C. DES MÉRITES ET DES LIMITES DE L'ENJAMBEMENT

Le rapport, publié en mars 2013, de la mission de lutte contre l'inflation normative confiée à MM. Alain Lambert et Jean-Claude Boulard résume ainsi les difficultés évoquées ci-dessus et la réponse en voie de leur être apportée : « Il est admis par tous que cette échéance [janvier 2015] ne sera pas tenue, mais personne n'ose proposer de la repousser. Cette préférence pour la proclamation d'un principe, au risque de provoquer des blocages et donc des retards, est propre à notre culture. La sénatrice Claire-Lise Campion, dans son rapport d'étape sur l'accessibilité, a proposé de contourner la difficulté en suggérant non pas de repousser, mais d'enjamber l'année 2015. L'effort sémantique mérite d'être salué. »

En fin de compte, l'effort n'a pas été seulement sémantique : le rapport « Réussir 2015 » de la sénatrice Campion a débouché sur un programme d'envergure décidé par le comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013. En effet, ce comité a prévu le lancement d'une concertation destinée à dégager les consensus nécessaires, d'une part, à l'élaboration du dispositif d'enjambement du 1 er janvier 2015, les agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) et, d'autre part, à un certain assouplissement du cadre normatif de la mise en accessibilité du cadre bâti, de la voirie et des transports.

Les Ad'AP ont été conçus comme des documents de programmation financière des travaux d'accessibilité. Leur objectif est de permettre aux acteurs n'ayant pas satisfait aux règles d'accessibilité de prendre des engagements sur un calendrier de travaux. Les agendas sont ainsi mis à la disposition des maîtres d'ouvrage et des exploitants d'ERP ainsi que des autorités responsables de transports routiers de voyageurs et de transports ferroviaires pour accompagner, au-delà du début de 2015, la mise en accessibilité de l'existant.

Leur durée est fixée à 3 ans au maximum en ce qui concerne les ERP de 5 e catégorie. Cette durée peut être portée à 6 ans en ce qui concerne les ERP de 1 e à 4 e catégories ainsi que dans le cas d'agendas dits « de patrimoine », c'est à dire intéressant plusieurs établissements, toutes catégories d'ERP comprises. Les patrimoines complexes pourront bénéficier d'agendas d'une durée pouvant aller jusqu'à 9 ans.

Les agendas comprendront une à trois périodes de travaux servant de point d'appui au contrôle de l'exécution des engagements du maître d'ouvrage ou de l'exploitant.

Ceux-ci devront déposer auprès du préfet un dossier d'agendas ou un engagement d'entrer dans la démarche avant le 31 décembre 2014. Dans le cas d'un simple engagement d'entrer dans la démarche, les dossiers d'agendas devront être déposés aux plus tard 12 mois après la publication de l'ordonnance créant l'outil Ad'AP. Des dossiers pourront toutefois être déposés ultérieurement, au prix de la réduction du délai de mise en oeuvre et du paiement d'une pénalité. Les projets d'agendas seront validés par le préfet, cette validation marquant le point de départ de la mise en oeuvre.

En ce qui concerne les points de contrôle évoqué ci-dessus, les maîtres d'ouvrage ou gestionnaires devront transmettre au préfet un bilan des travaux exécutés à la fin des périodes intermédiaires, de même qu'un. D'avancement à la fin de la première année de mise en oeuvre dans le cas d'un Ad'AP plusieurs périodes. Une attestation de fin d'agendas devra aussi être remise. Une amende pourra être appliquée en cas de non transmission des bilans et des attestations finales. La commission départementale pourra proposer l'octroi d'un délai supplémentaire pour achever l'agenda, la délivrance d'une injonction de réaliser les travaux dans un certain délai, la constitution d'une provision comptable correspondante ou l'application d'une sanction financière.

Le risque pénal sera suspendu pendant toute la durée de mise en oeuvre de l'agenda. Les poursuites seront de nouveau possibles à la fin du délai prévu si les travaux n'ont pas été exécutés.

La prorogation du délai de mise en accessibilité sera ainsi accordée, selon des modalités variées, dans le cadre d'un dispositif complexe de contrôle administratif assorti de sanctions relativement lourdes.

On ne saurait, ici, parler de simplification.

En ce qui concerne l'ajustement de l'environnement normatif, une vaste révision de la réglementation en vigueur a été entreprise dans le cadre de la concertation. Elle a donné lieu, d'une part, à un intéressant programme de rattrapage en faveur des personnes atteintes de handicap auditif, mentales, psychiques et visuelles, et, d'autre part, à une assez vaste palette de propositions de simplification des dispositions les moins efficientes de la réglementation.

La méthode n'en est pas moins fondée sur la continuation du « tout réglementaire ». Ainsi se poursuivra, selon toute vraisemblance, la course-poursuite entre une réglementation à vocation exhaustive - que les progrès de la technique rendront assez vite obsolète -, et les incohérences que l'infinie diversité des situations concrètes fera inévitablement apparaître au fur et à mesure de la mise en oeuvre du corpus réglementaire révisé.

Ajoutons que les moyens dégagés à juste titre par le Gouvernement pour aplanir les principales difficultés que pose la mise en oeuvre de la loi du 11 février 2005 ne pourront pas être mis en oeuvre dans l'ensemble des secteurs où se pose le problème de la complexité normative. Il convient donc de dégager des pistes novatrices.

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