B. L'ACHÈVEMENT DE LA MIGRATION DES SDIS EST INCERTAIN, DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT

L'incertitude sur l'achèvement de la migration des SDIS tient à la fois au moindre intérêt opérationnel de la migration dans certains départements et aux surcoûts qu'elle implique.

1. Le moindre intérêt opérationnel d'ANTARES en zone rurale pourrait conduire certains SDIS à renoncer à la migration

L'extension du réseau existant de la police nationale, qui a représenté un coût de 90 millions d'euros pour l'État, a été achevée en 2010. Désormais, le réseau ANTARES est disponible dans tous les départements métropolitains. La couverture surfacique atteinte, issue de données de modélisation, est de 95 %, ce qui correspond une population couverte équivalente de 98 % 14 ( * ) .

Toutefois, il existe de l'aveu même de la DGSCGC des zones où la couverture n'est « pas satisfaisante, voire inexistante » 15 ( * ) , comme ont permis de le confirmer les auditions et les déplacements menés par votre rapporteur spécial.

Compte tenu du choix de faire du réseau ANTARES une extension du réseau ACROPOL de la police nationale, les territoires urbains sont les mieux couverts. Aussi, il peut être fait l'hypothèse que les retards constatés dans le déploiement d'ANTARES sont directement liés à la persistance de « zones blanches » significatives dans les territoires ruraux.

Pour tester cette hypothèse, il est possible de comparer la densité moyenne au sein des départements métropolitains n'ayant pas encore migré ou étant « en cours » de migration vers ANTARES avec la densité moyenne constatée au niveau national. L'écart trouvé est important (74 habitants par mètre carré, contre 117 habitants par mètre carré au niveau national) 16 ( * ) , ce qui semble confirmer que le moindre intérêt opérationnel d'ANTARES en zone rural joue un rôle significatif pour expliquer les difficultés et les retards dans le déploiement du réseau .

À ce premier défi s'ajoute celui du financement de la migration, notamment depuis l'extinction du fonds d'aide à l'investissement (FAI).

2. Ce risque est renforcé par l'extinction du fonds d'aide à l'investissement (FAI), facteur important d'inégalité entre les SDIS

La migration vers ANTARES constitue un investissement important pour les SDIS , qui doivent notamment financer les postes mobiles équipant les véhicules, les postes fixes des casernes et l'adaptation technique des dispositifs radio équipant les CTA et CODIS.

De ce fait, l'État a mobilisé le fonds d'aide à l'investissement (FAI), instauré par l'article 129 de la loi de finances pour 2003 en remplacement de la majoration exceptionnelle de la dotation globale d'équipement des SDIS, afin de soutenir les SDIS ayant décidé de migrer vers ANTARES.

Les crédits du FAI consacrés à ANTARES ont ainsi représenté 22 % du total des crédits du FAI en 2007, 41 % en 2008, 66 % en 2009, 71 % en 2010 et 74 % en 2012. Toutefois, pour des raisons budgétaires, aucune autorisation d'engagement n'est inscrite en loi de finances au titre du FAI depuis 2013.

Cette extinction du FAI constitue un facteur important d'inégalité entre les SDIS.

En effet, le rythme de la migration vers ANTARES dépend fortement de l'ancienneté du réseau analogique : lorsque le réseau analogique a fait l'objet d'investissements récents, les SDIS cherchent en général à amortir dans un premier temps leur réseau, avant de basculer sur ANTARES.

La rapidité de la migration dépend également de l'existence de « zones blanches » dans certains départements, les SDIS concernés faisant le choix d'attendre un complément de couverture avant de migrer.

Du fait de l'extinction du FAI, ces deux facteurs exogènes ont créé d'importantes inégalités dans le financement du déploiement du réseau entre les SDIS.

Comparaison des coûts et des modalités de financement du déploiement d'ANTARES au sein des SDIS

(en millions d'euros)

Minimum

Maximum

Moyenne

Écart type

Coût du déploiement

1,4

8,7

3,1

1,8

Crédits du FAI

0

3,5

0,6

0,7

Coût réel pour le SDIS

0,6

7,7

2,5

1,6

Taux de prise en charge par le FAI

0 %

60 %

21 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses à l'enquête menée par l'ANDSIS)

Ainsi, le taux de prise en charge par le FAI varie de 0 à 60 %, contribuant significativement à l'écart type particulièrement élevé constaté pour le coût du déploiement (1,8). Certains SDIS ont reçu jusqu'à 3,5 millions d'euros de crédits du FAI, tandis que d'autres n'ont bénéficié d'aucun financement.

Les SDIS situés dans les territoires mal couverts ou qui avaient récemment investi dans leur réseau analogique ont donc été injustement pénalisés par l'extinction du FAI.

D'après les informations transmises à votre rapporteur spécial, il existerait dans ce contexte un risque non négligeable que certains SDIS renoncent définitivement à la migration , ce qui pourrait les placer en situation d'isolement opérationnel.


* 14 Source : réponses de la DGSCGC au questionnaire.

* 15 Source : réponses de la DGSCGC au questionnaire.

* 16 Source : commission des finances (d'après les enquêtes INFOSDIS et les données de l'INSEE)

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