EXAMEN EN COMMISSION

Le 26 juin 2017

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Cette année, la traditionnelle communication sur l'application des lois intervient dans un contexte particulier. Un débat sur le bilan de l'application des lois a déjà été organisé le mardi 21 février dernier, qui a permis un échange sur les lois les plus emblématiques du quinquennat qui s'achevait alors. L'élection du Président de la République puis la nomination d'un nouveau gouvernement compliquent l'exercice puisque ce bilan s'adresse à un gouvernement qui n'a, par définition, eu à connaître d'aucun de ces textes. Ce bilan présente néanmoins un intérêt dans la mesure où, justement, le gouvernement sortant a mis les bouchées doubles afin de publier, avant le second tour de l'élection présidentielle, les textes réglementaires d'application attendus.

Je sortirai donc des canons habituels de l'exercice, c'est-à-dire un bilan chiffré, arrêté au 31 mars de l'année en cours pour les textes de la session précédente. Cette année, cet exercice n'aurait aucun sens et il faut prendre en compte l'intégralité des textes pris, que ce soit avant ou après le 31 mars. Dernière remarque méthodologique : l'analyse porte sur les textes adoptés avant l'ouverture de la session en cours et ne concerne donc pas, par exemple, les lois issues des propositions de loi de nos collègues, les questeurs Jean-Léonce Dupont et Dominique Bailly, relatives respectivement à la sélection en master et à l'éthique du sport.

S'agissant de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP), si 88 articles sur 119 étaient entrés en vigueur dès le lendemain de sa publication, un seul décret était paru fin 2016, sur les 33 annoncés. Au 31 mars 2017, le taux d'application de la loi calculé sur la base des décrets prévus s'établissait donc à 54 %, mais beaucoup de textes ont été publiés depuis. En particulier, le décret du 9 mai 2017 a précisé les procédures administratives en matière d'archéologie préventive et les régimes de propriété des biens archéologiques. De même, un décret du 2 mai a établi une première liste de domaines nationaux dont la propriété relève en totalité ou pour l'essentiel de l'État.

Un décret du 10 mai a précisé les conditions de mise en oeuvre du dispositif dit « permis de faire », qui permet à l'État, aux collectivités territoriales et aux organismes HLM de déroger, à titre expérimental et pour une durée de sept ans, à certaines règles de construction pour la réalisation d'équipements publics et de logements sociaux. Ce décret porte sur l'accessibilité et la sécurité incendie. Un second texte, en cours d'examen par le Conseil d'État, portera sur d'autres champs de dérogation : réemploi de matériaux, performance énergétique, caractéristiques acoustiques.

Avec la publication de trois ordonnances, relatives respectivement au code du cinéma, au code du patrimoine, pour harmoniser les dispositions relatives au contrôle de l'État sur les bibliothèques, et au même code, pour diverses dispositions touchant aux procédures de travaux sur les monuments historiques ou immeubles et objets mobiliers classés ou inscrits, la loi LCAP est donc désormais très largement applicable.

En outre, deux ordonnances, modifiant elles aussi le code du patrimoine, sont en cours de préparation. L'une portera sur l'archéologie et l'application de la convention de l'Unesco de 2001 sur la protection du patrimoine culturel subaquatique et l'organisation de la gestion des vestiges archéologiques. La question en suspens concerne les vestiges anthropobiologiques (les restes humains). L'autre ordonnance devra préciser le régime de refus du certificat d'exportation, afin que celui-ci ne puisse plus être utilisé par les propriétaires comme une pièce authentifiant l'oeuvre.

Par ailleurs, un seul des huit rapports prévus par la LCAP est aujourd'hui paru. Il est relatif au contrat d'édition, sujet sur lequel notre commission s'était mobilisée dès 2014. Par principe, le Sénat est hostile à ces demandes de rapports qui masquent souvent le refus du Gouvernement, quel qu'il soit, de donner son accord à une mesure, quand elles ne constituent pas un moyen détourné de contourner l'article 40. Néanmoins il est dommage que le Gouvernement n'ait pas remis au Parlement le rapport sur la situation des arts visuels, sujet qui nous préoccupe particulièrement et de longue date, notamment à travers le groupe d'études qui leur est dédié et qui est présidé par Corinne Bouchoux. De même, pour les représentants des collectivités territoriales que nous sommes, il serait intéressant de disposer du rapport sur l'opportunité de consacrer 1 % du coût des opérations des travaux publics au soutien de projets artistiques. Je mentionnerai enfin, pour en terminer avec la LCAP, le rapport annuel au Gouvernement sur la restitution des oeuvres spoliées. N'oublions pas que c'est à l'initiative de Corinne Bouchoux, auteur d'un rapport sur le sujet en janvier 2013, que cette problématique, ô combien justifiée, a trouvé toute sa place dans le débat public. Il devrait être publié avant le 15 octobre.

La loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche de juillet 2013 est désormais totalement applicable depuis la parution du décret du 26 juillet 2016 relatif, notamment, aux conditions d'attribution des logements étudiants. En revanche, plusieurs rapports manquent encore, dont celui relatif à l'impact de l'extension des exceptions au principe de l'enseignement en langue française, sujet longuement et âprement débattu lors de l'examen du projet de loi. Le rapport annuel prévu par la loi sur les perspectives professionnelles des titulaires d'un doctorat, autre sujet cher à notre commission, n'a pas encore été présenté alors que la loi a été adoptée il y a près de trois ans. S'il faut bien évidemment donner du temps au temps, trois ans est un délai raisonnable pour évaluer les effets d'une disposition législative.

Dans le secteur de la communication, nous pouvons nous féliciter de ce que la loi du 14 octobre 2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre, adoptée à l'unanimité, soit intégralement entrée en application, à l'exception de son article 18, le décret en Conseil d'État fixant les modalités de suspension par l'Agence nationale des fréquences de l'accord donné à un site, lorsqu'elle constate qu'il est à l'origine d'un brouillage de fréquences, étant toujours en attente.

Autre sujet de satisfaction, la loi du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse est, elle aussi, devenue entièrement applicable.

L'application de la loi du 27 novembre 2015 visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale est plus inégale : des mesures réglementaires non prévues ont été prises, relatives, notamment, aux conditions d'inscription sur la liste des sportifs de haut niveau, au rôle du comité paralympique et sportif français, ou aux conditions de saisine de l'Autorité de régulation des jeux en ligne par les organisateurs d'une compétition ou manifestation sportive afin de faire respecter l'interdiction faite aux acteurs d'une compétition de parier sur ses résultats. En revanche, les arrêtés prévus à l'article 24 pour préciser, d'une part, la nature et la périodicité des examens médicaux des sportifs de haut niveau et, d'autre part, les modalités de mise en oeuvre par les fédérations sportives de la surveillance médicale de leurs licenciés non inscrits sur la liste des sportifs de haut niveau sont toujours en attente.

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