B. LE CAS PARTICULIER DU SÉNÉGAL

Afin d'étudier concrètement la situation des PMA, de visiter des projets et de rencontrer les acteurs locaux, vos rapporteurs spéciaux se sont rendus au Sénégal du 19 au 21 mai dernier.

1. La volonté d'accéder au statut de pays émergent à l'horizon 2035

Avec une population de plus de 14 millions d'habitants et un produit intérieur brut (PIB) de 14,4 milliards de dollars en 2013, le Sénégal est la deuxième économie d'Afrique de l'Ouest francophone , derrière la Côte-d'Ivoire. En terme d'indice de développement humain, le Sénégal est classé 163 sur 187 pays et plus de la moitié de la population vit avec moins de 2 dollars par jour , avec des faiblesses notamment en termes d'emploi, de qualité des services publics, de fourniture et de coût de l'électricité et plus récemment d'approvisionnement en eau.

Le secteur agricole (15% du PIB et 50 % de la population active) est particulièrement exposé aux aléas climatiques et à la volatilité des cours mondiaux des matières premières. Les autorités souhaitent développer l'activité agricole le long du fleuve Sénégal en vue d'accroître la production de riz et d'intensifier les cultures maraichères destinées à la consommation nationale ou à l'exportation.

Le secteur industriel (21 % du PIB) repose essentiellement sur les mines d'or, les phosphates, le ciment, l'agroalimentaire et le bâtiment.

Enfin, le secteur tertiaire (64 % du PIB, service public inclus pour 20 %) reste fortement dominé par le secteur informel tandis que le tourisme connaît un ralentissement important.

Le Sénégal a adopté une stratégie nationale en matière de développement économique et social, le Plan Sénégal émergent (PSE), qui constitue le cadre de référence de la politique économique et sociale du Gouvernement, avec l'objectif d'accéder au statut de pays émergent à l'horizon 2035.

Sur le plan financier, le Sénégal reste dépendant de l'aide extérieure, qui représente 20 % de l'ensemble de ses dépenses.

Chiffres clés du Sénégal

Données démographiques :

Population : 14,125 millions d'habitants (2014)

Densité : 69,24 habitants par km²

Croissance démographique : 2,53 % en 2013

Espérance de vie : 63 ans en 2014

Taux d'alphabétisation : 52 % en 2013

Indice de développement humain : 163 ème sur 187 pays (PNUD, 2013)

Données économiques :

PIB (2013) : 14,4 milliards de dollars

PIB par habitant (2013) : 1 130 dollars

Taux de croissance : 3,5 % en 2013, 4,5 % prévus en 2014, 4,6 % prévus en 2015

Taux de chômage (2010) : 49 %

Taux d'inflation : 2,1 % en 2013

Solde budgétaire : - 5,6 % du PIB en 2012 et - 5,3 % du PIB en 2013

Balance commerciale (2012) : - 2,282 milliards d'euros soit - 7,6 % du PIB

Principaux clients (2013) : Mali (17 %), Inde (13 %), Suisse (9 %)

Principaux fournisseurs (2013) : France (18 %), Nigéria (10 %), Chine (7 %)

Source : ministère des affaires étrangères

2. L'exposition particulière du pays au changement climatique

Si vos rapporteurs spéciaux ont choisi de se déplacer au Sénégal, c'est aussi parce que ce pays est particulièrement exposé aux conséquences du changement climatique.

Depuis 2008 le cabinet britannique Maplecroft publie chaque année un rapport sur la vulnérabilité des pays et des villes au réchauffement climatique. Il souligne régulièrement le fait que la majeure partie des pays les plus vulnérables sont concentrés en Afrique, du fait notamment des grands systèmes fluviaux exposés à de graves inondations ainsi que des risques élevés de sécheresse.

Plus précisément, son édition 2014 13 ( * ) classait le Sénégal comme dixième pays d'Afrique le plus vulnérable et quatorzième pays au niveau mondial.

Le ministère sénégalais de l'environnement a identifié plusieurs vulnérabilités principales 14 ( * ) .

Le Sénégal compte 3,8 millions d'hectares cultivables, mais est fortement dépendant de facteurs climatiques, à commencer par la pluviométrie. La sécheresse, l'élévation des températures mais aussi les mauvaises pratiques culturales, ont d'ores-et-déjà affecté la végétation, la salinisation des terres et la fertilité des sols, ce qui se traduit par des conséquences négatives sur la production agricole.

S'agissant de la ressource en eau, la baisse de la pluviométrie aurait déjà atteint 5 % à 25 % selon les régions par rapport à 1970. Le niveau des nappes phréatique est en baisse de 5 à 10 mètres au nord et de 15 à 20 mètres au sud. Cette nouvelle contrainte impose la valorisation des eaux de ruissellement et le développement d'aménagements hydro-agricoles.

Par ailleurs, l'élévation du niveau des mers affecte la majeure partie des villes côtières sénégalaises, à commencer par Saint-Louis, impliquant des déplacements de population importants.

Enfin, des risques ont également été identifiés dans le secteur de la pêche, avec une diminution de la ressource halieutique, et dans le tourisme.

Au-delà des risques identifiés, le pays est déjà confronté aux effets du changement climatique. Par exemple, du fait notamment de la montée du niveau des mers, la ville de Saint Louis est menacée par l'érosion de la « langue de barbarie », vaste bande de sable qui la protégeait de l'océan Atlantique. Dans la région de Dakar, c'est la hausse des précipitations qui provoque des inondations à répétition, notamment dans la ville nouvelle de Pikine.

3. Des projets emblématiques

Vos rapporteurs spéciaux ont notamment eu l'occasion de visiter le projet d'agriculture irriguée et de développement économique des territoires ruraux du département de Podor, dans la vallée du fleuve Sénégal. L'AFD a soutenu ce projet, via un prêt de 30 millions d'euros et une subvention de 1,5 million d'euros à la République du Sénégal. La maîtrise d'ouvrage a été confiée au ministère de l'agriculture, qui l'a déléguée à la Société d'aménagement et d'exploitation du delta et de la falémé (SAED), dont vos rapporteurs spéciaux ont rencontré le directeur général, Samba Kante.

Visite d'une coopérative rizicole

Il a permis une amélioration des conditions de production et de commercialisation des produits de l'agriculture et de l'élevage, à commencer par le riz, notamment grâce à des aménagements hydro-agricoles.

Il contribue ainsi à l'amélioration de la sécurité alimentaire et au développement économique du territoire, mais participe également à l'adaptation au changement climatique en sécurisant la ressource en eau pour la mise en culture, dans une zone à fortes contraintes environnementales (sécheresse, désertification, dégradation des terres, érosion). À ce titre, il est emblématique du lien entre développement économique et lutte contre le changement climatique.

Vos rapporteurs spéciaux ont également visité les locaux de la société indépendante et moderne des plastiques africains (SIMPA) et rencontré son directeur-général, Ibrahim Hawili.

Cette société est une des premières à avoir bénéficié de la ligne de financement accordée par l'AFD à la Société générale de banque au Sénégal (SGBS) pour refinancer des prêts consentis à des entreprises pour leurs investissements de mise à niveau environnementale et de maîtrise de l'énergie. En l'occurrence, la société SIMPA exerce une activité de recyclage du plastique et a pu investir, grâce à ces financements, dans des machines plus efficientes.


* 13 Maplecroft, The Climate Change and Environmental Risk Atlas 2014 , novembre 2013.

* 14 Sénégal émergent, Note technique thématique : Environnement et adaptation au changement climatique.

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