N° 700

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2019-2020

Rapport remis à M. le Président du Sénat le 8 septembre 2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 septembre 2020

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission d'enquête (1)
sur les
problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols
qui ont
accueilli des activités industrielles ou minières ,
et sur les
politiques publiques et industrielles de réhabilitation de ces sols

Président
M. Laurent LAFON,

Rapportrice
Mme Gisèle JOURDA,

Sénateurs

Tome I : rapport

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon, président ; Mme Gisèle Jourda, rapportrice ; MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Mme Maryse Carrère, MM. Jean-François Husson, Xavier Iacovelli, Didier Mandelli, Pascal  Savoldelli, vice-présidents ; MM. René Danesi, Alain Duran, Daniel Gremillet, Mmes Florence Lassarade, Brigitte Lherbier, MM. Jean-Pierre Moga, Philippe Nachbar, Georges Patient, Cyril Pellevat, Mmes Sonia de la Provôté, Sabine Van Heghe, M. Jean-Pierre Vial.

LISTE DES PRINCIPALES PROPOSITIONS

___________

PREMIER AXE :
AMÉLIORER LA QUALITÉ ET LA LISIBILITÉ DE L'INFORMATION
SUR LES SITES ET SOLS POLLUÉS

Proposition n° 1 : Consacrer en droit français un véritable droit à l'information du public sur les pollutions avérées ou suspectées des sites et sols et leurs effets sur la santé et l'environnement et prévoir la publication par Santé publique France des études épidémiologiques réalisées

Proposition n° 2 : Instaurer une obligation législative d'information du préfet et du maire concernés pour toute personne morale ayant connaissance d'une pollution des sols ou des eaux sur un site, et pour toute personne physique ayant participé à la réalisation d'un diagnostic de sol ou d'une opération d'aménagement ou de construction et ayant connaissance d'une pollution des sols ou des eaux sur un site

Proposition n° 3 : Établir une cartographie nationale des risques sanitaires et environnementaux liés aux pollutions des sols, à partir des données de la base Basol et des résultats d'un programme national d'identification des risques associés à une liste de substances polluantes dont la surveillance est identifiée comme prioritaire

Proposition n° 4 : Instaurer pour les maîtres d'ouvrage de projets de construction d'établissements accueillant des enfants et adolescents une obligation transversale de conduite d'un diagnostic des sols préventif, qui devrait s'accompagner d'un soutien financier de l'État

Proposition n° 5 : Mobiliser une enveloppe nationale de 50 millions d'euros pour mener à bien l'inventaire des établissements recevant des enfants situés sur des sites pollués et le diagnostic de ces sols, en traitant prioritairement les départements jusqu'ici exclus de l'inventaire

Proposition n° 6 : Fixer un calendrier précis pour l'achèvement des secteurs d'information sur les sols et renforcer l'obligation annuelle de révision des SIS, le cas échéant en portant ces mesures au niveau législatif

Proposition n° 7 : Donner aux communes et aux EPCI compétents en matière d'urbanisme un droit d'initiative pour délimiter des secteurs d'information sur les sols sur leur territoire lorsqu'ils ont connaissance de pollution de sites et sols, en prévoyant en contrepartie des possibilités accrues de financement et d'aménagement pour les sites ainsi inscrits en SIS

DEUXIÈME AXE :
INTRODUIRE DANS LA LÉGISLATION FRANÇAISE
UN VÉRITABLE DROIT DE LA PROTECTION DES SOLS

Proposition n° 8 : Relancer le processus d'élaboration d'une directive européenne sur la protection des sols et la prévention de leur dégradation par les activités industrielles et minières

Proposition n° 9 : Mettre un terme aux asymétries entre le code minier et le code de l'environnement en matière de responsabilités des exploitants et de prévention des risques sanitaires et environnementaux par :

- l'extension aux exploitants de sites miniers de l'obligation de constitution de garanties financières pour la remise en état de la mine après fermeture ;

- l'intégration de la protection de la santé publique dans les intérêts protégés par le code minier ;

- l'extension aux sites miniers de la possibilité de rechercher la responsabilité de la société mère en cas de défaillance éventuelle de la filiale exploitante ;

- l'intégration des travaux miniers dans l'autorisation environnementale, afin d'harmoniser les procédures administratives d'instruction, de contrôle et de sanction entre les sites miniers et les sites d'ICPE ;

- l'extension pour une durée de trente ans des conditions d'exercice de la police résiduelle des mines après l'arrêt des travaux, afin de permettre à l'État de rechercher la responsabilité des exploitants en cas d'apparition de nouveaux désordres et dommages.

Proposition n° 10 : Inscrire dans la loi les principes généraux de la politique nationale de prévention et de gestion des risques sanitaires et écologiques associés aux sites et sols pollués, de dépollution et de réhabilitation de ces sites et sols et consacrer dans la loi le renvoi à une méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués validée par arrêté des ministres chargés de l'environnement et de la santé pour préciser les modalités de mise en oeuvre de cette politique

Proposition n° 11 : Introduire dans le code de l'environnement une définition législative de la pollution des sols, comme elle existe pour l'eau et l'air

Proposition n° 12 : Définir dans la loi la notion d'« usage » en matière de sites et sols pollués, en clarifiant son articulation avec l'« usage » au sens du code de la construction et de l'habitation et avec la « destination » au sens du code de l'urbanisme, et en instaurant une typologie précise des types d'usages

Proposition n° 13 : Clarifier les notions de « réhabilitation » et de « remise en état » selon leurs objectifs respectifs et l'étendue des actions qu'elles impliquent, en harmonisant la terminologie utilisée au sein du code de l'environnement

TROISIÈME AXE :
AMÉLIORER LA SURVEILLANCE DES SOLS

Proposition n° 14 : Instituer un suivi centralisé des obligations de procéder à des études de sols prescrites par les préfets afin de mesurer plus précisément la surveillance de la pollution des sols et de recenser l'ensemble des cas identifiés de pollution des sols

Proposition n° 15 : Soumettre obligatoirement à l'examen de la Dreal les analyses conduites par les bureaux d'études certifiés ou équivalents et préalables à la délivrance de l'attestation de mise en oeuvre des obligations de diagnostic et de mesures de gestion pour les sites situés en SIS ou sur les terrains d'anciennes ICPE

Proposition n° 16 : Renforcer la recherche par l'inspection des installations classées des cas de non-déclaration des cessations d'activité par un croisement automatique des bases de données relatives aux ICPE avec les informations issues du bulletin officiel des annonces civiles et commerciales et du registre du commerce et des sociétés

Proposition n° 17 : Conditionner la radiation d'une entreprise du registre du commerce et des sociétés au respect des obligations prévues lors de la cessation d'activité

Proposition n° 18 : Inclure des exigences relatives à la surveillance au maximum décennale de la qualité des sols et des eaux souterraines dans les arrêtés ministériels fixant les prescriptions générales applicables aux ICPE soumises à déclaration relevant de catégories identifiées comme à risque pour les sols et dans les arrêtés préfectoraux relatifs à des ICPE à autorisation ou à enregistrement non soumises à des obligations de rapport de base ou de surveillance régulière des eaux souterraines

Proposition n° 19 : Permettre au préfet, sur proposition du Dreal, de prescrire une surveillance des eaux souterraines pour les sites non soumis à des obligations de surveillance des eaux souterraines mais présentant des risques de pollution des sols

Proposition n° 20 : Renforcer l'indépendance et l'homogénéité des méthodes des bureaux d'études en intégrant dans leur certification des exigences mieux définies sur la conduite des études de sols, la définition des paramètres techniques et la modélisation, tant pour l'évaluation des risques que pour les propositions de réhabilitation

QUATRIÈME AXE :
RÉUNIR LES CONDITIONS D'UNE GESTION RÉACTIVE
ET TRANSPARENTE DES RISQUES SANITAIRES

Proposition n° 21 : Prévoir une obligation pour le préfet et le directeur général de l'agence régionale de santé de communiquer systématiquement aux ministres chargés de la santé et de l'environnement et à Santé publique France toute suspicion d'une pollution des sols susceptible de présenter un risque sanitaire ou pour l'environnement

Proposition n° 22 : Charger Santé publique France de mettre en ligne sur son site Internet une liste régulièrement actualisée de l'ensemble des sites dont la pollution des sols présente un risque avéré pour la santé et rappelant les mesures de gestion du risque sanitaire mises en oeuvre ou envisagées

Proposition n° 23 : Rendre obligatoire la mise en place par le préfet d'une commission de suivi de site pour tout site industriel ou minier, en activité ou en arrêt, présentant un risque avéré pour la santé

Proposition n° 24 : Rendre obligatoire la mise en place, au sein de chaque commission de suivi de site, d'un comité d'interface dédié à la gestion des risques sanitaires

Proposition n° 25 : Rendre obligatoire l'élaboration par le préfet d'un plan d'action détaillant les mesures de gestion des risques sanitaires pour chaque site pollué présentant un danger avéré pour la santé, soumis à l'avis des membres de la commission de suivi de site et faisant l'objet d'un bilan annuel de sa mise en oeuvre

Proposition n° 26 : Intégrer dans le plan communal de sauvegarde des communes comportant sur leur territoire un site recensé dans la base Basol un volet spécifique consacré à l'alerte, l'information, la protection et le soutien de la population en cas de risque de pollution industrielle ou minière des sols

Proposition n° 27 : Soutenir, notamment par l'attribution d'une subvention nationale, la constitution d'un réseau associatif de collectivités territoriales accueillant des sites pollués afin de favoriser le partage d'expériences et de bonnes pratiques dans la gestion des risques sanitaires et écologiques associés aux pollutions des sols

Proposition n° 28 : Fixer à l'ANSéS et l'Ineris une cible annuelle commune de co-construction de nouveaux choix de VTR pour des substances polluantes dont la toxicité est étayée par la littérature scientifique, validés par un comité d'experts commun à ces deux organismes

Proposition n° 29 : Mettre en place un programme national de surveillance de la présence de substances polluantes prioritaires susceptibles d'être présentes dans les sols élaboré au sein d'une conférence nationale biannuelle sur la prévention des risques liés à la pollution des sols

Proposition n° 30 : Créer des centres régionaux de santé environnementale chargés d'examiner les demandes d'évaluation de l'impact sanitaire d'expositions environnementales sur saisine du préfet, du directeur général de l'ARS ou d'un directeur de délégation départementale de l'ARS, d'élus locaux ou d'associations de riverains

Proposition n° 31 : Rendre obligatoire la transmission par le bureau d'études et par l'exploitant au préfet, à la Dreal et au directeur général de l'ARS toute information recueillie à l'occasion du contrôle d'une installation concluant à des risques sanitaires inacceptables et justifiant la mise en oeuvre par l'exploitant de mesures de gestion

Proposition n° 32 : Inscrire dans la loi la participation au financement des études d'imprégnation et des études épidémiologiques des exploitants dont l'activité est identifiée comme responsable, en tout ou partie, des expositions environnementales présentant un danger avéré pour la santé, le cas échéant via une assurance obligatoire pour dommages causés à des tiers

Proposition n° 33 : Prévoir l'inscription systématique dans le dossier médical partagé par tout professionnel de santé, sous réserve du consentement du patient ou de son responsable légal, de l'ensemble des données d'exposition environnementale à des substances polluantes

Proposition n° 34 : Créer des registres de cancers ou de malformations congénitales dans les départements pour lesquels une pollution a entraîné la présence dans les milieux de substances chimiques toxiques, notamment pour mieux évaluer l'impact sur la santé humaine d'effets cocktail

CINQUIÈME AXE :
AMÉLIORER LA PRÉVENTION ET LA RÉPARATION
DES PRÉJUDICES ÉCOLOGIQUES

Proposition n° 35 : Inscrire la prévention et la surveillance des risques d'atteinte à la biodiversité liés à la pollution des sols dans les missions de l'office français de la biodiversité

Proposition n° 36 : Intégrer l'impact sur la biosphère dans les dommages environnementaux potentiels associés à la pollution des sols dans la méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués et faire référence aux outils relevant de la démarche d'évaluation des risques pour les écosystèmes

Proposition n° 37 : Inclure la réparation des dommages environnementaux provoqués par des pollutions chroniques (non accidentelles) dans la constitution de garanties financières des exploitants d'installations classées et de sites miniers et examiner la faisabilité et les modalités de l'introduction dans la loi d'une obligation assurantielle pour les exploitants industriels en matière de dommages environnementaux

Proposition n° 38 : Étendre la responsabilité résiduelle d'un exploitant d'un site minier aux dommages environnementaux et à la pollution des sols

Proposition n° 39 : Inscrire dans la loi la possibilité pour l'Ademe de mettre en oeuvre des dispositifs d'indemnisation des préjudices environnementaux causés aux tiers liés à des pollutions des sols en cas de défaillance ou d'insuffisance des garanties de l'exploitant responsable

SIXIÈME AXE :
MOBILISER LES FRICHES INDUSTRIELLES ET MINIÈRES
DANS UNE DÉMARCHE D'AMÉNAGEMENT DURABLE

Proposition n° 40 : Introduire dans la loi la définition du statut de friche, en s'inspirant de la définition établie par le sous-groupe de travail national relatif à l'inventaire national des friches

Proposition n° 41 : Créer un réseau national des inventaires territoriaux de friches alimenté par les collectivités territoriales, les EPF et les EPFL et reposant sur un référentiel partagé informant notamment sur l'état environnemental des friches répertoriées

Proposition n° 42 : Favoriser le traitement des terres excavées au plus proche des sites dont elles sont extraites en assouplissant les conditions de sortie du statut de déchet, tout en définissant des conditions exigeantes de traçabilité et de responsabilité du traitement des pollutions

Proposition n° 43 : Élaborer un guide, validé par arrêté ministériel, des méthodes de valorisation hors site des terres excavées dans une logique d'économie circulaire, dans le cadre de projets d'aménagement ou d'infrastructures linéaires de transport, afin de préciser les critères de qualité auxquels doivent répondre les terres une fois traitées

Proposition n° 44 : Envisager la mise en place de mécanismes d'incitation fiscale en faveur des techniques de dépollution identifiées comme respectueuses de l'environnement

Proposition n° 45 : Autoriser dans la loi le transfert des responsabilités d'un tiers demandeur à un autre tiers demandeur, afin de favoriser le recours au dispositif par les aménageurs publics

Proposition n° 46 : Autoriser dans la loi l'État à étendre l'obligation de constitution de garanties financières aux ICPE soumises à déclaration, le cas échéant en adaptant le seuil réglementaire d'exemption afin de fixer le périmètre le plus adapté

Proposition n° 47 : Modifier les dispositions règlementaires relatives à la méthode de calcul des garanties financières afin d'intégrer dans ce calcul les opérations de réhabilitation qui incomberont à l'exploitant d'une IPCE au moment de la cessation d'activité

Proposition n° 48 : Renforcer la capacité d'analyse financière des Dreal afin d'assurer le respect des obligations en matière de garanties financières

Proposition n° 49 : Créer un fonds national dédié au financement de la réhabilitation des sites et sols pollués, géré par l'Ademe, pour les sites orphelins et les sites non-orphelins pour lesquels les garanties financières de l'exploitant ou la surface financière de la collectivité seraient insuffisantes pour couvrir le coût des opérations nécessaires à la protection de la sécurité et de la santé des populations et de l'environnement

Définir dans la loi les principaux critères d'éligibilité et de priorité des sites pollués à un financement par le fonds national de réhabilitation des sites et sols pollués

Asseoir le financement du fonds national de réhabilitation des sites et sols pollués sur une dotation budgétaire de l'État, complétée par l'affectation du produit des sommes acquittées par les pollueurs au titre des sanctions administratives, civiles ou pénales, et d'une fraction additionnelle de la taxe générale sur les activités polluantes

Proposition n° 50 : Instaurer des incitations fiscales à la réhabilitation des sites pollués, comme des exonérations temporaires, déductions partielles ou réductions de taux de certains impôts, notamment les droits de mutation à titre onéreux, la taxe d'aménagement ou la taxe foncière, en prévoyant une compensation par l'État de la perte de ressources fiscales encourue par les collectivités

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