TROISIÈME PARTIE
DES DÉFIS RESTANT À RELEVER

I. UNE NÉCESSAIRE VIGILANCE QUANT À L'ADAPTATION DES UNITÉS AUX EVOLUTIONS DES TERRITOIRES ET À LA BAISSE PRÉOCCUPANTE DES TAUX D'ENCADREMENT

1. Redéployer les effectifs de volontaires du SMA en fonction des évolutions sociales et démographiques propres à chaque territoire

L'atteinte de l'objectif « SMA 6 000 » a entrainé un doublement des effectifs de volontaires stagiaires.

Cette augmentation s'est faite de manière relativement homogène selon les territoires, à l'exception de la Polynésie française et de Mayotte (dont les effectifs de volontaires stagiaires ont augmenté de respectivement 218 % et 194 %), qui se distinguaient par le nombre anormalement faible de leurs volontaires 21 ( * ) . La montée en puissance des SMA « historiques » (Antilles et Nouvelle-Calédonie) s'est ainsi faite dans des proportions identiques (entre + 142 et + 147 %), tandis que celle de La Réunion et de Mayotte a été sensiblement plus faible.

Évolution de la répartition géographique
des volontaires stagiaires du SMA

Territoire

2010

2017

Variation

Martinique

335

811

142,09%

Guadeloupe

335

827

146,87%

Guyane

335

563

68,06%

La Réunion

550

1090

98,18%

Mayotte

170

540

217,65%

Nouvelle-Calédonie

190

462

143,16%

Polynésie française

175

516

194,86%

Total

2263

4810

112,55%

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires

Vos rapporteurs spéciaux relèvent que l'augmentation des effectifs permise par « SMA 6 000 » n'a pas suffisamment pris en compte les évolutions socio-démographiques propres à chaque territoire. Le maintien d'un ratio de sélection au-dessus de la barre des 2 candidatures par place masque des évolutions contrastées selon les territoires.

Taux de sélection du SMA (général)

SMA

Candidatures

Plan d'incorporation

Ratio de sélection

2010

5 701

2 570

2,2

2011

5 723

3 178

1,8

2012

7 782

3 929

2,0

2013

11 172

4 371

2,6

2014

9 523

4 561

2,1

2015

10 072

4 739

2,1

2016

9 653

4 642

2,1

Source : réponses aux questionnaires de la commission des finances du Sénat

Ainsi, le SMA connait des difficultés de recrutement dans les Antilles, en raison de l'épuisement des « viviers ». Les taux de sélection y apparaissent proches du plancher, respectivement à 1,3 et 1,2 candidature par place en Guadeloupe et en Martinique. Dans les Antilles, la concurrence avec des dispositifs visant la même fin, bien que totalement distincts dans leurs modalités, comme la Garantie jeunes 22 ( * ) est également problématique. Dans les Antilles, les classes des centres de formation des apprentis sont parfois loin d'être complètes.

Réciproquement, certains territoires, comme Mayotte, la Nouvelle-Calédonie ou la Polynésie française connaissent une forte demande, se traduisant par des taux de sélectivité plus élevés.

Par ailleurs, la candidature n'étant pas ouverte aux jeunes étrangers établis sur le territoire national, ces derniers ne peuvent donc pas candidater. Si cette possibilité était ouverte, le ratio serait encore plus élevé en Guyane et à Mayotte, notamment. Votre rapporteur spécial Georges Patient souhaite, à cet égard, que la mise en place d'une filière ouverte aux étrangers dans ces deux territoire soit mise à l'étude, même si les difficultés en la matière, liées au statut militaire des volontaires, sont importantes. Le dispositif des cadets citoyens, devant être mis en oeuvre d'ici à 2025 sur ces deux territoires au bénéfice des jeunes étrangers en cours de naturalisation constituera une avancée notable (cf. infra , 1 du II).

Selon les informations transmises en audition, en Martinique, 20 % d'une classe d'âge éligible au SMA bénéficie du dispositif, contre seulement 8 % à La Réunion.

Taux de sélection du SMA en 2016

Martinique

1,2

Guyane

1,8

Mayotte

3

Guadeloupe

1,3

La Réunion

1,8

Polynésie française

3,2

Nouvelle-Calédonie

3,8

Source : réponses aux questionnaires de la commission des finances du Sénat

Au total, vos rapporteurs spéciaux plaident donc pour qu'une redéfinition stratégique de l'ampleur des promotions du SMA en fonction de l'évolution sociale et démographique de chaque territoire soit effectuée. Cette redéfinition pourrait utilement prévoir un redéploiement des effectifs de volontaires des zones « excédentaires » (par exemple, les départements des Antilles) vers des zones « déficitaires » (comme la Nouvelle-Calédonie, La Réunion ou Mayotte).

Recommandation n°1 : afin d'assurer une meilleure adéquation de la taille des unités aux réalités sociales et démographiques propres à chaque territoire d'outre-mer, réévaluer la taille des cohortes de volontaires recrutés dans chacune des unités du SMA.

2. Un taux d'encadrement ayant atteint un niveau critique

Début 2017, 1 105 ETPT étaient dédiés à l'encadrement du SMA. Cet effectif est réparti en 169 officiers, 489 sous-officiers, 191 engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT), 186 engagés volontaires du SMA (EVSMA) et 70 personnels civils.

Les cadres militaires du SMA proviennent du ministère des Armées. Ils sont affectés pour emploi au profit du ministère des Outre-mer, pour une durée de 2 à 3 ans. Affectés au SMA, les cadres doivent faire face à un nouvel environnement professionnel, culturel, social et économique. Conscient de la nécessaire adaptation des cadres et de la prise de conscience qu'ils ne formeront plus des combattants mais des jeunes volontaires ultramarins en difficulté, le SMA s'investit sur leur formation. Outre le stage d'acculturation mis en place par l'école militaire de spécialisation de l'outre-mer et de l'étranger (EMSOME), les cadres suivent une formation de mise en condition opérationnelle (MCO) organisée par l'état-major du COMSMA.

Le SMA recrute également des formateurs professionnels : les engagés volontaires du SMA (EVSMA) issus, pour la plupart, du monde civil ou bien sélectionnés parmi les volontaires techniciens les plus qualifiés. Ils sont recrutés au regard de leurs qualifications et de leur expérience en adéquation avec les offres de formations professionnelles proposées aux jeunes volontaires. Avant de rejoindre le régiment/bataillon pour lequel ils ont été recrutés, ils suivent une formation de six mois 23 ( * ) .

Lors de leur déplacement à Mayotte, vos rapporteurs spéciaux ont pu apprécier la haute qualification et le niveau élevé de motivation de ces cadres.

La mise en oeuvre de « SMA 6000 » a toutefois entrainé une importante mise sous tension des effectifs encadrants. Le taux d'encadrement 24 ( * ) , qui s'élevait à 25 % en 2010 a connu une baisse de 10 points sur la période 2010-2017. Ces quatre dernières années, cette baisse a concerné l'ensemble des unités, à l'exception de La Réunion, dont le taux d'encadrement est resté stable.

Taux d'encadrement du SMA depuis 2013

Source : réponses aux questionnaires

De l'avis général, les taux d'encadrement ont aujourd'hui atteint un niveau plancher, susceptible de mettre en péril les résultats du SMA et la sécurité de ses activités. Vos rapporteurs spéciaux estiment qu'une hausse du nombre de personnels encadrants constitue un impératif absolu. Cette hausse devra s'effectuer en conformité avec la nouvelle définition de la taille des unités précédemment préconisée par vos rapporteurs spéciaux.

Recommandation n°2 : afin de consolider ses résultats et garantir la sécurité de ses activités, augmenter les taux d'encadrement des unités du SMA, en prenant en compte la nouvelle définition de la taille des promotions.


* 21 Ceci peut s'expliquer par la création tardive de ces deux unités, ainsi que, s'agissant de Mayotte, de son statut particulier (il s'agit d'un bataillon et non d'un régiment).

* 22 La Garantie jeunes s'adresse aux jeunes de 16 à moins de 26 ans, en situation de précarité qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en étude. Pour favoriser leur insertion dans l'emploi, ils sont accompagnés de manière intensive et collective et bénéficient de mises en situation professionnelle. Cet accompagnement est assorti d'une aide financière pour faciliter leurs démarches d'accès à l'emploi.

* 23 Trois mois sont dédiés à la formation militaire au sein du centre de formation initiale militaire (CFIM) de Fréjus. Les trois mois suivants sont consacrés à la préparation de l'EVSMA à tenir son futur emploi de formateur professionnel. Il suit une formation pédagogique, assurée par un organisme de formation extérieur, au sein du détachement du SMA de Périgueux.

* 24 Mode de calcul : [(effectif encadrement) / (effectif encadrement + bénéficiaires)] x100.

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