B. LOI N° 2015-990 DU 6 AOÛT 2015 RELATIVE À LA CROISSANCE, À L'ACTIVITÉ ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES ÉCONOMIQUES

1. Dispositions relatives aux communications électroniques
a) Adoption d'ordonnances par le Gouvernement

En application de l' article 115 , le Gouvernement a adopté, en respectant le délai exigé de neuf mois à compter de la promulgation de la loi :

- l'ordonnance n° 2016-493 du 21 avril 2016 relative à la mise sur le marché d'équipements radioélectriques ;

- l'ordonnance n° 2016-526 du 28 avril 2016 portant transposition de la directive 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à des mesures visant à réduire le coût du déploiement de réseaux de communications électroniques à haut débit ;

- et l'ordonnance n° 2016-492 du 21 avril 2016 portant simplification des dispositions du code des postes et des communications électroniques relatives à l'institution de servitudes radioélectriques.

Le projet de loi de ratification de ces ordonnances a été déposé le 14 septembre dernier à l'Assemblée nationale.

b) Statut de zone fibrée

Issu d'un amendement sénatorial, l' article 117 a créé et suite aux recommandations de la mission dirigée par Paul Champsaur sur la transition vers les réseaux à très haut débit et l'extinction du réseau de cuivre, le statut de « zone fibrée » , inséré à l'article L. 33-11 du code des postes et des communications électroniques (CPCE). Ce statut vise à favoriser la transition du réseau cuivre vers un réseau en fibre optique en déclenchant des mesures facilitant cette transition sur un territoire donné, dès lors que le réseau fibré a atteint un niveau de développement suffisamment avancé pour devenir le réseau de référence.

L'article 117 prévoyait l'adoption d'un décret pour définir ses modalités d'application. Ce décret n'a pas été publié, alors qu'une question parlementaire sur le sujet est restée sans réponse (question écrite n° 77243 de M. Michel Vergnier, député de la Creuse, publiée le 31 mars 2015). Dans son rapport relatif à l'application de la loi n° 2016-990, en date du 22 mars 2016, le député Richard Ferrand remarquait que le Gouvernement impute ce retard à la « grande complexité technique de l'attribution du statut » et relativisait la gravité de ce retard par le fait que « le nombre de territoires qui pourraient être éligibles au statut de zone fibrée demeure très modeste ». En mars 2016 également, la Fédération des industriels des réseaux d'initiative publique (FIRIP) annonçait mettre en place des opérations pilotes dans au moins trois territoires.

Seul le décret n° 2016-1182 du 30 août 2016 modifiant les articles R. 111-1 et R. 111-14 du code de la construction et de l'habitation prend en compte la création du statut de zone fibrée par la loi, conformément à l'avis n° 2015-1490 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP ou, ci-après, l'Autorité), qui constate néanmoins qu'il sera ultérieurement nécessaire de modifier l'arrêté d'application de l'article R. 111-14 du code de la construction et de l'habitation une fois que le statut de zone fibrée aura été déterminé. Ce décret supprime l'obligation de relier les bâtiments au réseau cuivre dès lors qu'ils sont connectés en fibre optique et situés dans une « zone fibrée ».

Cependant, l' article 71 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique a modifié, suite à l'adoption d'un amendement sénatorial, l'article L. 33-11 du CPCE pour ajuster la répartition des responsabilités en la matière entre le ministre chargé des communications électroniques et l'ARCEP. Alors que le dispositif de la loi n° 2015-990 prévoyait que le ministre attribuerait ce statut après avis de l'ARCEP, la loi pour une République numérique confie cette tâche à l'ARCEP, tandis que celle de définir les modalités et conditions d'attribution du statut ainsi que les obligations pouvant y être attachées sont confiées au ministre, qui adoptera un arrêté, sur proposition de l'ARCEP.

Cet article 71 a également octroyé un délai supplémentaire pour l'adoption d'un décret d'application - en Conseil d'Etat et non plus un décret simple : il devait être pris dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi pour une République numérique, c'est-à-dire le 7 avril 2017. Ce décret devait, aux termes de la loi, déterminer « notamment les obligations réglementaires pouvant être adaptées en raison de l'attribution de ce statut ainsi que les dispositions facilitant la transition vers le très haut débit ».

Le Gouvernement et l'ARCEP ont organisé, en janvier, un premier atelier de réflexion sur le sujet réunissant les opérateurs et les collectivités. Le Gouvernement considère dorénavant que l'adoption de ce décret n'est pas nécessaire , aucune obligation réglementaire autre que celle concernée par le décret n° 2016-882 précité n'ayant été identifiée comme devant être adaptée. S'agissant de l'arrêté que l'ARCEP doit proposer au ministre chargé des communications électroniques, l'Autorité a décidé, le 18 avril 2017, de lancer une consultation publique courant jusqu'au 24 mai 2017, visant à définir les modalités et conditions d'attribution de ce statut avant de les proposer au Gouvernement. Selon les termes de l'article 71, l'arrêté devait être proposé dans les trois mois suivant l'adoption du décret en Conseil d'État, soit au plus tard le 7 juillet 2017.

c) Équipement des immeubles en fibre optique

L'article L. 111-5-1 du code de la construction de de l'habitation (CCH), alinéa 2, introduit par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie impose que tout un immeuble neuf groupant plusieurs logements ou locaux à usage professionnel - dits immeubles collectifs - soit pourvu, lors de sa construction, en lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, afin qu'il soit ensuite possible de desservir chacun de ces logements ou locaux. Cette obligation est applicable depuis le 1er janvier 2010 pour les immeubles de moins de vingt-cinq logements et depuis le 1er janvier 2012 pour ceux de plus de vingt-cinq logements.

L' article 118 de la loi commentée étend cette obligation d'équipement en fibre optique :

- aux travaux effectués dans les immeubles collectifs lorsque ces travaux sont soumis à permis de construire et que le coût des travaux d'équipement ne paraît pas disproportionné par rapport au coût des travaux couverts par le permis de construire (article L. 111-5-1-2 du CCH, introduit par un amendement sénatorial) ;

- à d'autres constructions neuves : celle des immeubles et maisons ne comprenant qu'un seul logement ou local à usage professionnel (article L. 111-5-1-1 du CCH) - dits immeubles et maisons individuels -, d'une part, et celle des lotissements, d'autre part.

Cette nouvelle obligation s'applique aux immeubles, maisons et lotissements dont le permis de construire ou le permis d'aménager est délivré après le 1er juillet 2016.

L'article 118 prévoit, pour chacune de ces trois extensions, l'adoption d'un décret en Conseil d'État.

S'agissant de l'extension à la construction de lotissements, le Gouvernement considère que la rédaction de la loi est suffisamment explicite et détaillée et que l'adoption d'un décret n'est, en conséquence, pas nécessaire.

Quant à l'extension à la construction d'immeubles et maisons individuels, le décret n° 2016-1182 du 30 août 2016 modifiant les articles R. 111-1 et R. 111-14 du code de la construction et de l'habitation, évoqué à propos des zones fibrées, a été publié.

En revanche, l'obligation d'équipement en lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique applicable aux travaux effectués dans les immeubles collectifs figurant à l'article L. 111-5-1-2 du CCH n'avait - au 31 mars 2017 - toujours pas été précisée par un décret en Conseil d'Etat. Ce décret a néanmoins été adopté le 5 mai dernier : il s'agit du décret n° 2017-832 du 5 mai 2017 relatif à l'application de l'article L. 111-5-1-2 du code de la construction et de l'habitation. Selon son article 1 er , est disproportionné le coût des travaux d'équipement en lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, y compris les travaux induits, qui est supérieur à 5 % du coût des travaux faisant l'objet du permis de construire.

Le décret renvoie à un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et des communications électroniques pour déterminer les modalités techniques de raccordement de chaque logement ou local professionnel à une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique.

d) Rapport de l'ARCEP sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles

Conformément à l' article 123 , l'ARCEP a publié un premier rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles le 3 décembre 2015. Ce rapport, qui évaluait les investissements réalisés par chacun des opérateurs dans le déploiement d'infrastructures nouvelles et vérifiait que les conventions de partage de réseaux radioélectriques ouverts au public n'étaient pas de nature à entraver ce déploiement, avait néanmoins été publié en retard par rapport à l'échéance fixée au II de l'article 123 (au plus tard trois mois après la promulgation de la loi). Les travaux parlementaires liant expressément l'examen du niveau des investissements à leur compatibilité avec les déploiements réalisés, l'ARCEP a, de plus, lancé le 18 février 2016 un observatoire trimestriel de suivi des déploiements mobiles en zones peu denses, qui complète ce rapport.

Cependant, l'Autorité n'a pas publié ce rapport cette année . Dans son rapport d'activité publié en juin 2016, l'autorité considérait pourtant que le rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs publié en décembre 2015 « permet de visualiser des différences importantes de qualité de service entre les opérateurs et permet donc de valoriser les investissements qu'ils ont réalisés. Au-delà du simple contrôle des obligations des opérateurs, l'ARCEP s'assure ainsi, plus largement, du maintien d'une forte incitation à l'investissement dans les réseaux de demain ». Néanmoins, des éléments relatifs à l'investissement des opérateurs figurent dans ce rapport d'activité, qui distingue entre fixe et mobile (le montant des investissements des opérateurs est intégré au rapport d'activité de l'autorité depuis 2002 : il est recueilli dans le cadre d'une enquête annuelle reposant sur les déclarations des opérateurs).

Surtout, le 5° de l'article 30 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes , introduit en deuxième lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, intègre l'effort d'investissement réalisé par les opérateurs dans le cadre des déploiements des réseaux de communications électroniques au rapport annuel de l'ARCEP, et supprime le rapport sur l'effort d'investissement des opérateurs mobiles .

e) Délégation de pouvoirs au président de l'ARCEP

L' article 125 permet à l'ARCEP de déléguer à son président ses pouvoirs relatifs à l'adoption des décisions individuelles d'attribution, d'une part, des autorisations d'utilisation de fréquences (articles L. 42-1 et L. 42-2 du code des postes et des communications électroniques, ci-après CPCE) et, d'autre part, de ressources en numérotation - préfixes, numéros ou blocs de numéros (article L. 44 du CPCE). Une telle délégation se justifiait pour les raisons suivantes :

- ces décisions ne posent pas de problème de rareté ou de concurrence ;

- elles sont adoptées de façon quasi-automatique ;

- enfin, et surtout, elles représentaient, lors de l'adoption de l'article, 88% du total des délibérations de l'autorité (70% pour les autorisations d'utilisation de fréquences et 18% pour les décisions individuelles en matière de numérotation). En 2016, elles constituaient environ 87% du total des décisions prises par l'Autorité (68% au titre des fréquences et 19% au titre de la numérotation).

Il s'agissait donc à la fois de réaliser des gains de productivité dans un contexte de moyens budgétaires contraints et d'accélérer le délai de traitement des demandes des entreprises du secteur.

En application de cet article, l'ARCEP a donc effectué cette délégation par une décision n°2015-1160 du 29 septembre 2015 portant délégation de pouvoirs . Elle exige du président qu'il rende compte au collège de l'ARCEP de l'exercice des activités déléguées à un rythme trimestriel et annuel.

Comme le lui permettait l'article 125, le président a également délégué ce pouvoir au directeur général, au directeur général adjoint et, en dernier lieu, aux directeurs.

Cette mesure a permis de réduire fortement les délais de traitement des demandes par les services. Ainsi, s'agissant des décisions en matière de numérotation, le délai de traitement est passé d'environ 15 jours à une semaine.

f) Adoption par l'ARCEP de lignes directrices relatives à la tarification des réseaux d'initiative publique

L' article 126 de la loi confie à l'ARCEP la mission d'adopter des lignes directrices portant sur les conditions tarifaires d'accès aux réseaux d'initiative publique (RIP) à très haut débit en fibre optique .

Pour rappel, les RIP sont des réseaux de communications électroniques établis et exploités par des collectivités territoriales ou leurs groupements. Cette compétence leur a été octroyée par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Les collectivités peuvent donc, depuis 2004, déployer ces réseaux et proposer l'accès à ceux-ci, sur le marché de gros, aux opérateurs privés actifs sur le marché de détail. Cette intervention des collectivités est nécessaire pour permettre le déploiement des réseaux de communications électroniques dans les zones du territoire caractérisées par une densité de population insuffisante pour inciter les opérateurs privés à établir un réseau.

Sous l'impulsion du plan France très haut débit, initié en 2010 et poursuivi en 2013, et qui vise à couvrir 100% de la population française en très haut débit d'ici à 2022, dont 80% par la fibre, les collectivités territoriales ont développé cet outil. Elles doivent assurer, dans le cadre du plan, la couverture en réseaux fixes à très haut débit de 43 % de la population, sur près de 90 % du territoire national. L'investissement nécessaire pour la couverture de cette zone d'initiative publique est estimé à 13 à 14 milliards d'euros. Le financement de ces RIP doit être porté par des subventions de l'État (pour 3,3 milliards d'euros), l'apport des collectivités territoriales, des prêts accordés par la Caisse des Dépôts et - ce qui concerne plus particulièrement l'article 126 - la commercialisation des réseaux aux fournisseurs d'accès à internet.

Afin d'aider les collectivités territoriales à déterminer un tarif d'accès pertinent, le législateur a donc confié à l'ARCEP la mission de les accompagner, à travers deux outils.

Un outil général, qui consiste en la définition de lignes directrices, dans le respect du droit européen 48 ( * ) . Elles ont été adoptées en décembre 2015 , suite à une consultation publique lancée en octobre 49 ( * ) . À la demande de plusieurs contributeurs, l'ARCEP a construit une tarification progressive, permettant aux collectivités territoriales de proposer des remises au début de la commercialisation et prévoyant ensuite une montée en charge, en vue d'atteindre finalement les tarifs constatés en zone d'initiative privée. A l'initiative du Sénat, l'article 30 de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne consacre au niveau législatif cette possibilité de pratiquer des remises en phase initiale, en précisant que les collectivités territoriales « peuvent proposer des conditions tarifaires préférentielles à titre temporaire, en vue de faciliter l'ouverture commerciale de leurs réseaux ».

Le second outil, mettant en oeuvre une approche au cas par cas, consiste en un droit de regard sur les conditions tarifaires des collectivités. Celles-ci doivent adresser leur projet à l'ARCEP au moins deux mois avant leur entrée en vigueur, l'Autorité pouvant émettre un avis - qu'elle peut rendre public - invitant à les modifier si elle estime que ces conditions soulèvent des difficultés au regard des exigences concurrentielles posées au VI de l'article 1425-1 du code général des collectivités territoriales (objectivité, transparence, non-discrimination, proportionnalité, garantie du respect du principe de libre concurrence et du caractère ouvert des réseaux, prise en compte de l'apport d'aides publiques). L'objectif est ici d'éviter que ces réseaux d'initiative publique ne soient proposés à des tarifs inférieurs à ceux proposés dans les zones d'initiative privée, à la fois pour préserver les finances publiques, éviter une requalification en aide d'Etat, et permettre une commercialisation homogène sur l'ensemble du territoire.

g) Couverture mobile du territoire

Introduit par voie d'amendement au Sénat par le Gouvernement afin de mettre en oeuvre ses engagements pris au Comité interministériel à la ruralité du 13 mars 2015, qui faisaient eux-mêmes suite au dépôt de plusieurs initiatives sénatoriales en ce sens 50 ( * ) , l' article 129 de la loi poursuit les programmes de résorption des zones blanches , c'est-à-dire des zones non couvertes, dans les centres-bourgs 51 ( * ) des communes (1). Il entend également aller au-delà des centres-bourgs (2) et améliorer l'information du public sur la couverture mobile (3).

Le programme de couverture des zones blanches en centres-bourgs

Pour rappel, le programme de couverture des centres-bourgs en réseau mobile de deuxième génération (2G), a été défini en juillet 2003, à travers la signature de la convention nationale de mise en oeuvre du plan d'extension de la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile par l'Etat, l'Autorité de régulation des télécommunications (ancêtre de l'ARCEP), les associations d'élus locaux et les opérateurs de téléphonie mobile. Il a ensuite été inscrit au niveau législatif par l'article 52 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (dont le dispositif reprend une proposition de loi sénatoriale déposée le 26 septembre 2002 sur le bureau du Sénat 52 ( * ) ), et les obligations de couverture des opérateurs ont été intégrées à leurs autorisations d'utilisation de fréquences 2G en 2006 pour Orange et SFR et en 2009 pour Bouygues Telecom.

Ce programme repose sur l'établissement d'une liste de centres-bourgs effectué après une campagne de recensements menée sous l'égide des préfets de régions (un premier a été réalisé en 2003, un second en 2008), et sur une répartition du financement entre les collectivités publiques et les opérateurs privés. Alors que les collectivités territoriales devaient financer, avec l'aide de l'État, 1258 pylônes (ou « points hauts » ou encore « infrastructures passives ») et leur alimentation en énergie (« phase I » du programme), les opérateurs devaient prendre à leur charge le financement de 976 pylônes (« phase II »). Les opérateurs pouvaient ensuite installer les infrastructures actives, ou antennes, en en supportant la charge financière. Une fois ces pylônes construits, les opérateurs pouvaient exploiter les sites selon le schéma de l'itinérance locale ou de la mutualisation passive, conformément à l'article 52 précité.

L'extension de ce programme au réseau mobile de troisième génération (3G) a été lancée par l'article 119 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, qui confie à l'ARCEP le soin de déterminer les conditions dans lesquelles sera mis en oeuvre un partage des installations de réseau de troisième génération en métropole, c'est-à-dire les conditions d'utilisation commune par les opérateurs d'équipements actifs et de leurs fréquences assignées. L'objectif était, comme l'indique l'exposé des motifs de l'amendement à l'origine de l'article, d'obtenir « le déploiement d'un réseau commun aux opérateurs » dans les zones les moins peuplées, les points hauts déployés pour la 2G étant réutilisés 53 ( * ) .

Suite à la décision de l'Autorité n° 2009-0328 du 9 avril 2009, un accord-cadre de partage d'installations de réseau 3G a ensuite été signé par les opérateurs le 11 février 2010, dit de « RAN sharing » (dénomination de la technologie permettant la mutualisation active). L'application de cet accord devait permettre de faciliter et d'accélérer l'extension de la couverture en 3G dans environ 3600 communes, correspondant à celles déjà identifiées dans le cadre du programme « zones blanches » 2G auxquelles s'ajoutaient environ 300 communes. Ce volet est entièrement financé par les opérateurs puisqu'il ne s'agit que du déploiement de nouvelles installations actives à installer sur des pylônes déjà construits.

(1) L'article 129 fixe un terme aux précédents programmes et prévoit l'identification de nouvelles zones blanches.

° Prenant acte de la nécessité d'achever le programme de couverture en 2G initié en 2003 et du retard pris par les opérateurs dans la mise en oeuvre de leurs engagements de couverture en 3G, les I et II de l' article 129 fixent un terme aux précédents volets du programme , en exigeant une couverture dans les zones résiduelles, c'est-à-dire déjà comprises dans ces programmes, mais pas encore couvertes :

- en 2G le 31 décembre 2016 et au plus tard six mois après la mise à disposition effective des infrastructures passives (mise en place des pylônes et leur raccordement) par les collectivités territoriales ou leurs groupements auprès des opérateurs 54 ( * ) - selon l'ARCEP 55 ( * ) , au 1er janvier 2017, 28 communes n'avaient pas encore mis à disposition des opérateurs les infrastructures passives, alors que les opérateurs n'avaient pas déployé les leurs dans 4 autres communes ;

- en 3G le 30 juin 2017 (le nouvel article 119-1 de la loi de modernisation de l'économie de 2008, introduit par l'article 129 ici commenté, fixe cette échéance et inscrit au niveau législatif l'accord de 2010).

° Les I et II de l'article 129 étendent également le précédent programme en prévoyant le recensement de nouveaux centres-bourgs en zone blanche et en y intégrant les centres-bourgs des communes dites polycentrées - c'est-à-dire les anciens centres-bourgs de communes ayant fusionné avec une autre commune depuis 1965, qui n'étaient pas concernés par les précédents recensements. Ces nouvelles zones doivent être couvertes en 2G 56 ( * ) et 3G 57 ( * ) ou 4G avant le 31 décembre 2016 et au plus tard six mois après la mise à disposition effective des infrastructures par les collectivités territoriales ou leurs groupements . Pour ces nouvelles zones, les modalités du programme reposent de nouveau sur un recensement, l'établissement d'une liste, et une répartition du financement entre acteurs publics et privés (les collectivités territoriales, avec l'aide de l'Etat, financent les infrastructures passives, et les opérateurs prennent en charge les infrastructures actives).

C'est en application de ces dispositions qu'a d'abord été publié, dans les trois mois à compter de la promulgation de la loi, l'arrêté du 5 novembre 2015 fixant la liste complémentaire des centres-bourgs de communes bénéficiant de l'extension du programme de couverture du territoire en services mobiles . Il recensait 171 centres-bourgs identifiés par une campagne de mesures organisée entre juillet et novembre 2015. Cet arrêté a néanmoins été modifié ultérieurement - et au-delà du délai de trois mois prévu par le législateur - par un arrêté du 8 février 2016, qui complète, suite à une deuxième campagne de mesures, la liste des centres-bourgs couverts, notamment avec les anciens centres-bourgs avant fusion de communes. L'annexe de cet arrêté mentionne 268 centres-bourgs, portant l'ensemble des centres-bourgs couverts par le programme à près de 3800. Afin d'aider les collectivités à financer les infrastructures destinées à accueillir les antennes mobiles des opérateurs, l'État s'est engagé, dans le cadre de l'appel à projets publié en janvier 2017, à financer jusqu'à 100 000 euros par commune et 130 000 euros en zone de montagne. L'enveloppe mobilisée par l'État à ce titre s'élève à 30 millions d'euros.

Afin de garantir qu'aucune commune éligible au plan de résorption des zones blanches n'aura été omise, le comité interministériel aux ruralités qui s'est tenu à Privas le 20 mai 2016 a décidé le lancement d'une nouvelle campagne de mesures, laquelle a eu lieu à la fin de l'année 2016. En conséquence, l'arrêté fixant la liste des communes concernées a une nouvelle fois été modifié par un arrêté du 5 mai 2017 , qui identifie 273 nouvelles communes à couvrir, portant la liste des centres-bourgs concernés à 541 et le total des communes concernées par le programme de couverture des zones blanches en centres-bourgs à 4089 . Les financements mis à disposition par l'État au titre de ce nouvel arrêté s'élèveront également à 30 millions d'euros. Ses modalités restent à définir dans un nouvel appel à projets. Au total, cette extension du programme de couverture des zones blanches en centres-bourgs représente, pour l'État, une enveloppe financière de 63,5 millions d'euros (3,5 millions d'euros s'ajoutant aux 60 millions déjà évoqués pour financer le marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage).

Enfin, mentionnons que l'article 81 de la loi pour une République numérique a, par ailleurs, permis à chaque commune ne figurant pas sur la liste des nouveaux centres-bourgs et communes polycentrées concernés, mais répondant aux critères du programme, de demander à y être inscrite, par un arrêté conjoint des ministres chargés des communications électroniques et de l'aménagement du territoire (cet arrêté n'a, au moment de la rédaction du présent rapport, pas été publié). Enfin, l'article 28 de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne précise que la commune effectuant une telle demande « obtient une réponse motivée dans un délai de deux mois à compter de sa demande » et que, « en cas d'acceptation de la demande, l'arrêté (...) est publié dans un délai d'un mois à compter de cette décision d'acceptation ».

° Selon l'observatoire des déploiements mobiles en zone peu dense publié par l'ARCEP - dont les résultats ne distinguent pas selon les volets du programme de couverture -, en avril 2017, la couverture 2G des centres-bourgs était réalisée à 92% , contre 91% depuis janvier 2016. L'Autorité précisait que 296 centres-bourgs ne disposaient toujours pas d'un pylône mis à disposition par la collectivité (entre juillet 2016 et avril 2017, seul un pylône supplémentaire a donc été construit), alors que seuls 4 centres-bourgs attendaient, depuis janvier dernier, que les opérateurs déploient leurs infrastructures actives sur leur pylône (contre 25 en avril 2016), dont 3 pour lesquels ils indiquaient rencontrer des difficultés d'implantation du pylône.

A la même date, la couverture 3G de l'ensemble des zones concernées par le programme était réalisée à 82% , contre 51% en avril 2016 et 75% en janvier 2017. La couverture en 3G progresse donc rapidement, dans le contexte d'un suivi accru de la part des pouvoirs publics. Selon l'ARCEP, 380 centres-bourgs attendaient le déploiement des infrastructures par les opérateurs (contre 1551 en avril 2016 et 669 en janvier 2017), et 296 pylônes devaient encore être construits par les pouvoirs publics (seul un pylône a été construit depuis juillet 2016).

Notons que, en juillet dernier, l'ARCEP - à laquelle le 9° de l'article 129 confie la mission de veiller au respect de la mise en oeuvre, par les opérateurs, des programmes de couverture - a, pour la première fois, décidé de sanctionner des opérateurs pour les retards pris sur le programme de couverture en 2G . Ainsi, après avoir été mis en demeure en juillet 2015, SFR et Orange ont été sanctionnés à verser respectivement 380 000 et 27 000 euros d'amende en raison de retards portant sur 47 et 5 communes. Dans un communiqué de presse en date du 20 septembre dernier, l'ARCEP prévenait que « la formation de poursuite et d'instruction de l'Arcep (resterait) vigilante et (suivrait) avec attention les déploiements des opérateurs ».

(2) Il prévoit également la signature d'une convention afin d'étendre le programme au-delà des centres-bourgs dans le cadre du dispositif dit « France Mobile ».

Le second levier d'extension de la couverture mobile du territoire figurant à l'article 129 consiste à mettre en place un nouveau dispositif en vue d'aller au-delà des centres-bourgs , conformément à l'engagement du Gouvernement d'ouvrir un guichet « couverture mobile » afin de couvrir 800 sites dits « stratégiques » dans un délai de quatre ans, énoncé lors du comité interministériel à la ruralité du 13 mars 2015. Le 2° du III de l'article 129 exige ainsi, dans un délai de trois mois après la promulgation de la loi, la signature, par l'État, les représentants des collectivités territoriales et les opérateurs, d'une convention définissant les conditions dans lesquelles est assurée la couverture des zones où aucun service mobile n'est disponible en dehors des zones déjà concernées par le programme de couverture des zones blanches.

° Avant la signature de cette convention , un premier appel à projets visant à équiper, au-delà des centres-bourgs, 800 sites dits « stratégiques » , c'est-à-dire des zones de développement économique, des zones touristiques ou des équipements publics ayant un intérêt économique, qui ne seraient pas couverts, a été publié en avril 2016. Selon cet appel à projets, l'État participe à hauteur de la moitié des dépenses des collectivités territoriales pour mettre en place et raccorder les points hauts, dans la limite de 50 000 euros par commune (75 000 euros dans les communes situées en zone de montagne). Les opérateurs doivent, en contrepartie, mutualiser l'installation et l'entretien de leurs équipements sur ces sites.

Cet appel à projets a été clôturé fin 2016. Plus de 80 zones ont été sélectionnées pour recevoir une subvention de l'État.

° Afin d'améliorer les modalités d'identification des sites concernés, et alors que le Gouvernement et les opérateurs se sont accordés pour étendre le dispositif à 1300 sites en mai 2016, le Gouvernement a, le 25 octobre 2016, annoncé le lancement de la plateforme « France mobile » , gérée par l'Agence du numérique, qui vise à collecter les problèmes de couverture rencontrés par les collectivités territoriales en zone rurale. Ce mode de recensement des signalements des problèmes de couverture est plus large que celui défini dans le cadre de l'appel à projets d'avril 2016, car il ne fixe pas de critère a priori . Peuvent ainsi être signalés : une situation de couverture partielle du territoire d'une commune, des difficultés localisées de réception, une couverture assurée par certains mais pas par l'ensemble des opérateurs (situation dénommée « zone grise »). Tous les types de zones peuvent donc faire l'objet d'une identification par les élus : zones d'habitat (y compris hameaux), zones économiques ou touristiques, axes de transport, etc.

° La mise en place de cette plateforme constituait la première étape de la mise en place du dispositif « France mobile » , qui a été précisé par la convention prévue par l'article 129 , signée le 17 février 2017 et complétée, pour sa mise en oeuvre dans les territoires, par une circulaire de la même date relative à la mise en oeuvre de commissions régionales de stratégie numérique. Cette convention - dite « France mobile » - a donc été signée plus d'un an et trois mois après le délai exigé par la loi, alors même que ses dispositions provenaient d'un amendement du Gouvernement et que certains sénateurs s'étaient particulièrement inquiétés du sort des zones hors centres-bourgs en séance publique au cours de la première lecture de ce texte.

Conformément aux termes de la loi, cette convention permet aux collectivités, de mettre à disposition des exploitants une infrastructure comprenant un point haut support d'antenne, un raccordement à un réseau d'énergie et un raccordement à un réseau fixe ouvert au public, après constatation de la carence de l'initiative privée.

Le dispositif qu'elle prévoit, tel que rappelé par la circulaire du 17 février dernier, s'articule concrètement en plusieurs phases. D'abord, les problèmes sont signalés sur la plateforme. Ensuite, ils font l'objet d'une priorisation concertée au niveau régional (un plafond annuel de 1260 cas transmis doit cependant être respecté). Les difficultés ayant été identifiées comme prioritaires sont alors traitées par les opérateurs, qui proposent, lorsqu'ils l'estiment possible, une solution d'amélioration de la couverture. Si les opérateurs n'identifient pas de solution, un financement de l'Etat pourra être sollicité par la collectivité concernée. En cas de désaccord entre les opérateurs et la collectivité, une mesure de terrain pourra être effectuée et, si elle démontre le défaut de couverture, la collectivité pourra également solliciter un financement étatique. Les modalités du financement de l'Etat figureront dans un futur appel à projet, seront similaires à celles décrites plus haut dans le cadre de l'appel à projet d'avril 2016 relatif aux 800 sites stratégiques (prise en charge de la moitié des coûts de construction dans la limite de 50 000 euros par commune et 75 000 euros en zone de montagne). Lorsque les pylônes auront été construits dans ce cadre, les opérateurs se sont engagés à installer la 3G et la 4G au plus tard six mois après leur mise à disposition.

° Début mai 2017, 292 premiers dossiers ont été considérés comme prioritaires (sur 2681 dossiers soumis sur la plateforme). Ils ont été transmis aux opérateurs le 24 mars dernier. Les opérateurs disposaient d'un délai de 45 jours ouvrés pour restituer leur réponse. Les services centraux de l'Etat transmettront, après leur réception, les réponses des opérateurs aux collectivités individuellement via la plateforme France Mobile.

La répartition géographique des signalements a été cartographiée par l'Agence du numérique :

L'Agence a également cartographié les projets considérés comme prioritaires lors de cette « première vague » de dossiers :

Enfin, elle a établi un premier bilan chiffré de la plateforme, retranscrit ci-après.

• Dossiers déposés par région sur la plateforme France Mobile :

• « Première vague » de priorisation

• Nature des problèmes remontés

° Deux textes doivent donc encore être publiés pour la mise en oeuvre du dispositif France Mobile : le nouvel appel à projets pour la définition des modalités de contribution de l'État au financement des infrastructures passives par les collectivités ; et les conditions techniques et tarifaires pour l'accès à ces infrastructures, qui doivent encore être définies par l'ARCEP (conformément au 7° du III de l'article 129).

S'agissant du volet financier, l'État estime que la couverture des 1300 sites devra mobiliser une enveloppe financière de 73,5 millions d'euros. En additionnant ce montant à celui mobilisé dans le cadre de l'extension du programme de couverture des zones blanches en centres-bourgs, on obtient donc un total de 137 millions d'euros pour le financement des mesures résultant de l'article 129 de la loi ici commentée. Ces financements proviendront du Fonds national pour la société numérique, constitué dans le cadre du Programme d'investissements d'avenir. Pour rappel, l'État avait contribué, entre 2004 et 2011, à hauteur de 40,8 millions d'euros au financement du programme de couverture de zones blanches en centres-bourgs.

(3) Il entend, enfin, renforcer l'information du public relative à la couverture du territoire, à travers la publication de nouvelles cartes.

Le 7° du III de l'article 129 confiait à l'ARCEP la responsabilité de préciser les règles concernant l'information du public sur la disponibilité, la qualité, et la couverture des réseaux et services de communications électroniques. C'est en application de ces dispositions que l'Autorité a adopté la décision n° 2016-1678 en date du 6 décembre dernier, homologuée par un arrêté du 11 janvier 2017. Comme l'évoquait Martine Lombard, membre du collège de l'ARCEP, lors de son audition par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale le 31 janvier dernier, « ce dispositif va produire un véritable choc de transparence, parce qu'il y aura un avant et un après ». Et de poursuivre : « avant, ce sont les cartes de couverture actuelles qui sont binaires - couvert ou pas couvert. (...) Après, il y aura quatre niveaux de couverture : pas de couverture ; couverture limitée - c'est-à-dire couverture uniquement à l'extérieur des bâtiments ; bonne couverture - c'est-à-dire couverture probable à l'intérieur des bâtiments ; enfin très bonne couverture - c'est-à-dire couverture dans les bâtiments à peu près garantie sauf cas particuliers, comme pour les bâtiments très haute qualité environnementale dont l'isolation, thermique mais pas uniquement, est parfaite ».

À ce jour, seule la région Nouvelle-Aquitaine, définie comme région pilote, est concernée par ces nouvelles cartes. La décision homologuée octroie aux opérateurs un délai de six mois pour la première publication des cartes de couverture sur l'ensemble du territoire métropolitain, et établit au 1 er juillet 2018 l'échéance concernant des territoires ultramarins.

Afin de vérifier la fiabilité des cartes transmises par les opérateurs à l'ARCEP, chaque opérateur pourra, conformément au 1° du III de l'article 129, faire l'objet de campagnes de mesures effectuées par des organismes indépendants désignés par l'Autorité mais dont la prestation sera mise à la charge de l'opérateur concerné.

2. Dispositions relatives à certaines activités sur Internet
a) Réglementation de la publicité sur internet

L' article 131 vise à adapter les règles de transparence sur le marché de la publicité - définies par la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques - à l'économie numérique. L'article 23 de cette loi entendait, comme de nombreuses autres dispositions de la loi de 1993, mettre fin à l'opacité qui caractérisait auparavant le secteur de la publicité. À cette fin, il met à la charge du vendeur d'espace publicitaire une obligation de rendre compte à l'acheteur de l'espace publicitaire. Concrètement, il s'agit pour le premier de communiquer au second les conditions dans lesquelles les prestations ont été effectuées. En cas de modification devant intervenir dans les conditions de diffusion du message publicitaire, le vendeur d'espace publicitaire doit aussi avertir l'annonceur et recueillir son accord sur les changements prévus. Enfin, dans le cas où l'achat d'espace publicitaire est effectué par l'intermédiaire d'un mandataire, ces obligations incombent tant au vendeur à l'égard du mandataire qu'au mandataire à l'égard de l'annonceur.

Selon l'observatoire de l'e-publicité réalisé par PWC pour le syndicat des régies Internet (SRI) et l'union des entreprises de conseil et achat médias (Udecam), le marché de la publicité en ligne représentait, en 2016, 3,4 milliards d'euros en France, correspondant à 29,6% du marché publicitaire français (devant la télévision, qui représente 28,1% du marché). Prenant acte de l'importance économique de ce marché, l'article 131 entend adapter les règles applicables au marché publicitaire en matière d'obligation de compte rendu à la publicité en ligne, en prévoyant que les modalités de ces obligations sur ce marché sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Il entend ainsi tenir compte des nouveaux acteurs de la commercialisation des espaces publicitaires et des nouveaux modes de cette commercialisation, qui sont apparus au gré du développement de l'économie numérique. L'achat d'espaces publicitaires sur internet fait, par exemple, intervenir des systèmes d'enchères automatisées en temps réel en fonction de critères variables qui ne sont pas toujours susceptibles d'être fixés a priori. Lors de la première lecture, le rapport de la commission spéciale chargée, à l'Assemblée nationale, d'examiner le texte, a donné un autre exemple d'adaptation nécessaire, à savoir les entreprises spécialisées dans le reciblage de la publicité. Ce reciblage fonctionne en temps réel et s'appuie sur un algorithme de recommandation. Cet algorithme analyse les recherches effectuées par un internaute sur un site en particulier en vue, ensuite, d'y incruster, dans une bannière personnalisée, une publicité, qui sera ultérieurement diffusée sur un réseau de sites où est susceptible de se rendre l'internaute ciblé, identifié grâce à un « cookie » déposé sur son ordinateur.

Le rapport précité indique, par ailleurs, qu'un groupe de travail sur ce sujet a été formé à l'initiative du Gouvernement et que le renvoi à un décret ultérieur permettait de laisser se poursuivre cette concertation, menée dans le cadre du Conseil national du numérique.

Le Gouvernement a, en effet, organisé une concertation sur une période étendue. Elle a débuté par une consultation publique sur internet dans le cadre du Conseil national du numérique en janvier 2015. Plusieurs réunions de concertation avec l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur ont également eu lieu. L'économie générale du texte a été approuvée par l'ensemble des acteurs en décembre 2015. Le projet de décret a ensuite été notifié à la Commission européenne, conformément à la directive 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information. Le 27 avril 2016, la Commission a émis un avis circonstancié sur le projet de décret, ce qui entraînait une prolongation jusqu'au 30 mai 2016 du statu quo à respecter, ainsi que l'obligation d'apporter une réponse sur les suites que les autorités françaises envisageaient de donner aux objections de la Commission. Les autorités françaises ont répondu à la Commission européenne le 23 août 2016. Le 7 novembre dernier, la Commission a communiqué sa réponse à l'administration, ce qui a permis la transmission du projet de décret au Conseil d'État, lequel a examiné le texte en décembre dernier.

Après une ultime transmission, pour information, à la Commission européenne, le décret n° 2017-159 du 9 février 2017 relatif aux prestations de publicité digitale , a pu être publié.

Il précise, d'abord, qu'il s'applique aux prestations de publicité digitale, c'est-à-dire « celles ayant pour objet la diffusion de messages sur tous supports connectés à internet tels qu'ordinateurs, tablettes, téléphones mobiles, téléviseurs et panneaux numériques ».

Il distingue, ensuite, deux types d'obligation de compte rendu différents. Le premier constitue le droit commun, et le second ne s'applique qu'à certains types de campagnes.

L'obligation de droit commun consiste, pour le vendeur d'espace publicitaire, à préciser à l'annonceur :

- la date et les emplacements de diffusion des annonces, les sites ou ensemble des sites internet sur lesquels les annonces sont diffusées pouvant être regroupés en fonction de leur nature ou de leurs contenus éditoriaux ;

- le prix global de la campagne ;

- le prix unitaire des espaces publicitaires facturés.

L'obligation spécifique ne s'applique qu'aux campagnes publicitaires s'appuyant sur des méthodes d'achat de prestations en temps réel sur des espaces non garantis, notamment par des mécanismes d'enchères, pour lesquelles les critères déterminants de l'achat sont le profil de l'internaute et l'optimisation de la performance du message. Le vendeur doit alors communiquer à l'annonceur des informations visant, d'une part, à s'assurer de l'exécution effective des prestations et de leurs caractéristiques comme de la qualité technique des prestations ainsi que, d'autre part, à renseigner l'annonceur sur les moyens mis en oeuvre pour protéger son image de marque et, le cas échéant, sur les conditions de mise en oeuvre des engagements souscrits dans le cadre de chartes de bonnes pratiques.

Afin de ne pas faire peser des obligations excessives sur les entreprises prestataires de services situées dans les autres pays de l'Union européenne ces obligations ne s'appliquent pas aux vendeurs établis au sein de l'Union européenne lorsqu'ils sont soumis à des obligations équivalentes dans leur État d'établissement.

Ce décret n'entrera en vigueur que le 1 er janvier 2018.

b) Transparence et loyauté des sites de place de marché et de l'économie collaborative

L' article 134 de la loi entendait compléter l'encadrement des plateformes sur internet débuté par l'article 147 de la loi de 2014 relative à la consommation (obligation de loyauté des sites comparateurs en ligne) en mettant à la charge des sites de place de marché et de l'économie collaborative une obligation d'information loyale, claire et transparente . Tout manquement à ces dispositions était passible d'une amende administrative.

Le contenu des informations à fournir et leurs modalités de communication devaient être définis par décret . Ce décret n'a pas été adopté.

Néanmoins, cette disposition est aujourd'hui obsolète , dans la mesure où l' article 49 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numériqu e en a totalement modifié les termes. L'article L. 111-7 du code de la consommation encadre en effet aujourd'hui, comme étudié pour la loi relative à la consommation, l'ensemble des plateformes en ligne, qu'il s'agisse de celles exerçant une activité de place de marché ou de comparateur en ligne, ou de celles faisant partie de l'économie collaborative.

Comme évoqué lors de l'étude de l'application de la loi relative à la consommation, le décret d'application des dispositions relatives à la loyauté des plateformes issues de la loi pour une République numérique devrait être bientôt publié.

Dans le secteur de l'hébergement touristique, aujourd'hui caractérisé par le poids prépondérant des plateformes dans le marché des réservations, il convient de rappeler que l'article 133 de la loi dite « Macron » indique que les hôteliers - antérieurement soumis à des exigences restrictives imposées par certaines agences en lignes dites « OTA » (Online Travel Agency) - ont désormais la liberté de consentir au client des rabais. La loi précise même que toute clause contraire est réputée non écrite. Ce texte d'application directe prolonge les recommandations de l'Autorité de la concurrence sur la liberté tarifaire et celle-ci en assure un suivi régulier : elle a ainsi publié en février 2017 un « Bilan de l'efficacité des engagements pris par Booking.com devant l'Autorité de la concurrence ».


* 48 Les lignes directrices de l'Union européenne 2013/C 25/01 pour l'application des règles relatives aux aides d'État dans le cadre du déploiement rapide des réseaux de communication à haut débit prévoient un rapprochement des tarifs sur le marché de gros entre les réseaux financés par la seule initiative privée et les réseaux soutenus par des aides publiques. Ce cadre européen prévoit également que les prix de gros doivent être orientés vers les coûts.

* 49 L'ARCEP avait déjà eu l'occasion de travailler sur le sujet dans le cadre du GRACO (groupe d'échange entre l'ARCEP, les collectivités territoriales et les opérateurs) en 2014 (voir le document « L'intervention des collectivités territoriales dans le secteur des communications électroniques, décembre 2014, compte rendu des travaux du GRACO »).

* 50 Article 1 er quater de la proposition de loi n° 676 (2009-2010) relative aux télécommunications, article 6 de la proposition de loi n° 118 (2011-2012) relative à l'aménagement numérique du territoire, et amendement n° 115 rect. bis déposé en séance publique et adopté en première lecture par le Sénat (article 27 bis) puis repris dans le texte de l'Assemblée nationale dans le cadre de l'examen de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, mais supprimé en deuxième lecture au Sénat suite à son adoption en commission dans le cadre de l'examen de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 51 Conformément au protocole utilisé et consultable sur le site internet de l'ARCEP, entre 5 et 7 points de mesure sont identifiés, à l'entrée et à la sortie du bourg, ainsi que dans des lieux centraux (mairie, église, place du marché, commerces), dans un rayon de 500 mètres.

* 52 Proposition de loi relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs

* 53 Amendement n° 421, sous amendé, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale

* 54 Nouvel article 52-2 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique, issu du I de l'article 129

* 55 Selon l'avis n° 2017-0504 de l'ARCEP en date du 20 avril 2017 sur le projet d'arrêté adopté en 2017

* 56 Nouvel article 52-1 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique, issu du I de l'article 129

* 57 Nouvel article 119-2 de la loi de modernisation de l'économie, issu du II de l'article 129

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