II. TRANSPORTS ET ÉCONOMIE MARITIME

A. LOI N° 2012-77 DU 24 JANVIER 2012 RELATIVE À VOIES NAVIGABLES DE FRANCE

Le décret n° 2016-666 du 24 mai 2016 a été pris pour l'application de l'article L. 4312-3-4 du code des transports, créé par l'article 2 de cette loi. Ce décret concerne le régime d'organisation et d'aménagement du temps de travail applicable aux agents de droit public de Voies navigables de France .

Deux textes d'application sur vingt-quatre n'ont pas été pris :

- à l'article 5 , l'arrêté du ministre chargé des voies navigables réglementant la navigation dans les eaux intérieures des bateaux traditionnels lorsque ceux-ci sont possédés par une association dont seuls les membres ont vocation à embarquer à bord. Le ministère indique n'avoir été saisi par aucune association à ce jour pour qu'une réglementation spécifique soit créée pour se substituer à celle applicable aux bateaux de plaisance ;

- le décret d'application de l'article 10 , qui autorise la reconnaissance d'une organisation interprofessionnelle de la filière fluviale par le ministre des transports. Aucun décret n'a été pris, dans la mesure où les professionnels de la filière n'ont pas pris d'initiative allant dans ce sens.

Pour mémoire, le rapport prévu à l'article 11, sur la formation des prix et des marges dans le transport fluvial, que le Gouvernement devait remettre au plus tard au 31 décembre 2012, n'a jamais été communiqué. D'après le ministère, les prix font déjà l'objet d'un suivi statistique de la part de Voies navigables de France et du ministère. Un rapport est néanmoins en cours de finalisation à ce sujet.

B. LOI N° 2013-431 PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS EN MATIÈRE D'INFRASTRUCTURES ET DE SERVICES DE TRANSPORTS

Le dernier texte d'application attendu, sur les modalités d'exécution de l'enquête nautique mentionnée à l'article 33 , a été publié : il s'agit du décret n° 2016-761 du 8 juin 2016 relatif à l'enquête nautique. La loi est donc devenue totalement applicable.

C. LOI N° 2014-872 DU 4 AOÛT 2014 PORTANT RÉFORME FERROVIAIRE

1. la quasi-totalité des décrets parus

La loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire devait marquer un tournant dans l'évolution du système ferroviaire français.

Elle a réuni au sein d'un gestionnaire d'infrastructure unifié, dénommé SNCF Réseau, les activités auparavant exercées par Réseau ferré de France (RFF), SNCF Infra et la direction des circulations ferroviaires (DCF). Cet établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) a été intégré à un groupe public ferroviaire , composé d'un Epic « de tête », la SNCF, et de deux Epic « filles », SNCF Mobilités, chargée de l'exploitation des services de transport, et SNCF Réseau. La SNCF a été chargée du pilotage stratégique du groupe et de missions transversales ou mutualisées.

En contrepartie de cette nouvelle architecture, la loi comporte une série de dispositions visant à garantir l'indépendance du gestionnaire d'infrastructures par rapport à l'exploitant des services de transport , indispensable pour l'exercice d'une concurrence loyale. Parmi elles figure le renforcement du rôle du régulateur , l'Autorité de régulation des activités ferroviaires, devenue Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) en 2015.

Outre ces modifications dans la gouvernance du système ferroviaire, la réforme comportait plusieurs promesses ambitieuses :

- un retour de « l'État stratège » ;

- des économies d'échelle ;

- une refonte du cadre social ;

- la maîtrise de la trajectoire financière du gestionnaire du réseau, permettant la stabilisation de sa dette à un horizon de dix ans ;

- une transparence accrue de la part de l'opérateur des services ferroviaires, permettant aux autorités organisatrices de transport, régionales notamment, d'exercer pleinement leur mission.

La loi du 4 août 2014 devait entrer en vigueur au 1 er janvier 2015, mais la constitution du groupe public ferroviaire n'a été effective qu'au 1 er juillet 2015 , soit à la date-limite établie par une première série de décrets d'application publiée le 10 février 2015 pour définir les missions et statuts de la SNCF, de SNCF Mobilités et de SNCF Réseau et tirer les conséquences de cette nouvelle architecture pour le fonctionnement du système ferroviaire.

D'autres décrets ont été publiés au courant de l'année 2015, pour déterminer : le fonctionnement des deux instances de concertation créées par la loi, le Haut comité du système de transport ferroviaire et le Comité des opérateurs du réseau ; les conditions d'exercice du droit d'option des salariés de l'ancien gestionnaire d'infrastructure Réseau ferré de France ; l'organisation et le fonctionnement de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires ; les modalités d'exercice des prestations de sûreté par l'Epic « de tête » SNCF. Des décrets ont également transposé des obligations européennes en droit interne.

En outre, l'ordonnance prévue à l'article 38 de la loi pour mettre en cohérence les dispositions législatives existantes avec les modifications apportées par la loi et achever la transposition de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen a été prise en juillet 2015 183 ( * ) .

Une grande partie des décrets nécessaires pour l'application de la réforme ont donc été publiés dans l'année suivant sa promulgation.

Néanmoins, la parution de ces décrets ne s'est pas nécessairement traduite par la mise en oeuvre immédiate et effective des dispositifs prévus . Par exemple, si le décret relatif au Haut Comité du système de transport ferroviaire a été signé le 30 avril 2015 184 ( * ) , ses membres n'ont été désignés par arrêté que le 10 décembre 2015 185 ( * ) , et celui-ci ne s'est réuni pour la première fois qu'en septembre 2016, soit plus de deux ans après la promulgation de la loi.

De la même façon, malgré le décret de février 2015 déterminant les modalités de fonctionnement de la commission de déontologie du système ferroviaire 186 ( * ) , les membres de cette commission n'ont été nommés qu'en avril 2016 187 ( * ) . Chargée de formuler des avis contraignants sur la possibilité d'exercer dans une entreprise ferroviaire pour une personne ayant eu à connaître, dans le cadre de fonctions exercées au sein de SNCF Réseau, d'informations confidentielles relatives à la répartition des capacités ou à la tarification de l'infrastructure, elle a été saisie à six reprises depuis sa première réunion le 22 juin 2016 188 ( * ) .

Par ailleurs, le contenu des décrets s'écarte parfois de l'esprit de la réforme . L'Autorité de régulation des activités ferroviaires avait émis plusieurs avis défavorables sur les projets de décrets d'application de la réforme , par exemple les trois décrets relatifs aux missions et statuts de SNCF, SNCF Mobilités et SNCF Réseau. Ses avis n'étant pas contraignants, plusieurs de ses remarques n'ont pas été prises en compte. Elle avait par exemple recommandé, dans le décret qui précise les modalités d'application du principe d'interdiction de divulgation des informations confidentielles détenues par le gestionnaire d'infrastructure, de préciser l'exception à cette interdiction prévue pour « la gestion opérationnelle des circulations », ce qui n'a pas été fait. De même, l'Autorité de la concurrence avait formulé un certain nombre de recommandations dans son avis sur les décrets d'application de la réforme ferroviaire 189 ( * ) pour garantir la neutralité et la transparence de l'accès aux infrastructures ferroviaires .

Surtout, plusieurs mesures d'application fondamentales pour remplir les objectifs annoncés se sont fait attendre.

Aujourd'hui, seul un décret d'application fait défaut : le décret prévu à l'article 7, introduit par le Gouvernement en séance publique à l'Assemblée nationale pour autoriser des transferts de propriété du domaine public ferroviaire au profit des régions . L'an dernier, le Gouvernement avait expliqué ce retard par l'extension du champ d'application de ces transferts, résultant de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République. D'une part, l'ensemble des collectivités compétentes en matière de développement économique, et non seulement les régions, peuvent en être bénéficiaires, d'autre part, ces transferts ne concernent plus seulement les lignes à voies métriques, séparées du réseau ferré national (soit 300 kilomètres de lignes), mais aussi les lignes à faible trafic n'ayant pas été utilisées par des services de transport de personnes depuis plus de cinq ans. D'après le ministère, environ 1 300 kilomètres de lignes pourraient ainsi être concernées. Un projet de décret a été présenté au Conseil national d'évaluation des normes et reçu un avis favorable le 9 mars 2017. L'Arafer a rendu son avis sur ce projet de décret le 22 mars 2017. La saisine du Conseil d'État a cependant été suspendue dans l'attente de la désignation du nouveau gouvernement « et sera relancée dès que possible ».

On peut également relever que l'article 3, introduit à l'initiative de députés de plusieurs groupes (socialiste, écologiste et radical, républicain, démocrate et progressiste), qui prévoit la présentation d'un schéma national des services de transport devant le Parlement , n'a toujours pas été mis en oeuvre.

2. La lenteur de la mise en place du nouveau cadre social

La réforme prévoyait l'instauration d'un cadre social commun, applicable à l'ensemble des salariés du secteur ferroviaire , constitué d'un « décret-socle » déterminant les règles minimales relatives à la durée du travail, impératives pour assurer la protection et sécurité des travailleurs, et d'une convention collective de branche . Un accord d'entreprise était aussi attendu à l'échelle du seul groupe public ferroviaire.

La loi de 2014 a ainsi abrogé l'article 1 er de la loi du 3 octobre 1940 relatif au régime de travail des agents des chemins de fer de la Société nationale des chemins de fer français, tout en précisant qu'à titre transitoire, les salariés du groupe public ferroviaire conserveraient leur régime de durée du travail jusqu'à la publication de l'arrêté d'extension de la convention collective ou de l'arrêté d'extension de l'accord relatif à l'organisation et à l'aménagement du temps de travail dans le transport ferroviaire, et au plus tard jusqu'au 1 er juillet 2016 .

Le décret-socle devait donc sortir rapidement après la promulgation de la loi, et servir de base à la négociation collective , qui devait être achevée avant le 1 er juillet 2016. Mais ce décret n'a été présenté aux acteurs qu'en février 2016, et n'a été définitivement pris que le 8 juin 2016 , au même moment que la finalisation de la convention collective de branche. Il a donc été publié près de deux ans après la promulgation de la loi.

En outre, le Gouvernement est intervenu, à la même période, dans les négociations de l'accord d'entreprise du groupe public ferroviaire , pour couper court aux évolutions défavorables à ses agents, malgré des mois de négociations menées en interne. Il a ainsi fait la démonstration des incohérences de l'État dit « stratège », qui préconisait en 2014 une refonte du cadre social de l'entreprise pour améliorer sa productivité, avant de demander à la direction du groupe, en juin 2016, de céder aux revendications des agents, dans le contexte des manifestations incontrôlées contre la loi El-Khomri et des grèves menaçant l'Euro 2016.

Or, les évolutions du cadre social annoncées en 2014 étaient fondamentales pour redonner des marges de manoeuvre au groupe public ferroviaire et lui permettre de survivre face à la concurrence des bus, avions à bas prix et du covoiturage, sans parler de la concurrence à venir des autres entreprises ferroviaires. Or, celle-ci a désormais été fixée par le quatrième paquet ferroviaire à 2020 pour les lignes commerciales et 2023 pour les services conventionnés.

Ainsi, dans le domaine social, non seulement la mise en application de la loi a été tardive, mais elle s'est écartée du chemin tracé lors des débats sur la loi de réforme ferroviaire.

3. La parution tardive du décret d'application de la « règle d'or » et la signature des contrats-cadre dans la précipitation

La même analyse peut malheureusement être faite s'agissant de la maîtrise de l'endettement de SNCF Réseau, censée résulter :

- d'économies d'échelle au sein du groupe public ferroviaire ;

- de la signature d'un contrat-cadre ambitieux avec l'État ;

- de la mise en place d'une « règle d'or » de financement des investissements sur le réseau.

Si la loi du 4 août 2014 renvoyait au Parlement la définition des ratios à partir desquels les dépenses d'investissement sur le réseau ne peuvent être financées par SNCF Réseau, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a défini un ratio 190 ( * ) , tout en renvoyant le mode de calcul de ses composantes et son plafond 191 ( * ) à un décret. Ce décret d'application de la « règle d'or » a été signé le 30 mars 2017 192 ( * ) .

L'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières avait été saisie du projet de décret début octobre 2016 et rendu son avis le 30 novembre 2016. Elle avait formulé plusieurs recommandations pour « respecter pleinement l'objectif visé par la loi de réforme ferroviaire » , dont une bonne partie a été intégrée par le Gouvernement.

Outre cette parution tardive, on peut regretter qu'avant même d'avoir pu entrer en application, cette règle a été contournée pour le financement de la liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Charles-de-Gaulle, dans la loi n° 2016-1887 du 28 décembre 2016 relative à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle.

Le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau doit, quant à lui, fixer la trajectoire financière de l'Epic sur dix ans , pour en stabiliser la dette colossale, qui a atteint 45 milliards à la fin de l'année 2016, et augmente à un rythme de près de 3 milliards d'euros par an. Il doit concrétiser le retour de « l'État stratège », en précisant les gains de productivité attendus du gestionnaire d'infrastructure, et donner de la visibilité aux acteurs. Son application effective devra être mesurée par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, saisie chaque année pour avis du projet de budget de SNCF Réseau.

Votre commission a donc réclamé ce contrat à plusieurs reprises , mais le projet de contrat n'a finalement été remis que le 21 décembre 2016 à l'Arafer, soit plus de deux ans après le vote de la loi. L'Arafer a rendu un avis extrêmement critique le 29 mars 2017. Malgré cet avis négatif, et de vives réserves exprimées par votre commission, le Gouvernement a signé ce contrat le 20 avril 2017.

La veille de cette signature, votre président avait organisé des auditions pour recueillir l'avis des parties prenantes à ce sujet. Votre commission a émis des regrets à l'issue de ces auditions pour plusieurs raisons.

Sur la forme , la signature de ce contrat - qui engage SNCF Réseau et l'État pour dix ans - à quelques jours du premier tour des élections présidentielles n'est pas convenable, alors que ce contrat est attendu depuis plus de deux ans par les acteurs du secteur. Elle l'est d'autant moins que le ministère a refusé de se rendre devant la commission, justifiant cela par la période de réserve. Il est à noter que la loi de 2014 a prévu une association du Parlement à ce processus, puisque le projet de contrat et l'avis de l'Arafer doivent lui être transmis. Or, jusqu'à la veille de la signature, le contrat de performance, accompagné de l'avis de l'Arafer, ne lui avait pas été transmis.

Sur le fond , l'Arafer a émis un avis très défavorable, qui appelle à la « révision profonde du projet de contrat avant sa signature » . Elle souligne le fait que ce contrat s'appuie sur des « hypothèses économiques fragiles » et « peu crédibles en l'état » et souffre d' « engagements peu définis » et de « carences dans le choix et la définition des indicateurs de performance de SNCF Réseau ». En conséquence, ce contrat rend très peu crédible la perspective d'un redressement de la trajectoire financière du gestionnaire du réseau. Sa dette, qui dépassera 63 milliards d'euros dans dix ans, aura augmenté de plus de 40 % au cours de la période sans qu'aucune mesure ne soit même envisagée par l'État pour y faire face. Le régulateur ajoute même qu' « il est à craindre que l'évolution de l'endettement de SNCF Réseau ne soit en réalité plus dynamique et, partant, le niveau de la dette en 2026 sous-estimé ».

4. Les autres mesures tardives

Le Gouvernement a pris le décret d'application nécessaire à la mise en place de la contribution locale temporaire , introduite à l'article 2 de la loi à l'initiative de notre collègue Philippe Marini pour financer les aménagements extérieurs des gares ferroviaires 193 ( * ) .

À l'article 12, le décret déterminant les conditions dans lesquelles les autorités organisatrices de transport ferroviaire sont consultées sur ou peuvent réaliser des projets d'investissements dans les gares est paru tardivement, fin octobre 2016 194 ( * ) .

Deux rapports du Gouvernement au Parlement étaient attendus dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi : à sur la dette ferroviaire (article 11) et sur la gestion des gares (article 29). Ils ont été rendus, avec retard.

Le premier, qui devait porter sur « la trajectoire de la dette de SNCF Réseau et [les] solutions qui pourraient être mises en oeuvre afin de traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire » et examiner « les conditions de reprise de tout ou partie de cette dette par l'Etat ainsi que l'opportunité de créer une caisse d'amortissement de la dette ferroviaire », a été remis en septembre 2016. Il ne propose néanmoins aucune solution pour traiter la dette du groupe public ferroviaire , en renvoyant cette question à la révision du contrat de performance qui n'a même pas encore été conclu. Son contenu est d'autant plus décevant que le Premier ministre s'était engagé à examiner les conditions d'une reprise de tout ou partie de la dette de SNCF Réseau en juin 2016, au moment où le Gouvernement a imposé un accord d'entreprise favorable aux intérêts des cheminots.

Le second, relatif à la « gestion des gares de voyageurs ainsi qu'aux modalités et à l'impact d'un transfert de celle-ci à SNCF Réseau ou à des autorités organisatrices de transport » devait aussi étudier « la possibilité de créer un établissement public reprenant l'intégralité des missions de Gares & Connexions et qui serait intégré au sein du groupe public ferroviaire ». Il a été remis le 27 avril 2017. Après une analyse du modèle économique et de la gouvernance des gares, le rapport présente plusieurs scénarios d'évolution, avec leurs avantages et inconvénients, tout en recommandant la réalisation d'études complémentaires.

5. D'autres écarts par rapport à l'esprit de la réforme

La proposition de nommer Jean-Pierre Farandou en remplacement de Jacques Rapoport à la tête de SNCF Réseau , alors qu'il a effectué une grande partie de sa carrière au sein de l'exploitant historique de transport, a aussi témoigné d'une certaine légèreté de l'État face à l'enjeu d'indépendance du gestionnaire du réseau par rapport à l'exploitant, pourtant réaffirmé par la loi du 4 août. Il démontre, dans le même temps, l'appropriation par le régulateur de ses nouveaux pouvoirs, puisque celui-ci s'est opposé à cette nomination comme la loi l'y autorisait.

De façon plus générale, les exemples ne manquent pas pour illustrer l'absence d'« État-stratège ». Alors que l'article 1 er de la loi du 4 août 2014 le charge de l'organisation et du pilotage de la filière industrielle et que plusieurs sénateurs de la commission l'avaient alerté de longue date sur la situation préoccupante de la filière ferroviaire, il a dû gérer en catastrophe le risque de fermeture du site Alstom de Belfort, en commandant des trains à grande vitesse pour des lignes classiques.

Du côté du groupe public ferroviaire , si l'on peut saluer le succès de la réunification des différentes activités de gestion de l'infrastructure, qui n'était pas sans difficulté, compte tenu des cultures différentes des agents, les effets de la réforme se font encore attendre . C'est en particulier le cas de l'amélioration du processus d'allocation des sillons comme des économies d'échelle annoncées du côté du gestionnaire d'infrastructure, dont la dérive des coûts continue.

De plus, certaines mesures prévues par la loi du 4 août 2014 ont tardé à être mises en oeuvre . Elle obligeait par exemple SNCF Réseau à prendre des mesures d'organisation interne pour assurer le respect par son personnel de l'interdiction de divulgation des informations confidentielles. Pour cela, le décret n° 2015-139 du 10 février 2015 relatif à la confidentialité des données détenues par le gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire et à la commission de déontologie du système de transport ferroviaire lui a imposé d'établir un plan de gestion des informations confidentielles , obligation figurant désormais à l'article L. 2122-4-5 du code des transports. Or, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières n'a été saisie que le 29 juillet 2016 de ce plan de gestion des informations confidentielles .

Plus grave encore, certains choix d'organisation du groupe public ferroviaire ne respectent pas la loi de réforme ferroviaire, comme l'a démontré la mise en demeure formulée par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières le 25 mai 2016 195 ( * ) . Elle relève que le rattachement de l'entité SNCF Combustible auprès de l'Epic faîtier SNCF n'est pas conforme au code des transports , dans la mesure où SNCF Combustible détermine les modalités d'accès aux stations gazole et les redevances à acquitter par les entreprises ferroviaires, une mission que le code des transports a réservée au gestionnaire d'infrastructure SNCF Réseau .


* 183 Ordonnance n° 2015-855 du 15 juillet 2015 prise en application de l'article 38 de la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire.

* 184 Décret n° 2015-499 du 30 avril 2015 relatif au Haut Comité du système de transport ferroviaire.

* 185 Arrêté du 10 décembre 2015 portant nomination au Haut Comité du système de transport ferroviaire.

* 186 Décret n° 2015-139 du 10 février 2015 relatif à la confidentialité des données détenues par le gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire et à la commission de déontologie du système de transport ferroviaire.

* 187 Arrêté du 7 avril 2016 portant nomination à la commission de déontologie du système de transport ferroviaire.

* 188 Source : « La mise en oeuvre de la réforme ferroviaire : état des lieux du régulateur », étude thématique de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, octobre 2016.

* 189 Avis n° 15-A-01 du 6 janvier 2015 de l'Autorité de la concurrence relatif à des projets de décrets pris pour l'application de la loi portant réforme ferroviaire.

* 190 Comme le rapport entre la dette financière nette et la marge opérationnelle de SNCF Réseau.

* 191 Dans la limite du plafond fixé par la loi, qui s'élève à 18.

* 192 Décret n° 2017-443 du 30 mars 2017 relatif aux règles de financement des investissements de SNCF Réseau.

* 193 Décret n° 2016-268 du 4 mars 2016 relatif à la contribution locale temporaire en matière ferroviaire.

* 194 Décret 2016-1468 du 28 octobre 2016 relatif à l'accès aux installations de service reliées au réseau ferroviaire et aux services et prestations fournis par les exploitants d'installations de service et portant diverses dispositions en matière de transport ferroviaire.

* 195 Décision n° 2016-078 du 25 mai 2016 portant mise en demeure de la SNCF pour non-respect des règles fixant les conditions d'exercice des missions d'approvisionnement en combustible par SNCF Réseau et SNCF Mobilités.

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