II. UN REVENU DE BASE EN FRANCE : POUR QUOI FAIRE ?

Les réflexions philosophiques qui structurent le débat autour de l'instauration d'un revenu universel sont diverses. Il existe en particulier une ligne de fracture importante autour de la question de la place que le travail doit avoir dans notre société , selon que l'on considère que le revenu de base est un outil favorisant le retour à l'emploi en accordant une sécurité à tous ou au contraire un moyen de réduire son temps de travail pour se consacrer à d'autres activités.

Il est donc impératif que tout projet politique ayant vocation à proposer une telle mesure soit au clair sur les objectifs poursuivis : il faut pouvoir répondre à la question « pourquoi un revenu de base ? » avant de se pencher sur les conditions pratiques de sa mise en oeuvre.

A. DES OBJECTIFS POURSUIVIS DE NATURES DIFFÉRENTES

Au-delà de l'amélioration de certains aspects techniques, plusieurs projets de revenus de base sont mus par des considérations diverses, certains pouvant être qualifiés d'« utopistes ».

La notion de revenu de base embrasse des projets de sociétés très différents et qui peuvent être incompatibles entre eux. En effet, le revenu de base est considéré par certains comme un outil plus efficace et plus simple de lutte contre la grande pauvreté (revenu de « subsistance »), lorsque d'autres y voient un moyen de repenser la place du travail dans la société et de libérer les individus de l'asservissement au travail (revenu d'« émancipation »). Ces conceptions souvent antagonistes se cristallisent autour du montant proposé du revenu de base : plus son montant est élevé, plus il constitue un revenu pouvant se substituer au revenu tiré d'une activité professionnelle et permettant aux individus d'organiser leur temps de travail et leurs parcours professionnels comme ils le souhaitent.

La fondation Jean Jaurès, dans une note récente relative au revenu de base 39 ( * ) , a ainsi tenté de synthétiser les différentes conceptions autour de trois approches principales : une approche libertarienne, qui « conçoit le revenu de base comme un transfert du pouvoir de décision depuis l'État vers les individus » ; des approches marxistes et écologistes, qui « conçoivent le revenu de base comme un instrument de sortie du capitalisme productiviste, voire du salariat, découplant les revenus du travail [...] des gains de productivité issus de la robotisation » ; une approche social-démocrate, qui entendrait « assurer à tous les conditions d'une émancipation et d'une vie digne » et permettrait « d'éliminer les problématiques du non-recours aux prestations sociales et de lutte contre la fraude ».

Plus simplement, le « paysage » du revenu de base s'ordonne entre des projets qui visent à modifier purement et simplement le rapport de l'individu à la société, alors que d'autres ont une ambition plus pragmatique : améliorer le système actuel et mieux l'adapter aux bouleversements de notre société afin de le rendre plus efficient.

1. Changer le rapport de l'individu à la société

Deux grandes conceptions antagonistes du revenu de base, visant à « changer la société », peuvent être identifiées.

La première est une approche « libérale » : le revenu de base aurait pour finalité de libérer l'individu de la tutelle de l'État. Le revenu de base est vu comme un instrument favorisant la liberté individuelle, chacun bénéficiant d'un revenu lui permettant de subvenir à ses besoins fondamentaux, qu'il choisirait de dépenser comme il l'entend.

Cette vision a notamment été promue par Milton Friedman 40 ( * ) , pour qui le revenu de base était un moyen de lutter contre la pauvreté et de renforcer la responsabilité individuelle, chacun étant capable de définir ses propres besoins et de faire ses propres choix. Elle est aujourd'hui défendue par MM. Marc de Basquiat et Gaspard Koenig dans leur proposition de mettre en place un revenu de base par le biais d'un impôt négatif. Le revenu qu'ils proposent (le Liber ) doit permettre aux individus de faire face aux incidents de parcours professionnel en constituant un filet de sécurité pour tous. Il s'agit de lutter plus efficacement contre la pauvreté tout en assurant une plus grande neutralité de l'État vis-à-vis des choix de vie des individus. Lors de son audition par la mission, M. Gaspard Koenig a ainsi rappelé que le revenu de base qu'il propose a pour ambition de « résoudre une question sociale cruciale, celle de la grande pauvreté, en faisant preuve le moins possible de paternalisme » 41 ( * ) .

Selon cette approche, le revenu de base est donc avant tout un « filet de sécurité » et n'a pas pour vocation de remettre en cause la place du travail dans la société. En s'additionnant aux revenus issus du travail, le revenu de base est au contraire conçu comme un moyen d'encourager la reprise d'une activité rémunérée.

Poussée plus loin, cette logique libérale conduit certains auteurs à proposer que le revenu de base se substitue au système de protection sociale actuel. Il s'agirait de supprimer l'ensemble des prestations non-contributives et contributives et de les remplacer par un revenu de subsistance, chacun ayant pour responsabilité de s'assurer individuellement contre les risques de la vie. Le revenu de base permettrait ainsi de démanteler l'État-providence. Dans son ouvrage L'argent des Français 42 ( * ) , M. Jacques Marseille a ainsi proposé de mettre en place une allocation mensuelle de 750 euros par adulte et de 375 euros par enfant se substituant à la quasi-totalité des aides versées : les allocations familiales, les bourses d'études, les aides au logement, les allocations chômage, les aides au retour à l'emploi, les prestations retraite. Seul le remboursement des dépenses de santé resterait à la charge de la solidarité nationale.

La seconde conception témoigne d'une approche « marxisante » du revenu de base, qui aurait pour objectif de libérer l'individu du travail. Le revenu de base est ici conçu comme un moyen, pour les individus, de choisir librement les modalités de leur participation à la vie sociale et, le cas échéant, d'organiser leur temps de travail comme ils le souhaitent. Dans cette approche, le revenu de base doit être d'un montant suffisant pour pouvoir se substituer aux revenus d'activité. Il viendrait par ailleurs s'ajouter aux prestations sociales versées par les organismes sociaux, et non les remplacer.

Le mouvement français pour un revenu de base (MFRB) conçoit ainsi le revenu de base comme un moyen d'assurer la subsistance de tous (en supprimant le problème du non-recours aux allocations) mais également de repenser la place du travail dans nos sociétés en permettant à chacun de choisir de s'engager dans les activités qu'il souhaite, qu'elles soient productives ou non. Il s'agit donc d'assumer de déconnecter le travail et le revenu afin de valoriser d'autres activités comme l'engagement associatif et le bénévolat. Comme l'a indiqué M. Jean-Éric Hyafil lors de son audition, le revenu de base permettrait aux travailleurs de disposer d'une « marge d'autonomie accrue pour quitter un emploi qu'ils estiment privé de sens et accéder à un nouvel emploi plus sensé à leurs yeux, même si celui-ci est plus faiblement rémunéré » 43 ( * ) .

De même, M. Philippe Van Parijs conçoit le revenu de base comme étant davantage qu'un instrument efficace de lutte contre la pauvreté monétaire : il s'agit de donner aux individus une liberté réelle de choisir un emploi permettant leur épanouissement, et donc de refuser un emploi ingrat. L'allocation universelle qu'il propose est donc « à la fois un instrument de liberté et une manière d'échapper à la servitude » 44 ( * ) .

M. Baptiste Mylondo pousse plus loin cette réflexion, et semble inscrire le revenu de base dans une dynamique plus large de réduction de l'activité productive et de la consommation, c'est-à-dire dans une perspective de décroissance économique. Le revenu de base permettrait de mieux partager le travail entre individus et de valoriser d'autres formes de participation à la vie sociale. Selon lui, « la société doit reconnaître à chacun de ses membres un revenu décent permettant une vie digne, en reconnaissance de sa participation active à la vie sociale » 45 ( * ) . La mutation de la société est alors « précisément l'objectif avoué du revenu inconditionnel. Cette mesure révolutionnaire vise à changer notre rapport au travail, à nous libérer de l'aliénation au travail et à la consommation, à réduire la place du travail dans nos vies. Ainsi, si personne ne veut travailler, tant mieux, peut-être pourrons-nous enfin cesser de perdre notre vie à la gagner » 46 ( * ) .

2. Simplifier et rendre plus opérationnels les dispositifs de lutte contre la pauvreté
a) L'effort de la collectivité en faveur de la lutte contre la pauvreté est conséquent

La France consacre près d'un tiers de son PIB (32,2 %, soit 689,8 milliards d'euros en 2014) à la protection sociale , ce qui place notre pays parmi ceux qui ont mis en place les systèmes les plus développés et les plus complets du monde.

Si l'essentiel de cette dépense correspond à la couverture, selon une logique assurantielle, des risques maladie et vieillesse, les prestations visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion représentent une vingtaine de milliards d'euros et sont complétées notamment par les aides au logement (18 milliards d'euros) et les prestations familiales (54,1 milliards d'euros), qui représentent une part importante des ressources des familles modestes.

Prestations sociales versées en 2014, par risque

En Md €

En %

Maladie

196,1

28%

Invalidité

38,3

6%

Accidents du travail - Maladies professionnelles

7,1

1%

Vieillesse

275,5

40%

Survie

37,8

5%

Famille

54,1

8%

Insertion et réinsertion professionnelle

3,5

1%

Chômage

39,3

6%

Logement

18,0

3%

Pauvreté - exclusion sociale

20,1

3%

Total

689,8

100%

Source : Drees, panorama des minima sociaux, édition 2016

La redistribution opérée par ces dépenses permet, en conjonction avec le système fiscal, de réduire le taux de pauvreté monétaire 47 ( * ) de près de 8 points , et l'intensité de la pauvreté 48 ( * ) de 17,1 points. Le tableau ci-dessous présente l'effet des différents outils de lutte contre la pauvreté.

Impact de la redistribution sur le taux, l'intensité et le seuil de pauvreté à 60 %
du niveau de vie médian en 2013, par type de transfert

Taux de pauvreté

Intensité de la pauvreté

Seuil de pauvreté

Niveau
(en %)

Impact
(en points)

Niveau
(en %)

Impact
(en points)

Niveau
(en euros)

Impact
(en euros)

Revenu initial 1

21,9

36,9

1 085

Impôts directs 2

20,7

-1,2

37,3

0,4

954

-131

Prime pour l'emploi 3

20,6

-0,1

37,1

-0,2

958

4

Prestations familiales

18,3

-2,3

32,4

-4,7

989

31

Prestations familiales sans condition de ressources 4

19,1

-1,5

33,6

-3,5

978

20

Prestations familiales sous condition de ressources

18,3

-0,8

32,4

-1,2

989

11

Allocations logement

16,0

-2,3

26,8

-5,6

995

6

Minima sociaux 5

14,4

-1,6

20,3

-6,5

1 000

5

RSA activité

14,0

-0,4

19,8

-0,5

1 000

0

Total prestations sociales et prime pour l'emploi

14,0

-6,7

19,8

-17,5

1 000

46

Revenu disponible

14,0

-7,9

19,8

-17,1

1 000

-85

1. Revenus d'activité, revenus de remplacement, pensions alimentaires (différence entre les pensions alimentaires reçues et les pensions alimentaires versées) et revenus du patrimoine. Le revenu initial inclut la CSG (imposable et déductible) et la CRDS mais est net des cotisations sociales.

2. Impôt sur le revenu, taxe d'habitation, contribution sociale généralisée (CSG), contribution à la réduction de la dette sociale (CRDS), prélèvement libératoire sur valeurs mobilières et autres prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Il s'agit des impôts directs payés en 2013 calculés d'après la déclaration de revenus 2012.

3. Il s'agit de la prime pour l'emploi effectivement perçue en 2013, c'est-à-dire calculée sur les revenus d'activité de 2012 et nette du RSA activité touché en 2012.

4. Hors complément de libre choix du mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE-CMG), cette prestation familiale n'étant pas prise en compte par l'Insee dans le calcul du niveau de vie.

5. Dans ce tableau, seuls le RSA socle, l'AAH et le minimum vieillesse sont comptés comme minima sociaux. L'ASS, l'ATA, l'AER-R, l'ATS-R et l'allocation veuvage sont comprises dans les revenus de remplacement et donc comptabilisées dans le revenu initial.

Note : Pour les prestations sociales soumises à la CRDS, celle-ci est incluse (c'est-à-dire qu'elle n'est pas déduite du montant de la prestation).

Lecture : En 2013, le taux de pauvreté calculé sur le revenu initial (avant redistribution) s'élève à 21,9 % en France métropolitaine. Après la prise en compte des impôts directs, il s'élève à 20,7 % : les impôts directs ont un impact de -1,2 point sur le taux de pauvreté. L'ajout de la prime pour l'emploi diminue le taux de pauvreté de 0,1 point supplémentaire. Le taux de pauvreté calculé sur le revenu disponible (après prise en compte de l'ensemble de la redistribution) s'établit à 14,0 %.

Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un ménage dont le revenu déclaré au fisc est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.

Source : Drees, panorama des minima sociaux, édition 2016

La France se situe ainsi parmi les pays d'Europe dans lesquels le taux de pauvreté est le plus bas 49 ( * ) . Toutefois, un pays dont la richesse produite approchait 38 000 euros par habitant en 2015 ne peut se satisfaire d'une situation dans laquelle 8,8 millions de personnes disposent de moins de 1 000 euros par mois. Ce constat, déjà dressé par M. Lionel Stoléru dès les années 1970 dans son ouvrage préfigurant la mise en place du RMI et renouvelé par lui lors de son audition par la mission, conduit à s'interroger sur la nécessité d'une réforme des dispositifs de lutte contre la pauvreté.

La pauvreté : une problématique aux multiples facettes

Les dispositifs de minima sociaux visent à répondre à une des facettes de la pauvreté, qui est la pauvreté monétaire. La notion de pauvreté est toutefois plus complexe que la simple insuffisance de ressources pécuniaires. M. Guillaume Alméras, responsable du département emploi, économie sociale et solidaire au Secours catholique français, a indiqué, en ce sens, devant la mission, que : « les indicateurs de pauvreté (...) ne sont pas seulement monétaires : les questions relationnelles sont elles aussi très importantes. Si l'aide matérielle peut représenter une porte d'entrée, les personnes qui viennent nous voir demandent d'abord et essentiellement du lien social et de l'écoute, préalables nécessaires à l'estime de soi. Le capital social importe . » 50 ( * )

Ainsi qu'ont pu le souligner les autres associations et acteurs de la lutte contre l'exclusion auditionnés par la mission, les publics frappés par la pauvreté, et notamment par ses formes les plus intenses, font face à une logique d'exclusion et d'éloignement du marché du travail qui ne saurait être combattue uniquement par l'octroi d'une allocation. M. Pascal Lallement, délégué national d'ATD Quart Monde, l'a rappelé : « la question de l'utilité et du refus de l'inactivité forcée est importante et doit faire partie de la réflexion » sur la pauvreté. « Trop de gens sont laissés pour compte, n'ont pas leur place dans la société et doivent être reconnus . » 51 ( * )

Ces associations ont ainsi fait part à la mission de leurs inquiétudes quant à l'idée d'un revenu de base vu comme un « solde de tout compte » se substituant au nécessaire accompagnement des personnes en situation de pauvreté.

b) Des dispositifs existants nombreux aux limites connues
(1) Un système de minima sociaux complet mais dont les limites sont identifiées
(a) Un système de minima sociaux qui reflète la volonté de répondre à la diversité des situations des bénéficiaires

Environ 4,1 millions personnes bénéficiaient d'un des neuf minima sociaux 52 ( * ) au 31 décembre 2014. En prenant en compte les conjoints et les enfants des allocataires, 7,4 millions de personnes sont couvertes, soit 11,1 % de la population . La dépense correspondante s'élevait cette année-là à 24,3 milliards d'euros, soit 3,5 % des dépenses de prestations sociales. Ces dispositifs permettent de réduire le taux de pauvreté de 1,6 point et représentent une part importante du revenu disponible des ménages modestes.

Part des prestations sociales non contributives dans le revenu disponible, par décile de niveau de vie, en 2013

* Dans ce graphique, seuls le RSA socle, l'AAH et le minimum vieillesse sont comptés comme minima sociaux.

** Hors complément de libre choix du mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE-CMG), cette prestation familiale n'étant pas prise en compte par l'Insee dans le calcul du niveau de vie.

*** Il s'agit de la prime pour l'emploi perçue en 2013, c'est-à-dire calculée sur les revenus d'activité de 2012 et nette du RSA activité touché en 2012.

Note : Pour les prestations soumises à la CRDS, celle-ci est incluse (c'est-à-dire qu'elle n'est pas déduite du montant de la prestation).

Lecture : En 2013, pour les ménages de France métropolitaine dont le niveau de vie est inférieur au premier décile, la part des prestations familiales dans le revenu disponible est de 13 %, celle des allocations logement et des minima sociaux est de 16 % chacun.

Champ : France métropolitaine, ménages dont le revenu déclaré au fisc est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.

Sources : INSEE-DGFiP-CNAF-CNAV-MSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2013

Si trois dispositifs regroupent 96 % des allocataires et 97 % des dépenses, on dénombre dix minima sociaux répondant à des règles différentes et s'adressant à des publics spécifiques. Le tableau ci-dessous présente le nombre d'allocataires et les dépenses correspondant à chacun des neuf minima sociaux qui existaient en 2014.

Nombre d'allocataires et dépenses d'allocations par minimum social en 2014

Nombre d'allocataires

Dépenses d'allocations
(en millions d'euros)

Revenu de solidarité active (RSA) socle

1 898 600

10 232**

Allocation aux adultes handicapés (AAH)

1 040 500

8 170

Minimum vieillesse (ASV et ASPA)*

554 200

2 429***

Allocation de solidarité spécifique (ASS)

471 700

2 684**

Allocation supplémentaire d'invalidité (ASI)

79 500

233

Allocation temporaire d'attente (ATA)

53 800

224

Allocation équivalent retraite de remplacement (AER-R) / allocation transitoire de solidarité de remplacement (ATS-R)

11 100

226**

Revenu de solidarité (RSO)

9 800

61

Allocation veuvage (AV)

7 500

62

Ensemble

4 126 700

24 321

* Les allocations de premier étage dans le cas de l'ASV ne sont pas incluses dans les dépenses du minimum vieillesse.

** Y compris prime de Noël.

*** Hors récupération sur succession.

Source : Drees, Panorama des minima sociaux, édition 2016

L'objet du présent rapport n'est pas d'entrer dans le détail du fonctionnement des différents minima sociaux. Il sera pour cela notamment renvoyé au récent rapport remis au Premier ministre par Christophe Sirugue, alors député 53 ( * ) et, pour ce qui est des aspects statistiques, à l'édition 2016 du Panorama des minima sociaux et prestations sociales, publié par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees).

On se contentera donc ici de rappeler les principales caractéristiques des minima sociaux existants.

La principale de ces prestations est le revenu de solidarité active ( RSA ), issu de la réforme du RMI intervenue en 2008 54 ( * ) et qui était versé au 31 décembre 2014 à 1,9 million d'allocataires, soit 46 % des bénéficiaires de minima sociaux, pour une dépense de plus de 10 milliards d'euros. Il consiste en une allocation différentielle complétant les ressources du foyer à concurrence d'un niveau garanti (524,68 euros pour une personne seule hors forfait logement 55 ( * ) ). Le volet « activité » du RSA a été fusionné à partir du début de l'année 2016 avec la prime pour l'emploi pour donner naissance à la prime d'activité , qui constitue un complément de revenu pour les personnes disposant d'un revenu d'activité faible 56 ( * ) .

Bien que le RSA soit conçu comme une prestation généraliste, plusieurs autres prestations s'adressent aux personnes exclues du marché de l'emploi.

L'allocation de solidarité spécifique ( ASS ), financée par l'État et gérée par Pôle emploi, est versée pour une période renouvelable de six mois aux demandeurs d'emploi ayant épuisé leurs droits aux allocations chômage et ayant travaillé au moins cinq ans au cours des dix années précédentes.

La prime transitoire de solidarité ( PTS ), qui a succédé à l'allocation équivalent retraite de remplacement (AER-R) et à l'allocation transitoire de solidarité (ATS-R), est versée aux personnes ayant épuisé leurs droits à l'allocation de chômage et ayant suffisamment cotisé sans toutefois avoir atteint l'âge de la retraite.

Enfin, dans les départements d'outre-mer, les bénéficiaires du RSA âgés de plus de 55 ans et de moins de 65 ans peuvent bénéficier, à la place du RSA, d'un revenu de solidarité ( RSO ) s'ils s'engagent à ne plus exercer d'activité professionnelle.

Les personnes qui ne peuvent pas travailler en raison de leur âge ou de leur handicap bénéficient par ailleurs d'allocations spécifiques.

L'allocation aux adultes handicapés ( AAH ) a vocation à compléter les ressources des personnes dont le taux d'incapacité dépasse un certain niveau. Financée par l'État, elle est versée par les caisses d'allocations familiales.

Entrée en vigueur en 2007, l'allocation de solidarité aux personnes âgées ( ASPA ), financée par le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et versée par les caisses de retraites, remplace pour les nouveaux bénéficiaires les prestations de l'ancien « minimum vieillesse ». Elle vise à compléter les revenus des personnes âgées de plus de 65 ans ou ayant atteint l'âge minimal de départ à la retraite tout en étant inaptes au travail.

L'ASPA comme l'AAH sont des aides différentielles d'un montant proche mais nettement supérieur à celui du RSA (801 euros pour l'ASPA et 808,46 euros pour l'AAH) afin de tenir compte de la difficulté ou de l'impossibilité pour les bénéficiaires de retrouver une activité rémunérée.

L'allocation supplémentaire d'invalidité ( ASI ), relevant de l'assurance maladie, est versée aux personnes titulaires d'une pension d'invalidité, d'une pension de réversion, d'une pension d'invalidité de veuf ou de veuve, d'une retraite anticipée pour handicap, carrière longue ou pénibilité dont le montant est inférieur à un certain niveau et qui ne remplissent pas la condition d'âge pour bénéficier de l'ASPA.

Les veufs et veuves de plus de 55 ans dont les revenus mensuels sont inférieurs à un seuil défini peuvent bénéficier pendant deux ans et sous certaines conditions d'une allocation veuvage .

Enfin, l'allocation temporaire d'attente ( ATA ) est versée à des personnes en réinsertion, principalement des anciens détenus ou des salariés expatriés. Jusqu'en 2015, cette prestation était également versée aux demandeurs d'asile qui bénéficient désormais d'une allocation spécifique ( ADA ). Le projet de loi de finances pour 2016 prévoyait pour l'ADA une dépense de 137 millions d'euros, pour 44 000 bénéficiaires.

La multiplicité de ces dispositifs, fruit de la construction progressive d'un système qui s'est voulu de plus en plus complet, témoigne d'une volonté de prendre en compte la diversité des situations. Elle n'est toutefois pas sans soulever des interrogations.

(b) Les limites du système de minima sociaux rendent nécessaire sa réforme

Bien que les minima sociaux constituent une composante importante de la politique de lutte contre la pauvreté, le système actuel demeure perfectible. Ses limites sont connues et bien documentées. Si une grande partie des constats dressés par le rapport 57 ( * ) de notre collègue Valérie Létard fait au nom de la commission des affaires sociales en 2005 restent d'actualité, le récent rapport remis au Premier ministre par Christophe Sirugue ainsi qu'un référé de la Cour des comptes rendu public le 26 novembre 2015 apportent des éléments d'actualité.

Le montant des minima sociaux ne permet généralement pas à une personne seule sans autre ressource de sortir de la pauvreté monétaire, dont le seuil s'établissait à 1 008 euros en 2014 selon l'Insee. 58 ( * )

Plafonds de ressources et montants maximaux des minima sociaux
pour une personne seule sans enfant et hors majorations éventuelles

au 1 er avril 2016 (en euros)

Montants maximaux
des allocations

Plafonds des ressources

ATA

348,58

524,68

ADA

206,83

524,68

ASS

494,88

1 138,90

RSA

524,68

524,68

Allocation veuvage

602,66

753,32

ASI

685,82

702,71

ASPA

800,80

800,80

AAH

808,46

808,46

AER-R

1 068,54

1 684,33

Source : Drees, Panorama des minima sociaux, édition 2016

Le système comprend en outre d'importants angles morts, ainsi que le fait apparaître la comparaison entre le taux de pauvreté avant transferts (21,9 % en 2013) et la proportion des bénéficiaires de minima sociaux par rapport à la population totale (11,1 %).

Au-delà de ces aspects quantitatifs, les limites du système tiennent essentiellement à sa complexité .

Premièrement, la multiplicité des dispositifs, des guichets et des règles d'éligibilité ainsi que la complexité des démarches rendent le système illisible aux yeux des bénéficiaires potentiels, au point qu' un nombre conséquent d'entre eux renoncent à leurs droits, ou ne sont pas en mesure de les faire valoir . S'il est, par définition, difficile de connaître avec précision l'ampleur du non-recours, le comité d'évaluation du RSA l'estimait en décembre 2011 à 35 %.

La multiplicité des règles applicables aux différents minima sociaux

Chaque prestation obéit à des règles différentes, ce qui est source de complexité à la fois pour les allocataires, qui peinent à comprendre le système et à connaître leurs droits, et pour les organismes gestionnaires, qui assument des coûts de gestion importants.

Le rapport Sirugue étudie en détail cette disparité de règles.

Premièrement, au-delà du montant même et du plafond de ressources ouvrant droit à allocation, le champ des ressources prises en compte varie. À titre d'exemple, les allocations familiales sont prises en compte pour le calcul du RSA mais pas pour l'ASS ou l'AAH.

Deuxièmement, la composition du ménage est prise en compte de diverses manières. Le montant de l'ASS ou de l'AAH est ainsi doublé pour un couple par rapport à une personne seule quand le montant du RSA n'est multiplié que par 1,5 pour tenir compte des économies d'échelles liées à la vie en couple. À l'inverse, le montant du RSA est majoré en fonction du nombre d'enfants alors que celui de l'ASS ne l'est pas.

Enfin, les aides au logement dont bénéficient les allocataires de minima sociaux sont prises en compte de manière forfaitaire dans le cas du RSA et du RSO, alors qu'elles ne sont pas prises en compte pour les autres dispositifs. Au contraire, pour les bénéficiaires de l'AAH, le bénéfice d'une aide au logement entraîne le droit à une majoration pour vie autonome.

Au-delà de la complexité du système et de la méconnaissance par les bénéficiaires potentiels de leurs droits, le non-recours s'explique également en partie par l'effet de stigmatisation des allocataires de minima sociaux.

Cette diversité de dispositifs et de règles crée en outre des différences de traitement qui ne se justifient pas nécessairement. Comme le souligne la Cour des comptes, « les différences entre les montants des différents minima sociaux, leurs caractéristiques et les droits et obligations qui leur sont associés placent les allocataires dans des situations inégales, alors même que leurs parcours et leurs situations personnelles peuvent être analogues » À titre d'exemple, le bénéfice de l'ASS permet de cumuler des droits à la retraite contrairement au RSA alors même que les publics concernés sont proches.

La complexité du système est également problématique du point de vue des pouvoirs publics.

Les minima sociaux sont financés et gérés par des intervenants différents, ce qui rend leur pilotage difficile. Ainsi, la décentralisation du RSA vers les départements n'empêche pas que les règles soient fixées au niveau national ni que l'État participe à son financement, alors que ce sont les caisses d'allocations familiales (Caf) qui sont chargées de son versement. De même, la Cour des comptes souligne que l'État, qui est pourtant le financeur exclusif de l'AAH, « est en pratique quasiment absent des circuits de décision ».

En outre, l'existence d'une pluralité d'allocations spécifiques complexifie le travail des organismes chargés de la gestion et du versement des allocations. Ainsi que ses représentants ont pu l'indiquer à la mission, l'outil informatique utilisé par la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) pour verser les près de 90 milliards d'euros de prestations dont elle assure le service - pour le compte de la branche famille ou pour compte de tiers - intègre environ 18 000 règles de droit. 59 ( * ) Toute modification d'une de ces règles suppose donc une adaptation complexe et coûteuse et peut avoir des impacts difficiles à anticiper.

La Cour des comptes relève donc dans son référé que le système « engendre un volume important de dépenses indues et de rappels à verser ».

(2) Une pluralité d'autres dispositifs concourant à la lutte contre la pauvreté

Si le rôle des minima sociaux dans la lutte contre la pauvreté est important, d'autres dispositifs ont également un impact fort. La construction de ces dispositifs pourrait toutefois être interrogée.

(a) Les prestations familiales

La politique familiale n'a pas historiquement été conçue comme un instrument de lutte contre la pauvreté mais comme une politique de redistribution horizontale, des célibataires vers les familles avec enfants. Toutefois, aux allocations familiales se sont progressivement ajoutées diverses prestations sous condition de ressources visant plus particulièrement à aider les ménages modestes ou se trouvant dans des situations particulières (familles monoparentales, enfants handicapés...).

De plus, depuis le 1 er juillet 2015, le montant des allocations familiales est modulé en fonction du revenu des parents, rompant avec le principe d'uniformité qui les caractérisait jusqu'alors.

Il résulte de cette évolution et de la surreprésentation des familles avec enfant parmi les ménages modestes que les prestations familiales sont fortement concentrées sur ces derniers. En 2014, 57 % de la masse des prestations sous condition de ressources et 52 % de la masse des prestations sans condition de ressources étaient versées aux 20 % des personnes les plus pauvres 60 ( * ) . En conséquence, la politique familiale apparaît davantage aujourd'hui comme une politique de soutien au revenu des ménages modestes, les prestations familiales contribuant à réduire le taux de pauvreté de 2,3 points en 2014.

Si une telle redéfinition des objectifs de la politique familiale doit être pérenne, il pourrait être pertinent de mieux l'articuler avec l'ensemble des dispositifs de lutte contre la pauvreté.

(b) Les aides au logement

Fin 2014, on comptait 6,5 millions d'allocataires d'une aide au logement (aide personnalisée, allocation de logement familiale ou allocation de logement sociale), ce qui représentait 13,7 millions de personnes bénéficiaires, soit 21 % de la population. Ces aides représentaient une dépense de 18 milliards d'euros en 2014.

Les chiffres de la Drees montrent que 73 % de la masse de ces aides sont versés aux 20 % des personnes les plus pauvres, ce qui fait des aides au logement un élément important des politiques en faveur des ménages modestes, contribuant à la réduction du taux de pauvreté monétaire à hauteur de 2,6 points.

Toutefois, le modèle actuel d'aides personnalisées aux locataires ne peut être considéré comme satisfaisant. L'enquête réalisée par la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat et publiée en juillet 2015 61 ( * ) permet notamment de faire un point sur les limites de ces dispositifs.

Premièrement, tout en reconnaissant que le débat n'est aujourd'hui pas tranché, la Cour souligne que de nombreuses études pointent l'effet inflationniste de ces aides sur les loyers.

Par ailleurs, la Cour démontre que si les aides au logement sont fortement concentrées sur les ménages modestes, de nombreux ménages parmi les plus pauvres (près d'un quart des ménages du premier décile des allocataires des Caf) ne reçoivent aucune aide au logement, soit parce qu'ils ne sont pas éligibles, car propriétaires occupants ou hébergés gratuitement par un tiers, soit en raison d'une connaissance insuffisante de leurs droits.

Enfin, la Cour des comptes note que les règles d'éligibilité et de calcul des aides au logement « aboutissent de fait à traiter de manière différenciée un nombre croissant d'allocataires en fonction de la nature de leurs revenus », et à laisser subsister des inégalités entre ménages, notamment entre locataires du parc social et du parc privé.

Lors de son audition, la Cnaf a également souligné que, du fait des règles de calcul des aides au logement, qui se basent sur les revenus de l'année n-2 , un certain nombre de ménages bénéficient d'aides bien que leurs ressources soient au-dessus du plafond alors qu'à l'inverse des ménages peuvent ne pas avoir droit à ces aides alors même que leur situation le justifierait.

(3) Des dispositifs autres que monétaires essentiels pour les bénéficiaires mais dont la connaissance globale est imparfaite

Au-delà des aides en espèces, un certain nombre de dispositifs apportent une aide en nature visant à lutter contre les effets de la pauvreté monétaire ou à aider les personnes concernées à sortir des dispositifs d'assistance. Sans les énumérer de manière exhaustive, il est possible d'en citer un certain nombre.

(a) Prestations extra-légales et droits connexes

Le fait d'être allocataire d'une prestation de solidarité ouvre droit, de manière plus ou moins automatique, au bénéfice d'un nombre important d'aides complémentaires. Ces droits connexes peuvent prendre la forme d'aides monétaires, comme la prime de Noël 62 ( * ) accordée aux bénéficiaires du RSA, d'exonérations fiscales, de la validation de trimestres de retraite dans le cas de l'ASS ou encore de tarifs sociaux (électricité, téléphone, transports). Ces aides sont décidées et financées par différents acteurs (État, collectivités territoriales, caisses de sécurité sociale), ce qui rend leur connaissance globale difficile.

Les caisses de sécurité sociale développent, à côté de leur mission de gestion et de service des prestations légales, une politique d'action sociale. Selon les chiffres publiés en septembre 2016 par la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), les aides extra-légales versées par les organismes de sécurité sociale s'élevaient ainsi à plus de 5 milliards d'euros en 2015, essentiellement à la charge de la branche famille. De son côté, Pôle emploi développe également une politique de services et d'aides destinées à aider les demandeurs d'emploi à retourner vers l'emploi. Ces aides prennent notamment la forme d'aides à la mobilité ou encore de formations.

Enfin, les collectivités territoriales, et en particulier les départements, dans le cadre de leur rôle de chef de file de l'action sociale, et les communes, par le biais des centres communaux d'action sociale (CCAS), jouent un important rôle de proximité.

En 2005, le rapport de notre collègue Valérie Létard relevait que si l'impact de ces aides locales était « vraisemblablement important », il était « extrêmement difficile de [le] mesurer ». 63 ( * ) La connaissance globale des prestations extra-légales et des droits connexes aux minima sociaux ne s'est depuis pas réellement améliorée.

(b) La couverture maladie des personnes à faibles revenus

La protection maladie universelle (Puma), qui est entrée en vigueur le 1 er janvier 2016 et a vocation à remplacer la couverture maladie universelle (CMU), permet d'assurer la prise en charge des frais de santé de toutes les personnes dont la situation ne leur permet pas de bénéficier de la couverture prévue par l'assurance maladie. À ce dispositif s'ajoute la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), attribuée de droit aux bénéficiaires du RSA, ou encore l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS).

(c) Des dispositifs spécifiques et parfois expérimentaux

Enfin, des dispositifs spécifiques, parfois expérimentaux, sont mis en oeuvre afin de colmater certains des angles morts du système, notamment en faveur des jeunes ou encore des chômeurs de longue durée. S'il n'est pas possible d'en dresser une liste exhaustive, il convient d'en citer quelques-uns :

- le fonds d'aide aux jeunes (FAJ) finance diverses aides (formation, logement, transports, recherche d'emploi, alimentation...) destinées aux jeunes qui ne peuvent bénéficier du RSA. Son utilisation est décentralisée au niveau des départements. En 2013, le FAJ s'élevait à 36 millions d'euros et le montant moyen des aides accordées à 189 euros 64 ( * ) ;

- le RSA n'étant ouvert aux jeunes de moins de 25 ans qu'à certaines conditions, des dispositifs d'aide à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes en situation d'exclusion ont été développés. La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a prévu une rénovation de ces dispositifs avec la mise en place de parcours contractualisés vers l'emploi et l'autonomie, dont la Garantie jeunes, généralisée à partir du 1 er janvier 2017, doit constituer l'une des modalités. Cet accompagnement, mis en oeuvre notamment par les missions locales pour l'emploi, prend diverses formes et peut s'accompagner du versement d'une allocation dans le cadre d'un parcours contractualisé vers l'emploi et l'autonomie ;

La Garantie jeunes

Mise en oeuvre à titre expérimental dans un nombre croissant de départements à partir de 2013, la Garantie jeunes a été généralisée et consacrée au niveau législatif par l'article 46 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. Elle doit constituer une modalité intensive de l'accompagnement des jeunes en difficulté d'insertion.

Ce dispositif comporte deux volets :

- un accompagnement individuel et collectif par les missions locales, qui passe par des séances de formation et des périodes d'immersion dans le monde du travail sous différentes formes (stages, emplois aidés, etc. ) ;

- une allocation forfaitaire équivalente au revenu de solidarité active (RSA) 65 ( * ) , cumulable avec les revenus d'activité du jeune qui n'excèdent pas 300 euros. Au-delà, l'allocation est dégressive et s'annule lorsque les revenus d'activité atteignent 80 % du Smic brut. Elle est financée par l'État.

Sont éligibles à ce dispositif les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans 66 ( * ) qui ne reçoivent pas de soutien financier de la part de leurs parents, qui ne sont ni étudiant ni en formation ni en emploi et dont le niveau de ressources est inférieur au plafond de ressources qui ouvre droit au RSA.

Dans chaque territoire, une commission d'attribution et de suivi de la Garantie jeunes, présidée par le préfet, a pour fonction de repérer les jeunes susceptibles d'y prétendre et de prendre les décisions d'admission, de renouvellement et, le cas échéant, de suspension ou de sortie des bénéficiaires du dispositif.

La Garantie jeunes fait l'objet d'un contrat entre la mission locale et le jeune qui définit leurs obligations et engagements réciproques. Ce contrat est conclu pour une durée d'un an renouvelable sur décision de la commission d'attribution et de suivi.

- la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée a prévu une expérimentation territoriale reposant sur la réallocation des différents dispositifs d'indemnisation du chômage et de solidarité dont bénéficient les personnes concernées afin de financer des emplois dans des entreprises du secteur de l'économie sociale et solidaire. Ces emplois, destinés à des personnes inscrites à Pôle emploi depuis plus d'un an, prennent la forme de contrats à durée indéterminée rémunérés au moins au niveau du SMIC et doivent permettre de répondre à des besoins économiques et sociaux non satisfaits par l'économie de marché sur le territoire concerné.

Si nécessaire qu'elle puisse être, la création de ce type de dispositifs spécifiques met en lumière les insuffisances des dispositifs généralistes actuels.

c) Des dispositifs qui laissent subsister des phénomènes de trappe à pauvreté

Au-delà des limites propres à chacun des dispositifs existants, l'inefficacité du système provient des phénomènes de trappe à inactivité ou à pauvreté qu'il laisse subsister. En effet, malgré les mécanismes d'intéressement imaginés, l'enchevêtrement de dispositifs, la complexité des règles de calcul, l'existence de droits connexes et les frais liés à la reprise d'activité (transport, garde d'enfants) rendent incertains les effets de la reprise d'une activité rémunérée pour le bénéficiaire d'un des minima sociaux.

La trappe à inactivité

On parle de « trappe à inactivité », ou de « trappe à pauvreté », pour décrire une situation dans laquelle les gains tirés de la reprise d'une activité rémunérée sont inférieurs à la perte résultant de la fermeture des droits à allocation.

Les déterminants de la trappe à inactivité ne sont pas uniquement monétaires. Il convient en effet de tenir compte de l'intérêt subjectif que peut trouver un individu à travailler, facteur d'intégration sociale ou, à l'inverse, à refuser un emploi qui lui semble excessivement inférieur à ses aspirations.

Le caractère illisible et incertain des anticipations est renforcé par la complexité de certaines règles fiscales. Ainsi, les minima sociaux ne sont pas assujettis aux cotisations sociales alors que les aides au logement et les prestations familiales sont exonérées de CSG mais pas de CRDS et que les allocations de chômage ou d'invalidité ne sont assujetties que si le revenu fiscal excède un certain plafond. Par ailleurs, certains bénéficiaires de minima sociaux sont de droit exonérés de taxe d'habitation 67 ( * ) , d'autres le sont à raison de la faiblesse de leurs revenus, la reprise d'une activité pouvant mettre fin à cette exonération.

Enfin, de nombreux dispositifs prenant en compte les ressources du foyer, le système dissuade souvent l'activité du second membre du couple , ce qui contribue à expliquer que le taux d'activité des femmes demeure nettement inférieur à celui des hommes (67,6 % des 15-64 ans pour les femmes contre 75,5 % pour les hommes).

Taux marginal d'imposition des bas revenus

La notion de taux d'imposition marginal désigne le taux auquel est taxé tout euro supplémentaire de revenu. Pour les personnes dont les revenus sont composés en grande partie de transferts sociaux, on utilise cette notion pour décrire le montant d'allocations dont l'individu perd le bénéfice à mesure que ses revenus d'activité augmentent.

La Cnaf a présenté à la mission des travaux dans lesquels elle calcule le taux marginal d'imposition en appliquant la formule suivante, où Rd correspond au revenu disponible et Ra au revenu d'activité :

taux marginal d'imposition = 1 - (Rd2-Rd1)/ (Ra2-Ra1)

Le graphique ci-dessous, élaboré à partir des données transmises par la Cnaf, montre l'évolution relativement erratique du taux marginal d'imposition pour les bas revenus. 68 ( * )

Il résulte de ce graphique que, jusqu'à environ 0,3 SMIC, la perte d'allocations résultant d'un supplément de revenu correspond au taux de dégressivité du RSA (38 %). Au-delà, les règles de calcul des aides au logement expliquent, selon la Cnaf une partie importante des variations observées. La forte pente constatée à partir de 1,35 SMIC correspond à la sortie du dispositif de prime d'activité. Au-delà de ce niveau de revenu, les variations de son taux d'imposition marginal dépendent alors essentiellement du barème de l'impôt sur le revenu.

d) Des propositions de réforme technique du système des minima sociaux existent
(1) Resserrer le système de minima sociaux

Partant du constat de ses limites, le rapport de M. Christophe Sirugue comme le référé de la Cour des comptes recommandent une simplification du système des minima sociaux.

La Cour des comptes recommande un resserrement du système de minima sociaux autour des trois principales allocations que sont le RSA, l'AAH et l'ASPA ainsi qu'une harmonisation des ressources prises en compte.

De son côté, M. Sirugue esquisse trois scénarios de réforme qu'il a détaillés devant la mission d'information 69 ( * ) .

Le premier scénario consiste en la mise en oeuvre de douze mesures de simplification. Ces mesures ne représentent pas des réformes profondes de notre système social et peuvent être mises en oeuvre rapidement, sans préjuger de transformations plus substantielles qui pourraient être mises en oeuvre ultérieurement. Un certain nombre de ces préconisations ont été inscrites par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2017.

Le deuxième scenario, qui se rapproche de la proposition de la Cour des comptes, consiste dans le regroupement des dix minima sociaux existants en cinq pôles : un pôle « solidarité » construit sur la base du RSA actuel, un pôle vieillesse et un pôle handicap/invalidité, les dispositifs spécifiques aux chômeurs en fin de droit et aux demandeurs d'asile étant maintenus.

Le troisième scénario, plus ambitieux, passe par la mise en place d'une couverture socle unique se substituant à l'ensemble des dispositifs existants. À ce socle, qui constituerait un minimum universel garanti, s'ajouterait un complément visant soit à aider les bénéficiaires à s'insérer par le travail soit à compléter les ressources des personnes que l'âge ou le handicap empêche de travailler.

Le scénario 3 du rapport Sirugue : couverture socle et compléments

Le troisième scénario proposé par M. Christophe Sirugue repose sur une couverture socle, versée sous condition de ressources mais sans contrepartie et qui serait à terme versée de manière automatique, sans que le bénéficiaire ait à en faire la demande. Cette prestation, financée par l'État, atteindrait un montant de 400 euros par mois.

Elle serait complétée pour les personnes âgées, handicapées ou invalides par un complément de soutien également financé par l'État dont le montant s'élèverait à environ 400 euros, la somme du socle et du complément équivalant ainsi à peu près au montant de l'AAH ou de l'ASPA.

Pour les personnes en âge et en capacité de travailler mais connaissant des difficultés d'insertion, un complément d'insertion d'un montant proche de 100 euros serait financé par les départements. Contrairement à la couverture socle et comme pour le RSA actuel, ce complément d'insertion serait conditionné à la conclusion d'un contrat précisant les obligations du bénéficiaire et son droit, opposable, à un accompagnement de la part des pouvoirs publics.

(2) L'idée d'une allocation unique

D'autres propositions ne se limitent pas aux minima sociaux et mettent en avant une réforme plus large, intégrant d'autres éléments de la politique de lutte contre la pauvreté.

Auditionnée par la mission, la Cnaf a présenté une simulation opérée à titre prospectif par ses services. En regroupant l'ensemble des prestations destinées aux ménages modestes servies par la branche famille ainsi que l'ASPA 70 ( * ) , soit une masse financière de 45,4 milliards d'euros, cette simulation fait apparaître qu'il est possible de créer un revenu minimum garanti de 900 euros par ménage, majoré dans certains cas particuliers (présence dans le foyer d'un handicapé, parent isolé, familles nombreuses...). Selon les travaux de la Cnaf, ce minimum garanti permettrait, à coût constant, de réduire drastiquement le taux de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian, qui passerait de 8 % à 2 %. Il ne s'agirait cependant pas là d'un revenu de base mais bien d'une allocation unique et différentielle, versée non pas à l'individu mais au ménage.

M. Daniel Cohen a défendu devant la mission d'information 71 ( * ) une proposition formulée par trois chercheurs de l'école d'économie de Paris 72 ( * ) consistant en une fusion du RSA et des aides au logement . Selon les calculs effectués par les auteurs, une telle réforme pourrait, à budget constant, permettre de verser à chacun des bénéficiaires actuels de ces aides une allocation de 624 euros (modulée à la hausse dans les zones où les loyers sont élevés), associée à une fiscalisation au premier euro des revenus du travail à un taux de 32 %. Une telle réforme ne permet toutefois pas de traiter la question de la complexité et de la multiplicité des minima sociaux.

Le Royaume-Uni a mis en oeuvre à partir de 2012 une réforme de son système d'aide aux ménages modestes, au travers de la mise en place d'une prestation unique fusionnant plusieurs allocations et crédits d'impôts sous condition de ressources. Versée automatiquement, ce crédit universel ( universal credit ) doit permettre à la fois de lutter contre le non-recours, de réduire nettement les coûts de gestion résultant de la complexité du système et surtout de supprimer les effets de trappe à inactivité résultant de taux marginaux d'imposition des bas revenus proches dans certains cas de 100 %. Il doit en effet être paramétré de manière à ce que la reprise d'une activité rémunérée soit toujours plus profitable que les aides sociales.

L'exemple britannique démontre toutefois l'extrême complexité d'une réforme d'un système existant et touffu d'État-providence.

La réforme britannique : une idée intéressante, une mise en oeuvre délicate,
des effets encore incertains

À la suite des élections générales de 2010, le Gouvernement britannique a engagé ce qui a été décrit par l'ancien premier ministre David Cameron comme « une des réformes les plus courageuses et les plus radicales de l'État-providence depuis Beveridge » 73 ( * ) .

Le Welfare reform act de 2012 a ainsi engagé la mise en oeuvre d'une allocation universelle ( universal credit ), se substituant à un ensemble de dispositifs sociaux et fiscaux sous condition de ressources. Le montant de cette allocation est calculé selon un barème unique prenant en compte la composition et les ressources du foyer.

Cette réforme s'accompagne d'une dématérialisation des démarches, chaque allocataire recevant automatiquement la somme à laquelle il a droit chaque mois. En contrepartie, les exigences en termes de recherche d'emploi ainsi que les contrôles devaient être renforcés.

Cette réforme, qui devait être opérationnelle en octobre 2017, a pris un retard considérable, en raison de la complexité du chantier qu'elle représente pour les administrations concernées mais surtout en raison des difficultés rencontrées dans l'élaboration de l'outil informatique nécessaire, qui avaient été sous-estimées 74 ( * ) .

Par ailleurs, la réforme de l'État-providence, qui avait pour but premier un renforcement de son efficience, a été mise en oeuvre dans un contexte d'austérité budgétaire qui a conduit à assortir la mise en oeuvre du crédit universel d'une série de mesures restreignant les prestations versées aux bénéficiaires. Ces mesures d'économie sont notamment une dégressivité plus forte de l'aide, son plafonnement à un niveau plus bas qu'initialement prévu ainsi que diverses règles comme celle selon laquelle les foyers occupant un logement considéré comme trop grand par rapport à leurs besoins voient leur allocation baisser ( bedroom tax ).

Dès lors, si la mise en oeuvre du crédit universel devait avoir pour effet de lutter contre les désincitations à la reprise d'activité, les paramètres finalement retenus pourraient conduire à ce que les foyers à faible revenu soient en fin de compte moins aidés que dans le système précédent.

Alors que la pleine effectivité du nouveau système est maintenant attendue pour 2022, il est donc difficile à ce stade de distinguer ce qui relève d'un effort de restriction budgétaire de ce qui relève d'un souhait de rendre le système plus incitatif.

La Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (iFRAP), que la mission a pu auditionner, 75 ( * ) propose une réforme proche de celle qui est mise en oeuvre au Royaume-Uni au travers de la création d'une allocation sociale unique (ASU) qui aurait vocation à se substituer à l'ensemble des prestations non contributives en espèces et en nature, légales et extra-légales. Cette ASU, modulée en fonction de la situation individuelle (âge, handicap) et de la composition du foyer, serait cumulable avec les revenus du travail dans la limite d'un plafond de 2 500 € par foyer et par mois. La proposition de l'iFRAP complète la fusion des aides par une fusion des différents organismes chargés de leur service au sein d'un guichet unique. Cette fusion permettrait, selon cette institution, d'économiser 5 milliards d'euros de coûts de gestion, qui s'ajouteraient aux 5 milliards d'euros de baisses de prestations, compensées en partie par une hausse du plafond du quotient familial.

e) Un revenu de base pourrait être une solution plus ambitieuse

La réflexion sur un revenu de base se substituant à un certain nombre de dispositifs de lutte contre la pauvreté s'inscrit dans le faisceau des propositions consistant à rendre le système de protection sociale plus lisible et plus efficient. M. Christophe Sirugue a ainsi reconnu, au cours de son audition, qu'un tel revenu « peut s'inscrire dans le cadre d'une politique de lutte contre la pauvreté en permettant un reformatage des dispositifs existants ». 76 ( * )

Cet objectif - même s'il n'est pas le seul - est présent dans de nombreux projets du revenu de base, qu'il s'agisse de celui proposé par le Basic income earth network (BIEN), le mouvement français pour le revenu de base (MFRB), l'association pour l'instauration d'un revenu d'existence (AIRE) ou Génération libre, dont les représentants ont tous insisté, lors de leurs auditions - qu'il s'agisse de MM. Philippe Van Parijs 77 ( * ) , Jean-Eric Hyafil 78 ( * ) , Marc de Basquiat 79 ( * ) ou Gaspard Koenig 80 ( * ) - sur les effets présumés très favorables du revenu de base sur les situations de pauvreté et de grande précarité.

De fait, pour ses promoteurs , le revenu de base présenterait des caractéristiques qui favoriseraient une protection plus efficace que celle actuellement offerte par les dispositifs actuels de lutte contre la pauvreté.

Par son caractère inconditionnel , il procurerait des avantages majeurs par rapport à la situation actuelle, voire même aux projets de fusion ou de resserrement des allocations existantes. En poussant plus loin la logique de fusion, il apparaît en effet comme un dispositif d'une grande simplicité et d'une grande lisibilité .

En outre, si l'on peut supposer qu'une partie de la population en situation d'exclusion - et notamment les personnes sans domicile - demeurera « inconnue » des services chargés du versement des aides sociales, le versement inconditionnel, voire automatique, permettrait de circonscrire la problématique du non-recours à une part résiduelle.

Par ailleurs, l'universalité de cette prestation permettrait de réduire les effets de stigmatisation des bénéficiaires, contribuant ainsi à renforcer l'acceptabilité sociale de la redistribution.

Parallèlement, l'inconditionnalité et l'universalité contribueraient à réduire les coûts de gestion associés à l'instruction des demandes et à la lutte contre la fraude.

Enfin, versé à tous et cumulable avec les revenus du travail , le revenu de base permettrait de lutter de manière plus efficace contre les effets de trappes à inactivité , l'individu qui reprendrait ou accroîtrait son activité professionnelle conservant l'intégralité du supplément de revenu correspondant.

3. Accompagner la mutation de l'économie à l'heure du numérique

Le revenu de base est également souvent présenté comme une mesure d'accompagnement - plutôt sans doute qu'une véritable réponse - à la mutation de notre économie à l'heure de la robotisation et du numérique. C'est d'ailleurs ce constat spécifique qui a conduit le Conseil national du numérique (CNNum) à préconiser de pousser davantage la réflexion sur l'introduction d'un revenu de base en France.

a) Le constat d'une évolution du modèle de l'emploi

L'automatisation des tâches liée à la robotisation, associée à l'essor d'une économie collaborative portée par le développement numérique, conduit à une évolution forte du modèle traditionnel de l'emploi.

Certaines études universitaires ont souligné la tendance lourde des sociétés, sous l'effet de l'automatisation, à modifier la nature des emplois .

L'automatisation a ainsi une large part dans la destruction de l'emploi salarié dans l'industrie, même si ce phénomène trouve également sa cause dans la place désormais acquise par des économies comme la Chine au sein du marché industriel mondial. En France, à titre d'exemple, l'emploi salarié dans l'industrie est passé en quinze ans de 4,1 à 3,1 millions, sa part dans l'emploi total passant de 26 % en 2001 à 19 % aujourd'hui.

De manière prospective, une étude de chercheurs de l'université d'Oxford de 2013 envisageait même la disparition en 2030-2035 de 47 % des emplois actuels aux États-Unis, suivant un double critère : le caractère répétitif des tâches et la distance technologique à parcourir pour les automatiser. 81 ( * ) Appliquant la même démarche, le cabinet Roland Berger estimait pour sa part que, en France, 42 % des emplois actuels comportaient un haut risque d'automatisation à l'horizon 2025. 82 ( * )

Comme l'a expliqué devant les membres de la mission M. Daniel Cohen, directeur du département d'économie à l'École normale supérieure, la révolution numérique que connaissent les sociétés occidentales est caractérisée par des effets très différents de ceux produits par les révolutions antérieures, et notamment de ceux de la deuxième révolution industrielle, celle du « tout électrique » : pour un très grand nombre d'emplois, à la différence des technologies de l'électricité qui avaient favorisé une organisation du travail à la chaîne, les nouvelles technologies n'entretiennent pas un rapport de complémentarité mais de substituabilité avec le travail humain . Dans bien des emplois, le numérique remplace le travail humain, sans pour autant le rendre plus productif. C'est pourquoi, selon lui, pour emprunter la terminologie « Schumpeterienne », la force destructrice est aujourd'hui plus forte que la dimension créatrice et, pour bien des gens, le numérique représente plus une menace qu'une promesse.

Pour autant, des travaux plus récents montrent qu'il convient de relativiser la grande peur de la substitution de l'homme par la machine qu'Aristote avait déjà évoquée et qui fut notamment développée dans l'entre-deux-guerres par Jacques Duboin, dans sa publication intitulée La grande relève des hommes par les machines .

Comme l'indique une étude de France Stratégie 83 ( * ) , il est davantage pertinent de raisonner par tâches que par emplois : toutes les tâches qui sont effectuées dans un même emploi ne sont pas automatisables dans les mêmes proportions. Il existe des tâches que les robots restent - et sans doute resteront - incapables d'assurer, en raison notamment de la nécessité de mener un travail collaboratif ou d'établir un lien social qui leur est consubstantiel. À cet égard, il faut souligner l'essor constant, à l'heure numérique, des services à la personne qui, avec les tâches de manutention, constituent l'exemple même d'emplois peu menacés par l'automatisation.

On assiste donc moins à la disparition d'un grand nombre d'emplois qu'à leur transformation et leur concentration sur les tâches dans lesquelles les travailleurs bénéficient d'un avantage comparatif par rapport à la machine, permettant ainsi d'assurer une complémentarité dans la contribution de l'homme et du robot à la création de richesse. C'est ce qui explique que des études scientifiques fondées sur d'autres critères que ceux retenus par les chercheurs d'Oxford précités fassent apparaître des taux d'emplois présentant un risque élevé d'automatisation qui ne dépassent pas 9 % aux États-Unis ou en France. 84 ( * )

Il n'en reste pas moins que, pour reprendre les termes employés par M. François Levin et Mme Judith Herzog, rapporteurs au CNNum, lors de leur audition, il existe un « plateau de frottement technologique » qui entraîne la disparition de certains métiers présentant davantage un caractère routinier que peu qualifié - même si les deux caractères sont souvent présents dans les mêmes emplois (par exemple, les métiers de caissiers ou caissières) - sans qu'émergent, immédiatement et dans de mêmes proportions, des métiers nouveaux directement liés au numérique . Cette situation a également été soulignée devant la mission par M. Philippe Vasseur, ancien ministre, commissaire spécial à la revitalisation et à la réindustrialisation des Hauts-de-France. 85 ( * )

De fait, M. Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie, a mis en exergue lors de son audition que l'on assistait dans les économies avancées à une certaine polarisation des emplois , avec des créations d'emplois relativement fortes s'agissant tant des métiers peu qualifiés que des métiers très qualifiés, et, à l'inverse, une destruction importante d'emplois se situant au milieu de l'échelle des qualifications. 86 ( * )

Aussi, comme l'a résumé M. Daniel Cohen devant la mission : « la menace jaillit de partout. On n'est jamais à l'abri d'une numérisation, y compris les traders remplacés par des logiciels de haute fréquence. C'est peut-être pourquoi il y a un consensus de droite et de gauche pour trouver des formules couvrant les gens en situation d'incertitude, à la place du vieux débat sur l'augmentation de l'efficacité de l'assistanat vers les personnes non qualifiées. L'assise de ce débat est à la proportion de la menace que le numérique fait peser ».

La seconde tendance est celle de l'évolution des figures du salariat comme modèle d'organisation du travail.

Certes, comme l'ont souligné l'ensemble des organisations syndicales entendues par la mission ainsi que M. Georges Tissié, directeur des relations sociales à la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME), la disparition de l'emploi salarié n'est pas pour demain, et ce type de relation de travail devrait rester très fortement majoritaire dans les prochaines décennies.

L'on assiste bien, néanmoins, non seulement à une fragmentation de l'activité salariale , avec une propension à alterner emplois salariés et périodes sans emploi, mais également à une diversification de plus en plus marquée des carrières professionnelles avec le développement d'une démarche d'externalisation d'activités par les entreprises, que d'aucuns qualifient de manière générique d'« uberisation ».

Il est commun de dire que l'emploi à vie n'est plus qu'un mirage et que les sociétés post-industrielles voient monter la cohorte des employés qui alternent des périodes d'emploi et des périodes de chômage - de plus en plus longues avec la crise économique depuis 2008. Mais les chiffres de l'Insee et de Pôle emploi sont là pour le démontrer.

Si les contrats à durée indéterminée restent la première modalité d'emploi dans le salariat, avec 85,5 % des engagements des actifs en 2015, cette modalité diminue de manière tendancielle au profit de contrats à durée déterminée ou de contrats d'intérim. Surtout, ainsi que l'a indiqué à la mission Mme Carine Chevrier, déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle, dans les nouvelles embauches, la part des contrats à durée déterminée est de 84 % , niveau jamais atteint depuis les quinze dernières années. Et, parmi ces contrats, 70 % ont concerné, en 2015, des durées inférieures à un mois.

Champ : France métropolitaine, population des ménages, personnes en emploi (hors secteur public) de 15 ans ou plus (âge au dernier jour de la semaine de référence).

Source : France Stratégie, d'après l'enquête Emploi 2014 de l'Insee

Le salarié, notamment lorsqu'il est jeune, est donc confronté à une succession de plus en plus rapide d'activités salariées différentes, qu'il exerce parfois de manière continue mais, dans la majeure partie des cas, de façon discontinue avec une alternance de périodes d'emploi non-salarié ou de périodes de chômage.

Lors de son audition, M. Jean Pisani-Ferry a ainsi rappelé que les transitions directes, sans période d'inactivité, d'un emploi vers un autre ne représentaient que 44 % du total des transitions d'emplois. Dans la majeure partie des cas, les individus passent donc par des phases dans lesquelles leur niveau de revenu peut être fortement affecté par une période d'inactivité, ces situations étant très concentrées sur les jeunes.

Source : France Stratégie

Pour certains, néanmoins, la fragmentation de l'activité salariale se traduit par des périodes de chômage plus nombreuses . Avec la crise, celles-ci sont de plus en plus longues .

Au premier trimestre 2016, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) en France (hors Mayotte) a atteint 10,2 % de la population en âge de travailler, contre 7,4 % en 2007.

Dans le même temps, le nombre de demandeurs d'emploi au sens du BIT depuis un an ou plus a cru de 70 %, passant de 732 000 personnes, soit 2,6 % de la population en âge de travailler, à 1,24 million. Ainsi, par rapport au nombre total de chômeurs, la proportion de chômeurs de longue durée depuis un ou plus a atteint 43,5 % au premier semestre 2016 .

Or, comme le soulignait notre collègue Anne Emery-Dumas dans son rapport sur ce qui allait devenir la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée 87 ( * ) , le chômage de longue durée, en éloignant plus durablement du marché du travail ceux qui y sont soumis, influence fortement leurs trajectoires professionnelles, compte tenu de la dégradation de leur capital humain, de l'obsolescence plus marquée de leurs qualifications professionnelles et de l'aggravation de leurs difficultés d'insertion dans la société.

Pour d'autres, les interstices entre les périodes de salariat donnent lieu à des phases d'activité non salariée . L'entreprenariat individuel en plein essor depuis plusieurs années, notamment sous la forme de la micro-entreprise - qui a succédé à l'auto-entrepreneur et constitue aujourd'hui près de la moitié des immatriculations nouvelles d'entreprises 88 ( * ) - peut en effet être regardé comme l'une des réponses à l'impossibilité de maintenir un lien de salariat pérenne avec un même employeur. Et dans le même temps, il pourvoit utilement à l'offre de travail créée par les démarches d'externalisation des activités auxquelles recourent les entreprises, notamment les start up .

Pour autant, là encore, comme l'a rappelé Mme Carine Chevrier, l'évolution - réelle - ne remet pas en cause la très forte prédominance du salariat parmi les formes d'emplois . L'emploi non salarié ne concerne aujourd'hui que 11,5 % des emplois en France.

Répartition des actifs occupés, par statut d'emploi, de 1982 à 2015

Champ : France métropolitaine, personnes de 15 ans ou plus occupant un emploi et vivant en ménage ordinaire

Source : Insee, enquêtes Emploi (calculs Insee)

Il n'en demeure pas moins que l'emploi non salarié en France change également. Par exemple, nombreux étaient, jusqu'à la fin des années 1980, les agriculteurs, artisans et commerçants qui, en détenant des éléments d'actifs corporels (notamment leurs terres, les murs de leurs boutiques ou leurs stocks) ou incorporels (en particulier leurs fermages, leur fonds de commerce ou leur droit au bail), bénéficiaient d'un patrimoine qu'ils pouvaient céder et valoriser, notamment à leur retraite ou en cas de difficulté d'exploitation. Cette population a décliné, en particulier sous l'effet conjugué de l'industrialisation et de la concentration des exploitations, de l'essor des grandes surfaces et de la modification des réseaux de distribution. Désormais, beaucoup des nouveaux travailleurs non salariés - en particulier les micro-entrepreneurs -, ne disposant pas d'un tel patrimoine professionnel, n'ont pas un tel « amortisseur » lorsque leur activité chancelle ou qu'ils décident d'y mettre fin.

Contrairement à la seconde révolution industrielle, la révolution numérique n'est donc pas inclusive : elle a tendance à accroître les inégalités et ne contribue pas à rendre plus productifs les éléments les moins productifs de la société ; elle conduit au contraire à les laisser sur le bord du chemin.

Aussi, face à des personnes qui voient leur inclusion dans le travail fragilisée et à la plus grande sophistication des parcours professionnels, le revenu de base se présenterait-il comme une sorte de « filet de sécurité » atténuant les effets de la restructuration de l'emploi, voire comme un substitut aux revenus liés à l'emploi pour les personnes qui ne sont plus en mesure d'occuper un emploi compte tenu d'exigences de qualification qui les dépassent. C'est dans cette perspective que s'inscrit notamment le Centre des jeunes dirigeants (CJD), ses représentants MM. Emmanuel Amon et Sébastien Rouchon ayant estimé devant la mission que ce revenu pourrait permettre d'offrir une « sécurité à long terme à toutes les personnes désireuses de travailler ». 89 ( * ) Ainsi que l'a décrit M. Philippe Vasseur lors de son audition : « nous allons, comme l'indiquent les travaux de l'Organisation internationale du travail, connaître un chômage lourd et structurel et nous ne pourrons résoudre ces problèmes qu'avec un changement de paradigme ». Le revenu de base participerait donc de ce changement.

b) Une création de richesse qui se développe de plus en plus hors de l'emploi

Dans le même temps, certains promoteurs du revenu de base, sans aller jusqu'à dé-corréler le revenu de base de la création de richesse comme l'envisagent certains projets utopistes, estiment qu'il est un moyen de rétribuer des créations de richesse qui tendent à se développer hors de l'emploi . Cette dimension a en particulier été mise en exergue au cours des auditions par M. François Levin et Mme Judith Herzog, rapporteurs au Conseil national du numérique (CNNum).

Le revenu de base permettrait ainsi de dépasser la logique actuelle selon laquelle la création de valeur est uniquement la résultante de ce qui est aujourd'hui reconnu comme du travail, qu'il s'effectue sous une forme salariée ou sous une forme indépendante. Il s'agirait ainsi de prendre en considération l'évolution du capitalisme moderne vers un « capitalisme cognitif », notion développée il y a quelques années notamment par M. Yann Moulier-Boutang. 90 ( * )

Serait ainsi mieux prise en compte par la société la création de valeur qui intervient hors de l'entreprise par un phénomène de « pollinisation » . L'un des exemples emblématiques est donné par l'entreprise Google, dont le modèle économique repose en premier lieu sur la création de valeur qui résulte du seul comportement des usagers d'Internet. Or, alors même qu'ils enrichissent les applications en les rendant plus performantes, ces usagers ne reçoivent aucune rétribution.

Le revenu de base pourrait dès lors assurer la solvabilisation de ces activités contributives nouvelles qui se développent dans le cadre d'une production « peer to peer », qui est l'essence du Web 2.0 91 ( * ) , et que le marché n'est pas aujourd'hui en mesure de rémunérer.

Dans cette perspective, le revenu de base est vu par certains de ses promoteurs comme l'un des instruments d'une juste rémunération des acteurs sociaux, tout en contrant les stratégies de captation des créations collaboratives dont ce qu'il est convenu d'appeler les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) sont souvent accusés et qui, selon quelques-uns, s'apparentent au phénomène d' enclosure qu'a connu l'Angleterre à la fin du Moyen-Âge et surtout au XVI e siècle, lorsque les terres communes ont peu à peu fait l'objet d'une appropriation individuelle par les propriétaires terriens.

c) Une économie dont la croissance atone ne permet pas de juguler chômage et précarité

Certains considèrent, enfin, que la période de faible croissance dans laquelle se trouvent les économies développées est fondamentalement liée au développement de l'économie numérique et en déduisent la nécessité de trouver une nouvelle forme de « garantie sociale », dont le revenu de base pourrait être l'une des composantes.

Il est vrai que la croissance économique est souvent définie comme la condition première de l'emploi. Et il est incontestable que, pendant les décennies d'après-guerre, la croissance a véritablement tiré celui-ci vers le haut, en ouvrant aux économies nationales de nouveaux marchés.

Pour autant, les chiffres de la croissance, tant au niveau mondial qu'en France, font apparaître un ralentissement que certains estiment inexorable . Cette situation est particulièrement frappante dans la zone euro, qui n'aura bénéficié au cours de la décennie 2007-2016 que d'une croissance annuelle moyenne de 0,5 %, après une croissance de 2,3 % pendant la décennie précédente.

Source : France Stratégie, d'après FMI, World Economic Outlook, janvier 2016 (prévisions à partir de 2015)

L'idée même de la permanence de la croissance est d'ailleurs questionnée par les économistes, à commencer par M. Larry Summers, ancien président de l'université de Harvard et secrétaire au Trésor du président des États-Unis, M. Bill Clinton, qui a popularisé le concept de « stagnation séculaire », qui contraste avec l'idée de récession défendue jusqu'alors par la majeure partie de la doctrine économique.

Lors de son audition par la mission, M. Daniel Cohen a en outre mis en relief que les effets de cette croissance économique faible étaient très inégalement répartis dans nos sociétés . Il a rappelé que l'intégralité de la croissance qu'ont connue les États-Unis au cours des trente dernières années a été captée par 10 % de la population, les 90 % restants n'ayant connu aucune progression de leur pouvoir d'achat. Plus encore, la moitié des gains a été concentrée sur 1 % de la population. Ceci montre, selon lui, que la force d'entraînement de la révolution numérique n'a absolument rien à voir avec celle des révolutions précédentes.

En France aussi, les inégalités se creusent à la faveur de cette nouvelle forme de croissance, quoique de façon moins aiguë par rapport à d'autres pays. Dans un rapport récent, 92 ( * ) France Stratégie relève ainsi que, depuis la crise, les trois quarts des niveaux de vie les plus modestes ont reculé, ce recul étant plus marqué dans le bas de l'échelle. Dans le même temps, le quart des niveaux de vie les plus élevés s'est globalement maintenu, tandis que les très hauts niveaux de vie ont continué d'augmenter avant de se replier à partir de 2011.

Si ce mouvement reste mesuré en termes de revenus, il est en revanche très fort en ce qui concerne le patrimoine. La même étude montre que les inégalités de patrimoine se sont nettement accrues depuis le milieu des années 1990 sous l'effet d'une polarisation entre les ménages propriétaires de leur résidence principale, qui ont bénéficié de l'envolée des prix du logement, 93 ( * ) et les ménages locataires, dont le patrimoine a peu évolué.

Cette situation fait ainsi naître, comme l'a souligné M. Philippe Van Parijs, un fort scepticisme sur la désirabilité de la croissance comme moyen de faire face et de répondre aux défis du progrès technologique et notamment à la persistance d'un chômage élevé. C'est en partie ce scepticisme qui conduit, selon lui, à regarder le revenu de base comme un nouveau remède structurel à la pauvreté, au chômage et à l'exclusion .


* 39 Groupe de travail « Revenu universel » de la fondation Jean-Jaurès, Le revenu de base, de l'utopie à la réalité , 22 mai 2016.

* 40 Milton Friedman, Capitalisme et liberté , 1962.

* 41 Audition du 7 juillet 2016.

* 42 Jacques Marseille, L'argent des Français , Broché, 2009.

* 43 Audition du 9 juin 2016.

* 44 Audition du 23 juin 2016.

* 45 Audition du 30 juin 2016.

* 46 Baptiste Mylondo, Un revenu pour tous ! Précis d'utopie réaliste , 2010.

* 47 Le taux de pauvreté est défini par l'Insee comme la part de personnes dont le niveau de vie (revenu disponible par unité de consommation) est inférieur à une certaine proportion du niveau de vie médian. En 2014, le seuil de pauvreté à 60 % du revenu médian s'élevait à 1 008 euros par mois.

* 48 La notion d'intensité de la pauvreté correspond à l'écart entre le niveau de vie de la population pauvre et le seuil de pauvreté. L'Insee la mesure en divisant l'écart entre le seuil de pauvreté et le revenu médian par le seuil de pauvreté.

* 49 Selon l'Insee, qui s'appuie sur des chiffres d'Eurostat, le taux de pauvreté à 60 % du revenu disponible équivalent médian s'élevait en France à 13,3 %, contre 17,2 % dans l'Union européenne. Seuls cinq pays (Finlande, Slovaquie, Danemark, Pays-Bas et République tchèque) connaissaient un taux inférieur.

* 50 Audition du 15 septembre 2016.

* 51 Audition du 15 septembre 2016.

* 52 L'allocation aux demandeurs d'asile (ADA), créée par la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile, constitue un dixième dispositif. Avant sa création, ses bénéficiaires pouvaient percevoir l'allocation temporaire d'attente (ATA).

* 53 Repenser les minima sociaux : vers une couverture socle commune , rapport remis au Premier ministre le 18 avril 2016.

* 54 Loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 55 Un montant forfaitaire (62,9 euros pour une personne seule) est déduit du RSA pour les personnes bénéficiant d'une aide au logement, hébergées gratuitement ou propriétaires sans charge de remboursement. Le rapport Sirugue relève que 91 % des allocataires du RSA se voient appliquer un forfait logement.

* 56 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi.

* 57 Minima sociaux : mieux concilier équité et reprise d'activité , rapport d'information n° 334 (2004-2005) de Mme Valérie Létard, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 11 mai 2005.

* 58 Seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian.

* 59 Audition du 22 septembre 2016.

* 60 Drees, Panorama des minima sociaux, édition 2016.

* 61 Rapport d'information n° 687 (2014-2015) de M. Philippe Dallier, fait au nom de la commission des finances, 16 septembre 2015.

* 62 La prime de Noël est une aide en principe exceptionnelle mais reconduite chaque année depuis 1988.

* 63 Minima sociaux : mieux concilier équité et reprise d'activité , rapport d'information n° 334 (2004-2005) de Mme Valérie Létard, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 11 mai 2005.

* 64 Drees, Panorama des minima sociaux, édition 2016.

* 65 Soit, au 1 er avril 2016, 524,68 euros pour une personne seule .

* 66 La loi du 8 août 2016 prévoit d'élargir le dispositif aux jeunes de 16 à 25 ans à compter du 1 er janvier 2017.

* 67 C'est le cas des bénéficiaires de l'AAH. L'exonération de taxe d'habitation entraîne automatiquement une exonération de la contribution à l'audiovisuel public.

* 68 Le cas-type présenté dans ce graphique correspond à celui d'un célibataire sans enfant de plus de 25 ans (ne recevant donc pas d'allocations familiales) et ne tient pas compte de la CSG, des cotisations sociales et des taxations indirectes.

* 69 Audition du 23 juin 2016.

* 70 Soit le RSA socle, la prime d'activité, l'AAH, la majoration pour vie autonome, l'allocation de base de la Paje, le complément familial, l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation de soutien familial et l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé.

* 71 Audition du 30 juin 2016.

* 72 Antoine Bozio, Gabrielle Fack, Julien Grenet (dir.), Les allocations logement. Comment les réformer ?, Paris, Éditions Rue d'Ulm, coll. « Cepremap », 2015.

* 73 Financial Times, 4 octobre 2010.

* 74 Un rapport de l'Institute for Government rédigé par M. Nicholas Timmins et publié en 2016 détaille les difficultés de mise en oeuvre du crédit universel.

* 75 Audition du 7 juillet 2016.

* 76 Audition du 23 juin 2016.

* 77 Audition du 23 juin 2016.

* 78 Audition du 9 juin 2016.

* 79 Audition du 9 juin 2016.

* 80 Audition du 7 juillet 2016.

* 81 C. B. Frey et M. A. Osborne, « Future of employment : how susceptible are jobs to computerisation ? », 2013.

* 82 Roland Berger Strategy Consultants, « Les classes moyennes face à la transformation digitale », 2014.

* 83 N. Le Ru, « L'effet de l'automatisation sur l'emploi : ce qu'on sait et ce qu'on ignore », juillet 2016.

* 84 M. Arntz, T. Gregory et U. Zierahn, «The risk of automatisation for jobs in OECD countries: a comparative analysis », 2016.

* 85 Audition du 28 septembre 2016.

* 86 Audition du 22 septembre 2016.

* 87 Rapport n° 266 (2015-2016) fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 16 décembre 2015.

* 88 41,3 % en mai 2016 (mais 48,5 % en mai 2015).

* 89 Audition du 15 septembre 2016.

* 90 Voir notamment : Le capitalisme cognitif : La nouvelle Grande Transformation , Paris, 2007.

* 91 Notion qui caractérise l'évolution de l'Internet vers une plus grande interactivité, par le biais d'une complexification interne de la technologie permettant plus de simplicité d'utilisation.

* 92 France Stratégie, Lignes de faille. Une société à réunifier , octobre 2016.

* 93 Avec une multiplication des prix quasiment par deux entre 1997 et 2008.

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