Quatrième séquence :

Parité et accès aux responsabilités, égalité professionnelle et lutte contre les violences, trois thèmes de mobilisation

Parité et accès aux responsabilités : dialogue entre Michèle André, ancienne présidente, et Laurence Cohen, vice-présidente de la délégation

Laurence Cohen . - Madame la présidente, chère Michèle André, nous ouvrons ensemble cette séquence sur la parité et l'égal accès aux responsabilités, qui est un sujet emblématique des combats portés par la délégation.

Pour illustrer cette thématique, les comédiens Blandine Métayer et Pascal Gilbert vont tout d'abord interpréter une saynète, puis nous procéderons à un échange.

[Blandine Métayer et Pascal Gilbert interprètent une saynète sur le thème de la parité et de l'accès aux responsabilités politiques.]

[Applaudissements.]

Nous l'avons vu, la délégation a été créée en plein débat constitutionnel sur la parité. Cette question est donc en quelque sorte inscrite dans son ADN !

Dans la vidéo qui a été projetée tout à l'heure, on te voit, chère Michèle, à la tribune du Sénat en 2010, en tant que présidente de la délégation, t'inquiéter des conséquences du mode de scrutin sur le nombre de femmes élues dans les assemblées régionales. Je précise que l'extrait en question porte sur le projet de réforme des conseillers territoriaux, dont beaucoup de dispositions ont été abrogées par la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires. C'est cette loi qui a permis aux assemblées départementales, jusqu'alors qualifiées de « mauvais élèves de la parité », de devenir paritaires.

Je vais rapidement retracer ton parcours d'élue. Tu as été conseillère régionale d'Auvergne, vice-présidente du conseil général du Puy-de-Dôme et maire adjointe de Clermont-Ferrand, chargée des sports, ce qui ne devait pas être évident en 1983. Tu as aussi, de 1988 à 1991, exercé des fonctions ministérielles, en tant que secrétaire d'État aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Au Sénat, où tu as siégé de 2001 à 2017, tu as exercé d'éminentes responsabilités, outre celle de présidente de la délégation aux droits des femmes.

De 2005 à 2008, tu as été vice-présidente, et donc membre du Bureau, une instance de décision cruciale.

En 2014, tu deviens présidente de la commission des finances, que tu as été la première femme à diriger. Tu fais donc partie des pionnières du Sénat. Je souhaiterais que tu nous racontes les difficultés rencontrées durant ces expériences.

Mais avant, permets-moi d'ajouter qu'en 2014, on ne comptait que 10 % de femmes à la commission des finances, ce qui est assez significatif. À titre indicatif, on comptait alors 37 % de sénatrices à la commission de la culture et 40 % aux affaires sociales 68 ( * ) . Et je vous invite, Mesdames et Messieurs, à consulter la liste des orateurs publics quand il s'agit de parler finances dans notre assemblée, c'est quasiment 100 % d'hommes...

Parmi les pionnières de notre assemblée, je voudrais rendre hommage à Gilberte Brossolette, qui a été la première vice-présidente du Conseil de la République en 1946, après avoir joué un rôle héroïque dans la Résistance. C'est donc la première femme à avoir présidé des débats dans notre hémicycle 69 ( * ) . Elle illustre, comme la plupart des sénatrices de l'époque, le lien étroit entre la Résistance et la première génération de femmes élues.

Je voudrais, moi aussi, citer Marie-Thérèse Goutmann, qui a été en 1975 la première femme à présider un groupe politique au Sénat - et au Parlement. Il s'agit du groupe communiste, dont je fais partie. Notre groupe présente la particularité d'avoir toujours été présidé par une femme depuis cette époque. Hélène Luc, ici présente, peut en témoigner, car elle a été notre présidente de 1979 à 2001, ayant eu ainsi l'immense privilège d'occuper dans l'hémicycle la place de Victor Hugo...

J'ajouterais une anecdote sur Marie-Thérèse Goutmann, qui a aussi été, selon le très sérieux Dictionnaire des parlementaires , mis en ligne par les Archives du Sénat, « la première femme à porter le pantalon au Sénat ». Ce détail n'est anecdotique qu'en apparence ; c'était en réalité totalement révolutionnaire !

Avant de céder la parole à Michèle André, je voudrais aussi observer qu'aucune femme n'a jamais exercé au Sénat la responsabilité de questeure : cherchez l'erreur ! Les affaires dites sérieuses doivent être confiées à des hommes ! Pour moi, comme pour beaucoup ici, il faut que les choses changent, maintenant ! Les femmes entendent souvent des injonctions à la patience. On leur dit : « Soyez patientes, la société avance ». Mais les progrès se font à petits pas.

Dès que les droits des femmes progressent, c'est parce que des femmes politiques se battent dans les hémicycles ou au gouvernement, mais aussi parce que nous arrivons à modifier les rapports de force grâce aux luttes des féministes et des associations, qui protestent avec énergie et revendiquent ces droits. Je suis donc très fière, comme beaucoup de mes collègues, de dire que je suis féministe, et que le féminisme est subversif et fait évoluer les choses vers une société d'émancipation.

En tant que femmes responsables politiques, nous savons que la parité et la lutte contre le sexisme sont un combat quotidien pour sortir des préjugés, des stéréotypes ou des places assignées. Vous l'avez compris, en tant que sénatrice, communiste et féministe, j'ai tout à fait conscience de cette double oppression, tant de classe que patriarcale. Et mon amie Annie David, ici présente, sénatrice de 2001 à 2017 et présidente de la commission des affaires sociales de 2011 à 2014, aurait beaucoup à dire sur ce sujet. Elle vient du monde du travail, de l'entreprise et de l'usine.

Mais les femmes l'ont prouvé plus d'une fois dans l'histoire, nous avons le courage et la détermination pour prendre la place qui est la nôtre et pour faire avancer la société. Toutefois, nous sentons bien au travers des témoignages, des vidéos et des saynètes de cette matinée, qu'il reste beaucoup de chemin à parcourir. Je ne doute pas que notre détermination ne faiblira pas.

Madame la présidente, chère Michèle, à toi la parole.

Michèle André . - Merci Laurence, pour ton témoignage sympathique.

Je remercie Annick Billon, présidente, et toute l'équipe, qui a préparé avec beaucoup d'attention ce moment qui est particulièrement intéressant pour nous.

Un anniversaire, c'est toujours une fête. Vingt ans, c'est une fête majeure, au sens propre du terme ! C'est le contraire du qualificatif que les femmes ont reçu dans le code Napoléon, où elles étaient considérées comme des « incapables majeures ». Cet héritage pèse lourd. Les femmes avaient alors besoin d'un tuteur toute leur vie ! Vous le savez, il a fallu du temps pour que les grandes lois en faveur des femmes se mettent en place. Le droit de vote a été un combat acharné, et les Françaises n'ont pas eu, sans doute, d'aussi bons réflexes que d'autres femmes dans le monde, par exemple en Nouvelle-Zélande ou dans d'autres pays plus avancés qui l'ont obtenu plus tôt 70 ( * ) . Cette forme d'autocensure pèse d'ailleurs encore probablement sur nous.

En ce qui me concerne - était-ce dans mon ADN depuis le début ? - j'ai toujours eu la certitude qu'il n'était pas juste que les garçons puissent exercer un métier de leur choix et pas les filles. J'ai été convaincue que je n'avais pas à obéir à cette injonction. J'ai d'ailleurs passé mon permis de conduire en 1966, à 18 ans, dès que j'ai eu les moyens de le faire, pour prouver que les filles aussi étaient capables de conduire. Il m'est arrivé de dire ensuite, lorsque j'ai été ministre, après avoir été déléguée régionale du ministère des droits des femmes d'Yvette Roudy en 1981, que dans les grandes conquêtes des femmes, il y avait eu le droit de conduire. Les femmes d'Arabie Saoudite ont d'ailleurs acquis récemment ce droit, qui est fondamental en termes d'autonomie. Je me souviens que lors de la première Guerre du Golfe, il avait été dit que les hommes ne souhaitaient pas que les femmes conduisent, car ils pensaient qu'elles iraient peut-être rejoindre leur amant dans le désert !

Le droit de vote et le permis de conduire ont libéré les femmes. Soyons également reconnaissants à celui - ou celle peut-être, mais je doute que ce soit une femme - qui a inventé le lave-linge. Cela a libéré beaucoup de temps pour que les femmes puissent faire autre chose que les corvées ménagères ! J'ai vu ma propre mère, dans les campagnes d'Auvergne, comme de nombreuses femmes, laver le linge dans un trou d'eau, même pas au lavoir ! On sait tout le temps et l'énergie que cela peut prendre de s'occuper d'une famille.

J'ai sans doute été privilégiée et insolente, pour reprendre la remarque de Laurence Rossignol. Je n'étais pas prête à accepter les injonctions. J'ai eu un métier passionnant, dans lequel j'ai côtoyé tous les directeurs d'hôpitaux, de maisons de retraite et d'établissements à caractère social du Puy-de-Dôme. Ensuite, je dois beaucoup pour ma part à mon parti politique, le Parti socialiste. Je me suis engagée dans les années 1975. Nous préparions une grande convention pour les femmes, animée par Yvette Roudy, et j'ai été la secrétaire fédérale des femmes du département du Puy-de-Dôme. Nous avions fixé trois lignes, qui restent aujourd'hui encore des combats à mener :

- l'autonomie économique des femmes, c'est-à-dire le droit de choisir un métier et de faire des études : ce combat continue encore ;

- la dignité, c'est-à-dire les problématiques autour de la contraception et de l'IVG. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à Lucien Neuwirth, que j'ai eu la chance de connaître. Il a fait énormément pour le droit à la contraception, et son histoire, si vous la connaissez, est très émouvante ;

- la citoyenneté à parts égales.

Il fallait en outre installer des rapports de force plus nombreux et créer des réseaux, comme les hommes savent le faire dans leurs parcours, leurs études et leurs vies. Le temps libre est précieux pour cela ! Si on est occupée à la maison, on est moins disponible pour faire du sport ou socialiser. Je me suis finalement appliqué tout cela à moi-même.

Lors des élections municipales de 1983, j'étais en sixième position sur la liste de Roger Quilliot - je salue Serge Godard 71 ( * ) , qui est présent dans cette salle. Lorsque Roger Quilliot m'a demandé d'accepter le poste d'adjointe au sport, j'ai eu un moment de panique. Je lui ai objecté que je n'y connaissais rien ! J'avais joué au basket au lycée, j'avais accompagné mon frère au football, je savais apprécier les règles de certains sports, mais mes connaissances s'arrêtaient là. Roger Quilliot m'a alors  dit - cet argument valait ce qu'il valait : « Je veux quelqu'un de jeune et qui a du caractère ». Je lui ai répondu : « Si vous pensez que cela suffira, je vais essayer ». Et en prime, comme je n'étais pas enthousiaste, il m'a également confié le portefeuille de la jeunesse - j'avais trente ans, ça allait encore !

À l'époque, rappelez-vous, Edwige Avice était ministre des sports. Elle en voyait de toutes les couleurs avec la Fédération française de rugby pour aller jouer en Afrique du Sud où sévissait l'apartheid. Je voyais combien c'était difficile. Mais en fait, ce poste s'est avéré extraordinairement formateur. Passé le premier moment de surprise, les clubs sportifs de Clermont-Ferrand m'ont vraiment adoptée. J'ai beaucoup appris dans le monde du sport, et nous avons d'ailleurs fait un rapport sur le sujet à la délégation. Je soutiens encore, chère Annie Sugier, chère Linda Weil-Curiel, toutes les actions que vous organisez pour promouvoir, lors des Jeux olympiques, la véritable égalité entre les hommes et les femmes 72 ( * ) .

J'ai également vécu une belle expérience ministérielle. Nous étions alors six femmes ministres sur 48. Cela ne pesait pas bien lourd... Créer un réseau dans ces conditions était difficile ! Mais j'ai apprécié les années où j'ai pu présider la délégation aux droits des femmes, et notamment le formidable combat pour la parité. Nous avions publié un rapport en 2013 73 ( * ) , dont une proposition a été adoptée ensuite lorsque Manuel Valls était ministre de l'intérieur. Il s'agissait de constituer des binômes paritaires dans le cadre des élections départementales, ce qui a fait hurler certains de mes camarades, jusqu'à ce qu'ils comprennent que cette réforme allait leur rendre service, mais qu'il faudrait sacrifier quelques-uns des leurs... Les femmes, dans leur parcours politique, doivent encore prendre des places !

J'aimerais apporter deux réflexions sur les difficultés que rencontre la délégation.

Tout d'abord, j'étais dans l'opposition sénatoriale quand je présidais la délégation. Gisèle Gautier avait encouragé ma nomination à ce poste, et je tiens à la remercier pour cela. En 2010, nous étions en désaccord avec le ministère de l'intérieur sur la question des conseillers territoriaux. Le scrutin se serait fait à un tour, ce qui aurait constitué un retour en arrière pour les femmes dans les conseils régionaux et n'aurait offert aucun progrès pour les conseils départementaux. Ce combat a notamment été mené avec Marie-Jo Zimmermann à l'Assemblée nationale et avec la présidente de la délégation aux droits des femmes du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Dans cette période très importante, très forte, nous avons toutes bien travaillé ensemble.

Il semble important à ce propos d'évoquer la question de la loyauté. Quand nous sommes dans l'hémicycle, vers qui notre loyauté doit-elle se tourner ? Vers le groupe politique ou vers la délégation ? Il s'agit d'une vraie difficulté. Je connais le prix qu'a payé Jacqueline Panis 74 ( * ) , qui était rapporteure sur les retraites au nom de la délégation 75 ( * ) . Elle avait été avertie par un membre de son groupe que, si elle portait les recommandations de la délégation, elle ne serait pas investie par son parti pour les élections sénatoriales - ce qui a été le cas. Je rends hommage à son courage et à son engagement. Lorsque nous portons ces combats, il n'est pas facile de s'émanciper des loyautés politiques et de choisir son camp. Je fais partie d'une génération qui était construite sur la puissance des groupes politiques dans cette assemblée.

Je tiens donc à saluer le groupe communiste, qui a toujours su donner aux femmes une part réelle, une part égale, dans l'accès aux mandats. C'était exemplaire ! Lorsque j'étais ministre, j'avais soumis un protocole d'engagement visant à ce qu'il y ait au moins 20 % de femmes aux élections municipales. Georges Marchais ne voulait pas le signer par principe, mais il n'a eu aucune difficulté à le mettre en oeuvre, car l'égalité et la parité existaient déjà dans son parti. Ces combats restent à poursuivre dans tous les partis politiques...

Une autre difficulté que rencontre la délégation tient à la trop faible participation des sénatrices à la commission des finances. Je regrette de n'avoir pas su convaincre mes collègues d'y siéger. Elles avaient toujours l'impression que cela serait trop difficile - une question que les hommes ne se posent pas. Je vous encourage donc, Mesdames les sénatrices, à vous y impliquer, car c'est au sein de cette commission que vous aurez une vision d'ensemble de toutes les problématiques traitées au Sénat. Même les commissaires de l'opposition sont rapporteurs spéciaux du projet de loi de finances. C'est une formidable commission, que j'ai aimé présider.

Merci beaucoup.

[Applaudissements.]

Laurence Cohen . - La délégation aux droits des femmes, par les rapports qu'elle produit, par son travail sérieux, bouscule les certitudes et met en lumière des problématiques qui ne sont pas obligatoirement le quotidien de notre haute assemblée. Je pense notamment à ce qui a été fait dernièrement à l'occasion de la Coupe du monde féminine de football. Quand nous avons commencé à travailler sur ce sujet, on nous a objecté qu'il n'était pas dans les préoccupations du moment. Je salue d'ailleurs les rapporteures, Annick Billon, Céline Boulay-Espéronnier, Victoire Jasmin et mon amie et camarade Christine Prunaud, car ce rapport a permis de faire évoluer les mentalités. À chaque fois, la délégation arrive à faire bouger les choses. Ce travail doit être reconnu.

[Applaudissements.]

Nous allons maintenant laisser la place à la séquence suivante, centrée sur l'égalité professionnelle, autour d'un dialogue entre Brigitte Gonthier-Maurin, ancienne présidente, et Françoise Laborde, vice-présidente de la délégation.

L'égalité professionnelle : dialogue entre Brigitte Gonthier-Maurin, ancienne présidente, et Françoise Laborde, vice-présidente de la délégation

Françoise Laborde . - Il est vrai que les groupes et les partis ne sont pas tous aussi ouverts aux questions d'égalité que le groupe communiste. Dans mon parti, le parti radical, la parité n'est pas innée. J'ai dû livrer un combat, grâce à de nombreux hommes et femmes, et je crois que c'est ainsi que l'on gagne sa place et ses galons.

C'est avec un réel plaisir et beaucoup d'amitié que je retrouve Brigitte Gonthier-Maurin. Le thème de la saynète qui va suivre lui tient particulièrement à coeur, car il s'agit de l'un de ses combats, comme nous l'avons vu dans la vidéo tout à l'heure. Ce thème est celui de l'égalité professionnelle.

Je laisse la place aux artistes.

[Blandine Métayer et Pascal Gilbert interprètent une saynète sur le thème de l'égalité professionnelle.]

[Applaudissements.]

Incontestablement, cette saynète nous parle, à toutes et à tous !

Chère Brigitte, dans la vidéo diffusée tout à l'heure, nous te voyons à la tribune, lors de la discussion de la future loi pour l'égalité réelle du 4 août 2014, défendre les accords de branche, la refonte des grilles salariales et le principe « À travail égal, valeur égale ».

Dans ce domaine, quels sont les combats de la délégation que tu souhaiterais évoquer plus particulièrement aujourd'hui ?

Brigitte Gonthier-Maurin . - Merci, chère Françoise, merci, Madame la présidente. Je tiens à saluer tous les collègues et toutes celles et ceux que j'ai pu côtoyer lors de ma présence à la délégation.

En effet, en 2013, à l'occasion de l'élaboration de la loi pour l'égalité réelle, la délégation avait souhaité mettre l'accent sur l'importance d'oeuvrer en faveur de l'indépendance économique des femmes, considérant qu'il s'agissait là d'un facteur très important pour l'égalité. Notre mobilisation en faveur du principe « À travail égal, valeur égale » s'inscrivait donc pleinement dans un travail d'émancipation.

Nous voulions faire entendre que la concrétisation de ce principe impliquait tout d'abord des garanties collectives clairement négociées, établies pour toutes et tous, sur la base de la reconnaissance de qualifications initiales et/ou acquises au travail, et de métiers. En outre, il convenait de mettre en place des accords tenant compte des spécificités et/ou de la pénibilité du travail dans les branches des secteurs dans lesquels les femmes exercent leur activité.

Je pense sincèrement que la transparence participe de l'égalité. C'est pourquoi, lors de ce travail législatif, nous portions la nécessité d'accords de branches et la refonte des grilles salariales, convaincus qu'il fallait permettre l'accès des femmes à tous les métiers, à toutes les fonctions et à toutes les responsabilités, à salaire égal.

Cette exigence de garanties, de conventions collectives et de statuts reste d'actualité au moment où de profondes mutations font évoluer le monde du travail. Aider les filles, dès le plus jeune âge, à se projeter dans un avenir d'égalité professionnelle, et d'égalité tout court, implique de s'attaquer à la déconstruction des stéréotypes de genre et de se défaire de l'emprise du patriarcat.

C'est donc dans cet objectif de démarche intégrée et globale qu'il faut entendre l'ensemble des réflexions conduites par la délégation aux droits des femmes. C'est ainsi que je comprends le travail effectué par la délégation sur les jouets 76 ( * ) , les manuels scolaires 77 ( * ) et la place des femmes dans le monde du travail 78 ( * ) . Ce dernier rapport a justement montré combien les conditions de travail s'étaient profondément dégradées en quelques années, notamment sous l'effet du temps partiel imposé, et combien la pénibilité des métiers exercés par les femmes avait augmenté, sans être reconnue en tant que telle. Nous avons entendu des témoignages épouvantables sur ce sujet.

La délégation a également travaillé en faveur de la sécurisation de l'emploi 79 ( * ) , pour l'égalité salariale 80 ( * ) et sur la place des femmes dans l'enseignement supérieur et la recherche 81 ( * ) . Nous savons que les femmes s'interdisent elles-mêmes d'évoluer dans certains secteurs ou certaines filières, alors qu'à l'école, elles réussissent aussi bien, voire mieux, que leurs camarades masculins.

Même dans l'art et la culture 82 ( * ) , nous avons découvert des témoignages montrant la grande invisibilité des femmes et soulignant leur incapacité à évoluer dans ce secteur. S'agissant de l'agriculture 83 ( * ) , nous avons constaté l'importance du statut pour que les agricultrices accèdent aux droits.

La délégation a également réfléchi à la question du harcèlement et des violences sexuelles au travail 84 ( * ) . Dans la saynète que nous venons de voir, nous étions partagés entre le rire et le malaise, car cela nous rappelle des exemples constatés, voire des expériences vécues...

Bien entendu, nous avons aussi travaillé sur l'important droit que constitue la retraite 85 ( * ) . Nous savons que de nombreuses femmes se trouvent en situation de grande pauvreté parce qu'elles ont été contraintes au temps partiel, qu'elles subissent des horaires hachés et qu'elles sont confrontées à la non-reconnaissance de leurs qualifications.

J'ajoute pour finir les travaux que nous avons faits en faveur d'un service public de la petite enfance 86 ( * ) . Là encore, la saynète était parfaitement illustrative. Il est nécessaire de permettre aux femmes de dérouler une carrière professionnelle parallèlement à leurs responsabilités familiales.

Malheureusement, il n'est pas possible de tout rappeler ici. J'en appelle donc à votre indulgence si j'ai oublié des éléments importants.

Françoise Laborde . - Merci, chère Brigitte.

Pendant les années 2011-2014, la délégation a travaillé sur les femmes et la culture, comme tu le rappelais tout à l'heure. Dans un secteur que l'on considérerait intuitivement comme bienveillant pour les femmes, nous avons pris conscience d'inégalités frappantes. Lorsque tu parles d'invisibilité, nous devons rappeler que dans certains orchestres, les auditions des musiciens se font derrière un rideau, sans quoi les hommes bénéficieraient d'un net avantage... Les femmes retirent même leurs chaussures pour que l'on soit sûr que cela n'influence pas les jurys !

Tu as également évoqué une étude sur les stéréotypes masculins et féminins dans les manuels scolaires, que nous avons effectuée en 2014. Je vous conseille de lire le rapport, qui contient quelques perles ! C'est en tout cas à l'école que l'on apprend l'égalité - et peut-être aussi le féminisme.

Dans le même esprit, un autre rapport de la délégation, porté par Chantal Jouanno, que je salue, et Roland Courteau, a fait le constat de la contribution des jouets à la séparation des univers de jeu des filles et des garçons. Nous défendons pour notre part un idéal de société mixte, où l'égalité femmes-hommes est un prérequis, dès le plus jeune âge ! Chacun doit pouvoir contribuer, sur ce point, à l'éducation des petits garçons et des petites filles. J'espère que vous le faites autour de vous.

Nous nous éloignons à peine de l'égalité professionnelle, puisque l'univers des jouets, nous l'avons vu dans ce rapport, peut par exemple contribuer à éloigner les filles des études techniques et scientifiques.

Chère Brigitte, y a-t-il d'autres souvenirs que tu souhaiterais partager avec nous ce matin ?

Brigitte Gonthier-Maurin . - J'aimerais souligner deux thèmes sur lesquels la délégation a travaillé. Il s'agit tout d'abord de la place des femmes dans la Résistance. Nous avons rendu un bel hommage, il y a quelques années, aux sénatrices issues de la Résistance. J'ai été surprise de l'engagement, du courage et de l'humilité de ces femmes, et en même temps de leur très grande invisibilité.

Cet hommage a été l'occasion de poser une plaque dans la galerie des bustes du Sénat 87 ( * ) . Une phrase de Marie-José Chombart de Lauwe y a été inscrite et j'aimerais vous la lire parce que je trouve qu'elle est très révélatrice : « Nous n'étions pas des citoyennes à part entière. Nous n'avions pas le droit de vote, il faut toujours le rappeler, mais nous avions une conscience politique et nous avons lutté contre l'oppression nazie, pour la patrie et les valeurs républicaines de liberté, de justice, de fraternité ».

Je suis particulièrement fière que la délégation ait poursuivi ce travail sur la place des femmes dans la Grande Guerre 88 ( * ) , car je crois que les constats étaient similaires. Il y a encore beaucoup de travail à produire pour reconnaître la juste contribution des femmes à notre histoire.

Le deuxième thème que j'aimerais remettre en mémoire, et je le dis avec émotion, concerne nos travaux sur les viols de guerre 89 ( * ) . Lors des auditions que nous avons réalisées en vue de ce rapport, des témoignages quasiment insoutenables nous ont été rapportés sur les viols massifs commis dans le cadre d'une véritable stratégie de destruction de l'ennemi, d'épuration ethnique et d'anéantissement de ses capacités reproductives. Cette atrocité continue, comme vous le savez, à faire de nombreux ravages. La règle semble être l'impunité des bourreaux...

J'aimerais vous lire une courte phrase d'une femme rescapée congolaise, Tatiana Mukanire 90 ( * ) : « Violer une femme, c'est la tuer en la laissant respirer ». Cette phrase illustre très bien la situation des femmes victimes de ce crime. Si elles en paient le prix toute leur vie, c'est aussi parce qu'elles sont rejetées et montrées du doigt, quand les scènes de viol ne sont pas filmées sur les portables et diffusées sur les réseaux sociaux. Voilà ce à quoi le genre humain est capable de s'adonner !

Ce combat continue ! Des efforts et des avancées ont été faits. Des tribunaux ont été mis en place. Toutefois, le fait de reconnaître les violences perpétrées à l'encontre de ces femmes, c'est favoriser leur reconstruction et c'est permettre la paix.

Je vous remercie.

[Applaudissements.]

Françoise Laborde . - Nous laissons maintenant la place à la séquence suivante, centrée sur le thème des violences, avec un échange entre Chantal Jouanno, ancienne présidente, et notre collègue Marta de Cidrac.

Lutte contre les violences - prostitution : dialogue entre Chantal Jouanno, ancienne présidente, et Marta de Cidrac, sénatrice

Marta de Cidrac . - Nous abordons notre troisième séquence, dédiée au thème des violences, un sujet prégnant et émouvant qui se trouve au coeur des combats de la délégation. Je voudrais souligner qu'en ce moment même, à l'Assemblée nationale, notre collègue Aurélien Pradié est en train de défendre sa proposition de loi 91 ( * ) contre les violences conjugales. Pour illustrer cette thématique, Blandine Métayer et Pascal Gilbert vont interpréter une saynète.

[Blandine Métayer et Pascal Gilbert interprètent une saynète sur la difficulté, pour les femmes victimes de violences, de porter plainte contre leur conjoint. La saynète se termine sur une note grave : le rappel du nombre des féminicides au 10 octobre 2019.]

[Applaudissements.]

Je me permets de souligner, Mesdames et Messieurs, comme cela a été rappelé précédemment, que nous sommes impliqués dans ce combat au-delà de nos clivages politiques. Les questions de violence ne concernent pas qu'un seul parti politique. Je suis une femme de droite, Aurélien Pradié appartient à la famille LR (Les Républicains) dont je suis également membre, et vous voyez bien que nous sommes tous, hommes et femmes, en accord sur ces questions. Ces sujets majeurs touchent toute la société.

Je souhaite la bienvenue à Chantal Jouanno, qui a présidé la délégation de 2014 à 2017 après un parcours de sportive de haut niveau, ce qui doit être très utile lorsque l'on se lance en politique !

Vous avez également été, Madame la présidente, entre autres responsabilités, ministre des sports. Nous sommes très attentifs à ce que vous partagerez avec nous aujourd'hui autour du sujet que vous avez porté et que vous continuerez, je l'espère, à défendre.

J'ai tenu à animer cette séquence, car les violences sont pour moi un engagement essentiel, un combat pour lequel les élus doivent se retrouver tous unis, quelles que soient leurs éventuelles différences politiques.

La saynète que nous venons de voir est très évocatrice. Je voudrais aussi rappeler la vidéo qui a été diffusée tout à l'heure, dans laquelle nous vous voyons à la tribune du Sénat, lors de la discussion de la future loi d'avril 2016 sur le système prostitutionnel 92 ( * ) , que vous avez activement défendue. Vous vous élevez avec éloquence contre ce fléau qu'est la prostitution. Vous déclarez alors ne voir dans cette dernière l'expression « ni de la liberté, ni de l'égalité, ni de la fraternité . »

Ce constat pourrait s'appliquer à toutes les violences que subissent les femmes...

Quand vous présidiez la délégation, deux thématiques en lien avec les violences, outre la prostitution, ont été inscrites à l'agenda : d'une part, un bilan des lois de lutte contre les violences au sein des couples 93 ( * ) et, d'autre part, la traite des êtres humains 94 ( * ) , dont les femmes et les enfants sont les premières victimes.

Dans la période plus récente, deux évolutions ont permis un changement de regard sur les violences. En 2017-2018, la vague #Metoo a encouragé une certaine libération de la parole, dans tous les milieux, et a fait des violences un sujet central de l'actualité quotidienne. En 2019, nous avons assisté à une véritable prise de conscience de la réalité des féminicides, qui a montré les limites de la notion de crime passionnel.

Que vous inspirent ces évolutions ?

Chantal Jouanno . - Merci et bravo à toute la délégation pour l'organisation de ce vingtième anniversaire. Je vois que la salle est pleine, attentive et convaincue. Je reconnais de nombreux interlocuteurs fidèles de la délégation.

Le sujet des violences ne m'appartient pas ! Je me suis inscrite dans la lignée des travaux de la délégation, qui depuis son origine a vraiment centré ses efforts sur ce thème. Comme le disait Michèle André, nous ne nous posons pas la question, au sein de la délégation, de savoir quelle est l'étiquette politique de la personne qui parle. Nous portons les mêmes combats, nous visons les mêmes objectifs. Il arrive que nous ayons des différences de vue sur les moyens d'atteindre ces objectifs, mais elles sont indifférentes aux partis et aux opinions politiques. Nous sommes animées par une même passion et une même préoccupation autour de la question des droits des femmes, au sens large.

L'expression la plus ultime des inégalités est en fait la violence sous toutes ses formes, que ce soit le viol, les violences au sein des couples, les féminicides ou la prostitution.

Il existe un continuum complet entre les travaux que nous avons faits sur les jouets et ceux sur les viols de guerre, par exemple. Au-delà des éléments les plus visibles, il est en effet important d'identifier les inconscients collectifs dans la société, car les inégalités s'y enracinent. Il y a beaucoup de choses dont nous n'avons pas conscience s'agissant des inégalités. On entend souvent : « Ça a toujours été comme ça ». Or les inégalités ne s'appuient pas sur des réalités naturelles, mais sur des constructions sociales.

Le rapport sur les jouets était éclairant en ce sens : le sujet paraissait anecdotique, les gens - y compris ici, au Sénat - réagissaient avec un sourire poli lorsque nous l'avons introduit. Pourtant, nous avons expliqué qu'à une époque, les publicités pour les jouets montraient des garçons s'amusant avec des jouets qui sont actuellement considérés comme « réservés aux filles ». Tout cela répond à une vocation marketing évidente. Nous avons déconstruit ces images et montré qu'une telle séparation des univers de jeu des filles et des garçons n'avait pas toujours existé. Il s'agit à mon avis d'un exemple typique pour établir la continuité des travaux de la délégation. Il n'existe pas de petits travaux ni de petits sujets. Le temps de la délégation permet de réaliser des travaux de fond et de repérer les inconscients de la société.

En cela, les travaux sur la prostitution sont intéressants. J'en suis venue à m'intéresser à ce sujet après avoir travaillé, en tant que parlementaire en mission, sur l'hypersexualisation des petites filles 95 ( * ) , à l'initiative de Roselyne Bachelot 96 ( * ) . J'étais frappée par l'assignation d'un rôle donné aux petites filles par la société. Si l'on additionne à cela la toute-puissance de l'image et l'individualisme, nous obtenons un cocktail explosif ! Les petites filles sur lesquelles j'ai effectué cette recherche aspiraient, par exemple, avec les concours de « mini-miss », à une forme de « rémunération sociale » qui n'était pas si éloignée que ça, finalement, de la rémunération pécuniaire, même si cette dernière est le plus souvent subie et non recherchée.

Lorsqu'on tolère la valorisation du corps dès le plus jeune âge, on ferme les yeux ensuite sur sa forme la plus ultime, qui est celle de la prostitution. Nous avons réalisé un travail passionnant dans le cadre de la commission des affaires sociales avec Jean-Pierre Godefroy 97 ( * ) , en 2013, sur la situation sanitaire et sociale des personnes prostituées 98 ( * ) . Nous ne voulions pas partir d'un regard extérieur, à la différence de la plupart des rapports qui existaient sur cette question et qui répondaient plutôt à la question suivante : comment faire en sorte que la prostitution ne dérange pas ?

Au contraire, nous nous sommes basés sur le regard de la personne qui subit. Que vit la personne prostituée, quelles difficultés rencontre-t-elle ? Cela a été un travail difficile, car nous avons entendu des témoignages de situations humaines terribles. Je me souviens d'une personne prostituée de 70 ans qui nous expliquait qu'elle ne l'avait jamais dit à son fils et que tous les jours, elle se débrouillait pour le lui cacher.

Par conséquent, le travail à la délégation vous enrichit intellectuellement et humainement. Il vous change. Il donne un vrai sens à la politique, qui que vous soyez. Cette cause vous touche au plus profond, que vous soyez une femme ou un homme. Cette expérience m'a d'ailleurs fait voir la politique autrement.

J'ai été très touchée par ces travaux sur la prostitution. Nous en avons beaucoup débattu et nous n'avions pas tous la même vision sur la pénalisation du client. Nous avions tous l'objectif de mettre un terme à la prostitution, même si nous n'étions pas certains des moyens à mettre en oeuvre. Jamais cela n'a donné lieu au moindre dérapage ou à la moindre accusation au sein de la délégation. Au contraire, il existe un grand respect entre celles et ceux qui partagent ces convictions.

Un autre travail m'a marqué, celui sur la laïcité 99 ( * ) . Nous cherchions les formes d'inconscient susceptibles de légitimer certaines formes de violence. Dans ce cadre, nous nous sommes interrogés sur la laïcité, afin de savoir si elle était le meilleur rempart contre les inégalités et les violences faites aux femmes. Nous étions tous prudentes et prudents sur ce sujet, qui touchait aux religions. Or les religions imprègnent l'inconscient, que l'on soit croyant ou non.

Ce travail a donc été prudent, patient et long. Nous avons toutes et tous évolué, car nous étions initialement persuadés que la laïcité constituait vraiment un rempart contre l'inégalité, alors que cela n'est pas vraiment le cas. En effet, la laïcité revêt plusieurs interprétations et n'a pas été pensée au départ dans la logique de l'émancipation des femmes.

Notre rapport concluait donc qu'il fallait s'accrocher au principe d'égalité, sans lequel la laïcité n'est pas réellement synonyme de libération. La suite logique a été de défendre l'inscription du principe d'égalité entre les femmes et les hommes à l'article premier de la Constitution 100 ( * ) . Je n'avais pas remarqué jusqu'alors que l'égalité entre les femmes et les hommes ne figurait pas en tant que telle dans la Constitution de 1958 101 ( * ) , ce qui est incroyable ! Ce travail nous a énormément enrichis en nous permettant notamment de repérer ces failles.

Chacun de nous n'est finalement qu'un maillon dans la délégation, qui a toujours eu dans sa « colonne vertébrale » la lutte contre les violences faites aux femmes.

Marta de Cidrac . - Merci, chère Chantal.

Les chiffres évoluent parfois positivement, mais le président Larcher a rappelé que la présence d'élues au Sénat a régressé à certaines périodes. Aujourd'hui, nous allons dans le bon sens en termes de féminisation, puisque nous avons dépassé le tiers de sénatrices au sein de notre assemblée.

Ce qui me frappe, c'est de constater que la délégation aux droits des femmes a accompagné tous les sujets concernant les droits des femmes et notamment celui des violences. Nous voyons qu'encore maintenant, en 2019, il y a tellement à faire ! On peut parfois avoir l'impression de se répéter, mais celles à qui nous devons d'être là aujourd'hui nous montrent que l'on doit continuer, toutes et tous, sur le chemin de l'égalité.

En tant qu'ancienne présidente, que pouvez-vous dire des actions qui ont été entreprises par la délégation et de celles qui restent encore à accomplir ?

Chantal Jouanno . - La délégation a produit des travaux de fond très forts. Cela est un acquis. Si nous avons parfois le sentiment de ne pas avoir réussi à atteindre notre objectif, nous nous apercevons que certains travaux de la délégation ressurgissent plus tard, parfois même quelques années après. Les travaux de la délégation ont donc un impact particulièrement fort. Il s'agit selon moi d'un point très encourageant. Le bilan global de ces vingt années est d'ailleurs très positif.

Ma génération n'a pas vécu le combat de l'entrée des femmes en politique. Cela n'a pas été pour moi une grande difficulté. De nombreuses autres personnes pourront témoigner du fait que la place des femmes et l'égalité femmes-hommes en France se sont améliorées. Cependant, de nombreux points d'alerte demeurent, en particulier sur la question des violences. Les chiffres que nous connaissons ne doivent pas être acceptés. Nous ne devons pas considérer qu'il s'agit d'un mal nécessaire ! Cela n'existe pas.

Par ailleurs, la délégation aux droits des femmes ne devra pas être supprimée de sitôt - je pense à la citation de Dinah Derycke rêvant d'une situation de parfaite égalité rendant la délégation aux droits des femmes superflue. La situation, on le sait, recule dès que la mobilisation pour l'égalité s'arrête dans un domaine. J'oeuvre aujourd'hui dans le secteur du débat public : si l'on n'impose pas le fait que les femmes s'expriment, elles ne le font pas spontanément et sont mises de côté. L'inconscient est tellement fort et ancré qu'il ne faut jamais baisser les bras. Le rôle de la délégation est à la fois d'aller plus loin et de conserver les acquis.

Marta de Cidrac . - Merci beaucoup.

[Applaudissements.]

Laurence ROSSIGNOL

Laurence COHEN et Michèle ANDRÉ

Françoise LABORDE
et Brigitte GONTHIER-MAURIN

Marta de CIDRAC et Chantal JOUANNO


* 68 Trois ans plus tard, au lendemain du renouvellement sénatorial de 2017, la proportion des sénatrices était de 12,24 % à la commission des Finances, de 36,7 % à la commission de la Culture et de 56,8 % à la commission des Affaires sociales.

* 69 Parmi ces pionnières, on peut aussi citer Germaine Peyroles, première femme à exercer les fonctions de vice-présidente de l'Assemblée nationale en 1946, Madeleine Braun ayant été préalablement vice-présidente de la deuxième Assemblée constituante qui a siégé de juin à novembre 1946.

* 70 Droit de vote pour les femmes (quelques exemples) : 1893 en Nouvelle-Zélande, 1901 en Australie, 1906 en Finlande, 1913 en Norvège, 1917 en Russie, 1918 au Canada, en Allemagne et en Autriche, 1919 en Suède, 1928 au Royaume-Uni, etc.

* 71 Sénateur du Puy-de-Dôme de 1998 à 2001 puis de 2010 à 2011 (groupe socialiste).

* 72 Référence aux combats de la Ligue du droit international des femmes , auditionnée, entre autres dates, par la délégation aux droits des femmes le 28 janvier 2016.

* 73 Il faut sauver la parité , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Michèle André (n° 552, 2009-2010).

* 74 Sénatrice de la Meurthe-et-Moselle de 2007 à 2011 (groupe UMP).

* 75 Réforme des retraites , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Jacqueline Panis (n° 721, 2009-2010).

* 76 Jouets : la première initiation à l'égalité , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Chantal Jouanno et Roland Courteau (n° 183, 2014-2015).

* 77 Lutter contre les stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires : faire de l'école un creuset de l'égalité , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Roland Courteau (n° 645, 2013-2014)

* 78 Femmes et travail : agir pour un nouvel âge de l'émancipation , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Brigitte Gonthier-Maurin (n° 279, 2012-2013).

* 79 Sécurisation de l'emploi : sécuriser aussi l'emploi des femmes , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Catherine Génisson sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi (n° 490, 2012-2013).

* 80 Égalité salariale entre les femmes et les hommes , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Michelle Meunier (n° 334, 2011-2012).

* 81 À la recherche d'un nouvel équilibre hommes-femmes dans l'enseignement supérieur et la recherche , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Françoise Laborde (n° 655, 2012-2013).

* 82 La place des femmes dans l'art et la culture : le temps est venu de passer aux actes , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Brigitte Gonthier-Maurin (n° 704, 2012-2013).

* 83 Être agricultrice en 2017, actes du colloque organisé le 22 février 2017 par la délégation aux droits des femmes , rapport d'information n° 579, 2016-2017 ; Femmes et agriculture : pour l'égalité dans les territoires , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Annick Billon, Corinne Bouchoux, Brigitte Gonthier-Maurin, Françoise Laborde, Didier Mandelli et Marie-Pierre Monier (n° 615, 2016-2017).

* 84 Annie David, Brigitte Gonthier-Maurin et Jean-Pierre Sueur, Rapport du groupe de travail sur le harcèlement sexuel (n° 596, 2011-2012) ; Harcèlement sexuel : une violence insidieuse et sous-estimée , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Brigitte Gonthier-Maurin (n° 610, 2011-2012).

* 85 Retraite des femmes : tout se joue avant 60 ans , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes sur le projet de loi garantissant l'avenir de la justice du système de retraite par Laurence Rossignol (n° 90, 2013-2014).

* 86 Les modes d'accueil des jeunes enfants : un enjeu de l'égalité entre les femmes et les hommes , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Cyril Pellevat (n° 473, 2014-2015).

* 87 La cérémonie d'inauguration de cette plaque a eu lieu le jour du colloque, le 27 mai 2014, à l'occasion de la première célébration de la Journée nationale de la Résistance après l'adoption de la loi n° 2013-642 du 19 juillet 2013 relative à l'instauration du 27 mai comme Journée nationale de la Résistance, loi dont l'initiative revient à Jean-Jacques Mirassou, alors sénateur. Les discours prononcés lors de cette cérémonie sont reproduits dans les actes du colloque ( Femmes résistantes , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Brigitte Gonthier-Maurin, n° 757, 2013-2014).

* 88 Les femmes pendant la Grande Guerre, actes du colloque du 18 octobre 2018 , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Annick Billon (n° 165, 2018-2019).

* 89 Pour que le viol et les violences sexuelles cessent d'être des armes de guerre , rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Brigitte Gonthier-Maurin (n° 212, 2013-2014).

* 90 Coordinatrice du Mouvement des survivant.e.s de viol et violences sexuelles en RDC , et membre de SEMA, le Réseau mondial victimes et survivantes pour mettre fin aux violences sexuelles liées aux conflits .

* 91 Proposition de loi visant à agir contre les violences faites aux femmes, Assemblée nationale (n° 2201, XV e législature). Ce texte, intitulé proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille , a été transmis au Sénat le 15 octobre 2019.

* 92 Loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

* 93 2006-2016 : un combat inachevé contre les violences conjugales , rapport d'information fait au nom de la délégation par Corinne Bouchoux, Laurence Cohen, Roland Courteau, Chantal Jouanno, Christiane Kammermann et Françoise Laborde (n° 425, 2015-2016).

* 94 Traite des êtres humains, esclavage moderne : femmes et mineur-e-s, premières victimes , rapport d'information fait au nom de la délégation par Corinne Bouchoux, Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, Brigitte Gonthier-Maurin, Chantal Jouanno et Mireille Jouve (n° 448, 2015-2016).

* 95 Chantal Jouanno, Contre l'hypersexualisation, un nouveau combat pour l'égalité , mars 2012.

* 96 Alors ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

* 97 Sénateur de la Manche de 2001 à 2017 (groupe socialiste).

* 98 Situation sanitaire et sociale des personnes prostituées : inverser le regard , rapport fait au nom de la commission des affaires sociales par Jean-Pierre Godefroy et Chantal Jouanno (n° 46, 2013-2014).

* 99 La laïcité garantit-elle l'égalité femmes-hommes ?, rapport d'information fait au nom de la délégation aux droits des femmes par Chantal Jouanno (n° 101, 2016-2017).

* 100 Proposition de loi constitutionnelle modifiant l'article premier de la Constitution pour y inscrire le principe d'égalité devant la loi sans distinction de sexe (Sénat, n° 454 2016-2017).

* 101 La proposition de loi constitutionnelle précitée, mentionnant dans son exposé des motifs, le troisième alinéa de la Constitution de 1946 (« La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme »), constate que cette formulation semble « n'encourager finalement qu'un rattrapage, au profit des femmes, de droits qui ont été donnés en premier lieu, de manière naturelle, aux hommes ».

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