D. LOI N° 2014-626 DU 18 JUIN 2014 RELATIVE À L'ARTISANAT, AU COMMERCE ET AUX TRÈS PETITES ENTREPRISES

Cette loi, forte de 73 articles répartis en cinq titres, comportait 20 articles devant faire l'objet de mesures réglementaires d'application. Malgré un démarrage difficile (seulement 26 % de taux d'application en 2015), le pouvoir réglementaire a pris l'ensemble des mesures d'application nécessaires prévues par la loi .

Seul un article de la loi nécessitait encore formellement des mesures réglementaires. L'article 26 de la loi comporte de nombreuses mesures de coordination en matière de sécurité sociale avec les dispositifs relatifs aux entrepreneurs individuels prévus par la loi et renvoie, à près d'une dizaine de reprises, à des mesures réglementaires d'application. Or, le Gouvernement ne prévoit pas d'adopter de mesures réglementaires spécifiques, les dispositions préexistantes du code de la sécurité sociale suffisant selon lui, sans modification, à assurer la pleine application de ces mesures. Cet article est donc pleinement applicable, nonobstant l'absence de mesures d'application nouvelles.

Par ailleurs, le Gouvernement estime que le rapport, qui devait être remis au Parlement avant le 18 décembre 2015, prévu par l'article 32 de la loi, sur la mise en place d'un statut unique de l'entreprise individuelle, élaboré par un comité chargé de préfigurer cette création, n'a aujourd'hui plus lieu d'être.

La loi du 18 juin 2014 peut donc désormais être considérée comme pleinement applicable.

E. LOI N° 2014-344 DU 17 MARS 2014 RELATIVE À LA CONSOMMATION

Cette loi comporte 161 articles répartis en six chapitres. 77 mesures d'application étaient prévues. L 'ensemble des dispositions de la loi est désormais applicable, compte tenu de la prise des décrets prévus . En revanche, plusieurs rapports demandés n'ont pas encore été remis au Parlement, ce qui démontre le peu de pertinence à faire figurer dans les textes de loi des demandes de rapport, compte tenu du faible « taux d'exécution » qu'elles connaissent.

- Trois dispositions ont fait l'objet de mesures d'application au cours de la période de référence.

L'article 6 de la loi avait prévu l'indication du pays d'origine pour les viandes et les produits agricoles et alimentaires à base de viande, dans des conditions prévues par décret . L'adoption de ce décret était conditionnée à l'autorisation de la Commission européenne. Celle-ci ayant accordé cette autorisation, à titre expérimental, le décret n° 2016-1137 du 19 août 2016 relatif à l'indication de l'origine du lait et du lait et des viandes utilisés en tant qu'ingrédient est venu mettre en application cette mesure d'information, en l'étendant au lait, en rendant obligatoire l'indication de l'origine dans des denrées alimentaires, à compter du 1 er janvier 2017 et jusqu'au 31 décembre 2018. À l'issue de cette période, un rapport d'évaluation devra être établi et transmis à la Commission européenne, sur la base duquel pourra être envisagée la pérennisation du dispositif.

L'article 54 de la loi , tout en ouvrant un droit de résiliation et de substitution du contrat d'assurance-emprunteur dans un délai de douze mois à compter de l'acceptation de l'offre de prêt, avait précisé que, pendant toute la durée de ce contrat, l'assureur ne pouvait pas le résilier pour cause d'aggravation du risque, sauf dans certaines conditions définies par décret en Conseil d'État, résultant d'un changement de comportement volontaire de l'assuré . Ces conditions ont été définies par le décret n° 2016-1559 du 18 novembre 2016 relatif aux conditions de résiliation d'un contrat d'assurance emprunteur pour cause d'aggravation du risque. Trois conditions cumulatives sont posées pour autoriser une telle résiliation : la pratique régulière d'une nouvelle activité sportive présentant un risque particulier pour sa santé ou sa sécurité, et figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie ; le fait que cet exercice conduit à rendre inexactes ou caduques les réponses faites par l'assuré en réponse aux questions relatives à sa pratique sportive posées par l'assureur lors de la conclusion du contrat ; l'absence de déclaration de cette nouvelle activité dans les conditions et délais définis au 3° à l'article L. 113-2 du code des assurances.

L'article 148 de la loi prévoyait que les modalités d'organisation des jeux et concours dans le cadre des publications de presse devaient être définies par décret. Ce dernier est intervenu ( décret n° 2016-1466 du 28 octobre 2016 fixant les modalités d'organisation des jeux et concours des publications de presse) et fixe les règles relatives au remboursement des frais engagés par le joueur ainsi que les règles de transparence et de bonne information sur l'organisation du jeu-concours et l'espérance de gain.

- Deux renvois à des décrets d'application sont devenus sans objet.

D'une part, le VI de l'article 112 de la loi prévoyait qu'un décret déterminant les principaux bassins de production pour la cotation des animaux vivants et des viandes devait être pris. Selon le Gouvernement, l'adoption d'un tel décret est cependant juridiquement inutile dès lors que l'article D. 654-25 du code rural et de la pêche maritime définit déjà ces bassins comme un « ensemble de lieux de commercialisation, géographiquement indépendants, caractérisés par un nombre suffisant de transactions, d'acheteurs et de vendeurs », qui sont déterminés par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et de l'économie.

D'autre part, si l'article 145 prévoyait que devait être pris un arrêté déterminant les tranches de numéros à valeur ajoutée pour lesquels les fournisseurs de services téléphoniques au public doivent proposer une option gratuite permettant de blocage des communications, la disposition, désormais inscrite à l'article L. 224-54 du code de la consommation, a été modifiée dans le cadre de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Dès lors, la mesure d'application attendue pour la mise en oeuvre de la loi du 17 mars 2014 peut être considérée comme étant devenue sans objet.

- Un rapport prévu par la loi a été remis au Parlement.

L'article 8 de la loi prévoyait la remise au Parlement, dans un délai d'un an, d'un rapport relatif à l'obsolescence programmée , sa définition juridique et ses enjeux économiques. Compte tenu de la définition finalement donnée par l'article 99 de la loi n ° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le Gouvernement a seulement remis son rapport en avril 2016 . Longuement attendu, ce rapport propose certaines évolutions, de nature modeste, sur cette problématique. Il est ainsi notamment préconisé de :

- suivre le retour d'expérience sur l'utilisation de la définition et de la pénalisation de l'obsolescence programmée contenues dans la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

- agir sur la conception des produits pour favoriser leur réemploi et faciliter leur réparation, ainsi que soutenir le développement des réseaux de réemploi, de réparation et de promotion de la réutilisation ;

- encourager les entreprises à poursuivre le développement des nouveaux modèles économiques permettant l'allongement de la durée de vie des produits ou leur intensification d'usage, dont les modèles d'économie de la fonctionnalité et d'économie du partage, et poursuivre leur accompagnement et leur soutien par les pouvoirs publics ;

- mettre en place, sous l'égide du ministère en charge de l'environnement et sur la base du volontariat des metteurs sur le marché, des expérimentations sur un nombre limité de produits, consistant en l'affichage de la durée de vie de ces produits, afin d'en tirer les conséquences en termes de normes partagées par les acteurs économiques des filières concernées, sur la notion de durée de vie, et en termes d'amélioration de l'information des consommateurs ;

- expertiser la pertinence de l'allongement de la durée de garantie légale pour certaines catégories de produits et formuler des propositions en conséquence.

En revanche, n'ont pas été remis au Parlement les rapports suivants, malgré l'expiration des délais prescrits :

- les rapports, prévus à l'article 8, d'une part, relatif à la modulation de l'éco-participation en fonction de la durée de la garantie commerciale des produits, de la disponibilité des pièces détachées et du prix raisonnable de ces dernières, et d'autre part, à la situation et aux enjeux en matière de protection des consommateurs (ce dernier rapport devant être remis sur une base annuelle) ;

- le rapport, prévu à l'article 16, sur l'état des lieux et les perspectives de l'économie circulaire en France. Certes, un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable a été établi en novembre 2014, mais il ne constituait, selon ses auteurs, qu'une « contribution » au rapport prévu par la loi, qui devait être remis avant le 1 er janvier 2015 ;

- le rapport, prévu à l'article 55, relatif au micro-crédit ;

- le rapport, prévu à l'article 160, sur les conséquences de la fin de l'application du règlement (CE) n° 1400/2002 de la Commission, du 31 juillet 2002, concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile.

D'autres rapports sont attendus, pour lesquels la date limite de dépôt n'est pas encore dépassée. Mais deux exemples démontrent à nouveau le peu de pertinence d'inscrire des obligations de remises de rapport à des échéances longues, difficilement compatibles avec l'évolution législative :

- l'article 2 de la loi prévoit la remise d'un rapport avant le 17 septembre 2017, évaluant les conditions de mise en oeuvre de la procédure d'action de groupe et devant proposer les adaptations jugées nécessaires. Ce rapport devait envisager également les évolutions possibles du champ d'application de l'action de groupe, en examinant son extension aux domaines de la santé et de l'environnement. Une partie de ce rapport est donc désormais sans objet, puisque, notamment, l'action de groupe a déjà été étendue au domaine de la santé par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, et aux actions en matière de discrimination, d'environnement, de relations de travail et de protection des données personnelles par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle ;

- de même, l'article 43 de la loi impose la remise d'un rapport relatif aux conditions de mise en oeuvre, à la pertinence et à l'impact de la réduction de la durée des mesures de traitement des situations de surendettement et des autres mesures prises en matière de prévention et de traitement du surendettement dans le cadre de la présente loi, de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires et, plus généralement, de la mise en oeuvre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale adopté le 21 janvier 2013. Ce rapport devait examiner la pertinence de nouvelles mesures législatives et réglementaires, en particulier une réduction supplémentaire de la durée des mesures de traitement ou une modification plus significative de la procédure de traitement des situations de surendettement. Or, depuis lors, le droit du surendettement a connu de nouvelles évolutions dans le cadre de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

1. Sur le volet télécommunications
a) Obligations d'information imposées aux sites comparateurs en ligne

L' article 147 , issu d'un amendement sénatorial sous-amendé par le Gouvernement, crée l'article L. 111-6 du code de la consommation (anciennement L. 111-5), qui met une obligation d'information loyale, claire et transparente à la charge de toute personne exerçant une activité de fourniture d'informations en ligne permettant la comparaison des caractéristiques et des prix de produits et de services - autrement dit, il s'agit des sites comparateurs en ligne.

Comme l'y invitait cet article, le Premier ministre a adopté le décret n° 2016-505 du 22 avril 2016 relatif aux obligations d'information sur les sites comparateurs en ligne .

Ce décret fixe les modalités et le contenu de ces obligations. Il précise d'abord le type d'activité de comparaison soumis aux obligations d'information. Sont soumis aux obligations d'information :

- les sites comparant des biens et des services et permettant, le cas échéant, l'accès aux sites de vente de ces biens ou de fourniture de ces services ;

- les sites de vente à distance qui proposent, à titre principal, la comparaison de biens ou de services, vendus par eux-mêmes ou par des tiers ;

- toute personne qui, pour son activité commerciale par voie électronique, utilise les termes de « comparateur » ou de « comparaison ».

Il détaille, ensuite, le contenu de ces obligations. Le site doit ainsi préciser dans une rubrique spécifique le fonctionnement du service de comparaison, cette rubrique devant être directement et aisément accessible sur toutes les pages du site et être matérialisée par une mention ou un signe distinctif. Sept type d'informations doivent obligatoirement figurer dans cette rubrique, tels que les critères de classement.

De plus, après chaque recherche, le site doit faire apparaître, de manière lisible et compréhensible, en haut de la page de résultats de comparaison et avant le classement des offres trois types d'informations : le critère de classement des offres, le caractère exhaustif ou non des offres de biens ou de services comparées et du nombre de sites ou d'entreprises référencés, et le caractère payant ou non du référencement.

Une fois les résultats affichés, le site doit faire apparaître, à proximité de chaque offre dont elle propose la comparaison, certaines informations essentielles comme les caractéristiques du bien ou du service proposé, le prix total à payer et les garanties commerciales.

Enfin, en application de l'article 20 de la loi n° 2004 575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, le décret oblige le responsable du site à afficher le caractère publicitaire (par la mention du mot « annonces » sur la page d'affichage des résultats) d'une offre référencée à titre payant et dont le classement dépend de la rémunération perçue.

Le décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 relatif à la partie réglementaire du code de la consommation a abrogé ce décret du 22 avril 2016 pour modifier l'insertion de ses dispositions dans le code de la consommation.

Par ailleurs, l'article 49 II de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique abroge l'article L. 111-6 du code de la consommation à compter de l'entrée en vigueur des mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article L. 111-7 du code de la consommation dans sa rédaction issue de cette même loi . L'article L. 111-7 (anciennement L. 111-5-1) avait été créé par l'article 134 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 relative à la croissance, à l'activité et à l'égalité des chances économiques, qui traitait des obligations d'information imposées aux places de marché et aux sites de l'économie collaborative. La loi pour une République numérique modifie cette rédaction afin que l'article traite de l'ensemble des plateformes. La commission mixte paritaire examinant le texte a donc souhaité réunir au sein d'un même article du code de la consommation l'ensemble des obligations d'information des opérateurs de plateformes en ligne, en précisant, dans un paragraphe qui leur est consacré, les obligations spécifiques des comparateurs .

Les mesures réglementaires d'application de l'article 49 II de la loi pour une République numérique devaient, pour être adoptées, recueillir l'avis obligatoire du Comité consultatif de la législation et de la règlementation financière. De plus, le projet de décret a été notifié à la Commission européenne en février, conformément à la directive 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information. Cette notification a eu pour effet de reporter de trois mois, à compter de la date de sa réception par la Commission, la publication du projet de décret, ce délai étant considéré comme nécessaire par la directive pour permettre aux Etats membres et à la Commission d'examiner le projet. Ce délai a expiré le 10 mai dernier, et la Commission n'a formulé aucune observation. Le décret peut donc être publié.

S'agissant des obligations d'information sur les sites comparateurs en ligne, le Gouvernement entend reprendre in extenso les dispositions actuellement en vigueur.

b) Protection du consommateur contre le recours abusif aux numéros de téléphone dits « surtaxés »

L' article 145 de la loi a prévu la création de plusieurs mécanismes visant à protéger le consommateur contre le recours abusif aux numéros de téléphone dits « surtaxés » , par lesquels sont commercialisés des « services à valeur ajoutée » 58 ( * ) - tels que des renseignements, l'assistance client ou la vente à distance. Ces numéros sont constitués de numéros à dix chiffres commençant par 08 (pour les services vocaux) et de numéros courts à quatre chiffres commençant par 1 ou 3 (pour les messages textuels). Ces dispositifs visent à renforcer la transparence des appels vers ces numéros à valeur ajoutée, en contraignant les professionnels les proposant à mieux informer les consommateurs et en permettant à ces derniers de limiter leur utilisation.

(1) La consécration législative du dispositif « 33700 »

L'article 145, dont les dispositions en la matière sont aujourd'hui codifiées aux articles L. 224-51 et L. 224-52 du code de la consommation (anciennement L. 121-45 et L. 121-46), impose aux fournisseurs de services téléphoniques au public de proposer aux consommateurs un dispositif leur permettant de signaler, par messages textuels, les appels et messages textuels non sollicités émis par des professionnels et le numéro de téléphone de leurs émetteurs . Ces dispositions, qui proviennent d'un amendement sénatorial, ont pour objet de consacrer le numéro de messages courts 33700 et le site internet https://spam-vocal.33700.fr. Selon les termes de l'article 145, les opérateurs de communications électroniques exploitant un numéro à valeur ajoutée doivent être informés de ces signalements, les modalités de cette information devant être prévues par décret.

Le décret n° 2016-1238 du 20 septembre 2016 relatif au mécanisme de signalement prévu à l'article L. 224-43 du code de la consommation et à l'information des opérateurs sur les numéros les concernant en application de l'article L. 224-51 précise que les opérateurs sont informés quotidiennement par les fournisseurs d'un service téléphonique au public des signalements adressés au 33700 (article D. 224-19 du code de la consommation).

(2) La mise en place de l'annuaire inversé

L'article 145 a prévu, en insérant les articles L. 224-43 à L. 224-50 au sein du code de la consommation (anciennement L. 121-42 à L. 121-44), la mise en place d'un « annuaire inversé » disponible en ligne pour ces numéros, c'est-à-dire un outil permettant aux consommateurs de rechercher non pas le numéro d'une personne mais la personne derrière le numéro. Cette mise en place doit être effectuée gratuitement par les opérateurs de communications électroniques exploitant un ou plusieurs numéros spéciaux, par leurs abonnés auxquels ces numéros sont affectés et, s'ils sont différents, par les fournisseurs des produits ou services à valeur ajoutés. Deux annuaires inversés, l'un pour les services vocaux, l'autre pour les messages textuels, ont été mis en place de manière anticipée par les opérateurs et éditeurs de services en octobre 2015 (il s'agit du site http://www.infosva.org pour les services vocaux, mis en place à travers l'association SVA+, et du site http://annuaire.infoconso-multimedia.fr/sms-plus/, pour les messages textuels, mis en place par l'Association française du multimédia mobile (AFMM)).

Afin de s'assurer de la fiabilité dans le temps des informations présentes dans l'annuaire inversé, l'article 145 (insérant l'article L. 121-46, aujourd'hui article L. 224-53, au sein du code de la consommation) prévoit la création d'un mécanisme de signalement imposant aux opérateurs de vérifier les renseignements présents dans l'annuaire inversé en vue qu'ils procèdent, en cas d'inexactitude, à la suspension de l'accès au numéro et, le cas échéant, à la résiliation du contrat conclu avec l'éditeur de services. Les modalités de ce mécanisme de signalement devaient être précisées par décret, au plus tard le jour de l'entrée en vigueur de ce dispositif, c'est-à-dire deux ans après la promulgation de la loi. Or, la publication du décret a dépassé de six mois l'échéance prévue par la loi : il s'agit du décret n° 2016-1238 du 20 septembre 2016 relatif au mécanisme de signalement prévu à l'article L. 224-43 du code de la consommation et à l'information des opérateurs sur les numéros les concernant en application de l'article L. 224-51. Ce retard s'explique, selon le rapport d'information rédigé par les députés Damien Abad et Philippe Kemel et publié en octobre dernier, par deux principales raisons. D'abord, « les fusions en cours des organismes d'autorégulation du secteur en matière d'envoi de messages textuels et d'appels vocaux » : les associations SVA+ et l'AFMM ayant fusionné le 29 septembre 2016, il apparaissait nécessaire d'attendre la réalisation de ce projet de fusion car le décret renvoie à « l'organisme professionnel le plus représentatif du secteur des services à valeur ajoutée ». Ensuite, il existait « des difficultés techniques dans la définition des seuils devant déclencher la vérification », dans la mesure où des stratégies de contournement risquaient d'être adoptées par certains éditeurs de services. Toutefois, selon ce même rapport, « les opérateurs auraient d'ores et déjà anticipé une partie des obligations qui devraient découler dudit décret avant sa publication ».

Ce décret précise, d'abord, que l'annuaire inversé mis en place doit permettre au consommateur de signaler et de décrire précisément et avec concision une inexactitude sur les informations présentes dans l'annuaire, une préoccupation sur la déontologie du service associé au numéro, ou encore un problème relatif au contact auquel le consommateur doit pouvoir adresser ses réclamations (article D. 224-17).

Il liste, ensuite, les motifs des signalements pouvant être effectués par les consommateurs (article D. 224-18 du code de la consommation). Il précise la notion d'inexactitude mentionnée par la loi, en donnant au consommateur la possibilité de signaler à la fois une inexactitude sur les informations présentes dans l'annuaire inversé, une préoccupation sur la déontologie du service associé ou encore un problème relatif au contact auquel le consommateur doit pouvoir adresser ses réclamations. Ces différents motifs de signalement ont été accueillis favorablement par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) dans son avis sur le projet de décret en date du 28 juin 2016.

Par ailleurs, il prévoit que les signalements - ceux au titre de l'annuaire inversé comme ceux au titre du dispositif 33700 - peuvent être volontairement mis à disposition de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), de l'ARCEP, du service national de police judiciaire chargé de la lutte contre la cybercriminalité, et des opérateurs de communications électroniques (article D. 224-20). Il renvoie à un arrêté pour en préciser les modalités de mise à disposition. Cependant, selon le Gouvernement, l'AFMM a déjà mis en application la disposition du décret concernée, selon des modalités qui conviennent aux services de l'État. Le Gouvernement estime , dès lors, qu'il n'est pas nécessaire d'adopter cet arrêté , que le décret n'invitait à prendre qu' « en tant que de besoin ».

Enfin, il dispose que l'opérateur de communications électroniques exploitant un ou plusieurs numéros à valeur ajoutée n'aura l'obligation de vérifier les renseignements présents dans l'annuaire inversé que pour les numéros dont le nombres de signalements - aussi bien au titre de l'annuaire inversé qu'au titre du dispositif 33700, étudié infra - dépasse un ou plusieurs seuils fixés chaque année par arrêté du ministre chargé de la consommation , après consultation de l'organisme professionnel « le plus représentatif du secteur de services à valeur ajoutée » (article D. 224-21). Le pouvoir réglementaire a donc proportionné l'application de cette obligation de vérification, conformément aux débats parlementaires qui complétaient en ce sens la lettre de l'article 145.

Cet arrêté relatif à la fixation des seuils de signalement déclenchant l'obligation de vérification des informations figurant dans cet annuaire n'a toujours pas été adopté. Selon le Gouvernement, la définition de tels seuils nécessite de disposer d'un historique suffisant des divers signalements . Le décret prévoyait ainsi que la possibilité de déposer des signalements sur l'annuaire inversé n'était effective que le 1 er octobre 2016 ou le 1 er janvier 2017, selon le type de signalement. Cependant, actuellement, les signalements sur l'annuaire sont très peu nombreux. Les opérateurs vérifient donc systématiquement les informations qu'ils reçoivent, ce qui rend superfétatoire en pratique la définition d'un seuil. La DGCCRF envisage donc, à l'occasion de la publication de l'arrêté relatif à l'option gratuite de blocage (voir point suivant), de mieux faire connaître aux consommateurs l'existence de l'annuaire inversé et la possibilité d'y déposer des signalements. Cette publicité risque d'augmenter fortement le nombre de signalements, ce qui permettra, alors, de disposer du recul nécessaire pour l'adoption de l'arrêté, après concertation avec les professionnels.

(3) L'option gratuite permettant de bloquer les communications à destination des numéros « surtaxés »

Enfin, l'article 145 de la loi prévoit que les fournisseurs de service téléphonique au public proposent au consommateur une option gratuite permettant de bloquer les communications à destination de certaines tranches de numéros à valeur ajoutée (article L. 224-54 du code de la consommation, anciennement L. 121-47). Ce dispositif repose sur la publication d'un arrêté définissant ces tranches . En 2015, une première version avait été soumise, pour consultation, à l'ARCEP, au Conseil national de la consommation ainsi qu'à la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications (aujourd'hui Commission supérieure du numérique et des postes).

Néanmoins, l'identification d'un risque de blocage des numéros à valeur ajoutée non surtaxés et utiles, comme par exemple ceux des services clients, a rendu nécessaire de modifier le texte issu de la loi relative à la consommation afin d'insérer une référence explicite aux numéros surtaxés. En effet, le caractère surtaxé ou non d'un numéro à valeur ajoutée dépend du choix de l'éditeur de services auquel est attribué le numéro. Un numéro peut donc être surtaxé un mois et ne plus l'être le mois suivant. Le texte initial visant l'ensemble des numéros à valeur ajoutée, il était nécessaire de préciser que, parmi ceux-ci, seuls les numéros surtaxés sont effectivement concernés. Afin d'identifier en temps réel les numéros surtaxés, une base de donnée a été mise en place en 2015 - celle-ci était, au demeurant, nécessaire à la mise en place de l'annuaire inversé.

L'article 88 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique modifie donc en ce sens l'article L. 224-54 du code de la consommation. Il modifie également, par voie de conséquence, son entrée en vigueur, fixée à six mois après la promulgation de la loi pour une République numérique, c'est-à-dire le 7 avril 2017 , afin d'octroyer aux opérateurs un délai pour se mettre en conformité avec le nouvel article. Le rapport déjà cité de MM. Abad et Kemel jugeait étonnant « de constater que la loi pour une République numérique contient une disposition fixant l'entrée en vigueur de ce dispositif six mois après sa promulgation, alors que celui-ci est entré en vigueur en mars 2016, comme prévu dans la loi relative à la consommation ».

Alors que le Gouvernement indiquait, début janvier 2017, que le projet d'arrêté pourrait être publié fin février, il faisait état, en mai, de ce qu'une nouvelle concertation a dû être menée . Le délai requis par la loi pour une République numérique n'a donc pas pu être tenu.


* 58 Tous les numéros spéciaux ne sont pas facturés de la même façon : depuis octobre 2015, les numéros verts sont gratuits, les numéros gris sont facturés au prix d'un appel local, et les numéros violets sont surfacturés, en contrepartie du service fourni. Seuls ces derniers sont donc en réalité « surtaxés ». C'est l'éditeur du service qui choisit la tarification qu'il souhaite associer au numéro qu'il exploite.

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