D. LES MESURES INDIVIDUELLES DE CONTRÔLE ADMINISTRATIF ET DE SURVEILLANCE : UN DISPOSITIF PROTÉIFORME UTILISÉ EN SOUTIEN D'AUTRES MESURES

Depuis le 31 octobre 2017, 72 personnes ont fait l'objet de mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance 17 ( * ) .

Ce dispositif a été très rapidement utilisé pour prendre le relais, dès le 1 er novembre 2017, des mesures d'assignation à résidence prononcées à l'encontre de 21 personnes sur le fondement de l'article 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence. Il convient toutefois d'observer que 69 personnes faisaient l'objet d'une assignation à résidence au 2 juin 2017.

Au moins 29 personnes ayant fait l'objet d'une assignation à résidence pendant l'état d'urgence ont été concernés par une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance sur la période novembre 2017-novembre 2018 .

Le nombre de mesures nouvelles apparaît désormais régulier, avec entre 4 et 10 nouvelles mesures chaque mois.

Évolution du nombre de mesures individuelles de contrôle administratif
et de surveillance (mesures nouvelles) par mois

1. La nature et la motivation des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance

La grande majorité des arrêtés sont motivés sur le fondement de l'existence d'éléments permettant de regarder l'individu comme « soutenant ou adhérant à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de ces actes » : 63 arrêtés initiaux ont été motivés sur ce fondement.

47 arrêtés l'ont été sur le fait que l'individu « doit être regardé comme entrant en relation de manière habituelle avec des personnes incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme » .

38 arrêtés ont été motivés sur les deux critères, pourtant alternatifs.

Les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance concernent de plus en plus des personnes sortant de prison : au moins 15 personnes exécutant leur peine en détention ont fait l'objet d'une telle mesure prenant effet à la date de leur libération.

Le dispositif le plus contraignant des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, fondé sur l'article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure, est le plus utilisé (59 personnes sur 72). Cette mesure permet, pendant une durée de trois mois renouvelables, d'assigner une personne à un périmètre géographique déterminé, de l'obliger à se présenter périodiquement auprès des forces de l'ordre et de déclarer son lieu d'habitation, sous peine de sanctions pénales.

Parmi les 59 personnes faisant l'objet d'une assignation dans un périmètre, 49 étaient assignées au territoire d'une commune et 10 l'étaient au territoire d'un département.

56 personnes ont été astreintes à se présenter quotidiennement aux services de police et de gendarmerie. Pour 3 personnes, les pointages ont été hebdomadaires.

63 des 72 personnes ayant fait l'objet d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ont eu l'obligation de déclarer leur lieu d'habitation et tout changement de lieu d'habitation.

26 personnes ont été interdites d'entrer en relation avec une ou plusieurs personnes. 7 d'entre elles n'étaient astreintes qu'à cette mesure.

2. Des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance majoritairement renouvelées

48 décisions prononçant une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ont été renouvelées au moins une fois, 22 au moins deux fois et enfin 5 arrêtés seulement ont été renouvelés trois fois .

Il n'est pas nécessaire de présenter des éléments nouveaux ou complémentaires pour renouveler jusqu'à six mois une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance. De tels éléments sont en revanche nécessaires au-delà de six mois : l'analyse des arrêtés témoigne d'une certaine difficulté des services à identifier des faits véritablement nouveaux, hors évènement judiciaire (violation des obligations, arrestation, etc .). Les renouvellements sont le plus souvent fondés sur quelques éléments complémentaires relatifs à des faits anciens déjà cités dans la décision initiale de placement sous mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.

Une personne ne peut faire l'objet d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance que pour une durée maximale de douze mois, consécutifs ou non : cette disposition légale a été consacrée comme une exigence constitutionnelle par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 mars 2018. Il convient désormais de s'interroger sur les dispositifs de droit commun qui doivent prendre en charge ces personnes qui ont fait l'objet d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance depuis le 1 er novembre 2017.

Évolution du nombre de mesures individuelles de contrôles administratif et de surveillance (mesures en cours)

Depuis le 1 er novembre 2017, 14 mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ont été abrogées. Les abrogations s'expliquent par l'incarcération de la personne concernée pour des faits en lien ou non avec la mesure (violation de l'obligation, menaces à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique, apologie du terrorisme, etc .), son hospitalisation d'office ou son placement en rétention en vue de son expulsion. Une mesure a été abrogée car « sans effet » en raison du départ de la personne à l'étranger, départ constaté à l'occasion d'un contrôle routier de la personne en Grèce.

3. Des mesures qui ont su évoluer

Les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance sont régulièrement modifiées , notamment pour adapter le périmètre d'assignation aux obligations judiciaires des personnes (suivi par les services pénitentiaires d'insertion et de probation, par exemple) ou pour faciliter leur réinsertion (suivi d'une formation professionnelle, emploi, etc .).

Les obligations des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance se cumulent parfois avec des contrôles judiciaires ou des mises à l'épreuve . Ainsi, une personne, assignée dans un périmètre par décision de son contrôle judiciaire, a fait l'objet, en complément, d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance afin de l'obliger à se présenter quotidiennement aux forces de l'ordre (« pointage »). Une autre personne qui, au titre de son contrôle judiciaire, avait l'interdiction d'entrer en contact avec plusieurs personnes, s'est vu notifier la même interdiction, au titre d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance, afin d'anticiper une éventuelle levée du contrôle judiciaire : les deux mesures sont toujours en cours.


* 17 Deux personnes ont fait l'objet d'une mesure initiale qui a été abrogée en raison d'une hospitalisation sous contrainte ou d'une incarcération, puis reprise à leur sortie sous la forme d'une nouvelle mesure initiale : les 74 arrêtés concernent donc 72 personnes.

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