D. LE RISQUE DE « TRAPPE DES PAYS À REVENUS INTERMÉDIAIRES »

1. Une richesse nationale basée sur les investissements, trop peu sur la consommation

Reflet du modèle économique de la Chine, la richesse nationale est assise sur les investissements et sur l'épargne, non sur la consommation.

Certes, depuis 2008, le poids de la consommation des ménages dans le PIB s'est stabilisé, alors qu'il diminuait tendanciellement depuis le début des années 2000, mais il reste à un niveau particulièrement faible (36 % en 2013). Dans la plupart des pays développés, sauf situations spécifiques comme le Luxembourg, le taux de consommation se situe au-dessus de 50 % du PIB. Selon la Banque mondiale, seuls de rares pays dans le monde connaissent une part de la consommation des ménages dans le PIB plus faible que la Chine ; il s'agit principalement de pays aux revenus pétroliers importants (Algérie, Arabie saoudite ou Koweït).

Dans le même temps, le poids des investissements reste déterminant, en particulier à la suite du plan de relance massif décidé dans le cadre de la crise mondiale de 2008-2009.

En 2014

Part de la consommation des ménages dans le PIB

Part des investissements
dans le PIB

Part de l'épargne
dans le PIB

Chine

36 %

48 %

49 %

France

56 %

22 %

21 %

Allemagne

55 %

18 %

24 %

États-Unis

69 %

20 %

17 %

Source : chiffres de la Banque mondiale.

Il existe donc un risque à moyen terme pour la Chine de tomber dans la « trappe des pays à revenus intermédiaires », qui caractérise la situation d'économies qui, après une phase de croissance rapide, ne parviennent pas pour autant à rejoindre le groupe des économies avancées. Ces pays ne disposent ni des avantages comparatifs des pays à très bas salaires, ni de ceux des pays technologiquement avancés.

La forte propension à épargner des ménages chinois (33 % du revenu disponible pour les ménages urbains et 26 % pour les ménages ruraux en 2013) peut s'expliquer en grande partie par la relative faiblesse des dépenses sociales publiques en Chine.

2. Une protection sociale encore nettement insuffisante

Le système de protection sociale, qui comprend l'assurance vieillesse, l'assurance chômage, l'assurance santé, l'assurance contre les accidents du travail et l'assurance maternité, s'est rapidement développé en Chine depuis le milieu des années 2000.

Les dépenses sociales publiques, qui comprennent l'ensemble des ressources allouées par les pouvoirs publics aux secteurs des retraites, des aides sociales et de la santé ont atteint 9 % du PIB en Chine en 2012 selon l'OCDE, contre 6 % en 2007. Leur poids reste toutefois très en-deçà de leur poids moyen parmi les pays de l'OCDE (22 % du PIB en 2013).

Les taux de couverture de la population contre les risques santé et vieillesse ont progressé à un rythme rapide. Au total, en 2012, 99 % de la population chinoise bénéficiait d'une assurance santé de base (16 % en 2004) et 58 % d'une assurance vieillesse de base (17 % en 2004).

Toutefois, le système de protection sociale présente encore de nombreuses insuffisances. Il est fragmenté en plusieurs régimes disparates et sur le plan géographique. De ce fait, les droits sont difficilement transférables en pratique, malgré les dispositions juridiques existantes. En outre, les niveaux des cotisations et des prestations sont très variables

Le niveau de protection reste au final insuffisant. Les dépenses de santé pèsent encore fortement sur les budgets des ménages chinois : 10 % des dépenses de consommation pour la population rurale en 2012 et 6 % pour les ménages urbains. Ces taux sont plus élevés que ceux des principaux pays développés (à l'exception des États-Unis où le ratio est à près de 21 %), mais aussi que ceux d'autres pays émergents (3,6 % en Russie, 4,1 % en Inde). Cela s'explique notamment par le coût élevé des soins médicaux en Chine.

La situation des retraités ruraux, qui dépendent beaucoup des aides reçues par la famille, est particulièrement difficile. Selon la Banque mondiale, les pensions de retraite représentent moins de 10 % des revenus des ruraux de plus de 60 ans.

La situation des migrants reste également précaire. Faute de posséder un « hukou » urbain, les 166 millions d'ouvriers paysans migrants sont largement exclus des systèmes de protection sociale de leur lieu de résidence et très peu sont couverts par leur employeur contre le risque maladie ou le risque vieillesse.

Alors même qu'il reste insuffisant, le système de protection sociale doit être réformé pour assurer sa viabilité, en particulier en ce qui concerne l'âge de départ en retraite, aujourd'hui fixé en règle générale à 55 ans pour les femmes, voire 50 ans pour certaines catégories, et 60 ans pour les hommes. L'âge moyen de départ en retraite, 51,2 ans, est très précoce (dix ans de moins que la moyenne mondiale). Les autorités ont à plusieurs reprises indiqué qu'elles réfléchissaient à un allongement de l'âge légal de départ à la retraite en Chine.

Le système de protection sociale chinois, en cours de construction, est d'ores et déjà confronté au défi du vieillissement de la population. Tout en envisageant de repousser l'âge de départ à la retraite, les autorités ont décidé de mettre à contribution les entreprises d'État qui devront participer davantage à son financement.

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