C. DES FLUX FINANCIERS IMPORTANTS QUI REFLÈTENT UN PROJET SCIENTIFIQUE ET CULTUREL AMBITIEUX

Si les versements prévus par l'accord sont importants - de l'ordre d'un milliard d'euros -, ils doivent être mis au regard de l'ambition patrimoniale du projet, qui exige un engagement exceptionnel de la France.

1. Un projet scientifique et culturel ambitieux : la création ex nihilo d'un musée universel du XXIe siècle

La demande initiale des Émirats arabes unis était plutôt celle d'une pinacothèque d'art ancien. Au cours de la négociation, le projet a évolué, sous l'impulsion de l'équipe de direction du Louvre alors en poste, vers la notion de « musée universel » qui figure en bonne place dans l'accord du 6 mars 2007 .

D'après Alexandre Kazerouni, « le Louvre Abou Dhabi se veut davantage un lieu de formulation d'hypothèses ouvertes à la recherche qu'un lieu de mise en scène des conclusions de l'histoire de l'art. En ce sens, son universalisme plein d'étonnement est très différent de celui prescriptif des Lumières incarné depuis plus de deux siècles par le Louvre des bords de Seine ».

Cette orientation permet de faire bénéficier le Louvre Abou Dhabi de la richesse de l'ensemble des collections nationales françaises . Le musée universel d'Abou Dhabi présentera ses collections - complétées, durant les dix premières années suivant l'ouverture, par des prêts des musées français - de façon chronologique et non pas par aire géographique, ce qui constitue une novation qui devrait permettre de faire émerger des liens entre des aires culturelles souvent présentées de façon distincte. Bien que l'architecte ait déjà été choisi par les Émiriens, et le bâtiment déjà conçu au moment de la définition du projet culturel et scientifique, la disposition intérieure du bâtiment a pu être adaptée pour tenir compte des enjeux muséographiques.

Aucune région, aucun type d'art n'est écarté et il importe de souligner que des oeuvres religieuses ou comprenant des sujets nus ont été acquises par les Émiriens, comme en témoignait l'exposition « Naissance d'un musée », organisée en 2014 au Louvre et qui présentait les acquisitions émiriennes liées au projet du Louvre Abou Dhabi. L'enjeu symbolique que représente un tel musée, dans une région qui connaît un mouvement d'expansion de l'islamisme radical, ne doit pas être sous-estimé.

2. Des flux financiers en provenance des Émirats arabes unis qui atteignent près d'un milliard d'euros

Les flux financiers dus par les Émirats arabes unis à la France dans le cadre du projet s'élèvent à 974,5 millions d'euros dont le versement est étalé sur la totalité de la durée de l'accord, soit trente ans et demi - ce montant n'inclut pas le coût d'acquisition de la collection permanente du Louvre Abou Dhabi, qui est supporté par la partie émirienne et qui s'élève à une quarantaine de millions d'euros par an.

L'ensemble des versements prévus dans l'accord de 2007, résumés dans le graphique ci-après, est indexé sur l'inflation européenne et les montants indiqués doivent donc s'entendre en euros constants de 2007.

Échéancier initial des versements des Émirats arabes unis à la France depuis la signature de l'accord jusqu'à son terme (2007-2037)

(en millions d'euros constants de 2007)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'accord intergouvernemental de 2007)

Près de la moitié du total est liée à l'attribution du nom du Louvre au nouveau musée, qui se traduit par le versement de 400 millions d'euros (constants de 2007) au profit exclusif du Louvre, dont le versement doit être effectué en plusieurs « tranches » : 150 millions d'euros ont été versés par les Émirats arabes unis à la signature de l'accord et cette somme devrait être complétée par quatre paiements de 62,5 millions d'euros qui sont prévus l'année de l'ouverture puis tous les cinq ans à compter de l'ouverture.

Répartition des versements prévus par l'accord de 2007 par domaine

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'accord intergouvernemental de 2007)

Les prêts font l'objet d'une compensation financière de 190 millions d'euros .

Les expositions temporaires donnent lieu à un versement annuel moyen de 13 millions d'euros , dont 8 millions d'euros de remboursement des frais engagés pour la production des expositions et 5 millions de contribution de soutien aux musées français. Hors défraiement, les versements nets au profit des musées s'élèvent à 75 millions d'euros sur quinze ans.

Ces flux récurrents sont complétés par un mécénat ponctuel de 25 millions d'euros au profit du Louvre et qui trouve sa contrepartie implicite dans l'attribution à une galerie du musée du Louvre du nom « d'une personnalité éminente des Émirats arabes unis ». Le Centre Cheikh Zayed bin Sultan Al Nahyan a été inauguré par le président de la République française le 5 juillet 2016.

Enfin, il faut noter que le rôle joué par la France au titre de la stratégie d'acquisition des collections permanentes du musée ne fait pas l'objet d'un paiement spécifique .

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