LE CADRE JURIDIQUE DE LA FORMATION DES ÉLUS LOCAUX

I. LE DROIT À LA FORMATION DES ÉLUS LOCAUX EST RECONNU PAR LA LOI

Afin d'exercer au mieux les compétences qui leur sont dévolues, les élus locaux ont le droit de bénéficier d'une formation adaptée à leurs fonctions .

Il ressort de la consultation lancée par votre délégation que près de 55 % des répondants ont bénéficié de formations aux fonctions d'élu local . Pour l'essentiel, elles leur ont été dispensées par des associations d'élus locaux (56 % des répondants) ou les services des collectivités (19 %).

A. UN DROIT QUI S'EST LARGEMENT PERFECTIONNÉ CES DERNIÈRES ANNÉES : DE LA « FORMATION AUX FONCTIONS » AU « DROIT INDIVIDUEL À LA FORMATION »

Institué en 1992, le droit à la formation des élus locaux a été progressivement conforté par le législateur et a permis de consacrer une obligation de moyens pour les collectivités territoriales ainsi qu'un droit à une formation individualisée pour les élus.

Depuis la loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux, les élus locaux ont le droit de « bénéficier d'une formation adaptée à leurs fonctions », financée par les collectivités territoriales sur leur budget (au titre des « frais de formation, de déplacement et de séjour et pertes de revenu »).

Un droit à la formation aux fonctions ouvert à tous les élus locaux

Ce droit, codifié dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT), est ainsi reconnu aux élus municipaux en vertu de l'article L. 2123-12, aux conseillers départementaux en vertu de l'article L. 3123-10, aux conseillers régionaux en vertu de l'article L. 4135-10, ainsi qu'aux membres des communautés urbaines et à ceux des communautés d'agglomérations, conformément aux articles L. 5215-16 et L. 5216-4.

La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a ouvert le droit à la formation aux élus des communautés de communes, dans les mêmes conditions que pour les élus municipaux, en vertu des dispositions de l'article L. 5214-8 du CGCT.

Il appartient aux assemblées délibérantes des collectivités territoriales de se prononcer sur les critères de la répartition des crédits consacrés à la formation de chacun des élus. Dans les trois mois suivant leur renouvellement, ces assemblées doivent délibérer sur l'exercice du droit à la formation de leurs membres, en déterminant les orientations 1 ( * ) et les crédits ouverts à ce titre.

Les élus locaux exercent, en la matière, individuellement et librement leur droit, un principe de liberté auquel vos rapporteurs restent très attachés. Concrètement, cela signifie que l'élu à la faculté de choisir sa formation et l'organisme qui la lui dispensera, sous réserve que celui-ci soit agréé.

L'organisme qui dispense la formation doit en effet être détenteur d'un agrément ministériel , sur lequel le Conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL) rend un avis préalable. Votre délégation aura l'occasion de revenir sur le rôle essentiel de cet organe.

Les frais de formation, de déplacement et de séjour sont pris en charge par la collectivité, de même que les pertes de revenus subies par les élus en formation. Les crédits ouverts au titre de la formation des élus locaux constituent une dépense obligatoire pour les collectivités.

Votre délégation se félicite que le législateur ait souhaité, par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, d'une part allonger de 6 à 18 jours le congé de formation que les élus locaux peuvent mobiliser dans ce cadre, et d'autre part fixer un plafond au budget de formation à 20% du montant des indemnités de fonction des élus de la collectivité susceptibles d'être versées.

Elle salue surtout les avancées permises par la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat , qui résulte d'une initiative sénatoriale 2 ( * ) . S'agissant plus particulièrement de la formation, les nouveaux droits et obligations inscrits dans la loi avaient fait l'objet de recommandations de votre délégation.

Un progrès significatif a d'abord été autorisé par la fixation d'un montant plancher au budget consacré à la formation des élus locaux, de l'ordre de 2 % du montant des indemnités de fonction susceptibles d'être versées. Il s'agissait d'une recommandation formulée par votre délégation dans le rapport sur la formation des responsables locaux 3 ( * ) , réalisé par Antoine Lefèvre en 2012. Il constatait ainsi que « le droit à la formation des élus locaux est insuffisamment mis en oeuvre, notamment dans les petites collectivités, qui se heurtent souvent à l'absence de crédits suffisants » .

Il relevait que le premier frein à l'effectivité de ce droit était « budgétaire ». Selon lui, « l'inscription d'une ligne de crédits destinée à la formation des élus locaux est en réalité rare pour de nombreuses collectivités territoriales, et les pratiques sont très différentes selon la collectivité concernée [...] ». Les chiffres relatifs aux dépenses de formation étaient donc très éloignés du plafond légal de 20 %, ainsi que le relevait notre collègue : « le problème était en réalité la sous-consommation des crédits destinés à la formation ». Votre délégation ne peut que se féliciter de l'instauration d'un plancher minimum de crédits budgétaires consacrés à la formation des élus locaux et de la reprise d'une de ses propositions .

L'obligation pour les collectivités d'organiser une formation durant la première année de mandat à destination des élus ayant reçu une délégation au sein des communes et des communautés de communes de 3 500 habitants et plus, des communautés d'agglomération, des communautés urbaines et des métropoles, constitue un autre progrès significatif . Néanmoins, cette disposition n'entrera réellement en vigueur que lors du prochain renouvellement des conseils municipaux en 2020.

Mais c'est surtout l'instauration d' un nouveau droit, « le droit individuel à la formation » (DIF) pour les élus locaux, qui constitue l'avancée la plus notable. Là encore, il s'agissait d'une recommandation de votre délégation, qui se félicite de constater que ses propositions, loin de rester lettre morte, trouvent une traduction législative .

Désormais, les 550 000 élus 4 ( * ) des communes, des départements, des régions, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et des collectivités territoriales à statut particulier acquièrent par année de mandat, 20 heures de formation , cumulables et utilisables sur toute la durée du mandat. Les élus des syndicats intercommunaux et des syndicats mixtes ne sont toutefois pas concernés par le DIF.

Selon un principe « assurantiel », ce droit est financé par une cotisation obligatoire versée uniquement par les élus locaux percevant une indemnité (soit environ 190 000 élus locaux sur les 550 000 en France), dont le taux est fixé à 1% du montant de ces indemnités. Ce droit n'est en revanche pas convertissable en euros. Selon les informations transmises par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui en est l'organe gestionnaire, le montant annuel des cotisations s'élève à 12 millions d'euros 5 ( * ) .

La mise en oeuvre du DIF relève de l'initiative de chaque élu. Le point important réside dans le fait que les formations éligibles à ce titre peuvent être en lien avec l'exercice du mandat , ou contribuer à la réinsertion professionnelle de l'élu local à l'issue du mandat.

S'il est encore trop tôt pour réaliser un premier bilan du DIF, votre délégation ne peut que se féliciter de l'existence d'un dispositif dont les élus locaux peuvent utilement se saisir pour s'assurer d'une meilleure réinsertion sur le marché du travail .


* 1 Un tableau récapitulant les actions de formation des élus financées par la collectivité est annexé au compte administratif. Il donne lieu à un débat annuel sur la formation des membres de l'assemblée délibérante.

* 2 Proposition de loi n° 120 (2012-2013) de Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur.

* 3 Rapport d'information n° 94 fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation « La formation des responsables locaux : un enjeu pour nos territoires » (2012-2013).

* 4 L'AMF précise que les conseillers municipaux, communautaires, métropolitains, départementaux ont commencé à acquérir des droits au 1 er janvier 2016, alors que les membres des conseils municipaux de Polynésie française ont commencé à en acquérir au 1 er janvier 2017.

* 5 Chaque année, entre le 1 er et le 30 octobre, la CDC transmet aux collectivités et établissements des élus contributeurs un appel à cotisation au fonds de financement du DIF. Ce document détaille, entre autres, les références du compte bancaire destinataire des sommes précomptées depuis le mois de janvier de l'année N. Ce versement par les collectivités concernées doit intervenir avant le 31 décembre de l'année N. Les collectivités devront par ailleurs fournir une déclaration comprenant le nombre d'élus cotisants ainsi que le montant total des cotisations dues.

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