II. L'AMÉLIORATION DURABLE DES CONDITIONS DE VIE DES MILITAIRES SUPPOSE DE POURSUIVRE L'EFFORT D'INVESTISSEMENT DANS LES INFRASTRUCTURES AU-DELÀ DU PLAN « FAMILLE »

A. LES CAPACITÉS D'HÉBERGEMENT ET DE LOGEMENT DES MILITAIRES SONT AUJOURD'HUI LIMITÉES PAR L'INADAPTATION DU PARC IMMOBILIER DE LA DÉFENSE

1. La politique d'hébergement et de logement fait partie de la condition militaire

L'hébergement , qui est un droit pour les militaires du rang, bénéficie également en priorité aux cadres célibataires ou célibataires géographiques. La politique interarmées de soutien en matière d'hébergement 13 ( * ) consacre la distinction entre d'une part le casernement (ou hébergement en caserne) qui bénéfice aux militaires du rang et aux volontaires et d'autre part l'hébergement strico sensu qui bénéficie en priorité aux cadres d'active célibataires ou célibataires géographiques.

Le casernement est à la fois un droit et une obligation 14 ( * ) pour les militaires du rang jusqu'au grade de caporal et les volontaires qui sont logés dans des infrastructures dites « de milieu » qui tiennent compte des spécificités propres à chaque armée.

L'hébergement stricto sensu est une possibilité pour les personnels civils et militaires du ministère des armées qui peuvent bénéficier sous certaines conditions d'un hébergement dans le domaine militaire, notamment au sein d'un « bâtiment cadre célibataire » (BCC). Eu égard à la saturation des bâtiments cadre célibataire, le ministère des armées met en oeuvre une priorité dans l'accès à l'hébergement pour les sous-officiers célibataires de moins de quinze ans de service, qui ne sont pas éligibles pour l'octroi d'un logement familial.

Critères de priorités d'attribution d'un hébergement hors Île-de-France

Source : HCECM, juin 2018, 12e rapport thématique, La vie des militaires et de leur famille selon le lieu d'affectation , p. 203

Le logement est une politique d'accompagnement dont l'objet est de compenser les sujétions liées à la condition militaire. L'octroi d'un logement dans le parc immobilier de la défense ne constitue pas un droit mais un service proposé sous condition aux personnels civils et militaires du ministère des armées. Il correspond à un double objectif de compensation des sujétions liées à la condition militaire et d'accompagnement social des personnels à revenu modeste du ministère. À ce titre, le ministère propose des locations à des conditions tarifaires qui bénéficient d'une décote par rapport au marché locatif privé d'environ 50% en Île-de-France et d'environ 30% en dehors de l'Île-de-France.

La politique de logement est complétée par un dispositif d'aide individuelle pour l'accession à la propriété . Parallèlement aux dispositifs d'hébergement et de logement susmentionnés, le ministère des armées a également mis en place un mécanisme de prêt d'accession à la propriété financé conjointement par l'institut de gestion sociale des armées (IGeSA) et l'établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique (EPFP) pour un montant d'au plus 25 000 euros, à taux zéro et remboursable sur quinze ans 15 ( * ) .

2. L'inadaptation du parc immobilier et la complexité de la chaîne de décision portent atteinte à l'efficacité de la politique de logement

L'enchevêtrement des acteurs intervenant dans la politique de logement des militaires nuit à sa lisibilité . À la différence de l'hébergement, la politique du logement fait intervenir une multitude d'acteurs du ministère des armées qui sont rattachés à la fois à l'état-major des armées (EMA) et au secrétariat général pour l'administration (SGA), responsable de la politique immobilière du ministère 16 ( * ) . Ainsi alors que l'attribution des logements 17 ( * ) , l'établissement du schéma directeur immobilier de la base de défense (SDIBdD) et la détermination des priorités en matière de travaux d'infrastructure relèvent des commandants de base de défense (ComBdD), placés sous l'autorité de la sous-chefferie performance de l'état-major des armées (EMA), le pilotage de l'utilisation optimale du parc, la concertation locale et la remontée d'informations sont assurés par chaque bureau du logement de base de défense (BLBdD), coordonnés par cinq 18 ( * ) bureaux régionaux du logement (BRL), qui appliquent les directives de la sous-direction du logement placé dans le périmètre du secrétariat général pour l'administration (SGA), et qui étaient, jusqu'au 1 er janvier 2021, organiquement rattachés aux groupements de soutien de base de défense (GSBdD) 19 ( * ) .

La complexité de la chaîne de décision en matière de logement dans les armées a plusieurs conséquences qui nuisent autant à la condition des soldats qu'à l'efficacité de cette politique. En premier lieu, cette organisation court le risque de créer un sentiment d'éloignement du point de vue des militaires. Le déploiement, à partir de la fin du mois de novembre 2021, d'un système d'information dédié au logement dénommé « ATRIUM » qui permettra notamment de dématérialiser le dépôt de dossier des demandeurs tente d'y répondre. En second lieu, l'organisation actuelle laisse peu de place aux autorités des trois armées (commandements de régiments, de bases ou d'unités isolées) pour faire valoir leur point de vue en matière de logement . L'association effective des autorités militaires locales à la mise en oeuvre de la politique de logement constitue de ce fait un levier d'amélioration de l'efficacité de cette politique .

Le parc immobilier de la défense n'est pas adapté aux besoins des militaires. Le parc immobilier de la défense est constitué d'un total de 43 158 logements au 31 décembre 2020 qui se décomposent en trois catégories de logements. En premier lieu, le parc domanial (27% du parc global) constitué de logements appartenant à l'État, mais pour une partie desquels la gestion a été externalisée. En deuxième lieu, les logements réservés par convention (65% du parc global) qui n'appartiennent pas à l'État, mais pour lesquels le ministère bénéficie d'une priorité de réservation définie par convention.

En dépit d'une demande importante des personnels du ministère qui excède l'offre de logements, l'ensemble des logements du parc ne sont pas disponibles à la location : les logements en cours de cession et ceux rendus aux bailleurs lorsque le ministère n'a pas été en mesure de proposer un locataire dans le temps imparti sont exclus du « parc utile » qui ne représentait au 31 décembre 2020 que 81% du parc global du ministère soit 34 774 logements.

Cette utilisation sous-optimale du parc du ministère s'explique en grande partie par l'inadaptation de l'offre actuelle par rapport aux demandes formulées par les militaires et leur famille au regard de l'évolution des structures familiales et des standards de confort dans la société civile. Cette inadaptation se traduit par un taux de réalisation 20 ( * ) de seulement 58% en 2020.

logements dans le parc global du ministère des armées

du parc est disponible à la location

des demandes de logement aboutissent


* 13 v. lettre n°D-16-006111/DEF/EMA/PERF/PILSTRAT/NP du 9 juin 2016

* 14 v. instruction n°201710/DEF/SGA/DFP/FM/1 du 4 novembre 2005

* 15 v. circulaire n°43/ARM/SGA/DRH-MD du 22 décembre 2017

* 16 v. art. 2 4° du décret n°2009-870 du 15 juillet 2009 relatif aux attributions du délégué général pour l'armement et du secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense

* 17 v. art. R. 5131-11 du code de la défense

* 18 Situés à Bordeaux, Lyon, Metz, Rennes et Toulon.

* 19 À compter du 1 er janvier 2021, les BLBdD sont rattachés à la sous-direction du logement de la direction du patrimoine, de la mémoire et des archives (DPMA) du secrétariat général pour l'administration (SGA).

* 20 Rapport entre le nombre de logements attribués et le nombre de demandes reçues

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page