Guyane et le Surinam

Ils sont les descendants des esclaves importés d'Afrique par les colons, et qui vers le XVIII e siècle ont fui les plantations hollandaises du Surinam et se sont réfugiés en forêt sur la rive française en empruntant aux amérindiens leurs mode de vie et leurs techniques de la chasse et de l'agriculture. L'installation progressive de ces communautés « marrones » a poussé l'administration coloniale vers 1880 à utiliser leur chef suprême « le Gran Man » pour garder la frontière et réguler la circulation sur le fleuve.

Cela s'est fait selon un mode contractuel rémunéré.

Le contrat entre le Gran Man et le gouverneur était verbal et s'articulait en droits et obligations :

Le gouverneur rémunère au nom de la France le Gran Man, qui se charge de favoriser la descente du fleuve et l'établissement des membres de sa communauté à Saint-Laurent du Maroni ; il lui fournit un costume d'apparat.

Les Bonis s'engagent à accueillir le mieux possible les voyageurs sur l'ensemble de la vallée du Maroni. Ils fixent par ailleurs le prix de journée du canotage et autres tâches exécutées.

Pour cette organisation de l'activité des Bonis, le Gran Man reçoit une pension annuelle de 1 200 francs. Les prestations effectuées au profit de tiers sont payées par le commanditaire.

Le mandatement des sommes dues ne recouvre aucun formalisme administratif. L'indemnité au Gran Man est mandatée au nom du commandant supérieur de l'administration pénitentiaire qui, après vérification du service fait, lui remet la somme convenue.

L'intervention d'un acte administratif officiel, liant l'indemnisation à la nomination d'un chef coutumier, va intervenir en 1887.

Cette pratique est entrée dans les faits sans que le conseil général de la Guyane créé en 1878 n'ait pu s'y opposer. Ainsi, les services de l'État, par l'intermédiaire de gendarmes dits « gestionnaires » à l'intérieur du pays, ont continué à reconnaître de nouveaux chefs coutumiers dans les villages et à les indemniser « de mains à mains ». Cela s'est fait d'ailleurs en coïncidence avec la réorganisation administrative du territoire guyanais en 1930 qui a eu pour conséquence de le diviser en deux parties : une zone côtière et une zone protégée dite « territoire de l'Inini ». Il est vraisemblable que c'est durant cette période (vers 1941) que les autorités coutumières amérindiennes ont commencé elles aussi à percevoir les indemnités.

La départementalisation n'a donc fait qu'emprunter la voie de l'intégration de pratiques et de comportements nés sous la colonie et que le préfet, successeur du gouverneur, ne pouvait qu'entériner et mettre en oeuvre.

Par ailleurs, les prérogatives du Gran Man et autres chefs coutumiers sont précisées. Ils se voient octroyer deux types de mission : l'une d'ordre public, l'autre coutumière, comme le rappelle Mme Irma Arnoux dans son ouvrage Les amérindiens dans le département de la Guyane : problèmes juridiques et politiques .

Une fonction administrative de police à l'intérieur du groupe dont ils ont la responsabilité ; des relations constantes avec les gendarmes, c'est à eux qu'ils font appel lorsqu'un membre du groupe commet un délit. C'est à eux qu'il revient de s'occuper de toutes les démarches administratives (pour décès, pièces d'identité...).

Ils deviennent aussi des auxiliaires de justice, chargés de régler les conflits individuels et collectifs dans les villages ou avec les autres groupes ethniques.

Ils sont également garants de la culture ethnique, chargés de préserver l'identité de leurs tribus et d'organiser les cérémonies rituelles et spirituelles.

B. La question du culte catholique

- Le concordat napoléonien de 1801 n'a pas été introduit en Guyane.

- La loi de séparation du 9 décembre 1905 non plus en dépit de son article 43 qui prévoyait les conditions dans lesquelles elle serait applicable à l'Algérie et aux colonies, et qu'un décret du 6 février 1911, avait établi un régime de séparation semblable pour la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion.

- Ce refus d'extension résulte du fait que la Guyane est considérée comme terre de mission relevant dès lors d'un statut particulier défini par l'ordonnance royale de Charles X du 27 août 1828 relative au gouvernement de la Guyane.

- L'article 2 de la loi du 19 mars 1946 sur la départementalisation disposait que « les lois et décrets actuellement en vigueur en France métropolitaine et qui ne sont pas encore appliqués à ces colonies feront avant le 1 er janvier 1947 l'objet de décrets d'application à ces nouveaux départements ».

- Sur demande de l'évêque de Guyane, le ministre de l'intérieur, interrogé lui-même par le ministre de finances, donne un avis défavorable sur cette extension, le 27 mai 1948.

- Ainsi, le seul texte de référence du régime des cultes en Guyane demeure l'ordonnance royale du 27 août 1828. À la différence de l'Alsace Moselle, il ne s'agit pas d'un régime civil résultant d'un concordat entre le Saint-Siège et la France, mais d'un régime dérogatoire.

- À l'article 36 de cette ordonnance, il est inscrit que « le gouverneur veille au libre exercice et à la police extérieure du culte, et pourvoit à ce qu'il soit entouré de la dignité convenable ». Quant à l'article 89, il précise qu'un officier de l'administration de la marine ayant fonction d'ordonnateur est chargé, sous les ordres du gouverneur, d'assurer le « paiement des ministres du culte ».

Du point de vue de la jurisprudence, le débat n'est pas clair.

En effet par un arrêt du 8 novembre 1963 le Conseil d'État confirme l'application en Guyane de l'ordonnance de 1828, puis par un arrêt du 9 octobre 1981 (Béhérec) il assimile le statut des prêtres à celui des fonctionnaires.

C'est à une nuance près ce que l'on trouve dans le précis Dalloz Droit canonique édition 1989 : « les prêtres agréés sont des agents permanents, titulaires rémunérés par le département, mais ils ne sont pourtant pas des fonctionnaires départementaux ».

Saisi pour avis, le représentant de l'État en Guyane se référant à la jurisprudence consultative du Conseil d'État pour ce qui concerne les ministres des cultes reconnus en Alsace Moselle, indique pour sa part : « les ministres du culte catholique en Guyane, seul culte reconnu, n'ont pas été nommés dans un emploi permanent et titularisés dans un grade de la hiérarchie administrative de la fonction publique territoriale ».

C. Comment les situations des autorités coutumières et des prêtres ont-elles été gérées depuis la départementalisation ?

Il ne serait pas exagéré d'apprécier comme une indifférence compatissante la posture de l'État à l'égard des interpellations faites par les exécutifs départementaux ou les parlementaires, vis-à-vis des deux situations évoquées. Rien d'étrange à cela, dans la mesure où les démarches de contestation ne constituaient pas une réelle revendication politique forte, même après que la décentralisation de 1982 a renforcé l'autonomie locale. Il est par ailleurs significatif de constater que les projets d'évolution statutaire initiés par les élus en 2003, puis en 2010 pour une plus grande autonomie encore n'ont pas fait de ces questions des préalables indispensables à résoudre en amont des nouvelles institutions et responsabilités souhaitées.

On peut sans doute noter que dans le souci d'éviter une floraison de demandes d'agrément de chefs coutumiers investis dans de nouveaux villages, le conseil général a défini vers les années 2003-2004 un cadre visant à maintenir un certain quota d'autorités coutumières indemnisées, mais sans que soit posée la question d'un arrêt définitif du versement de ces indemnités, même de façon progressive.

En ce qui concerne les prêtres, il a fallu attendre une délibération récente du 19 décembre 2011 qui, d'une part, a fixé définitivement à 33 les membres du clergé catholique pris en charge et a décidé, d'autre part, que leur rémunération (sauf celle de l'évêque) ne saurait perdurer au-delà de la mise en oeuvre de la collectivité unique.

Deuxième partie :
L'autonomie à l'épreuve de contraintes matérielles :
la question des biens de l'ancien domaine colonial

A. Rappel de la situation posée en 1946-1947

Aux termes du décret n° 47-2222 du 6 novembre 1947, les biens de l'ancien domaine colonial ont été répartis à compter du 1 er janvier 1948 entre l'État, les départements et éventuellement les communes.

Dans son article 2, ce texte dispose qu'après inventaire des biens de l'ancien domaine colonial, dressé à la diligence du préfet, ce dernier rédigera un projet de répartition qui, accompagné de l'avis du conseil général, sera transmis au ministre des finances pour la rédaction d'un arrêté avant le 31 décembre 1947.

En définitive un arrêté interministériel du ministre des finances et des affaires économiques du 30 juin 1948 a déterminé, pour chaque nouveau département d'outre-mer, la nouvelle affectation des biens de l'ancien domaine colonial qui ont été répertoriés.

Ce texte traite en fait de l'affectation des biens concernés de l'ancien domaine colonial et non pas de leur propriété.

D'ailleurs, cette question de la propriété ne devait pas poser de problème pour le législateur de 1946, puisque l'objectif était de transformer les colonies en des départements équivalents aux départements métropolitains, autrement dit, le patrimoine de l'ancienne colonie devait ipso jure devenir celui du nouveau département d'outre-mer.

Il faut entendre dès lors que dans le tableau de répartition annexé à l'arrêté de 1948 tous les biens mentionnés dans la rubrique « domaine national » ne sont qu'affectés à l'État à titre d'utilisateur et non de propriétaire .

Cette interprétation a été confirmée par la section des finances du Conseil d'État dans un avis rendu le 12 mars 1948, s'agissant de l'ancien domaine colonial de la Guadeloupe :

« Considérant que le changement de statut dont la loi du 19 mars 1946 a fait bénéficier la Guadeloupe ne saurait avoir pour effet sous réserve des modifications apportées à la consistance du domaine colonial par l'introduction de la législation métropolitaine, de priver la Guadeloupe de la propriété des biens qui constituaient ce domaine ; qu'en conséquence, la Guadeloupe, érigée en département français, est, et demeure, sous la réserve ci-dessus indiquée, propriétaire de ces biens. »

En résumé l'État bénéficie d'un droit de jouissance gratuit pour les besoins de ses services, assorti toutefois d'une obligation de les entretenir en bonus pater familias .

S'il a utilisé et utilise pleinement son droit de jouissance, il n'a pas toujours exécuté son obligation de les entretenir, certains de ces biens étant alors devenus inutilisables.

B. La nécessité impérative de régler la question des biens immobiliers

De façon évidente, elle est la conséquence de l'évolution du contexte juridique et institutionnel depuis la départementalisation.

La décentralisation intervenue en 1982 a confié au département de la Guyane comme aux autres des compétences nouvelles qui ne pouvaient être mise en oeuvre sans une augmentation de moyens matériels et, en l'espèce, de locaux supplémentaires ; le conseil général s'est vu contraint de louer des locaux dans le privé, pour des loyers qui s'élèvent actuellement à 450 000 euros par an.

Le même problème se pose aujourd'hui avec l'évolution vers la collectivité unique de la Guyane puisque la fusion des services départementaux et régionaux risque de provoquer une refonte en profondeur des organigrammes, avec toutes les conséquences en matière d'accueil et d'efficacité des nouvelles structures, sur l'ensemble du territoire.

Enfin, on ne peut négliger l'existence d'un environnement juridique nouveau qui n'a pu que bouleverser celui de 1946 en matière d'autonomie, notamment la Charte européenne sur l'autonomie locale.

C. Quelles modalités pour le règlement de cette situation

Règlement immédiat :

Transférer au département le droit de jouissance des bâtiments actuellement non utilisés par l'État.

Règlement à court terme :

- Prévoir une convention de jouissance entre l'État et le département pour tous les immeubles départementaux bâtis actuellement utilisés par l'État.

- Prévoir par ailleurs des échanges d'immeubles bâtis entre l'État et le département.

Règlement à moyen terme (avant la collectivité territoriale de Guyane)

Modifier le droit posé en 1946-1947 pour le rendre compatible avec les contraintes et le droit actuel.

Conclusion

Au terme de cette présentation, il apparaît que la question du patrimoine immobilier de l'ancien domaine colonial semble être en voie de règlement, même s'il est peu probable qu'elle trouve un exutoire définitif avant la mise en oeuvre de la nouvelle collectivité en mars 2015.

Par contre, s'agissant des autorités coutumières et des prêtres, il est à craindre que ce long « serpent de mer » ne continue à évoluer sans risque au sein des divers systèmes institutionnels qui pourraient être mis en place. En effet, c'est toute la question de la coutume et de son poids juridique qui doivent être pris en compte pour situer la réalité de la question autochtone en Guyane et en tirer les conséquences légales et réglementaires en accord avec l'autonomie locale.

Le débat en l'espèce est de toute évidence politique, et on peut comprendre qu'il ne constitue pas une priorité concertée pour les élus, sans une réelle volonté de l'État de s'y associer.

En ce qui concerne les prêtres, nous pouvons nous interroger en premier lieu sur la possibilité d'exécution de la délibération du conseil général du 19 décembre 2011.

Quelle serait en effet la légalité d'une mesure globale de suppression de leur salaire, alors que leur recrutement fait l'objet d'arrêtés individuels, et qu'ils bénéficient par ailleurs de certains avantages statutaires (congés, retraite, ...) ?

Des risques de contentieux sont à prévoir.

En second lieu, pourquoi l'État refuse-t-il aujourd'hui de supporter la charge de cette dépense alors qu'elle a pour origine des actes juridiques pris par le pouvoir central. Il est clair en effet que ces mesures ont été prises bien avant la décentralisation, et qu'on ne peut par ailleurs évoquer un droit local le justifiant.

Peut-on gommer du jour au lendemain cette réalité guyanaise apparemment bien ancrée dans la société, et à peine contestée par d'autres cultes ?

La solution serait peut-être une véritable institutionnalisation de l'activité du clergé catholique pour participer à des compétences relevant du conseil général (notamment dans le domaine social) et sous réserve de compensations financières de l'État.


* 234 Avis n° 325 présenté par M. Michel Mercier au nom de la commission des finances sur le projet de loi organique adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales. Sénat, session ordinaire 2003-2004, p. 5.

* 235 Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003, J.O n° 75 du 29 mars 2003, p. 5568.

* 236 Selon l'article 72-2 alinéa 3 de la Constitution : « les recettes fiscales et autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ».

* 237 Cela se caractérise par la situation monodépartementale des régions, une superficie communale plus étendue en moyenne que celle de la France hexagonale (une population communale également plus importante), la spécificité de certaines ressources fiscales, un flux d'immigration clandestine élevé (surtout en Guyane et à Mayotte), un taux de chômage impressionnant (près de 30 % à La Réunion).

* 238 Loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 et loi ordinaire n° 2010-1487 du 7 novembre 2010 relatives au département de Mayotte, J.O n° 0284 du 8 décembre 2010, p. 21458 et 21459. La fiscalité de droit commun des départements et régions d'outre-mer ne sera applicable aux départements et communes de Mayotte qu'à compter du 1 er janvier 2014.

* 239 Guide statistique de la fiscalité directe locale 2011/2012, collectivités-locales.gouv.fr, annexe 1, p. 56, 58 et 62.

* 240 Guide statistique de la fiscalité directe locale 2011/2012, collectivités-locales.gouv.fr, annexe 1, p. 64 et 66.

* 241 Fiscalité locale-départements : collectivités-locales.gouv.fr.

* 242 À noter que depuis la réforme de la taxe professionnelle, les taux départementaux intègrent les anciens taux régionaux : soit 13,50 % pour le département et 3,88 % pour la région de Martinique avant la réforme.

* 243 Les moyens financiers nouveaux mis à la disposition de la région sont en réalité ceux qui, antérieurement, relevaient du budget de l'assemblée départementale ; on aboutit alors à un quintuplement des moyens financiers régionaux en 1984. En contrepartie, cela entraîna pour le département la perte de plusieurs millions de francs résultant de ce transfert fiscal, alors même qu'il ne disposait pas à l'époque d'un potentiel fiscal équivalant à celui de ses homologues de l'hexagone.

* 244 Chiffres inscrits aux budgets primitifs 2013. Les finances des collectivités locales en 2013 : état des lieux, rapport de l'observatoire des finances locales, 9 juillet 2013, p. 70

* 245 Chiffres de 2011, rapport précité de l'observatoire des finances locales, p. 68.

* 246 Rapport précité de l'observatoire des finances locales (chiffres de l'année 2010), p. 69.

* 247 Rapport précité de l'observatoire des finances locales, p. 69.

* 248 Les chiffres mentionnés ne tiennent pas compte de Mayotte et de Paris. Rapport de l'observatoire des finances locales, p. 70.

* 249 À noter que ces chiffres n'intègrent pas la ville de Paris. La situation est encore plus critique en Guyane où le département doit faire face à des charges de personnel justifiées par la nécessité de pallier la carence du secteur privé en matière de santé dans des zones les plus reculées et souvent les plus défavorisées.

* 250 Chiffres tirés des budgets primitifs 2013 hors Paris et hors gestion de la dette active. Finances locales-départements, collectivités-locales.gouv.fr.

* 251 Rapport de l'observatoire des finances locales, p. 70.

* 252 Il s'agit des dépenses d'équipement brut. Rapport de l'observatoire des finances locales, p. 70.

* 253 Certaines collectivités minorent les restes à réaliser en dépenses et/ou majorent les restes à réaliser en recettes. Les obligations de rattachement à l'exercice des charges et produits sont ignorées, les comptes de gestion sont établis à partir de données dont la sincérité et la fiabilité sont sujettes à caution... La situation financière des communes des départements d'outre-mer, rapport thématique de la Cour de comptes, juillet 2011, p. 30.

* 254 Il s'agit d'un territoire de cinq districts qui connaît une présence humaine de nature logistique, scientifique ou militaire.

* 255 En Polynésie française et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

* 256 À Saint-Pierre-et-Miquelon.

* 257 Loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, J.O n° 45 du 22 février 2007, p. 3218.

* 258 Selon les collectivités : dotation globale de fonctionnement (communes, intercommunalité, départements, provinces), dotation élu local, dotation spéciale instituteurs, dotations amendes de police, dotations d'équipement des territoires ruraux, dotation globale d'équipement des départements, dotation des bibliothèques communales, dotation générale de décentralisation, dotation globale de développement économique...

* 259 Rapport public thématique de la cour des comptes sur l'autonomie fiscale en outre-mer, novembre 2013, p. 31.

* 260 Ces normes concernent l'élaboration des textes fiscaux et surtout le caractère législatif de l'impôt (ici, c'est la même institution qui intervient à la fois en matière de lois du pays et de délibération de nature réglementaire, à savoir le congrès).

* 261 Rapport de l'Observatoire des finances locales, p. 90.

* 262 Il n'existe pratiquement pas d'impôts directs dans cette collectivité.

* 263 La gestion des établissements publics locaux d'enseignement, la voirie nationale, la lutte contre les maladies vectorielles, la police de la circulation, la gestion des bibliothèques et le financement de moyens des services d'incendie et de secours.

* 264 Rapport de l'observatoire des finances locales, annexe 3 les collectivités locales d'outre-mer, p. 71.

* 265 Transport intérieur, urbanisme, agriculture, tourisme, pêche, sport, sécurité sociale.

* 266 Statut qui n'a pratiquement pas évolué depuis 1961.

* 267 Pour l'heure, car sa santé économique reposant essentiellement sur le tourisme, il y a lieu d'être circonspect pour l'avenir, sachant qu'il s'agit d'un secteur particulièrement fragile.

* 268 Rapport de l'observatoire des finances locales, p. 90.

* 269 En 2011, sur 1,5 Mds € de recettes de fonctionnement, 72,6 % ont fait l'objet de reversements. Rapport de l'observatoire des finances locales, annexe 3 les collectivités locales d'outre-mer, p. 71.

* 270 Il s'agit de prélèvements qui s'ajoutent aux droits de licences, patentes, contributions foncières, droits d'enregistrement...

* 271 Article 52 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, J.O n° 52 du 2 mars 2004, p. 4183.

* 272 En ce sens qu'elle repose essentiellement sur la fiscalité indirecte. Rapport de la Cour des comptes, p. 67.

* 273 Les deux perçoivent en outre la taxe de traitement des ordures ménagères.

* 274 Sauf à mentionner une demande de la région Guyane qui avait pour objet de permettre à cette collectivité de fixer elle-même le taux de la taxe minière perçue à son profit (article 1599 quinquies B du code général des impôts). En réalité, les habilitations ont concernés des domaines divers comme la formation professionnelle, l'environnement énergétique, l'habitat, le transport...

* 275 Dans les petites collectivités à l'image de Saint-Barthélemy (article 6214-4 de la loi organique précitée du 21 février 2007), Saint-Martin (article 6314-4 de la loi organique précitée). À Saint-Pierre-et-Miquelon, c'est l'État qui assure la mission de la gestion de l'impôt et à Wallis-et-Futuna, les moyens sont plus ou moins partagés avec une participation de la Nouvelle-Calédonie en matière de recouvrement.

* 276 Plus précisément, le recouvrement est opéré par le payeur de la Polynésie (agent DGFIP) et deux receveurs particuliers : le receveur des impôts et celui des hypothèques, eux-mêmes agents de la Polynésie en tant que comptables secondaires.

* 277 Soit 5,8 % pour la patente. Rapport précité de la cour des comptes 2013, p. 82.

* 278 Rappelons que dans cette dernière collectivité, le système fiscal ne comprend aucune sanction pénale.

* 279 Son taux de prélèvements obligatoires est de l'ordre de 16 %.

* 280 À Saint-Barthélemy, le livre des procédures fiscales qui devaient accompagner le code des impôts depuis 2007 se fait attendre.

* 281 Définition proposée par le groupe national Management du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).

* 282 Serge Delplace, Docteur ingénieur traitement de l'information, in colloque international réseau Redford, juin 2009 sur la responsabilité sociétale, une opportunité pour de nouvelles pratiques de management et de gouvernance.

* 283 Directeur général des services.

* 284 In Autonomie et responsabilité des cadres publics, une mutation managériale, coordonné par Pierre-Charles Pupion, collection cadre service public.

* 285 Réseau des Écoles de service public.

* 286 Loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

* 287 Danielle Laport, directrice de l'Aract Martinique, docteur en sociologie et ingénieur social in la responsabilité sociétale, colloque international réseau Redford, juin 2009. Guide méthodologique responsabilité sociétale conçu par l'ARACT Martinique en direction des collectivités territoriales (http://martinique.aract.fr/portal/pls/portal/docs/1/2216361/PDF.

* 288 Accompagnement de la sociologie et de l'anthropologie de la représentation du monde de tous les jours aux Antilles.

* 289 Recrutement de cadres locaux sur des postes d'encadrement.

* 290 Les békés sont les descendants des colonisateurs.

* 291 Manifestation de solidarité entre voisins.

* 292 In « Le besoin de chefs au début du XX e siècle », Yves Cohen, Directeur d'études au CRH, École des hautes études en sciences sociales.

* 293 Conseil en stratégies sociales, professeur associé au Celta (Sorbonne).

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