II. LES RECOMMANDATIONS POUR FAVORISER LA RÉINSERTION ET LA RECONVERSION PROFESSIONNELLES

Faciliter la réinsertion et la reconversion professionnelles des élus après leur mandat ne relève pas seulement d'une prestation individuelle pour l'élu concerné mais participe également de l'intérêt général en favorisant, en amont, l'engagement dans les mandats politiques locaux de professions moins enclines à s'engager que ne le sont les retraités (salariés, professions libérales, agriculteurs, artisans, etc.), surtout dans les fonctions de maire ou d'adjoint au maire.

Certains élus locaux peuvent effectivement choisir de suspendre leur activité professionnelle pour se consacrer exclusivement à l'exercice de leur mandat. Dans ce cas, la loi offre déjà plusieurs garanties, dont le droit à la réintégration 19 ( * ) jusqu'à l'expiration de deux mandats consécutifs .

En effet, à l'expiration du mandat, les élus peuvent demander à reprendre leur activité professionnelle et retrouver, dans les deux mois suivant la date à laquelle ils ont avisé leur employeur de leur intention de reprendre cet emploi, un emploi analogue assorti d'une rémunération équivalente .

La loi leur reconnaît également le droit 20 ( * ) , lorsqu'ils réintègrent leurs fonctions, de demander à leur employeur un stage de remise à niveau organisé dans l'entreprise, pour s'adapter à l'évolution de leur poste de travail ou à celle des technologies utilisées.

Ces élus peuvent enfin solliciter une formation professionnelle et un bilan de compétences dans les conditions fixées par le code du travail, étant entendu que le temps passé au titre du mandat local est assimilé aux durées d'activité exigées pour l'accès au congé individuel de formation et au bilan de compétences.

La question de la réinsertion professionnelle se pose évidemment avec moins d'acuité pour les fonctionnaires, qui peuvent plus facilement réintégrer leur administration.

S'agissant des élus qui souhaitent se reconvertir, vos rapporteurs saluent évidemment l'instauration du DIF . Auparavant, la préparation à la reconversion professionnelle était prise en charge par les élus intéressés sur leurs deniers propres. À cet égard, peu d'entre eux se formaient dans ce cadre. Comme l'indique l'AMF, « depuis juillet 2017, date effective de l'entrée en vigueur du DIF, un nombre croissant d'élus locaux manifestent le souhait de se préparer à la reconversion professionnelle ». Vos rapporteurs rappellent que pour le DIF, les formations contribuant à la réinsertion professionnelle de l'élu local sont les formations éligibles au titre du CPF prévu par le code du travail.

Vos rapporteurs se réjouissent aussi des avancées permises par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale et la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat. Ces textes ont modifié les articles L. 613-3 et L. 335-5 du code de l'éducation pour permettre aux élus locaux de valider l'expérience acquise dans le cade de leur mandat à la condition de « justifier de leurs connaissances et des aptitudes exigées pour l'obtention d'un diplôme, d'un titre à finalité professionnelle ou d'un certificat de qualification ». Le mandat électif devient donc une expérience professionnelle , sous réserve d'être en rapport direct avec le contenu du diplôme, du titre ou de la certification visée et d'avoir été exercé pendant trois ans. C'est une avancée importante, jugée indispensable par les élus locaux, puisqu'ils sont près de 70 % des répondants à la consultation organisée par votre délégation à considérer que « les formations suivies par les élus locaux doivent être qualifiantes et se traduire par l'obtention d'un diplôme ».

Là encore, votre délégation relève qu'il s'agissait d'une de ses précédentes recommandations 21 ( * ) . Elle s'étonne d'ailleurs de la méconnaissance de ce dispositif de VAE par les élus locaux, méconnaissance qu'elle a pu constater lors de ses auditions mais aussi à l'occasion de la consultation. En effet 83 % des répondants indiquaient n'avoir aucune connaissance des possibilités offertes par la loi en matière de VAE . Elle estime que le travail de pédagogie et d'information conduit par les associations d'élus, l'administration, mais aussi par le Sénat, à travers la démarche engagée dans le cadre du présent rapport, mérite d'être poursuivi.

Enfin, elle juge que si les dispositions actuelles en matière de réinsertion professionnelle des élus locaux sont globalement satisfaisantes, quelques améliorations peuvent encore être apportées , essentiellement à travers l'approfondissement ou l'amplification des dispositifs existants.

A. MIEUX PRENDRE EN COMPTE, AU TITRE DE L'ANCIENNETÉ PROFESSIONNELLE, LE TEMPS DU MANDAT

Comme cela a été indiqué, la loi du 31 mars 2015 a consolidé le droit à la suspension du contrat de travail des salariés qui interrompent leur carrière professionnelle pour se consacrer à leur mandat, en étendant à deux mandats la durée du bénéfice du droit à la réintégration dans leur entreprise.

Toutefois, lorsque le salarié a fait valoir son droit à suspension du contrat de travail auprès de son employeur et qu'il réintègre l'entreprise au terme de son mandat, le temps consacré à l'intérêt général n'est que partiellement pris en compte aujourd'hui. La durée du ou des deux mandats est en effet seulement prise en compte pour le calcul du droit au congé individuel de formation et le bilan de compétences.

Cette situation contribue au déficit d'attractivité des mandats pour les jeunes et les actifs du secteur privé. Pour encourager la réinsertion professionnelle, il pourrait donc être opportun que la durée du ou des deux mandats soit prise en compte au titre de l'ancienneté également pour le calcul du temps de congés payés , et surtout pour le calcul de la durée de préavis de licenciement et du montant des indemnités de licenciement, périodes qui sont aujourd'hui déduites de l'ancienneté 22 ( * ) .

Vos rapporteurs recommandent donc la prise en compte totale du temps du mandat au titre de l'ancienneté dans l'entreprise, pour les élus ayant bénéficié de la suspension de leur contrat de travail.

Recommandation n° 7 : Permettre aux élus ayant bénéficié de la suspension de leur contrat de travail de faire prendre en compte, au titre de l'ancienneté dans l'entreprise, la totalité du temps du mandat pour le calcul de la durée de préavis de licenciement et du montant des indemnités de licenciement.


* 19 L'article 8 de la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice par les élus locaux de leur mandat modifiant l'article L. 3142-60 du code du travail.

* 20 Article 11 de la loi précitée. Les dispositions ont été rendues applicables aux maires, aux présidents d'EPCI, aux adjoints au maire et aux vice-présidents de communes et d'EPCI de plus de 10 000 habitants qui ont cessé temporairement d'exercer leur activité professionnelle pour se consacrer à l'exercice de leur mandat.

* 21 Rapport précité fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation n° 94 (2012-2013) d'Antoine Lefèvre.

* 22 L'article L. 1234-8 du code du travail, applicable au préavis de licenciement, et l'article L. 1234-11, concernant l'indemnité de licenciement prévoient que les périodes de suspension n'entrent pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier de ces dispositions.

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