Temps d'échanges

Annick Billon . - Il nous reste quelques minutes pour un temps d'échanges avant de conclure cette matinée.

Michèle Demessine, ancienne ministre, ancienne sénatrice . - Je voudrais simplement ajouter un point à cette belle histoire. Grâce à la ténacité d'Hélène Luc, j'ai fait partie de la délégation officielle française à la Conférence internationale de l'ONU à Pékin, en 1995. La délégation était présidée par Colette Codaccioni, qui était ministre des droits des femmes. J'ajoute que 600 Françaises, représentant des ONG, participaient également à cette conférence, ce qui représentait un poids significatif.

Je voudrais aussi souligner l'universalité du combat des femmes, qui me paraît essentielle. Si la question des femmes dans les institutions publiques était mise à l'ordre du jour de la conférence de 1995 alors que d'autres problèmes - économiques, sociaux - existaient également pour les femmes à cette époque, j'étais vraiment convaincue de son importance, car je venais du mouvement des femmes. Quand j'ai été élue au Sénat en 1992, je me suis rendu compte du peu de poids des femmes dans les institutions. Elles pouvaient toujours se battre au-dehors, mais elles n'obtiendraient rien en ne participant pas, en tant qu'élues, aux décisions de l'intérieur. Cette insuffisance a été quelque peu rattrapée depuis.

Les femmes qui m'ont convaincue qu'il fallait aller de l'avant sont les femmes africaines. Elles sont toujours présentes et actives dans les conférences internationales. J'aurais pu penser que la participation des femmes aux pouvoirs publics n'était pas une urgence pour elles, compte tenu des difficultés de leurs pays, mais elles ont joué un rôle très important lors de la conférence de Pékin. Cela m'a donné du courage pour proposer à mon groupe la création, au Sénat, d'une délégation aux droits des femmes.

S'agissant de la séance de ce matin, j'observe qu'il est très rare que l'on entende parler de politique avec le coeur. Or de nombreuses intervenantes se sont libérées et ont parlé avec leur coeur, aujourd'hui ! À une époque où les Français doutent de la politique, il ne faut pas oublier de tels moments. Nous devons peut-être casser le moule du discours politique auquel les Français n'adhèrent pas. Parler avec le coeur peut redonner du lustre à la politique...

Annick Billon . - Notre ancienne collègue Christiane Kammermann 102 ( * ) souhaite intervenir.

Christiane Kammermann, ancienne sénatrice . - Je voulais simplement vous remercier. Je trouve que cette réunion était à la fois sympathique et extrêmement profonde. Je suis ravie d'être venue. J'ai passé des années au sein de cette délégation et je voudrais que Paulette Brisepierre 103 ( * ) , qui y a effectué un travail très important, ne soit pas oubliée.

Encore bravo et merci pour tout ce que vous avez fait.

Emelyn Weber, présidente de la délégation aux droits des femmes du CESE . - Je préside la délégation aux droits des femmes et à l'égalité du CESE. Je vous remercie pour cette matinée. Votre délégation a pratiquement le même âge que celle du CESE 104 ( * ) . Cet anniversaire est à la fois passionnant, serein et très militant. Cette matinée me paraît absolument exemplaire !

Dans notre calendrier, nous travaillons actuellement sur les droits sexuels et reproductifs. Je crois vraiment en la complémentarité entre nos institutions sur des thématiques aussi fortes. Le combat féministe dépasse celui des assemblées. D'autres institutions, comme le Haut Conseil à l'égalité (HCE) 105 ( * ) , participent de ces avancées. Je suis très fière d'avoir pu assister à cette journée.

Annick Billon . - Je donne maintenant la parole à Victoire Jasmin, sénatrice de la Guadeloupe.

Victoire Jasmin, sénatrice . - Je voudrais simplement remercier toutes les pionnières et tous les pionniers qui ont fait de cette délégation ce qu'elle est devenue aujourd'hui. Je me trouve en face de personnes qui ont beaucoup oeuvré avant moi, avant nous, et je me rends compte du chemin parcouru. Quand j'ai entendu dans les témoignages les difficultés que les unes et les autres ont rencontrées, je vois que les choses ont évolué grâce aux femmes et aux hommes qui font partie de cette délégation. Les propos entendus ce matin sont très importants ! Merci à vous tous.

Gisèle Bourquin, présidente de Femmes au-delà des mers . - Je préside l'association Femmes au-delà des mers et je suis aussi vice-présidente de la Coordination pour le lobby européen des femmes (CLEF). Je ne vais pas revenir sur tous les compliments qui ont déjà été exprimés sur cette matinée exceptionnelle. La qualité des échanges de ce matin nous permet de continuer le combat.

Nous avons parlé de l'universalité des problèmes que rencontrent les femmes. En tant que présidente d'une association engagée dans les droits des ultramarines, je voudrais souligner que ces difficultés existent dans les outre-mer de manière plus marquée. Puisqu'il est question de violences faites aux femmes, le CESE a consacré un excellent rapport à ce problème. En outre, un colloque a eu lieu sur les entrepreneures ultramarines ici, au Sénat 106 ( * ) .

Nous sommes toutes ensemble, avec les hommes bien sûr, pour faire avancer les choses. Merci aux organisatrices de nous donner l'occasion d'échanger dans la sérénité.

Annick Billon . - J'en profite pour saluer Brigitte Grésy, la nouvelle présidente du HCE.

Claude du Granrut 107 ( * ) . - Je suis très heureuse d'être venue à cette réunion. J'ai senti qu'il y avait chez vous une réelle volonté politique. Par vos actions, vous avez fait progresser le rôle et la place des femmes.

Je voudrais toutefois attirer votre attention sur un fait qui est assez grave à mon avis. Dans les années 1970, j'ai eu l'occasion de contribuer à l'ouverture de l'ensemble des grandes écoles aux femmes. Peu à peu, nous sommes parvenus à un niveau de 30 % de femmes parmi les élèves de ces grandes écoles. Or ce chiffre est tombé à 15 %. C'est grave ! Cela empêche la progression des femmes dans la vie politique, économique ou industrielle dans notre pays. Les femmes ne vont plus dans les grandes écoles : 15 %, c'est une dégringolade ! Votre délégation pourrait se pencher sur cette question, et intervenir notamment auprès du ministre de l'éducation nationale.

Annick Billon . - Vous nous donnez de nouvelles pistes de réflexion, je vous en remercie.

Je passe maintenant la parole à Jacqueline Cottier, présidente de la commission des agricultrices de la FNSEA, qui nous a beaucoup accompagnées dans notre travail sur les agricultrices réalisé en 2017 sous la présidence de Chantal Jouanno. J'en étais d'ailleurs co-rapporteure.

Jacqueline Cottier, présidente de la Commission des agricultrices de la FNSEA . - Je représente les agricultrices à la FNSEA. Votre rapport sur les femmes dans l'agriculture a mis en lumière les problèmes rencontrés par mes collègues agricultrices et permis de faire progresser notre situation. Au 1 er janvier 2018, nous avons obtenu des avancées sur le congé de maternité. Le coût du remplacement pour l'agricultrice sera nul, ce qui est satisfaisant pour nous.

S'agissant des violences faites aux femmes, j'entends sensibiliser mes réseaux sur cette question. Je suis persuadée que certaines agricultrices autour de moi souffrent de ce mal, mais les territoires ruraux restent éloignés des services et des centres d'hébergement.

Merci à vous, Annick Billon.

Annick Billon . - Je salue également les personnes présentes aujourd'hui à l'invitation de membres de la délégation et venues des territoires.


* 102 Sénatrice des Français de l'étranger de 2004 à 2017 ; Christiane Kammermann a été vice-présidente de la délégation aux droits des femmes (groupe LR).

* 103 Paulette Brisepierre (1917-2012), sénatrice des Français de l'étranger de 1989 à 2008 (groupe UMP), a été vice-présidente de la délégation aux droits des femmes.

* 104 Selon le site Internet du CESE, la délégation aux droits des femmes du CESE a été créée en février 2000 « sur le modèle des délégations homonymes de l'Assemblée nationale et du Sénat ».

* 105 Le HCE était représenté au cours de cette matinée par sa présidente, Brigitte Grésy, ainsi que par Édouard Durand et Ernestine Ronai, co-présidents de la commission Violences de genre .

* 106 L'engagement des femmes outre-mer, un levier clé du dynamisme économique , actes du colloque organisé le 20 février 2019 par la délégation sénatoriale aux outre-mer et la délégation aux droits des femmes, rapport d'information n° 348, 2018-2019.

* 107 Ancienne secrétaire générale du Comité du travail féminin de 1971 à 1977, ancien membre du CESE, élue régionale (Picardie) de 1996 à 2004, présidente de la Société des familles et amis des anciennes déportées et internées de la Résistance (SFAADIR).

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