B. ADAPTER LE PÉRIMÈTRE DE LA POLICE D'AGGLOMÉRATION AUX BASSINS DE DÉLINQUANCE

1. Élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police en matière d'ordre et de sécurité publics à l'ensemble de la métropole

En contrepartie de ce dessaisissement, la compétence opérationnelle de la préfecture de police pourrait être étendue.

Comme le rappellent l'IGA et l'IGPN, il est généralement admis que l'unité urbaine constitue « le périmètre le plus pertinent en matière de police » 84 ( * ) . Ses contours sont déterminés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) selon des critères reposant sur « la continuité du bâti et le nombre d'habitants » 85 ( * ) .

Comme le montre la carte ci-dessous, la zone constituée par Paris et la petite couronne est loin de recouvrir l'ensemble de l'unité urbaine , suggérant ainsi que le périmètre actuel de la police d'agglomération reste trop étriqué au regard des bassins de délinquance. Ainsi, la troisième ville la plus peuplée de la région, Argenteuil, se trouve exclue de la zone de compétence de la préfecture de police.

Cartographie de la région Île-de-France

Source : commission des finances du Sénat (à partir d'une carte réalisée par l'institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France, dont la légende a été modifiée)

Ce constat amène naturellement à s'interroger sur le périmètre administratif le plus pertinent pour l'exercice des compétences en matière d'ordre et de sécurité publics.

À cet égard, la région constitue une zone bien trop large , dans la mesure où l'unité urbaine comprend seulement 31 % du territoire régional, contre 89 % des habitants 86 ( * ) . En outre, la présence de zones de compétence de la gendarmerie serait source de complication.

Une solution intermédiaire consisterait à faire coïncider le périmètre de compétence de la préfecture de police avec celui de la Métropole du Grand Paris (MGP) , ce qui permettrait notamment d'intégrer des villes telles qu'Argenteuil et Viry-Châtillon et de disposer - nous y reviendrons plus en détail dans la partie consacrée à la modernisation de l'organisation budgétaire - d'un cadre institutionnel permettant à l'ensemble des élus locaux de s'exprimer sur le budget spécial.

À cet égard, il doit être souligné qu'il avait initialement été envisagé de confier à la MGP une compétence s'agissant des dispositifs locaux de prévention de la délinquance. L'article 12 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) prévoyait à cet effet la création d'un « conseil métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance » chargé de coordonner « les grandes orientations en matière de prévention de la délinquance sur le territoire de la métropole du Grand Paris ». Les dispositions relatives à la prévention de la délinquance ont toutefois été remises en cause par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe).

Recommandation n° 3 : en contrepartie, élargir la compétence opérationnelle de la préfecture de police à l'ensemble du territoire de la métropole afin de rapprocher le périmètre de la police d'agglomération des bassins de délinquance.

2. Redéfinir en parallèle les relations avec les élus locaux et les autres représentants de l'État

En parallèle, il apparaît nécessaire de renforcer les relations avec les élus locaux et les représentants de l'État .

Il peut d'ailleurs être souligné que l'article 12 de la loi Maptam comportait des dispositions allant dans ce sens . Ainsi, le préfet de police devait informer « régulièrement le président de la métropole du Grand Paris des résultats obtenus en matière de lutte contre l'insécurité ». En outre, le préfet de police et le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, étaient chargés « d'arrêter conjointement le plan de prévention de la délinquance » de la métropole après « avis du conseil métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance ».

Il est vrai que, comme cela a été précédemment rappelé, la réforme de la police d'agglomération a suscité chez les élus locaux et les représentants de l'État un sentiment d'éloignement et de dépossession , en raison de la faiblesse des liens entretenus avec la préfecture de police.

Or, la recherche d'une meilleure articulation avec ces acteurs se justifie pleinement sur le plan de l'efficacité de l'action publique .

En effet, les collectivités territoriales de petite couronne « participent de manière croissante à la fabrique de la sécurité » aux côtés de la préfecture de police 87 ( * ) . Comme le relève l'Institut d'aménagement et d'urbanisme (IAU) dans une récente publication, les trois-quarts des communes de petite couronne disposent d'une police municipale et 80 % d'un dispositif de vidéosurveillance 88 ( * ) . La région a également décidé de mener une politique active en matière de sécurité, avec un budget d'investissement qui devrait atteindre 21,8 millions d'euros en 2017 89 ( * ) .

S'agissant des représentants de l'État , il doit être rappelé que le droit en vigueur donne explicitement aux préfets de département la compétence pour « faire cesser les troubles à l'ordre public dans le département, sauf lorsque les troubles affectent un autre département » 90 ( * ) - justifiant ainsi de les associer étroitement aux activités de maintien de l'ordre des directions de la préfecture de police. Cette coordination renforcée apparaît d'autant plus nécessaire que pas moins de onze préfets exercent sur le territoire de la préfecture de police.

Tant du point de vue de la légitimité que de l'efficacité de son action, il serait donc dommageable que la préfecture de police se tienne à l'écart, dans son fonctionnement, des préfets et des élus locaux.

Recommandation n° 4 : redéfinir les relations avec les élus et les représentants de l'État afin de remédier au sentiment d'éloignement lié à la mise en place de la police d'agglomération et de renforcer l'efficacité de l'action publique.


* 84 IGA et IGPN, « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 154.

* 85 Insee, « Unité urbaine », Définitions, 13 octobre 2016.

* 86 Atelier parisien d'urbanisme, « Atlas de l'agglomération parisienne - Premiers éléments cartographiques », décembre 2012, p. 2.

* 87 IAU, « Le Grand Paris de la sécurité », Note rapide, n° 702, octobre 2015, p. 2.

* 88 Ibid .

* 89 AEF, « La région Île-de-France adopte un budget de 21,8 millions d'euros pour la sécurité en 2017 », dépêche n° 554830, 26 janvier 2017.

* 90 Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale de la police nationale (IGPN), « Évaluation de la mise en place de la police d'agglomération parisienne », précité, p. 63-64.

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