III. LA RÉORIENTATION VERS UNE CROISSANCE PLUS QUALITATIVE ET PLUS INCLUSIVE

A. UN CHOIX ASSUMÉ

1. « China 2030 » : un rapport fondateur

En 2010, la Banque mondiale et le Development Research Center du Conseil d'Etat chinois, think tank économique directement rattaché à l'un des plus importants organes du pouvoir chinois, ont lancé des travaux pour évaluer le développement de la Chine et tracer des perspectives d'évolution sur le long terme. Ces travaux ont abouti à la publication, début 2013, d'un rapport qui a fait date : « Chine 2030 : construire une société moderne, harmonieuse et créative ».

Ce rapport est particulièrement intéressant, notamment du fait qu'un organe chinois de haut niveau en est corédacteur et cosignataire. Il rappelle que, du XVIème au début du XIXème siècle, la Chine était la plus grande économie du monde. En 1820, elle représentait un tiers de la richesse mondiale. Elle a connu un « déclin catastrophique » entre 1820 et 1950, puis « une ascension météorique » depuis 1978. La Chine devrait ainsi intégrer la catégorie des pays à hauts revenus, telle que définie par les organisations internationales, un peu avant 2030.

Dans ce contexte, le rapport pose deux questions. Est-ce que le taux de croissance de la Chine peut rester l'un des plus hauts du monde même s'il diminue ? Est-ce que le pays peut maintenir une croissance rapide entraînant peu de perturbations sur le monde, l'environnement et les structures de la société ? Les auteurs du rapport répondent « oui » à ces questions, « mais seulement si la Chine assure une transition entre les politiques qui l'ont si bien servie dans le passé vers d'autres qui abordent les défis si différents d'un futur lui-même si différent ».

Le second chapitre du rapport décrit une « nouvelle stratégie » pour réaliser la vision de la Chine en 2030, en se focalisant sur les choix-clés susceptibles de maintenir un développement économique et social rapide. Six « piliers » sont alors définis : consolider les fondations du marché ; mettre en valeur l'innovation ; promouvoir un développement vert ; assurer l'égalité et la protection sociale pour tous ; renforcer les finances publiques ; atteindre des relations mutuellement bénéfiques entre la Chine et le reste du monde.

Au-delà de son contenu, ce rapport révèle la manière de fonctionner du régime chinois, où la préoccupation stratégique du temps long est toujours présente et où les décisions sont d'abord préparées et muries à l'intérieur du système sans publicité.

2. Le 12e plan et l'arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants

Le 12 e plan quinquennal, approuvé en mars 2011 pour la période 2011-2015, confirme le souhait des autorités chinoises d'un rééquilibrage de la croissance par une hausse de la consommation intérieure permettant l'édification d'une société dite de « moyenne aisance ». Cette hausse de la consommation doit notamment être tirée par une hausse du pouvoir d'achat, avec une augmentation du revenu net, tant rural qu'urbain, de 7 % en moyenne annuelle, et une maîtrise de l'inflation, une réforme de la fiscalité ou encore la création de 45 millions d'emplois urbains.

La Chine est également confrontée à une moindre compétitivité du facteur travail , puisque les salaires ont fortement progressé durant les dix dernières années. Par exemple, ils ont augmenté d'environ 15 % par an dans la région de Shanghai, alors que l'inflation restait limitée autour de 4 % - 5 %. Pour autant, cette progression des salaires et des coûts pour les entreprises a été inégale selon les régions. De fait, la Chine est elle-même confrontée à des délocalisations , soit des régions côtières vers l'intérieur du pays, soit vers des pays à moindre coût salarial comme le Viêt-Nam, l'Indonésie, la Malaisie ou les Philippines.

Par ailleurs, le 12 e plan prévoit un développement des services visant à augmenter de 4 points leur part dans le PIB et intègre de manière sensible l'ensemble des thématiques environnementales (efficacité énergétique, émissions de gaz à effet de serre, développement des industries vertes,...).

À la fin de l'année 2012, une nouvelle équipe dirigeante arrive au pouvoir en Chine, le congrès du Parti communiste chinois élisant le comité central qui lui-même désigne le bureau politique (25 membres) dont émane le comité permanent du bureau politique. Xi Jinping devient secrétaire général et président de la commission militaire centrale du parti communiste, ainsi que Président de la République ; Li Keqiang devient Premier ministre.

En mai 2014, le Président Xi Jinping énonce le concept de « nouvelle normalité », pour qualifier l'évolution de la croissance chinoise, moins forte mais plus orientée vers la consommation intérieure et les services.

Les objectifs de croissance sont ainsi sensiblement inférieurs de ceux des années précédentes, autour de 7 % par an. Le prochain plan quinquennal qui sera annoncé à la fin de l'année 2015 pour la période 2016-2020 constituera un élément déterminant pour évaluer la stratégie des autorités pour les prochaines années, mais peu d'analystes attendent des évolutions importantes, tout du moins avant le renouvellement des instances dirigeantes en 2017.

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