B. UN PROJET DE LOI CENTRÉ SUR LES MOBILITÉS ROUTIÈRES QUI MET EN oeUVRE DES PRESCRIPTIONS EUROPÉENNES

1. Sécurité, choix des mobilités, décarbonation

Le projet de loi est présenté comme « une réforme en profondeur du cadre général des mobilités » en vue d'offrir, sur l'ensemble du territoire national, des solutions de déplacements qui soient à la hauteur des « attentes de la population » et des « enjeux d'aujourd'hui ». L'exposé des motifs identifie trois grands défis en la matière, auxquels il entend répondre : le manque de solutions de mobilité dans les territoires, l'urgence environnementale et climatique, enfin la révision des priorités et du financement des infrastructures.

Les transports routiers sont au centre de la démarche , qu'il s'agisse de l'accélération de la décarbonation ou du développement de l'information dite multimodale, qui permet à chacun de choisir sa mobilité.

La décarbonation des transports est en effet une urgence dans certaines zones du territoire national. Le 17 mai 2018, la Commission a annoncé son intention de renvoyer la France devant la Cour de justice de l'Union européenne pour non-respect des normes de qualité de l'air fixées par la directive 2008/50/CE du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe, après des mises en demeure renouvelées en 2009, 2010, 2011, 2013, 2015 et 2017. Elle estime en effet, en l'état, que quatorze zones du territoire métropolitain subissent des dépassements de normes.

Dans la mesure où ces sujets sont très présents dans la politique européenne des transports, le projet de loi comporte plusieurs dispositions de transposition ou d'application de textes européens ou encore de mise en conformité avec le droit européen, dont l'objet est de faciliter la mobilité électrique et le choix des moyens de transport , ou encore de s'assurer que les véhicules en activité respectent les normes européennes en matière de sécurité et d'émissions polluantes .

Sont ainsi concernés :

- le règlement délégué (UE) n° 2017/1926 du 31 mai 2017, pris en application de la directive 2010/40/UE, qui prévoit l'ouverture des données de transports pour mettre en place l'information multimodale en matière de déplacements (art. 9 du projet de loi) ;

- l'article 8 modifié de la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments qui fixe les normes de pré-équipement des parcs de stationnement en infrastructures de recharge des véhicules électriques (art. 23 du projet de loi) ;

- les articles 3 des règlements (UE) n° 2013/168, n° 167/2013 et n° 2018/858 concernant la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques (art. 29 §I du projet de loi) ;

- la décision (UE) n° 2014/585 du 15 mai 2014 et le règlement délégué (UE) n° 2015/758 sur l'accès au système d'immatriculation des véhicules par les personnels du groupement chargé de la réception des appels d'urgence du système européen eCall embarqué (art. 31 §I, 19° du projet de loi) ;

Les émissions de gaz polluants et de particules polluantes ne provenant pas exclusivement des véhicules routiers, le projet de loi autorise en outre le Gouvernement à adopter par voie d'ordonnances les mesures d'application de :

- l'article 57 du règlement (UE) n° 2016/1628, en matière de contrôle du respect des limites d'émissions et de réception par type pour les moteurs à combustion interne destinés à des véhicules non routiers (art. 29  §II) ;

- l'article 20 du règlement (UE) n° 2015/757, pour définir les sanctions applicables en cas de manquements aux obligations en matière de surveillance et de déclaration des émissions de dioxyde de carbone du secteur du transport maritime  qu'il définit (art. 37  §4, b).

Une ordonnance est également prévue pour les mesures d'application du règlement (UE) n° 2016/424 relatif aux installations à câbles (art. 34).

2. Des textes européens prescriptifs qui ouvrent peu de marges d'appréciation aux États membres

Les mesures de transposition ou d'application figurant dans le projet de loi sont le plus souvent strictement encadrées par le texte européen, particulièrement lorsqu'il s'agit de mesures d'application d'un règlement.

Certains de ces règlements ouvrent toutefois quelques options aux États membres, que ceux-ci peuvent choisir d'exercer ou non. Tel est par exemple le cas du règlement délégué (UE) n° 2017/1926 qui définit les modalités d'accès aux données des services de transport et les règles d'utilisation de ces données par les services d'information, dont le projet de loi reprend deux options (art. 9), en particulier le paiement d'une redevance lorsque le volume des données réutilisées est important afin d'en couvrir les coûts de production et de diffusion.

De même, le projet de loi reprend les dérogations à l'obligation de mettre en place des infrastructures de recharge des véhicules électriques dans les parcs de stationnement autorisées par l'article 8 modifié de la directive 2010/31/UE (art. 23).

Parfois le projet de loi entend être plus allant que le texte européen . Ainsi lorsqu'il fixe des délais plus rapprochés d'ouverture des données de transports ou lorsqu'il inclut les données dynamiques dans l'information multimodale prévue par le règlement délégué (UE) n° 2017/1926. Dans ces deux cas, la démarche s'inscrit toutefois dans le cadre européen qui fixe des délais maximum ou définit un périmètre limité que ses considérants invitent les États membres, selon le cas, à accélérer ou à élargir .

Le projet de loi est également plus exigeant que les textes européens en matière d'accès aux transports des personnes handicapées ou à mobilité réduite .

Enfin, il dote les autorités de contrôle, en particulier l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), de pouvoirs coercitifs plus étendus que ce qu'exigent les textes européens afin de garantir le respect des obligations qu'ils définissent.

L'ajout au projet de loi, par une lettre rectificative du 20 février, de quatre articles extraits du projet de loi portant suppression de sur-transpositions de directives européennes en droit français, adopté par le Sénat le 7 novembre 2018, qui exploitent des dérogations ouvertes par la directive 2012/34/UE établissant un espace ferroviaire unique européen ajoute un volet ferroviaire qui allège les obligations pesant sur certaines lignes locales de chemin de fer.

Quant aux habilitations que sollicite le Gouvernement pour introduire par voie d'ordonnance les dispositions organisationnelles et répressives de nature législative nécessaires à la mise en oeuvre de règlements, même si les termes des habilitations sont peu explicites, il apparaît que le texte européen fixe le plus souvent un cadre précis qui laisse peu de marge aux législateurs nationaux .

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