Rapport d'information n° 670 (2013-2014) de M. Philippe DOMINATI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 1er juillet 2014

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N° 670

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 1er juillet 2014

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la direction de l' information légale et administrative (DILA) ,

Par M. Philippe DOMINATI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Mme Nicole Bricq, MM. Jacques Chiron, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Hervé Marseille, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, Jean-Marc Todeschini, Maurice Vincent, Richard Yung .

PRINCIPALES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La DILA est née de la fusion, en 2010, de deux directions : celle de la Documentation française et celle des Journaux officiels. Quatre ans après, la fusion peut être considérée comme une réussite d'un point de vue opérationnel, même si les économies « potentielles » identifiées ex ante sont difficilement mesurables ex post .

La DILA est financée par un budget annexe, qui dégage chaque année depuis 2010 un excédent : en 2013, celui-ci s'élève à 26 millions d'euros, qui résultent de 201 millions de recettes et des dépenses à hauteur de 175 millions d'euros. Cet excédent ne doit pas conduire à ignorer les défis auxquels fait face cette direction, dont les missions contribuent à moderniser les services publics.

En effet, la DILA garantit l'accès au droit, aux informations légales et mène, au titre de sa fonction d'éditeur, une mission de vulgarisation ; or, le développement du numérique transforme les conditions d'exercice de ces métiers .

95 % des recettes sont issues des annonces légales et correspondent en fait à des obligations de publicité pesant sur les entreprises ou les collectivités publiques ; les autres recettes , et en particulier les ventes de publications et d'abonnements ou les prestations et travaux d'édition s'avèrent particulièrement atones . Cette situation traduit la difficulté de la DILA à trouver sa place, notamment en tant qu'éditeur public mais aussi à rencontrer un large public pour ses publications.

Recommandation n° 1 : confirmer, par une déclaration officielle, l'intention d'arrêter l'impression du Journal officiel (JO) « papier » à la fin de l'année 2016.

Recommandation n° 2 : redéfinir les relations avec la Société anonyme de composition et d'impression du Journal officiel (SACIJO) en raison de l'arrêt du JO « papier » et de la réorientation des missions de la DILA vers les activités numériques.

Recommandation n° 3 : accélérer le rythme du changement en prenant, à court terme, une décision claire concernant l'avenir des activités d'édition et d'impression.

Recommandation n° 4 : doter la DILA d'une comptabilité analytique fine permettant de mesurer la compétitivité de ses différentes activités afin de pouvoir, le cas échéant, les réorienter.

Mesdames, Messieurs,

Créée en 2010 suite à la fusion de deux directions historiques (la direction de la Documentation française et la direction des Journaux officiels), la direction de l'information légale et administrative (DILA) exerce les missions de ces deux anciennes directions dans un cadre en pleine mutation en raison de la révolution numérique.

Les missions de la DILA sont résolument tournées vers l'usager, le citoyen, qu'il s'agisse de garantir l'accès à l'information et au droit ou de contribuer à la vulgarisation des affaires publiques. Aussi, l'enjeu pour la DILA est désormais de garantir l'accessibilité et la disponibilité d'informations fiables et pertinentes en ligne.

En application des dispositions de l'article 57 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), votre rapporteur spécial du budget annexe « Publications officielles et informations administratives » a décidé de consacrer une mission de contrôle budgétaire à la DILA, qui doit être réformée en profondeur et rapidement.

À ce titre, votre rapporteur spécial a évalué les conséquences de la fusion opérée il y a quatre ans, qui peut être considérée comme une réussite.

La DILA doit désormais s'engager dans un nouveau cycle et adapter, de façon ambitieuse et innovante, l'exercice de ses missions aux perspectives offertes par le numérique. Cette évolution est risquée mais nécessaire, pour sauvegarder la vocation de direction moderne de la DILA, au service des citoyens et des autres administrations.

PREMIÈRE PARTIE : LA RÉUSSITE D'UNE FUSION NÉCESSAIRE

I. UNE DIRECTION RÉCENTE, NÉE DE LA FUSION DE DEUX DIRECTIONS HISTORIQUES

A. UN RAPPROCHEMENT LOGIQUE...

La création de la DILA, en 2010, résulte de la fusion de la direction des Journaux officiels (DJO) et de la direction de la Documentation française (DDF).

En effet, dès le début des années 2000, une réflexion a été engagée quant à la possibilité de rapprocher ces deux directions.

1. La direction des Journaux officiels

Héritier de la Gazette de 1631 qui bénéficiait, dès 1635, du monopole de publication des décisions royales et faits marquants de la vie politique, devenue Moniteur au XVIII e siècle, le Journal officiel de la République française est ainsi nommé en 1848.

À cette époque, en raison de la difficulté pour l'État de recruter des ouvriers du livre afin d'assurer la publication quotidienne du Journal officiel, il fut décidé de recourir, par le biais d'un prêt de main d'oeuvre, à la Société anonyme de composition et d'impression du Journal officiel (SACIJO), dont les salariés relèvent (aujourd'hui encore) du statut de la presse quotidienne parisienne. Les salariés de la SACIJO étaient chargés tout particulièrement de la composition mais aussi de l'impression du Journal officiel quotidien, la SACIJO étant rétribuée en conséquence par la direction des Journaux officiels.

La direction des Journaux officiels était financée, jusqu'en 2007, par un budget annexe. Cette « mission » au sens de la loi organique aux lois de finances 1 ( * ) (LOLF) ne comportait qu'un seul programme. Or, l'article 7 de la LOLF prévoit que : « une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ».

Ainsi, saisi sur la loi de finances pour 2006, le Conseil constitutionnel a précisé 2 ( * ) , s'agissant du budget annexe « Journaux officiels », « qu'une mission ne saurait comporter un programme unique ; que ce budget annexe et les nouvelles règles organiques devront être mis en conformité à compter de l'année 2007 ; que, sous cette réserve, il n'y a pas lieu, en l'état, de le déclarer contraire à la Constitution ».

2. La direction de la Documentation française

Créée en 1945 et issue de la fusion de deux services créés par la Résistance et du service d'analyse de la presse étrangère, la Documentation française joue principalement le rôle d'un éditeur public : elle remplit notamment une mission de vulgarisation et est également l'éditeur des administrations.

En outre, elle fut incitée, à partir des années 1970 (cf. infra ), à diffuser des informations documentées sur d'autres supports (téléphone, minitel, Internet). Ainsi, à partir de 1999, la Documentation française a géré le site « service-public.fr » et, en 2002, elle a créé le site « vie-publique.fr ».

Les missions de la direction de la Documentation française

Les attributions de la direction de la Documentation française sont fixées ainsi qu'il suit :

1° La direction rassemble, en vue de la mettre à la disposition des administrations et du public, une documentation générale sur les principaux problèmes d'actualité intéressant la France et l'étranger ;

2° Elle élabore, édite et diffuse des études et des documents d'information générale et de vulgarisation ;

3° Elle réalise, à l'occasion de ces diverses activités, une coordination interministérielle, d'une part, dans le domaine de la documentation, d'autre part, dans celui de l'édition et de la diffusion des diverses publications d'informations générales des administrations et services publics ;

4° Elle est chargée de promouvoir des études de documentation informatisée, et de créer, dans les domaines de sa compétence, des banques de données dont elle assure la gestion ;

5° Elle assure le secrétariat de la commission de coordination de la documentation administrative (...) ;

6° Elle agit comme éditeur pour le compte d'administrations et d'organismes publics.

Source : article 1 er du décret n° 76-125 du 6 février 1976 relatif aux attributions de la direction de la Documentation française (abrogé par le décret du 13 janvier 2010 fixant les missions de la DILA)

Jusqu'en 2006, la direction de la Documentation française faisait l'objet d'un double mode de financement : par le budget général et par des ressources propres, inscrites au compte de commerce créé par l'article 58 de la loi de finances pour 1970. Ce mode de financement traduisait la dualité des missions de la Documentation française : des activités concurrentielles et des activités de service public, telle la mise à disposition des citoyens d'une information fiable.

En 2003, la dégradation de la situation financière du compte de commerce a conduit au versement d'une subvention exceptionnelle de 3 millions d'euros du budget général à la direction de la Documentation française, traduisant ses difficultés à dégager des recettes en tant qu'éditeur.

Enfin, en 2003, un référé 3 ( * ) de la Cour des comptes a souligné la complémentarité des activités des deux directions. Notre collègue François Marc, alors rapporteur spécial, a également proposé que « de nouvelles coopérations entre la Documentation française et les Journaux officiels » soient envisagées.

Ainsi, l'obligation organique de modifier la mission « mono-programme » des Journaux officiels, le déséquilibre du compte de commerce de la Documentation française et la complémentarité des missions des deux directions ont justifié le rapprochement de ces deux directions.

B. ... MAIS DÉCIDÉ TARDIVEMENT

La création de DILA résulte d'un processus lent, qui a véritablement débuté en 2005.

Après une mission conduite par Frédéric Tiberghien sur les conditions d'un rapprochement « fonctionnel », le Secrétaire général du Gouvernement, Jean-Marc Sauvé, a souhaité, en 2005, que quatre domaines de coopération entre les deux directions soient retenus : l'impression, l'édition, la diffusion et l'informatique.

L'année suivante, la loi de finances pour 2007 4 ( * ) a prévu la clôture du compte de commerce « Opérations à caractère industriel et commercial de la Documentation française » et du budget annexe « Journaux officiels » au 31 décembre 2006 et la création d'un budget annexe commun aux deux directions intitulé « Publications officielles et informations administratives ». Ce nouveau budget annexe comprenait deux programmes 5 ( * ) correspondant aux anciennes directions.

Selon le rapport de notre collègue Philippe Marini, alors rapporteur général, « la bonne situation financière des Journaux officiels permettra d'apurer le déficit de la Documentation française » 6 ( * ) .

Plus généralement, les recettes issues des activités de l'ancienne direction de Journaux officiels devaient contribuer à financer les dépenses de la direction de la Documentation française, sans qu'un abondement depuis le budget général ne soit plus nécessaire.

Enfin, le principe de la fusion des deux directions a été acté en février 2008 par le Secrétaire général du Gouvernement, après la réunion du Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) et dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

II. QUATRE ANS APRÈS LA FUSION, UN BILAN PLUTÔT POSITIF

A. UNE FUSION LENTE MAIS RÉUSSIE

À partir de 2008, les missions et l'organisation de la nouvelle direction ont été élaborées par des groupes de travail et au début de l'année 2010 7 ( * ) , la fusion a pu être considérée comme effective.

En effet, selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, « il aura fallu (...) deux années de réflexions et de concertation avec les représentants du personnel, pour tenir compte des différences de statuts (public, privé) et négocier un aménagement des conditions d'emploi » 8 ( * ) .

Cependant, des services communs ont été créés en 2008 et 2009, notamment s'agissant des systèmes d'information et de la comptabilité.

Concomitamment à la création de la DILA en 2010, deux nouveaux programmes transversaux ont remplacés les programmes correspondant jusqu'alors aux deux anciennes directions. Cette évolution, qui a matérialisé, dans la maquette budgétaire, la fusion des deux directions, était rendue indispensable en raison des fréquents transferts de recettes d'un programme à l'autre, correspondant aux situations financières différenciées des deux directions préexistantes.

Enfin, en 2012, une nouvelle refonte de l'organisation de la DILA a été menée, conduisant à un regroupement de l'ensemble des « métiers » de la DILA gérés par une sous-direction unique.

Il aura donc fallu quatre ans pour conduire cette fusion , dont deux années consacrées uniquement à la définition de l'organigramme et à la négociation salariale.

Pour la DILA, « malgré les différences de cultures administratives et de statuts, et la perspective tracée d'une réduction progressive des effectifs, la fusion s'est faite sans conflit social » 9 ( * ) .

La fusion peut être considérée comme réussie car l'organisation actuelle de la DILA est plus rationnelle et offre des possibilités nouvelles , en particulier grâce à la possibilité de développer la « chaîne de l'accès au droit ». Cette chaîne permet à la DILA de suivre toutes les étapes de la production du droit, de sa publication à sa mise en oeuvre et d'offrir ainsi aux citoyens la possibilité d'effectuer, en ligne, la démarche concernée.

Par ailleurs, des services dits « support » ont été mutualisés et des équipements (notamment en matière d'impression) sont désormais utilisés par tous et non plus seulement par les Journaux officiels, contribuant à justifier l'achat, en 2008, d'une nouvelle rotative pour un coût total de 10 millions d'euros (cf. infra ).

B. DES ÉCONOMIES DIFFICILEMENT MESURABLES

Selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, « les discussions avec la direction du budget concernant la mise en oeuvre du nouveau budget annexe commun en 2007 ont en outre permis (...) de mesurer un potentiel d'économies d'échelle en cas de fusion, avec la mise en commun des services de soutien ». Toutefois, ce potentiel n'a pas été chiffré.

En outre, il est difficile d'estimer les économies d'échelle dégagées par une fusion en raison de la fragilité des hypothèses retenues pour estimer les dépenses qui auraient été observées en l'absence de fusion.

En ce qui concerne les dépenses de personnel, les deux années de concertation nécessaires pour organiser la fusion ont notamment consisté à « négocier un aménagement des conditions d'emploi avec la direction du budget et la direction générale de l'administration et de la fonction publique, pour rapprocher les niveaux de rémunération des agents » 10 ( * ) .

Ainsi, les salariés de la direction des Journaux officiels ont conservé leur statut de droit privé avec application de la convention collective de la presse parisienne et les personnels de la direction de la Documentation française ont conservé leur statut de fonctionnaires ou de contractuels de droit public.

« Une convergence des rémunérations a été mise en oeuvre, en trois ans, à partir de 2010, sous forme indemnitaire, financée par les économies de masse salariale liée à la réduction des effectifs ».

Ainsi, entre 2009 et 2012, les effectifs de la DILA ont diminué de 91 équivalents temps plein travaillé (ETPT), permettant une économie de l'ordre de 4,5 millions d'euros sur trois ans. Pour la même période, une enveloppe de 2,14 millions d'euros a permis la convergence des rémunérations entre les agents de la Documentation française et ceux des Journaux officiels grâce à une « indemnité de modernisation des métiers ».

L'indemnité de modernisation des métiers correspond clairement à un coût lié à la fusion ; s'agissant des « gains » résultant de la fusion, et notamment de la réduction des effectifs et des économies associées, il est impossible de distinguer les suppressions de postes liées à des économies d'échelle de celles résultant d'une modification profonde des activités de la DILA.

Plus généralement et sans que l'on puisse isoler ce qui relève des éventuelles conséquences de la fusion, il convient de souligner que depuis 2009, les effectifs sont en baisse et les crédits maîtrisés .

Ainsi, entre 2009 et 2013, le montant des crédits de paiement a augmenté de 169 millions d'euros à 175 millions d'euros, soit une hausse de 3,32 % sur la période.

Il faut noter que les dépenses de personnel de la SACIJO, à laquelle la DILA recourt toujours, ne sont pas retracées dans les dépenses de titre 2 et que ses effectifs ne sont pas compris dans le plafond d'emplois du budget annexe.

Évolution des dépenses et des effectifs

(en euros et en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat

Lecture : au sein du total des dépenses de personnel, on peut distinguer les dépenses de personnel de la DILA de celles de la SACIJO.

Si les effectifs de la DILA ont diminué de 116  ETPT, soit 14 % entre 2009 et 2013, ses dépenses de personnel (hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions ») sont stables sur la même période ; les dépenses de personnel de la SACIJO ont, quant à elles, diminué de près de 9 %, contribuant ainsi fortement à la baisse globale des dépenses de personnel de la mission de près de 3 %.

Depuis 2009, la baisse des effectifs de la DILA a bien un impact négatif sur les dépenses de personnel (hors CAS « Pensions »), qui est toutefois compensé par des mesures catégorielles (notamment l'indemnité de modernisation des métiers) et un glissement vieillesse technicité (GVT) positif .

Facteurs d'évolution de la masse salariale de la DILA (hors CAS Pensions)
2009-2013

(en millions d'euros)

N.B. : dans la rubrique « Autres » figurent notamment l'incidence des variations de quotité de travail ainsi que des éléments variables et régularisations.

Source : commission des finances du Sénat

Enfin, la fusion n'a pas été l'occasion d'une rationalisation immobilière, dans la mesure où l'ensemble des sites occupés dans les deux anciennes directions ont été conservés et en particulier :

- le site de l'avenue Desaix à Paris (XV e arrondissement): 27 000 m 2 , dont 5 891 m 2 de surface utile nette (SUN) ;

- le site du Quai Voltaire à Paris (VII e arrondissement) : 5 600 m 2 , dont 1 944 m 2 de SUN ;

- le site de l'avenue de Ségur à Paris (VII e arrondissement) : 6 414 m 2 ; la DILA, qui louait une partie de ces locaux, a dû les quitter en octobre 2013 en raison des travaux de réhabilitation de l'ensemble immobilier de Ségur-Fontenoy. Aussi, pour la période des travaux (entre fin 2013 et 2017), la DILA a loué une partie de la Tour Mirabeau, située au 39-43, quai André Citroën (dans le XV e arrondissement).

La DILA devrait réintégrer le site Ségur en 2017 et, « dans cette perspective, un schéma directeur immobilier interne a été lancé début 2014 dans le but de rationaliser l'occupation de sites parisiens de la DILA. L'objectif est de concentrer les effectifs sur deux sites parisiens à l'horizon 2017. Par conséquent, le site du Quai Voltaire sera vendu et la location du site de la Tour Mirabeau, arrêtée. Dans le cadre de ce projet, un programmiste immobilier assiste actuellement la gestion immobilière de la DILA pour trouver des solutions d'aménagement afin d'optimiser les surfaces de bureaux sur le site de Desaix » 11 ( * ) .

Ainsi, quatre ans après la fusion des deux anciennes directions, la fusion a permis de rationaliser une part des activités aujourd'hui exercées par la DILA et de mutualiser effectivement des fonctions (dites « support ») mais aussi l'utilisation de certains outils de production, au premier rang desquels figure la rotative (cf. infra ).

SECONDE PARTIE : UNE MUTATION À RISQUES

I. DES MISSIONS EN MUTATION : LE « VIRAGE » DÉCISIF DU NUMÉRIQUE

Les missions de la DILA sont définies par le décret de 2010 précité et elles correspondent aux activités anciennement exercées par la direction des Journaux officiels et par la direction de la Documentation française.

Les missions de la DILA

1° Elle diffuse l'ensemble des données dont la publication est obligatoire en vertu des lois et des règlements ou qui nécessitent des garanties particulières de fiabilité.
Elle assure plus particulièrement :

- l'édition et la diffusion des lois, ordonnances, décrets et autres actes ou documents administratifs qui doivent être publiés au Journal officiel de la République française ;

- la publicité des débats parlementaires ;

- la publication des informations contribuant à la transparence de la vie associative, économique et financière ;

- la mise à disposition du public des données qui facilitent l'accès au droit ;

2° Elle assure la conception et le fonctionnement de services d'information utilisant différents supports qui permettent aux citoyens de connaître leurs droits et obligations et facilitent leurs démarches ; elle met à la disposition du public un service de renseignement par téléphone ;

3° Elle favorise l'accès des citoyens à la vie publique et au débat public par l'édition et la diffusion de publications, la mise à disposition de documents et d'espaces de diffusion sur l'internet ; à cet effet, elle peut agir comme imprimeur, éditeur ou diffuseur pour le compte d'administrations et d'organismes publics ou publier pour son compte propre des périodiques et ouvrages de vulgarisation sous la marque éditoriale de la Documentation française ;

4° Elle prépare la politique interministérielle dans le domaine de la diffusion légale, de l'information administrative et de l'édition publique ; elle assure, à ce titre, le secrétariat du conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative.

Source : décret n° 2010-31 du 11 janvier 2010 relatif à la direction de l'information légale et administrative

A. LE DÉCLIN D'UNE MISSION HISTORIQUE : VERS LA FIN DE L'IMPRESSION DU JOURNAL OFFICIEL ?

Le nombre d'abonnés au Journal officiel (JO) en version papier ne cesse de diminuer, passant de 43 450 exemplaires en 2000 à 3 129 en 2013.

Pourtant, la version du JO relative aux « lois et décrets » demeure utilisée : au 31 décembre 2013, on dénombre 64 726 abonnés au sommaire du JO mis en ligne gratuitement sur le site Internet Legifrance.

Aujourd'hui, seuls 39 % des textes ont été publiés en version électronique seule, tandis que certaines mesures nominatives n'existent que sous un format « papier ».

La rapide diminution du nombre d'abonnés au JO « papier » conduit à s'interroger sur la pertinence de poursuivre son impression quotidienne et un arrêt de l'impression du JO serait envisagé à horizon 2016.

Recommandation n° 1 : confirmer, par une déclaration officielle, l'intention d'arrêter l'impression du Journal officiel « papier » à la fin de l'année 2016.

Un tel arrêt de l'impression du Journal officiel devrait conduire la DILA à s'interroger sur l'avenir de ses relations avec la SACIJO, dont le personnel relève du statut de presse quotidienne nationale et bénéficie, à ce titre, de conditions salariales avantageuses.

Ainsi, en 2013, la DILA a versé 43 millions d'euros à la SACIJO, permettant à celle-ci de rémunérer ses 206 salariés (30 millions d'euros) et de financer les retraites des anciens salariés.

Quant aux dépenses du seul personnel de la DILA, elles s'élèvent en 2013 à 73 millions d'euros : au total, les charges de personnel (DILA et SACIJO) représentent donc plus de 60 % de l'ensemble des dépenses de la direction.

Les effectifs de la SACIJO ont fortement diminué ces dernières années, avec la mise en place, en 2006, d'un plan de réduction des effectifs, qui ont ainsi été réduits de 450 à 250 personnes en deux ans. Toutefois, aujourd'hui, la pyramide des âges des salariés de la SACIJO ne permet pas d'entrevoir de nouveaux départs à la retraite à court terme (seuls six salariés ont 58 ans ou plus).

Recommandation n° 2 : redéfinir les relations avec la Société anonyme de composition et d'impression du Journal officiel (SACIJO) en raison de l'arrêt du JO « papier » et de la réorientation des missions de la DILA vers les activités numériques.

En 2008, il a été décidé d'investir dans l'achat, pour 8 millions d'euros 12 ( * ) , d'une nouvelle rotative, permettant à la fois de garantir l'impression quotidienne du Journal officiel dans des délais réduits mais aussi d'utiliser au maximum ce nouvel équipement pour des travaux en couleur et de haute qualité.

En effet, jusqu'alors, l'imprimante utilisée pour imprimer le JO quotidien ne pouvait servir qu'à cette tâche.

En outre, elle nécessitait la présence de dix personnes tandis que la nouvelle rotative peut fonctionner avec une équipe de six agents - ce changement de l'outil de travail a permis à la direction de justifier plus facilement une réduction des effectifs .

La rotative, complètement opérationnelle en avril 2013, sera amortie en 2021. Il convient de continuer à l'utiliser et même de l'employer au maximum de ses capacités, en renforçant les travaux de haute qualité effectués par la DILA, en particulier pour les autres administrations (cf. infra ).

En effet, à ce jour, la rotative couleur est sous-utilisée : 113,6 millions de pages ont été imprimées en 2013, l'objectif étant fixé à 200 millions de pages en 2014.

B. UN ÉDITEUR PUBLIC QUI PEINE À S'AFFIRMER

La DILA joue également le rôle d'éditeur public : elle doit élaborer ou sélectionner des contenus en fonction de leur qualité et de leur intérêt, accompagner les auteurs dans l'élaboration de leur projet, choisir la forme éditoriale la plus adéquate (numérique, papier), mais aussi le meilleur mode de diffusion et assurer un référencement pertinent de la production.

L'existence d'une édition publique est légitime. Ainsi, comme le rappelle une circulaire 13 ( * ) de 1998, du Premier ministre Lionel Jospin, « il est normal que les éditeurs relevant de l'État produisent et diffusent des titres qui, en raison de la spécialisation du sujet abordé ou de l'étroitesse du marché potentiel, ne pourraient pas être offerts au public à un prix abordable sans un financement public. Cela constitue la raison d'être principale des éditeurs publics ».

D'ailleurs, selon le rapport 14 ( * ) du Médiateur de l'Edition publique, « les éditeurs publics témoignent d'une intégration satisfaisante sur le marché du livre, d'une bonne réactivité face à ses fluctuations et d'une réelle cohérence dans l'offre éditoriale proposée - le plus souvent complémentaire de l'offre des éditeurs privés -, ce qui confère à ces publications toute leur importance et leur légitimité ».

L'édition publique représente :

- 5 452 titres publiés (dont 2 586 cartes), soit 6 % du nombre de titres publiés par l'édition française ;

- 6,1 millions d'exemplaires vendus, soit 1,4 % des exemplaires vendus par l'ensemble des éditeurs ;

- 44,5 millions d'euros de chiffres d'affaires, soit 1,7 % du chiffre d'affaires du secteur.

Le paysage de l'édition publique s'avère particulièrement éclaté, avec plus de 70 éditeurs publics. Or, sept éditeurs « institutionnels » 15 ( * ) (dont la DILA) réalisent 60 % du chiffre d'affaires et 70 % des exemplaires vendus .

En effet, les ministères tendent à pratiquer leur propre activité éditoriale sans mutualisation aucune avec les autres services de l'État.

Pourtant, plusieurs initiatives ont été prises afin d'éviter que des administrations dont ce n'est pas le coeur de métier exercent des activités d'éditeurs :

- la circulaire précitée du Premier ministre de 1998 précisait que « les administrations et établissements publics dont ce n'est pas la vocation ne doivent pas entreprendre d'activités éditoriales par leurs propres moyens » ;

- une circulaire 16 ( * ) , également signée par Lionel Jospin, et datant de 1999 rappelait que « les administrations et établissements dont ce n'est pas la vocation ne doivent pas entreprendre des activités éditoriales. Lorsqu'ils souhaitent publier et diffuser des ouvrages, il leur faut soit faire appel aux organismes publics qui sont investis statutairement d'une mission éditoriale, soit recourir à des éditeurs privés, notamment dans le cadre de coéditions » ;

- enfin, une circulaire 17 ( * ) du Premier ministre François Fillon, en 2012, indiquait que « parmi les éditeurs publics, par son statut et ses compétences, la direction de l'information légale et administrative (DILA) est le référent interministériel de première intention pour les administrations de l'État et leurs opérateurs en matière de publication ».

Ainsi, sous la marque « La Documentation française », la DILA est éditeur délégué pour le compte des administrations.

Or, la DILA ne parvient pas, à ce jour, à s'affirmer en tant qu'éditeur public au service des autres administrations, qui continuent à éditer pour leur propre compte .

Ainsi, en 2013, la DILA a édité 145 ouvrages pour le compte d'administrations (contre 177 en 2012), pour un chiffre d'affaires de 1 million d'euros. À titre de comparaison, les activités d'édition de la DILA pour son propre compte ont rapporté 2,3 millions d'euros.

En 2013, la DILA a bénéficié de 2,9 millions d'euros de recettes au titre des prestations et travaux d'édition, alors que la loi de finances pour 2013 prévoyait 4,5 millions d'euros de recettes. Le résultat s'avère donc bien en-deçà de la prévision.

Pourtant, dans la mesure où l'édition est un véritable métier, une compétence unique, « centralisée » à la DILA et dont pourrait bénéficier l'ensemble des administrations, permettrait de donner une cohérence à la politique éditoriale de l'État, tout en évitant des coéditions avec le secteur privé qui peuvent s'avérer coûteuses .

Une telle orientation de la DILA au service des administrations n'est pas exempte de risques car dans un contexte budgétaire contraint, les ministères seront sans doute tentés de réduire leurs dépenses de publication. Mais la DILA pourra alors jouer pleinement son rôle de conseil s'agissant de l'édition, le cas échéant pour proposer aux administrations de ne pas éditer ou de choisir une édition dématérialisée.

Aussi, il est indispensable de s'interroger sur la pertinence pour l'État de disposer d'un éditeur public comme la DILA et, le cas échéant, de déterminer les moyens susceptibles de permettre à la DILA de s'affirmer comme éditeur de référence pour le compte de l'ensemble des administrations. Dans cette perspective, la DILA pourrait se positionner comme une véritable direction « support », au service des administrations.

Recommandation n° 3 : accélérer le rythme du changement en prenant, à court terme, une décision claire concernant l'avenir des activités d'édition et d'impression.

C. UNE ADAPTATION AU NUMÉRIQUE BIEN ENGAGÉE MAIS À RENFORCER

Alors que la DILA doit garantir un accès au droit et à une information objective et de qualité, les possibilités offertes à cet égard par Internet ont profondément modifié les conditions d'exercice de cette mission . Aussi, la DILA propose une offre étoffée et reconnue de sites Internet qu'elle gère et développe .

Les objectifs de la DILA, suivis dans les programmes et rapports annuels de performance concernent notamment la modernisation de la diffusion légale en développant l'offre numérique et l'optimisation de la production et de la diffusion de données ; le défi du numérique est donc bien pris en compte dans la mesure de la performance de la DILA.

Ainsi, s'agissant de la diffusion légale , qui vise à garantir l'accès au droit et à assurer la transparence économique et financière grâce à la publication d'avis d'appels à la concurrence, des informations sur la vie des entreprises, les supports sont désormais numériques, garantissant une plus grande transparence, notamment en ce qui concerne la publicité des marchés publics.

Il faut souligner la grande réussite du site Internet Legifrance, modèle unique au monde qui a totalisé près de 100 millions de visites en 2013.

En ce qui concerne l'information administrative , le renseignement téléphonique demeure utile, notamment pour éviter de renforcer la fracture numérique. Ainsi, grâce au service 3939 Allo Service Public, les citoyens peuvent être informés de leurs droits et obligations et, le cas échéant, être réorientés vers le service compétent ; le centre d'appel de ce service est situé à Metz et compte 66 agents, chacun répondant en moyenne à 6 000 appels par an.

Grâce à deux niveaux de réponse - un niveau « normal » et un niveau « expert », 88 % des usagers « estiment que la réponse donnée est claire et restent persuadés de l'utilité et de la fiabilité du service rendu » 18 ( * ) .

En outre, depuis le mois de juillet 2013, tout appel téléphonique est complété par l'envoi d'un « mémo de fin de conversation » : un résumé de la conversation, comprenant le détail des informations indiquées par téléphone, est envoyé par courrier électronique à l'usager. Cette démarche répond à la recommandation n° 19 du Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative (COEPIA) 19 ( * ) relative à l'amélioration de la qualité du renseignement administratif des usagers par téléphone.

Mais la DILA est également chargée de sites Internet conçus pour les usagers des services publics : il s'agit du site « Service-public.fr », référence des usagers de l'administration ou de « mon.service-public.fr », qui vise à faciliter l'accès du citoyen aux services publics, permettant ainsi de réaliser un million de démarches en ligne en 2013.

6,8 millions de comptes sont recensés sur le site « mon.service-public.fr », permettant notamment de conserver et de réutiliser les pièces justificatives enregistrées et de réaliser des démarches comme par exemple : les demandes d'actes d'état civil, d'inscription sur les listes électorales ou le recensement citoyen obligatoire.

Aussi, l'ensemble des missions de la DILA sont concernées par la révolution numérique et la direction doit s'adapter pour continuer à offrir un service de qualité, adapté aux nouvelles pratiques et susceptible de permettre à toutes les administrations de réaliser des économies.

D. DES CONSÉQUENCES SUR LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

1. Une direction consciente des difficultés d'une telle reconversion

Dans ce contexte, les métiers exercés par les 812 collaborateurs de la DILA doivent évoluer.

Consciente de cette nécessité, la direction de la DILA a mis en place une gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) visible et qui se veut ambitieuse.

Celle-ci prend en compte le besoin en nouvelles compétences, tout en cherchant à mobiliser les ressources internes grâce à une offre riche de formations.

Ainsi, trois équivalents temps plein (ETP) et une personne du pôle « Stratégie » de la DILA sont chargés de mettre en oeuvre la GPEEC. D'une part, des entretiens individuels permettent de recenser le « patrimoine de compétences » de la DILA et d'autre part, des fiches de postes, qui détaillent les compétences requises et correspondent aux besoins de la DILA sont rédigées. Enfin, en relation avec la direction du budget et pour définir le schéma d'emplois de la DILA, une modélisation de l'évolution des effectifs est effectuée chaque année.

Dans ce contexte, il n'est pas prévu de réduire les effectifs de la DILA à horizon 2017, mais les départs en retraite programmés devraient conduire à une baisse de 34 ETP (soit 5 %) entre 2013 et 2016.

2. Un exemple du décalage entre ressources et besoins : l'accroissement du recours aux sous-traitants informatiques

Les difficultés et la lenteur d'une telle reconversion ont pu conduire la DILA à recourir à de nombreux sous-traitants en matière informatique.

Ainsi, en 2013, le coût de l'ensemble des prestations informatiques s'élève à 6,6 millions d'euros, en forte hausse depuis 2008.

Évolution (2008-2013) du coût (TTC) des prestations en matière informatique

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données du questionnaire

La forte augmentation observée entre 2012 et 2013 peut s'expliquer en partie par un changement de périmètre en 2013 en raison notamment de la reprise de l'hébergement du site « mon.service-public » jusqu'alors pris en charge par le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP).

Toutefois, la hausse du coût des prestations externes en matière informatique observée depuis 2008 pose la question de la capacité de la DILA à développer, en interne, les compétences requises pour faire face aux mutations de son activité .

Il convient d'être particulièrement vigilant s'agissant de ces dépenses, qui peuvent s'avérer rigides car il est souvent difficile remettre en cause certains contrats de sous-traitance en raison de coûts de sortie prohibitifs.

La DILA est consciente de ce problème et une partie du projet stratégique de la DILA pour la période 2014 à 2017 est consacrée au choix de la sous-traitance ou de l'internalisation dans le domaine informatique . Tout en rappelant que son « coeur de métier n'est pas de développer des systèmes informatiques », elle prévoit par exemple de n'utiliser des compétences externes que pour des expertises spécifiques.

II. DES RECETTES À DIVERSIFIER

A. DES RECETTES D'ANNONCES PRÉPONDÉRANTES

1. Un budget annexe jusqu'à présent excédentaire...

Selon l'article 16 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), « certaines recettes peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux ou de procédures comptables particulières au sein du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial ».

Le recours à un budget annexe constitue donc une exception au principe de non affectation d'une recette à une dépense ; c'est pourquoi, il a été strictement encadré par l'article 18 de la LOLF : « des budgets annexes peuvent retracer, dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'État non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances , lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services » .

Le budget annexe « Publications officielles et information administrative » remplit les conditions prévues par la LOLF et la DILA perçoit des recettes issues de la publication des annonces légales et, mais de façon plus marginale, de la vente de publications (cf. infra ).

Selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, « l'excédent budgétaire du budget annexe est pris en compte chaque année pour calculer le solde du budget général de l'État ».

En 2013, l'excédent budgétaire s'élève à 26 millions d'euros , en baisse depuis 2011 (- 18 millions d'euros, soit 41 %). Dans la mesure où les dépenses de la mission sont relativement stables, les variations de l'excédent dépendent principalement du dynamisme des recettes .

En effet, malgré cette affectation de recettes au budget annexe, la DILA n'en dispose pas à son gré : en particulier, elle ne peut pas adapter (à la hausse) ses dépenses à l'évolution de ses recettes.

Évolution parallèle des recettes et de l'excédent budgétaire depuis 2010

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Cet excédent résulte d'encaissements supérieurs aux décaissements pendant l'année considérée. Depuis 2010 et chaque année, la prévision de l'excédent s'avère assez nettement en-dessous de la réalité , l'écart variant, sur ces quatre années, entre 34 millions et 19 millions d'euros.

Évolution de l'excédent du budget annexe

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

La sous-estimation de l'excédent s'explique par des prévisions de recettes prudentes et un niveau de dépenses moindre par rapport aux prévisions.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, la DILA affiche traditionnellement des objectifs ambitieux s'agissant des projets à mener dans l'année - justifiant le niveau des dépenses prévues -, qui doivent être revus à la baisse en cours de gestion .

Écarts à la prévision (recettes et dépenses) depuis 2010

(en euros)

Recettes

Dépenses

Source : commission des finances du Sénat

Si l'on peut saluer la prudence de ces prévisions, la « bonne surprise » qu'apporte le budget annexe chaque année grâce à un excédent supérieur à la prévision ne doit pas pour autant conduire à négliger une réflexion sur les réformes que la DILA doit entreprendre .

2. ... grâce à des recettes correspondant à des dépenses obligatoires des entreprises ou des collectivités publiques

Au sein des recettes de la DILA, il convient de distinguer les recettes d'annonces légales des autres recettes.

En effet, en 2013, 94 % des recettes du budget annexe proviennent des seules annonces légales (annonces des marchés publics, annonces légales obligatoires et annonces civiles et commerciales) qui constituent des dépenses obligatoires pour certaines entreprises et collectivités publiques.

En effet, les organismes publics passant une commande publique doivent rendre publics leurs appels d'offres : ainsi, à partir de certains seuils, la publication au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) - et au JO de l'Union européenne - est obligatoire. Par exemple, pour les marchés de travaux, ce seuil est fixé à 5,186 millions d'euros. En 2013, les annonces publiées au BOAMP ont procuré 95 millions d'euros de recettes à la DILA.

Les entreprises ont également des obligations de publications d'informations administratives et financières : le code de commerce prévoit ainsi que les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé doivent notamment publier au bulletin des annonces légales obligatoires (BALO) les comptes annuels approuvés par l'assemblée générale et l'attestation des commissaires aux comptes. Une telle obligation existe également s'agissant de certains établissements de crédit. Les recettes du BALO s'élèvent en 2013 à 4,8 millions d'euros.

Enfin, la publicité des actes enregistrés au Registre du commerce et des sociétés (RCS) ou des avis de dépôt des comptes des entreprises est assurée par le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC), qui a procuré à la DILA en 2013 des recettes à hauteur de 84 millions d'euros.

Origine des recettes du budget annexe en 2013

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Alors même que les recettes, et notamment celles des annonces, sont en baisse depuis 2011, la part des recettes des annonces dans l'ensemble des recettes tend à augmenter : la DILA ne parvient pas à diversifier ses sources de financement et seules les redevances perçues grâce aux annonces permettent de financer ses autres activités (l'information légale ou les activités d'édition et de diffusion). Les ventes d'abonnements et de publications, qui constituent la deuxième source de recettes de la DILA, demeurent une source marginale de son financement, malgré les investissements (en particulier la rotative) consentis ces dernières années.

Évolution par types de recettes

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat

Ainsi, la situation ressemble à celle d'avant la fusion des directions de la Documentation française et des Journaux officiels : les activités « monopolistiques » de cette dernière permettent de financer les missions déficitaires de l'ancienne Documentation française.

B. L'ATONIE DES RECETTES SUR LES SEGMENTS CONCURRENTIELS

Les recettes ne relevant pas des annonces légales diminuent depuis 2010 (cf. supra ). Il s'agit des ventes de publications et abonnements et des prestations et travaux d'éditions.

Les recettes issues des prestations et travaux d'édition ne sont pas à la hauteur des prévisions (cf. supra ), traduisant le fait que la DILA ne parvient pas à être identifiée comme le référent des administrations : elles ont diminué de 1 million d'euros depuis 2011, soit une baisse de 25 %.

Par ailleurs, s'agissant des ventes de publications, les recettes s'érodent depuis 2010 .

Évolution (2010-2013) des recettes de ventes de publications et d'abonnements

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Selon les informations fournies à votre rapporteur spécial, en 2013, la baisse des recettes s'explique par une nouvelle érosion structurelle des ventes d'abonnements aux publications régaliennes, à l'arrêt des ventes de livrets d'apprentissage à la conduite et au recul des ventes éditoriales dans un contexte de tassement du marché de l'édition.

En outre, il convient de noter une légère baisse, entre 2012 et 2013, du chiffre d'affaire moyen par référence, de 2 347 euros à 2 316 euros. Selon la DILA, « cette baisse est principalement liée à la vente en 2012 de deux titres phares en année électorale : le Code électoral et le Guide du bureau de vote », soulignant ainsi que les recettes de la DILA en matière d'édition ne résultent pas, en premier lieu, de la mise en oeuvre d'une stratégie éditoriale performante.

L'absence de dynamisme des recettes hors annonces légales doit conduire à s'interroger sur la soutenabilité de ce mode de financement et, par conséquent, sur la pertinence de maintenir l'ensemble des activités de la DILA. Si celle-ci a déjà entrepris des réformes, comme par exemple la rationalisation de son offre éditoriale, il n'en demeure pas moins qu' un examen attentif de chaque mission de la DILA paraît indispensable .

Pour aider à ce pilotage, la mise en place d'une comptabilité analytique fine, couvrant l'ensemble des activités de la DILA, pourrait s'avérer particulièrement utile.

Recommandation n° 4 : doter la DILA d'une comptabilité analytique fine permettant de mesurer la compétitivité de ses différentes activités afin de pouvoir, le cas échéant, les réorienter.

CONCLUSION GÉNÉRALE

La DILA, créée en 2010, résulte d'une décision de modernisation et de rationalisation des services publics. Cette réforme, qui est consolidée chaque jour par le renforcement des liens fonctionnels entre les deux anciennes directions, peut être considérée comme une réussite.

En effet, nul ne met en doute les complémentarités entre les activités de deux anciennes directions et la fusion a sans doute facilité la diminution des effectifs observée depuis 2010.

Néanmoins, la DILA se trouve aujourd'hui confrontée à un nouveau défi, celui du numérique. Le développement d'Internet a des conséquences sur l'ensemble de ses activités : les activités d'édition doivent être repensées dans le cadre de l'émergence du « livre numérique » ; la diffusion légale est d'autant plus performante qu'elle est large et donc visible sur Internet ; les renseignements administratifs et les possibilités d'accéder à des démarches en ligne permettent une modernisation ambitieuse de l'administration.

Il ne s'agit pas d'une simple adaptation, mais d'une véritable mutation de la DILA, nécessitant une redéfinition du cadre d'exercice de ses missions mais aussi de ses métiers.

Pour mener à bien ce chantier, la DILA doit accélérer le rythme de sa modernisation . À défaut, elle risque de « rater » le virage du numérique.

Son positionnement interministériel (la DILA étant rattachée aux services du Premier ministre) doit faire de la DILA une direction « support », au service des autres administrations, susceptible notamment de les conseiller.

C'est donc une nouvelle mutation, tout aussi conséquente que la fusion, qu'il convient aujourd'hui de mener. La tâche du prochain directeur sera donc de relever ce défi, l'avenir de la DILA étant en jeu.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 1 er juillet 2014, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a entendu une communication de M. Philippe Dominati, rapporteur spécial, sur la direction de l'information légale et administrative (DILA).

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » . - Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il me revient de vous présenter les conclusions de mon contrôle budgétaire de cette année, qui a porté sur la direction de l'information légale et administrative, la DILA.

Cette dernière, créée en 2010, résulte de la fusion de la direction des Journaux officiels (JO) et de la direction de la Documentation française. Ainsi, dès 2003, la Cour des comptes a souligné « l'étroite complémentarité » de certaines des activités des deux directions.

En outre, la même année, François Marc, alors rapporteur spécial du compte de commerce de la Documentation française, a mené un contrôle sur la Documentation française qui concluait à la nécessité « d'envisager de nouvelles coopérations entre la Documentation française et les Journaux officiels » et de « procéder à des économies d'échelle pour les opérations de renouvellement de l'outil de production ».

La prise en compte de ces observations par l'administration a conduit à la création, en 2007, du budget annexe « Publications officielles et informations administratives », regroupant les crédits des deux directions.

Il a encore fallu deux années, de 2008 à 2010, pour préparer leur fusion, avec en particulier la mise en commun des services de soutien.

Il faut noter que selon la DILA, cette période a permis de « négocier un aménagement des conditions d'emploi avec la direction du budget et la direction générale de l'administration et de la fonction publique pour rapprocher les niveaux de rémunérations des agents ».

Ainsi, les économies de masse salariale réalisées grâce à la fusion ont été en partie utilisées pour financer la convergence des rémunérations en trois ans. Entre 2009 et 2012, les effectifs de la DILA ont diminué de 91 équivalents temps plein travaillé (ETPT) permettant de réaliser une économie de l'ordre de 4,5 millions d'euros sur trois ans. La convergence des rémunérations, grâce à la mise en place d'une indemnité de modernisation des métiers, a bénéficié d'une enveloppe totale de 2,14 millions d'euros. Aujourd'hui, d'un point de vue opérationnel, la fusion peut être considérée comme une réussite.

Quelles sont les missions de la DILA ? Fruit de son histoire, elles sont diverses et fixées par un décret de 2010.

Tout d'abord, la DILA garantit l'accès au droit et offre aux citoyens des informations sur leurs droits et obligations et sur les démarches administratives qu'ils doivent effectuer. À ce titre, la DILA gère notamment les sites Internet « Legifrance », « Mon service public » ou « Vie publique ». Il s'agit des activités de service public effectuées à titre gratuit par la DILA.

Ensuite, la DILA exerce une mission - également de service public - mais qui lui procure des recettes : il s'agit de la publication des informations contribuant à la transparence de la vie associative, économique et financière.

Enfin, la DILA doit éditer et diffuser des publications de vulgarisation relatives aux politiques et au débat publics. Cette activité est également supposée lui apporter des recettes grâce à la vente des ouvrages.

Dans toutes ces activités, la DILA « s'appuie » sur la société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels (la SACIJO), qui compte 200 salariés, pour effectuer ses travaux d'impression. Je reviendrai plus tard sur le rôle de cette société.

Chaque année depuis sa création, le budget annexe dégage un excédent, qui est reversé au budget général. Ainsi, en 2013, cet excédent est de 26 millions d'euros, les recettes s'élevant à 201 millions d'euros et les dépenses à 175 millions d'euros.

La part des recettes relatives à la publication des annonces légales est prépondérante - elles représentent 94 % des recettes en 2013, soit 188 millions d'euros - et en progression de 5 points par rapport à 2010.

Or la plupart de ces recettes sont liées à des obligations légales de publicité des entreprises ou des collectivités : ainsi, les informations légales de certaines catégories de sociétés doivent être publiées au bulletin des annonces légales obligatoires (BALO). À partir de certains seuils, les appels à la concurrence en matière de marchés publics sont obligatoirement publiés au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ; enfin, certaines informations relatives à la vie des entreprises doivent être publiées au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).

Les autres recettes de la DILA sont atones, en particulier les ventes de publications et d'abonnement (7,5 millions d'euros) ou les prestations et travaux d'édition de la DILA (2,9 millions d'euros).

S'agissant des dépenses, elles sont relativement stables, à hauteur de 175 millions d'euros en 2013, soit une hausse de 1,3 % depuis 2007 à périmètre courant.

Elles sont également en « recomposition » depuis 2010 : en particulier, la baisse des dépenses relatives à l'activité d'édition et d'information administrative est compensée par la monté en puissance du pilotage et de la modernisation des activités numériques. Cette évolution montre que la DILA a entrepris sa modernisation.

Cependant, les dépenses totales de personnel, comprenant à la fois le personnel de la DILA et celui de la SACIJO s'avèrent particulièrement importantes, puisqu'elles représentent en 2013 plus de 60 % du budget de la DILA (soit 115 millions d'euros).

Comme vous le comprenez à l'issue de cette présentation, les métiers et les missions de la DILA doivent aujourd'hui évoluer très rapidement, afin de s'adapter à la révolution numérique.

Or, en 2010, afin que la DILA dispose d'un outil d'impression plus performant et polyvalent, il a été décidé d'investir dans l'achat d'une rotative, opérationnelle en 2013, pour un coût de 10 millions d'euros.

Aussi, à l'issue de ce contrôle, je souhaiterais vous faire part d'une observation et formuler plusieurs recommandations.

J'observe que le directeur de la DILA a quitté ses fonctions le 30 avril dernier. À ce jour, aucun successeur n'a été désigné. Or, cette désignation est capitale pour une institution devant prendre un virage au moins aussi stratégique que le projet, réussi, de la fusion.

Le choix d'un tel directeur est difficile et nécessairement long, mais il ne faudrait pas que cette absence dure trop longtemps et je souhaiterais qu'il soit nommé avant la fin du mois de juillet.

Par ailleurs, et c'est ma première proposition, dans la mesure où le JO papier n'a plus aujourd'hui que 3 129 abonnés, contre 64 726 abonnés au sommaire du JO électronique, il me semble indispensable de confirmer, par une déclaration officielle, l'intention d'arrêter l'impression du JO papier à la fin de l'année 2016. À ce stade, il ne s'agit que d'une perspective probable, mais non officiellement actée. Il appartiendra donc au nouveau directeur de prendre cette décision et d'en tirer toutes les conséquences.

En outre, la mission prioritaire du nouveau directeur sera d'accélérer le rythme du changement. Je recommande que soit rapidement prise une décision claire concernant l'avenir des activités d'édition et d'impression. Plus précisément, la question de l'utilisation de la rotative, amortie sur huit ans, soit en 2021, devra être réglée. Le cas échéant, le nouveau directeur devra déterminer les moyens de donner un second souffle aux activités d'impression et d'édition publique. Pour faciliter cette prise de décision, il est d'ailleurs urgent que la DILA se dote d'une comptabilité analytique fine, permettant de mesurer la compétitivité de ses différentes activités. En effet, plus rien ne justifie aujourd'hui que l'État dispose d'une imprimerie sans valeur ajoutée par rapport à un imprimeur privé. De plus, l'arrêt du JO papier et la réorientation des missions de la DILA vers le numérique justifient que les relations avec la SACIJO soient redéfinies.

En 2013, 43 millions d'euros ont été consacrés au financement des dépenses de personnel de la SACIJO, qui utilise le matériel mis à disposition par la DILA, son unique client. La SACIJO, régie par le statut de la presse parisienne, comprend aujourd'hui 200 salariés, occupés non seulement à des activités d'impression mais aussi de composition ou d'édition ; la moitié des effectifs, tout en gardant son statut, a été mise à disposition de la DILA. Les tâches aujourd'hui effectuées par les salariés de la SACIJO devraient être prises en charge par le personnel de la DILA.

Enfin, j'ai pu observer que l'équipe de direction - au sens large, y compris l'autorité de tutelle, composée d'un personnel de qualité et de haut niveau - est tout à fait consciente de la nécessité de réorienter les missions de la DILA vers le numérique, mais aussi des difficultés et des risques d'une telle opération.

Ainsi, tout en réduisant ses effectifs, la DILA met en avant sa gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) et les efforts de formation déployés pour accompagner le personnel dans cette transformation tout en continuant à garantir un bon niveau de service.

Il faut également saluer de belles réussites en matière de services numériques : c'est le cas notamment de Legifrance, exemple unique - et modèle envié - dans le monde ! De même, la fréquentation du site « Mon service public » a augmenté de 70 millions à 218 millions de visites par an entre 2010 et 2013.

Le projet stratégique qu'a défini la DILA pour les années 2014 à 2017 me paraît être le bon : il mise sur le numérique et le rôle résolument interministériel de la DILA, au service des administrations.

Fusionner les deux directions, en 2010, était risqué mais nécessaire. Aujourd'hui, de nouveau, la DILA doit prendre des risques : le choix du nouveau directeur s'avérera crucial puisqu'il devra conduire le changement à un rythme accéléré. Je vous remercie de votre attention.

M. François Marc , rapporteur général . - Je remercie Philippe Dominati de nous avoir dressé le tableau de la situation présente de la DILA et de nous avoir rappelé qu'une belle rotative à 10 millions d'euros est faite pour tourner, comme l'indique d'ailleurs le signifiant du mot « rotative ». Je souhaite comme lui que l'on puisse trouver les débouchés nécessaires et une activité permettant d'amortir l'investissement en huit ans, avec l'efficacité espérée.

Je me réjouis également de constater à travers vos propos que la fusion a été un succès. À l'époque où j'étais rapporteur spécial, la fusion se préparait, mais des questions se posaient sur ses modalités et les économies que l'on pouvait en attendre. À l'heure où l'on parle tant en France de fusions et des économies en découlant, cette fusion de la Documentation française et des JO a-t-elle débouché sur des économies substantielles ? Peut-on identifier les gains issus de cette opération ?

M. Philippe Marini , président . - Vous a-t-il été possible d'étudier dans quelles conditions la décision de commander cette rotative a été prise ? En effet, il semble bien qu'elle ait été actée sans une visibilité suffisante. Qui a été en mesure de porter un regard stratégique au moment où un investissement physique aussi substantiel, notamment par rapport au volume d'activité du service public, était décidé ?

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Tout d'abord, en ce qui concerne la fusion, je crois que l'on peut dire que, globalement, cela a été une réussite. Les économies sont diverses et variées, notamment issues de l'outil principal qu'est la rotative. Par exemple, l'ancienne rotative nécessitait une dizaine de postes, contre six pour la nouvelle. En outre, la nouvelle rotative peut faire de la couleur, ce qui n'était pas le cas de l'ancienne. Des économies d'échelles ont donc été effectivement réalisées.

Deuxièmement, la fusion a permis de faire cohabiter des mondes différents, à savoir la Documentation française, le JO et le statut de la presse parisienne. La SACIJO n'est en réalité que le réceptacle de l'action syndicale, et ce n'est que pour garantir la paix sociale qu'une relation, en réalité assez fictive, a été nouée entre la direction de la DILA et la SACIJO, se traduisant notamment par la réalisation d'économies d'échelles en termes de personnel.

Toutefois, le changement s'accélère et c'est pourquoi que je pense que nous sommes à l'aube d'un second virage. Actuellement, deux tiers des salariés employés le sont dans l'impression et l'édition. L'ancien directeur de la DILA s'est efforcé de trouver des débouchés avec l'aide des services du Premier ministre dont la DILA dépend. Une circulaire a ainsi été éditée pour essayer d'en faire l'éditeur public de référence et inciter les ministères à travailler avec elle, de façon à favoriser l'utilisation de la rotative. Toutefois, mon sentiment est que cette action s'est avérée limitée dans ses résultats.

La DILA rencontre des difficultés pour trouver un marché et asseoir sa compétitivité ; elle doit résolument basculer, comme toute cette profession, dans le numérique.

Je m'interroge également sur le fait de savoir si la DILA doit continuer à relever d'un budget annexe. En effet, ce dernier n'est motivé que par les recettes « garanties » provenant des annonces légales. Sans doute pourrait-on évoluer vers une autre forme de gestion budgétaire de l'organisme.

Pour répondre au Président, c'est le Secrétariat général du Gouvernement qui pilote depuis longtemps la nécessité pour l'État de disposer d'un outil performant d'impression. C'était sa préoccupation au moment de la fusion.

La DILA va devoir prendre ce virage et réussir cette mutation dans un délai beaucoup plus court que ce qui était prévu initialement au-delà de la durée des huit ans sur la rotative.

M. Philippe Marini , président . - Je pense que le rapport est extrêmement utile pour bien prendre conscience de tous ces enjeux. Il conviendrait de demander au nouveau directeur de la DILA de proposer un plan de réduction de l'activité et de reconversion de l'outil, compte tenu de l'évolution du contexte technologique. C'est une mission assurément difficile.

Peut-être aussi pourrait-on s'interroger sur le paiement des annonces légales puisqu'en définitive près de 200 millions d'euros relèvent en réalité d'une taxe. En effet, nous n'avons pas le choix, nous sommes contraints d'avoir recours à ces moyens de diffusion légale.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - J'ai le sentiment que ces annonces légales ne perdurent que pour assurer la survivance d'une activité qui risque de devenir obsolète dans peu de temps. Mais la mutation demande des reclassements, des formations, d'autres compétences, et c'est pour cela qu'elle est difficile.

M. Philippe Marini , président . - Près de 200 millions d'euros pour les annonces légales, c'est tout de même un montant important...

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - On voit également que les recettes de l'ancienne Documentation française sont minimes. Les impressions couleur ne représentent d'ailleurs que 113 millions de pages contre 224 millions pour le noir et blanc.

À l'issue de ce débat, la commission a donné acte de sa communication à M. Philippe Dominati, rapporteur spécial, et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction de l'information légale et administrative (DILA)

M. Didier François , directeur adjoint chargé d'assurer l'intérim

M. Jean-Marc Frohard , secrétaire général

Secrétariat général du Gouvernement

M. Serge Lasvignes , Secrétaire général du Gouvernement

M. Olivier Schmit , chef de la mission d'organisation des services du Premier ministre

Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative (Coepia)

M. Bernard Pêcheur , président

M. Olivier Garnier , secrétaire adjoint

Mme Marianne Lévy-Rosenwald , Médiateur de l'édition publique

M. Raoul Provins , chef du bureau de l'intérieur et de l'action gouvernementale, direction du budget


* 1 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 2 Considérant 27 de la décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005.

* 3 Référé au Premier ministre en date du 30 octobre 2013.

* 4 Article 35 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 5 Le programme 621 « Accès au droit, publications officielles et annonces légales » et le programme 622 « Édition publique et information administrative ».

* 6 Rapport général n° 78 (2006-2007) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2006.

* 7 Décret n° 2010-31 du 11 janvier 2010 relatif à la direction de l'information légale et administrative.

* 8 Réponse au questionnaire adressé par votre rapporteur spécial.

* 9 Ibid.

* 10 Réponse au questionnaire adressé par votre rapporteur spécial.

* 11 Réponse au questionnaire adressé par votre rapporteur spécial.

* 12 En raison de la nécessité d'effectuer des travaux pour installer la rotative dans les locaux de la DILA, le coût total de la rotative, installation comprise, s'élève à 10 millions d'euros.

* 13 Circulaire du 20 mars 1998 relative à l'activité éditoriale des administrations et des établissements publics de l'État.

* 14 Rapport du Médiateur de l'édition publique pour l'année 2012, de Marianne Levy-Rosenvald, remis au Premier ministre et à la ministre de la Culture et de la Communication, décembre 2013.

* 15 Il s'agit du Centre des monuments nationaux, du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l'Institut géographique national (IGN), de la Réunion des musées nationaux (RMN), du Service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM), des Services culture, éditions et ressources pour l'Éducation nationale et de la DILA.

* 16 Circulaire du 9 décembre 1999 relative à l'institution d'un médiateur de l'édition publique.

* 17 Circulaire du 29 mars 2012 relative à l'efficience des activités de publication de l'État.

* 18 Rapport d'activité de la DILA pour l'année 2013.

* 19 Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative, « Quelle information pour quel public ? », rapport 2012-2013.

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