QUELLES ÉNERGIES POUR QUELLES MOTORISATIONS ?

M. Pierre-René Bauquis, ancien directeur Stratégie et planification de Total. Face aux problèmes climatiques, la question-clé est de savoir quelle énergie est consommée dans les véhicules, le type de motorisation étant presque un sujet annexe.

La question énergétique renvoie à deux aspects économiques : d'une part, l'économie au sens traditionnel (le prix de revient), d'autre part, le coût des émissions, notamment de CO 2 .

Jusqu'en 1990, la réponse à la question de savoir quelle énergie et quelle motorisation utiliser était simple et sans appel : il s'agissait du pétrole et du moteur à combustion.

Depuis qu'est apparue la nécessité de réduire les émissions nocives, le problème a complètement changé de nature. L'objectif devenu prioritaire aujourd'hui est la réduction des émissions de CO 2 et d'autres polluants tels que le NOx, les particules, etc .

Il existe pour ce faire deux démarches, dont le downsizing , dont il vient d'être question, qui permettra à terme de diviser par deux les émissions des nouveaux véhicules, donc du parc automobile, à l'échéance de vingt ans.

Si l'on veut aller plus loin, il faut, par ailleurs, en plus substituer aux énergies actuelles des énergies non carbonées. Il existe pour cela deux candidats crédibles : l'électricité non carbonée et l'hydrogène.

De ce point de vue, je suis frappé par l'extraordinaire survie, depuis plus d'un siècle, de l'hydrogène énergie, constamment remis au goût du jour. Ce fut le cas, il y a une vingtaine d'années, avec BMW - Mercedes et leurs véhicules à hydrogène sous pression et piles à combustible, et, plus récemment, avec la vedette technologique de cette industrie, Toyota, qui vient de sortir le modèle Mirai, disponible au prix de 75 000 euros - le prix de revient de Toyota étant d'un peu plus du double. C'est Toyota qui a, en 1997, ouvert une nouvelle ère de l'automobile, avec un véhicule certes mono-énergie pétrole (la Prius) mais qui était hybride, donc capable de passer à une motorisation qui stockait l'électricité à bord, ancêtre de ce qui sera probablement la solution dans ce domaine.

Ce mythe du véhicule à hydrogène est porté par des groupes de premier plan. En France, Air Liquide dispose ainsi d'un programme hydrogène énergie très important et Total construit des stations hydrogène.

Pourquoi est-ce une fausse bonne solution ?

Je citerai ici, sans les détailler, les quatre facteurs principaux : un coût de production élevé ; un coût de transport élevé (dix fois supérieur à celui des hydrocarbures liquides) ; un coût de stockage dans les véhicules élevé (2 ( * )) ; un coût de conversion en électricité élevé.

Or, contrairement à ce que l'on entend parfois et qui constitue, à mon sens, une erreur d'analyse, cela ne peut être compensé par les avantages spécifiques de rendement.

J'ajouterai que les véhicules à hydrogène sont des bombes en puissance pour peu que des individus mal intentionnés décident d'y mettre le feu ; ils n'auront donc à ce titre jamais l'autorisation de rouler en masse. Le bon sens l'exclut.

Concernant l'électricité, il existe deux sous-voies complémentaires : le tout-électrique, pour les véhicules urbains et péri-urbains (en France, cette voie a été largement ouverte par le groupe Bolloré), et l'hybride rechargeable, qui constitue à mon avis la solution d'avenir à grande échelle et représentera certainement 80 % du parc automobile dans trente ans, dans les pays développés. Étant dual fuel (c'est-à-dire alimentés par électricité sur le réseau et par des hydrocarbures), ces véhicules offrent une extraordinaire souplesse et permettent la régulation des réseaux. Le gestionnaire de réseau peut, par exemple, couper l'alimentation d'un véhicule hybride rechargeable, ce qui est impossible pour un véhicule tout-électrique.

Pour les personnes particulièrement intéressées par ce sujet, je dispose d'une présentation écrite plus détaillée que je me ferai un plaisir de leur transmettre si elles m'en font la demande (3 ( * )) .


* (2) Avec un rapport de poids de 5 % d'hydrogène pour 95 % de réservoir.

* (3) Cf . Annexe 2.

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