II. CONSOLIDER LA SOUVERAINETÉ MARITIME POUR CRÉDIBILISER LES AMBITIONS FRANÇAISES

1. Sécuriser le périmètre de souveraineté face à la multiplication des menaces en mer
a) Faire respecter la souveraineté française face aux revendications étrangères
(1) Un droit de la mer issu de la Convention de Montego Bay de 1982

Si la souveraineté française sur ses espaces maritimes est juridiquement bien établie grâce au droit de la mer établi par la Convention de Montego Bay, des contestations et des violations persistent.

La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, dite Convention de Montego Bay, fonde le droit de la mer en posant le cadre juridique des mers et des océans. Ratifié en 1996 par la France, ce traité international rassemble aujourd'hui 168 États membres.

La Convention précise les différentes catégories d'espaces maritimes sur lesquels les États côtiers peuvent revendiquer leur souveraineté :

- Les eaux intérieures peuvent s'étendre jusqu'à 12 milles nautiques (22 km), prolongés sur 12 autres milles nautiques par une « zone contiguë ». Les États côtiers jouissent d'une souveraineté sur leur mer territoriale. Les navires et aéronefs de tous pays bénéficient d'un « droit de passage inoffensif ».

- La zone économique exclusive (ZEE) peut s'étendre jusqu'à 200 milles nautiques (370 km) du rivage. L'État côtier y dispose de droits souverains en matière d'exploration, d'exploitation, de gestion et de conservation des ressources naturelles des eaux, des fonds marins et de leur sous-sol.

- Un plateau continental étendu pouvant aller jusqu'à 350 milles nautiques peut également être reconnu à l'État côtier. Ce dernier peut y mener des activités d'exploration et d'exploitation des ressources naturelles mais doit également partager le plateau avec tout autre État, côtier ou non, souhaitant exercer des activités dans le cadre des libertés de la haute mer.

Schéma simplifié du droit de la mer

Source : Ministère des outre-mer

On l'a vu, grâce à la reconnaissance des ZEE par la Convention de Montego Bay, la France dispose de la deuxième zone économique exclusive du monde. Des domaines émergés modestes permettent de disposer de ZEE immenses. Ainsi, la Polynésie française, constituée de plusieurs archipels, lui permet de détenir une ZEE plus vaste que l'Union européenne.

(2) Des contestations de souveraineté maritime qui fragilisent la position française

Près d'une trentaine de désaccords internationaux sur la délimitation des ZEE persistent et font l'objet de discussions 51 ( * ) .

Dans l'océan Indien, l'archipel des Comores revendique toujours la souveraineté sur Mayotte, Madagascar continue de porter des visées sur les îles Éparses dans le canal du Mozambique 52 ( * ) et l'île Maurice sur Tromelin. Dans l'océan Pacifique, on peut noter les revendications du Mexique sur l'île de La Passion-Clipperton - ou tout au moins les ressources de sa ZEE - et du Vanuatu sur les îlots de Matthew et Hunter . Plus anecdotique, un différend oppose dans les Antilles Saint-Martin à son voisin hollandais Sint-Maarten sur la délimitation de la zone de l'étang aux Huîtres .

Face à ces contestations, la France a adopté une attitude parfois trop conciliante, privilégiant des négociations qui ont pu apparaître comme des reculs en matière de souveraineté française . Ce fut ainsi le cas en 2010 avec la signature avec l'île Maurice d'un traité de cogestion sur Tromelin , instituant un partage en matière de gestion de l'environnement, de la pêche, de la météorologie et de l'archéologie. Ce traité n'a cependant pas été ratifié par le Parlement français , le projet de loi portant approbation de la ratification de l'accord ayant été retiré par deux fois (en 2013 et en 2017) de l'ordre du jour, à l'initiative de notre rapporteur Philippe Folliot, avec à l'époque le soutien de collègues députés de toutes sensibilités dont Laurent Furst (UMP) et Gilbert Le Bris (PS). Une fronde a été menée contre ce traité jugé inique et déséquilibré.

À Madagascar, le Président de la République Emmanuel Macron a semblé en 2019 s'engager sur une démarche similaire à celle du traité de cogestion de Tromelin, en initiant une commission mixte sur les îles Éparses , ayant pour mission d'aboutir à un accord sur l'avenir de ces îles avant le 26 juin 2020, date anniversaire de l'indépendance de Madagascar. Cependant, comme notre rapporteur Philippe Folliot a veillé à le vérifier, ces négociations n'ont pas abouti et la commission mixte semble aujourd'hui en sommeil. Cette mission n'a, par ailleurs, pas empêché la création d'une réserve naturelle nationale des Glorieuses , créée par décret en juin 2021 et que le Président de la République avait visitée en octobre 2019.

Il n'en est pas de même pour l'île de La Passion-Clipperton , où la signature en 2007 d'un accord avec le Mexique octroyant à titre gracieux à ce pays des facilités de pêche conduit de fait à une remise en cause de la souveraineté française. Aucune contrepartie n'est mentionnée et l'accord permet aux navires mexicains de pêcher sans limites à condition de déclarer les prises , alors que les accords de pêche fixent habituellement des quotas et définissent les types de navires autorisés à exploiter les ressources 53 ( * ) . Or, l'affirmation de la pleine souveraineté de la France sur l'île de La Passion-Clipperton permettrait aux autorités françaises de demander l'extension de son plateau continental. Cette demande d'extension a été déposée en mai 2009 et retirée trois jours plus tard ! Le renouvellement en catimini en 2017 de cet accord au mépris des recommandations du rapport du parlementaire en mission désigné par le Gouvernement 54 ( * ) en dit long sur le désintérêt de notre pays sur cette île et sa ZEE.

Si Annick Girardin, ministre de la mer, assure que la méthode portée par la France est « celle d'une fermeté sur notre souveraineté , mais d'un bon voisinage sur le partage des ressources et sur la responsabilité en matière de protection de l'environnement » 55 ( * ) , force est de constater que des contestations de souveraineté maritime perdurent et que les réponses de la France face à celles-ci ne sont pas toujours aussi fermes qu'elles le devraient.

Pour chacun des territoires ultramarins, la France ne doit pas transiger en matière de souveraineté .

b) Une multiplication des menaces en mer
(1) Une explosion de la pêche illégale et du narcotrafic

Outre ces contestations d'États étrangers qui perdurent, les espaces maritimes ultramarins sont aussi confrontés à des menaces en mer qui se multiplient et dont le niveau de violence s'intensifie.

La pêche illégale notamment constitue une menace croissante dans le domaine maritime ultramarin, tout particulièrement dans les ZEE des Antilles et de la Guyane.

L'intensification du phénomène de pêche illégale est tout particulièrement marquée en Guyane. Roger Aron, vice-président de la collectivité territoriale de Guyane, en charge de l'agriculture, de la pêche et de la souveraineté alimentaire, note que la collectivité « se sent dépouillée par ceux qui viennent se servir sur son territoire » et constate que « la France n'assure pas sa souveraineté sur le respect des zones maritimes » 56 ( * ) . Une importante campagne de pêche illégale a par ailleurs été menée en 2017 dans les eaux de la Nouvelle-Calédonie par une flottille de bateaux de pêche vietnamiens, ou « blue boats », pêchant en zones peu profondes, récupérant des espèces à haute valeur (holothuries en priorité pour le marché chinois, trocas, langoustes et crustacés). Les autres territoires ultramarins semblent relativement préservés par ces campagnes de pêche illégale.

Ces pratiques de pêche illégale sont de plus en plus agressives . Denis Robin, Secrétaire général de la mer, note ainsi une « augmentation significative de la violence lors de ces opérations de contrôle (...). La Marine nationale et les douanes doivent faire face à des déchaînements de violence , se traduisant par des jets d'engins lourds et contondants, ou l'aspersion de produits inflammables ». Aland Soudine, président du comité régional des pêches confirme que les pêcheurs guyanais « ont peur : des bateaux ont été braqués puis laissés à la dérive, les marins ligotés à bord » 57 ( * ) . Face à ce niveau de violences, Denis Robin reconnaît la nécessité de mobiliser « des profils de type commando-fusilier sur ces contrôles ». Sophie Brocas, directrice générale des outre-mer, assure quant à elle que « ces interventions peuvent être qualifiées d'« opérations de guerre ».

Le narcotrafic est également en forte progression dans les eaux des Antilles et de la Guyane. Le trafic de cocaïne en provenance d'Amérique du Sud transite dans ces zones. La Marine nationale y a ainsi saisi plus de 31 tonnes de drogue en 2021 contre une moyenne de 18 tonnes les années précédentes 58 ( * ) . Si le narcotrafic le long des côtes est-africaines préserve pour l'instant La Réunion, la Marine nationale assure veiller à ce qu'il ne s'y propage pas, comme c'est déjà le cas pour les Seychelles 59 ( * ) .

Enjeux géopolitiques des océans

Source : Marine nationale

(2) Des rivalités navales croissantes entre États

Les territoires ultramarins doivent également faire face à la recrudescence de tensions navales , particulièrement active dans la zone indopacifique . On y observe un phénomène de réarmement naval . Yann Briand, chargé du bureau stratégie et politique au cabinet du chef d'État-major de la Marine, souligne ainsi qu' « entre 2008 et 2030, le tonnage de la marine chinoise devrait augmenter de 138 % ». L'ensemble des marines de la zone suit cette tendance, ce réarmement se constatant à la fois pour Singapour et pour l'Australie. Il s'agit pour la Marine nationale « d'un signe assez inquiétant » démontrant que ces marines « sentent une menace arriver » 60 ( * ) .

Les outre-mer français se trouvent au centre des tensions géopolitiques puisque comme l'indique Élie Tenenbaum, directeur du centre des études de sécurité à l'Institut français des relations internationales (IFRI), « 5 des 7 pays émergents les plus avancés se trouvent dans les aires régionales immédiates de nos départements, régions et collectivités d'outre-mer » 61 ( * ) .

La France voit par ailleurs ses territoires et ses espaces maritimes devenir des lieux de convoitise et de contestation . Au-delà de l'île de La Passion-Clipperton, les fonds océaniques de Nouvelle-Calédonie revêtent notamment une importance stratégique, puisqu'ils recèlent des métaux rares contenus par exemple dans les nodules polymétalliques, qui pourraient bientôt être exploités par des opérateurs économiques. Comme le souligne Yann Briand, « le fait géopolitique et l'émergence de nouvelles puissances en mer occasionnent une sollicitation croissante (de la Marine) dans de nombreux endroits ». Or, « les outre-mer sont particulièrement fragiles face à ces menaces ».

Des rivalités pourraient également naître autour de l'Arctique et des nouvelles routes maritimes qui devraient s'ouvrir avec la fonte des glaces 62 ( * ) . Cette ouverture de l'Arctique induit de nouvelles dynamiques de développement de flux maritime et portuaire, qui pourraient notamment concerner Saint-Pierre-et-Miquelon.

(3) Des actions de piraterie qui s'intensifient

Autrefois très présentes dans les Caraïbes, les opérations de piraterie sont désormais davantage concentrées dans l'océan Indien , particulièrement en forte progression dans le golfe d'Aden . La piraterie est également très présente dans les détroits de Malacca et de Singapour , situés entre les océans Indien et Pacifique. Ces deux détroits, véritables « autoroutes maritimes mondiales » 63 ( * ) sont empruntés chaque année par plus de 120 000 navires, représentant un tiers du commerce mondial.

Si cette piraterie ne concerne pas directement les zones économiques exclusives ultramarines 64 ( * ) , elle menace le trafic maritime à destination des outre-mer et conduit à mobiliser d'importantes forces de la Marine nationale .

La France participe depuis 2008 à l'opération Atalante menée par l'Union européenne au large de la Somalie. Ces opérations de sécurisation semblent aujourd'hui porter leurs fruits. La Marine nationale précise ainsi que les primes d'assurances des navires transitant dans la zone, qui avaient été multipliées par trois ou quatre entre 2009 et 2012, ont pu être ramenées à des « niveaux raisonnables ».

(4) La cyber warfare

Outre les menaces actuelles, les territoires ultramarins seront probablement de plus en plus confrontés à un nouveau domaine de lutte : la cyber warfare . Les fonds sous-marins sont traversés par des câbles sous-marins, par lesquels transitent plus de 95 % des données mondiales.

La protection de ces câbles est un enjeu d'avenir, des États comme la Russie 65 ( * ) ayant désormais la capacité d'intervenir sur ces câbles, de les couper, de les endommager voire de les espionner . Le défi de la sécurisation de ces câbles oblige notamment à développer des capacités pour intervenir sur des profondeurs allant jusqu'à 6 000 mètres.

Canal du Mozambique : nouvelle mer du Nord ?

Bras de mer de l'océan Indien de près de 1 600 km de long , le canal du Mozambique est fragmenté par une multitude d'îles qui le compose et le sépare du reste du continent africain, concentrant des intérêts géostratégiques grandissants.

Route maritime majeure de l'océan Indien où transitent notamment 30 % de la production mondiale de pétrole, le canal du Mozambique renferme également des réserves considérables de gaz naturel exploitable et de pétrole , découvertes au début des années 2000. Selon une étude du United States Geological Survey (USGS), les réserves de pétrole ont été évaluées entre 6 à 12 milliards de barils et celle de gaz à plus de 500 milliards de m 3 , faisant du Canal du Mozambique une future « mer du Nord ».

Ce potentiel énergétique accentue les risques de tensions régionales et suscite les convoitises d'États étrangers . La Chine a réalisé des études sismiques dans cette zone et la Russie soutient officiellement les revendications malgaches sur les îles Éparses. La France bénéficie d'une position très privilégiée dans la région grâce à Mayotte et aux îles Éparses . Chacun de ces territoires confère à la France une zone économique exclusive (ZEE) importante dans le canal du Mozambique et donc des droits d'exploitation sur les ressources qui s'y trouvent.

S'il y a du « gaz dans l'eau » 66 ( * ) entre la France et ses voisins de l'océan Indien, la loi du 30 décembre 2017, dite loi Hulot, a mis fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation d'hydrocarbures . Le Gouvernement a donc refusé de prolonger le permis d'exploration au large de l'île de Juan de Nova, alors que la loi d'interdiction ne concernait que de nouveaux permis, entérinant la fin des travaux de forage et donc l'abandon de la perspective de connaître les quantités et l'exploitabilité de ses ressources. La Commission européenne a toutefois accordé en février 2022 un label « vert » au gaz , reconnaissant, sous certaines conditions, sa contribution à la lutte contre le changement climatique.

Proposition n° 12 : Renouveler le permis d'exploration et reprendre les recherches gazières au large de Juan de Nova.

2. Disposer des moyens de surveillance et de protection de ce domaine à la hauteur des enjeux

Alors même que les menaces en mer sont croissants, plaçant les outre-mer au centre des enjeux géopolitiques, les forces de souveraineté outre-mer restent sous-dimensionnées , devant faire face à des ruptures capacitaires jusqu'en 2025 .

a) Grâce aux forces outre-mer, la France dans le club restreint des États disposant d'une présence militaire globale
(1) Une présence militaire globale

Les forces militaires déployées dans les territoires d'outre-mer sont désignées comme des « forces de souveraineté » et représentent aujourd'hui 7 150 hommes et femmes , complétées par des forces occasionnelles venues d'Hexagone. Ces forces prépositionnées, interarmées et à dominante marine se répartissent en cinq forces armées régionales :

- les Forces armées aux Antilles ( FAA ), composées de 1 000 militaires ;

- les Forces armées en Guyane ( FAG) , composées de 2 100 militaires ;

- les Forces armées dans la zone sud de l'océan Indien ( FAZSOI ), composées de 1 700 militaires ;

- les Forces armées en Nouvelle-Calédonie ( FANC ), composées de 1 450 militaires ;

- les Forces armées en Polynésie française ( FAPF ), composées de 900 militaires.

Grâce à ses forces outre-mer, la France dispose d'une présence militaire globale , appartenant ainsi à un club très restreint , davantage même que celui des puissances nucléaires. La France figure aujourd'hui à la troisième place de club, derrière les États-Unis et la Russie mais devant le Royaume-Uni.

La force du dispositif français réside dans son ancrage territorial et souverain , par définition inaliénable et donc non soumis aux aléas d'un accord de défense avec un État étranger susceptible d'être dénoncé. Comme le précise en termes élogieux la Revue stratégique de défense et de sécurité de 2017, ce dispositif, présenté comme « à la fois rare et envié », offre à la France des « plateformes sûres de projection de puissance partout dans le monde et la possibilité de se redéployer militairement au gré de l'évolution de la situation stratégique ».

Carte des forces de souveraineté déployées outre-mer

Source : Ministère des armées

(2) Cinq missions stratégiques confiées aux forces de souveraineté

Ces forces de souveraineté remplissent 5 fonctions stratégiques , définies par les différents Livres Blancs et par la Revue stratégique de défense et de sécurité :

- la protection du territoire national : celle-ci consiste à la fois en une protection de la souveraineté territoriale (dans des zones contestées) et économique (action notamment contre la pêche illégale) que de certaines emprises stratégiques (comme le centre spatial guyanais de Kourou) ;

- la prévention des conflits : depuis les territoires ultramarins, les forces de souveraineté rayonnent sur l'ensemble des zones de responsabilité permanente (ZRP). Ainsi, les FAZSOI agissent également en coopération avec la Southern African Development Community (SADC) et les FAPF sur l'ensemble du Pacifique ;

- la connaissance et l'anticipation : les forces de souveraineté outre-mer permettent d'assurer l'observation de zones souvent mal suivies (cas par exemple des FASZOI sur les évolutions des mouvements djihadistes au Mozambique ou des FAA pour la zone Caraïbe) ;

- l' intervention : les forces de souveraineté y sont notamment associées via les opérations de soutien et d'assistance aux populations, comme à la suite du cyclone Dorian en 2019 et de l'ouragan Irma en 2017. Cette fonction concerne également les exercices effectués en zone indopacifique tels que l'exercice Croix du Sud en Nouvelle-Calédonie.

- de dissuasion : malgré la fermeture du centre d'expérimentation du Pacifique, cette fonction stratégique est toujours assurée, les forces aériennes ayant ainsi participé en 2021 à l'exercice Heifara-Wakea, exercice de projection depuis l'hexagone de Rafales dans le ciel polynésien puis à Hawaï.

Ensemble des forces navales de la Marine nationale

Source : Marine nationale

b) Un dispositif taillé au plus juste et des ruptures de capacité navale jusqu'en 2025
(1) Les forces outre-mer placées au bas de la liste des priorités

Si la France bénéficie d'un dispositif de poids grâce à ses forces outre-mer, celles-ci ont pourtant été systématiquement placées au bas de la liste des priorités des armées, avec des effectifs en décroissance presque continue depuis la fin de la guerre froide.

Les forces armées en outre-mer ont fait l'objet d'un sous-dimensionnement important depuis le milieu des années 2000. Le Livre blanc de 2008 prévoyait ainsi une « réduction du volume (des) forces militaires stationnées dans les départements et collectivités d'outre-mer, afin d'y conserver les moyens strictement nécessaires aux missions militaires ». Les effectifs des forces de souveraineté sont passés de 8 700 à 7 150 entre 2008 et 2018 , avec une proportion croissante de personnels « tournants » détachés pour quelques mois 67 ( * ) . Et ce, alors que sur la dernière partie de cette période, les effectifs globaux de nos forces armées progressaient.

Le Livre blanc de 2013 dresse le constat d'un « risque important de rupture capacitaire qui pourrait entraîner l'État à ne plus pouvoir remplir de façon appropriée l'ensemble des missions qui lui incombent dans les outre-mer » et appelle à ce que le dispositif militaire implanté dans les outre-mer soit « dimensionné pour tenir compte des problèmes de sécurité et de défense de chaque territoire ».

En 2017, la Revue stratégique de défense et de sécurité nationale affiche une nouvelle ambition française face aux enjeux que représentent les territoires d'outre-mer et l'immensité de la ZEE en réclamant un effort en direction du dispositif prépositionné . L'intention sera reprise dans la Loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 qui prévoit pour les forces prépositionnées « des effectifs suffisants et des équipements adéquats ».

Comme le rappelle Élie Tenenbaum, le dispositif des forces de souveraineté outre-mer est « aujourd'hui taillé au plus juste , encore davantage que pour le reste des armées. Il peine à remplir ses contrats opérationnels et son renouvellement, à périmètre de missions constant, n'est nullement garanti à l'horizon 2030 ». Face aux nombreux défis de ces armées, « croire que, dans le monde de 2030, nous pourrons effectuer, avec autant - voire moins - de moyens, ce que nous pouvions faire en 1980 parait présomptueux ».

Indispensables au respect de la souveraineté française et au coeur des conflits à venir, les forces de souveraineté présentes outre-mer sont aujourd'hui largement sous-dimensionnées .

La loi de programmation militaire 2019-2025 devrait être actualisée afin de rééquilibrer les forces pour retrouver un socle de capacités indispensables mais également pour moderniser et adapter ces forces aux nouvelles menaces.

Proposition n° 13 : Faire des outre-mer la priorité de l'actualisation de la Loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025.

(2) Un programme de désarmement des P400 amenant à des ruptures temporaires de capacité jusqu'en 2025

La réorganisation des forces de souveraineté engagée par les LPM de 2009 et 2013 a notamment conduit à une perte de capacités en matière de patrouilleurs , suite au désarmement progressif des P400.

Mises en service entre 1987 et 1988, les 10 unités de patrouilleurs P400 avaient été positionnées dans les territoires d'outre-mer où elles conduisaient des missions de surveillance et de sécurisation des ZEE . Entre 2009 68 ( * ) et 2020, 9 des 10 patrouilleurs P400 de la Marine nationale ont progressivement été désarmés . Après le retrait du P400 « La Moqueuse » en juin 2020, le dernier P400 opérationnel est le bâtiment « La Glorieuse » dont le port d'attache est à Nouméa et dont le désarmement est prévu pour 2022.

Le programme BATSIMAR (Bateaux de surveillance et d'intervention maritime) mis en place pour remplacer les P400 a été engagé avec retard pour des raisons budgétaires, ayant été repoussé à deux reprises en 2009 et 2014. Des ruptures de capacité sont donc apparues, que la loi de programmation militaire 2014-2019 a visé à compenser. Trois Patrouilleurs Antilles-Guyane (PAG) 69 ( * ) ont été déployés et mis en service à partir de 2017 70 ( * ) . Deux de ces patrouilleurs sont basés en Guyane, et le troisième en Martinique. Quatre bâtiments de soutien et d'assistance outre-mer (BSAOM) 71 ( * ) , ayant aussi vocation à participer aux missions de souveraineté outre-mer, ont été commandés en 2013 et le premier bâtiment a été mis en service en 2016 en Nouvelle-Calédonie. Ces 4 BSAOM sont basés comme suit : 1 en Martinique, 1 à La Réunion, 1 en Nouvelle-Calédonie et 1 en Polynésie française.

En novembre 2019 , le Président de la République Emmanuel Macron, lors des Assises de l'économie de la mer, a annoncé la commande de six patrouilleurs outre-mer (POM) 72 ( * ) , destinés à remplacer les P400. Leur livraison est prévue à partir de la fin 2022 , avec une unité mise en service chaque année. Deux POM seront basés à Nouméa, deux POM à Tahiti et les deux POM restant à La Réunion.

Les livraisons de POM s'étalant entre fin 2022 et 2025, il existe donc des ruptures temporaires de capacités en matière de patrouilleurs déployés outre-mer au moins jusqu'en 2025 .

Ce trou capacitaire est particulièrement inquiétant, les forces étant ainsi vulnérables jusqu'en 2025. Le nombre de patrouilleurs destinés à assurer la protection de la ZEE française est aujourd'hui à peu près équivalent à deux voitures de police surveillant l'ensemble du territoire métropolitain 73 ( * ) . Yann Briand, membre du cabinet du chef d'état-major de la Marine, reconnaît qu'« avec un matériel vieillissant et certainement trop peu nombreux , c'est un vrai défi pour nous de pouvoir intervenir et de maîtriser toutes ces zones qui, sans contrôle, sont pillées » 74 ( * ) .

Par ailleurs, il convient de s'assurer que les POM livrés en 2025 puissent s'adapter au gré des standards et des besoins à l'horizon 2035 , voire 2050 puisque le renouvellement ne semble s'effectuer que tous les 40 ans. Au vu des menaces, le remplacement un pour un ne paraît par ailleurs pas aujourd'hui suffisant, rendant nécessaire la livraison de patrouilleurs supplémentaires par point d'appui.

Enfin, la dronisation offre des opportunités intéressantes - et relativement peu coûteuses - pour renforcer les capacités de surveillance maritime. Il s'agit de ne pas perdre la course technologique en cours, alors que la France semble aujourd'hui prendre du retard. Comme le précise Yann Briand, « même des nations telles que la Turquie maîtrisent parfaitement l'emploi des drones. Nous en sommes très loin . Nous avons pour objectif d'avoir un drone par bâtiment . Nous ne sommes pas à ce rendez-vous » 75 ( * ) .

Proposition n° 14 : Prévoir la livraison d'un patrouilleur supplémentaire pour chacune des forces outre-mer lors de la prochaine loi de programmation militaire.

Proposition n° 15 : Coupler la livraison des patrouilleurs outre-mer (POM) par la mise en service de drones de surface pour sillonner la ZEE.

(3) Une perte des capacités amphibies et hauturières dans les bâtiments de soutien et d'assistance outre-mer (BSAOM)

S'agissant des moyens d'assistance et de soutien , les bâtiments de transport léger ( BATRAL ) de classe Champlain ont été remplacés par les bâtiments de soutien et d'assistance outre-mer (BSAOM) . Cette évolution a permis de disposer de fonctionnalités nouvelles : moyens de communication et de navigation, capacité de remorquage, grue de levage, etc.

Cependant, outre le passage de cinq à quatre bâtiments, les BSAOM ont perdu les capacités amphibies et hauturières dont disposaient les BATRAL. Ces capacités sont pourtant particulièrement utiles en cas d'intervention lors de catastrophes naturelles.

Par ailleurs, la mise en place des BSAOM s'est accompagnée d'une diminution par deux des capacités de transport . La capacité d'emport est de 60 personnes pour le BSAOM contre 130 hommes et 12 véhicules pour le BATRAL.

La mise en service des BATRAL constitue donc une rupture de capacité qui ne dit pas son nom , la disparition d'une capacité amphibie basique et immédiatement disponible intra-théâtre outre-mer posant de nombreux problèmes logistiques. Le rétablissement de ces capacités amphibies est aujourd'hui primordial. Si la reconstitution de bâtiments sur le modèle des BATRAL paraît difficile, il pourrait être utile de développer des hydroglisseurs , sur le modèle de ceux dont s'est dotée la marine japonaise.

Proposition n° 16 : Rétablir des capacités amphibies pour les forces navales outre-mer en acquérant des hydroglisseurs, sur le modèle de ceux développés par la marine japonaise.

c) Un nécessaire rééquilibrage des moyens pour renforcer la capacité d'intervention régionale depuis les bassins océaniques
(1) Une surveillance satellitaire ne pouvant compenser la faiblesse des moyens humains

La surveillance satellitaire , souvent présentée comme un moyen de compenser la faiblesse des ressources capacitaires , peut aujourd'hui se révéler inefficace. Développée de manière massive par la Marine nationale depuis 2013, cette surveillance permet de recueillir des informations pour contrôler les zones maritimes. Des données peuvent être obtenues par le biais des satellites AIS ( Automatic identification system ), de satellites radar ou encore de satellites optiques.

Si ces systèmes, en amélioration constante 76 ( * ) , permettent aujourd'hui de détecter des navires et de les identifier en quasi-temps réel offrant de véritables potentiels de surveillance à la Marine nationale, notamment en matière de pêche illégale et de narcotrafic, encore faut-il que les tous les navires soient dotés de ces balises AIS ou les activent effectivement . Une récente étude menée dans le cadre du projet Ocean Sentinel 77 ( * ) a d'ailleurs montré que plus d'un tiers des navires de pêche présents dans les eaux internationales de l'océan Austral n'étaient pas équipés d'AIS et donc non déclarés.

Le rapporteur Philippe Folliot indiquait d'ailleurs lors de l'audition d'Annick Girardin, ministre de la mer, que la frégate « Le Prairial » avait croisé, lors de son passage sur l'île de La Passion-Clipperton, un senneur mexicain dans la ZEE française « avec un emport de 1 200 tonnes de thon, qui avait désactivé sa balise AIS et ne pouvait donc pas être capté et suivi par satellite. L'absence connue de moyens humains et navals sur place ouvre la porte à de tels actes, totalement contraires au traité concernant la pêche avec le Mexique » 78 ( * ) .

Face à l'immensité de la zone maritime française, la surveillance satellitaire constitue un outil précieux mais ne remplace pas la présence sur le terrain . Le renforcement des moyens humains et navals tout comme le développement d'innovations comme ceux développés par Ocean Sentinel 79 ( * ) devront être soutenus pour assurer une meilleure surveillance de la ZEE française .

(2) Des infrastructures à développer pour disposer de capacités de projection

Les infrastructures navales jouent un rôle indispensable pour assurer ces missions de protection et disposer de capacités de projection. Élie Tenenbaum mentionne ainsi le dock flottant de Papeete , construit en 1975, que la Marine nationale espère maintenir jusqu'en 2030. Ce dock, exploité par la Marine, permet l'entretien à la fois de bâtiments militaires et de navires civils, grâce à une convention avec la Chambre de commerce de Polynésie française. Mais cette infrastructure est aujourd'hui limitée en termes de tonnage et de tirant d'eau des navires (limitation aux navires de 3 800 tonnes).

Comme le mentionne l'amiral Jean-Mathieu Rey, le déploiement en outre-mer de moyens militaires venus de l'Hexagone nécessite « un entretien et des infrastructures très pointues . Nous avons la capacité de déployer des frégates ou des avions de chasse loin des bases principales métropolitaines, mais ils doivent par moment y retourner, sauf à créer de nouvelles infrastructures permettant d'assurer leur maintenance et leur soutien. Mais ces investissements lourds ne sont pas à l'ordre du jour » 80 ( * ) .

Élie Tenenbaum note également que « l'absence d'infrastructures satisfaisantes bloque aujourd'hui le déploiement permanent de frégates de premier rang ou d'avions de combat dans le dispositif. Baser des avions Rafale en Polynésie française demanderait une infrastructure et des capacités de soutien ». Ces infrastructures exigeraient d'importants investissements, qui permettraient une valorisation économique des territoires, amenant des compétences techniques et industrielles. Le déploiement de nouveaux moyens militaires imposerait ainsi une mise à niveau des infrastructures .

(3) Rééquilibrer les moyens pour assurer des missions plus régulières et préparer les forces à horizon 2035

La surveillance régulière des zones maritimes ultramarines paraît par endroit défaillante. La collectivité de Saint-Barthélemy estime ainsi que son espace maritime est trop peu contrôlé et rappelle que la gendarmerie ne dispose que d'un navire pour les deux îles du Nord 81 ( * ) . Surtout, les moyens aériens sont faibles : aucun hélicoptère n'est basé sur les îles du Nord et la disponibilité d'un hélicoptère provenant de Guadeloupe est plus qu'aléatoire.

Proposition n° 17 : Baser un hélicoptère polyvalent (armée, gendarmerie, douanes, sécurité civile) à Saint-Martin pour les îles du Nord.

Les passages pour assurer la souveraineté de la France sur l'île de La Passion-Clipperton restent également trop irréguliers . L'amiral Jean-Mathieu Rey assure que la Marine nationale se rend à La Passion-Clipperton « toutes les années et demie » et reconnaît qu'« il serait préférable de nous y rendre chaque année » 82 ( * ) .

La ZEE liée à ce territoire est de 434 000 km 2 , soit davantage que la seule ZEE de l'Hexagone (345 000 km 2 ). Une aire marine protégée a été instaurée dans les 12 milles nautiques autour de l'île. La loi du 21 février 2022, dite loi 3DS 83 ( * ) , a par ailleurs prévu la création d'un conseil consultatif de l'île de La Passion-Clipperton, chargé d'assister le ministre des outre-mer, sur le modèle du conseil consultatif des TAAF.

La particularité de cette île est son extrême éloignement des territoires français , l'île de La Passion-Clipperton se trouvant ainsi à plus de 5 000 km de la Polynésie française. Cet isolement empêche de mener des recherches scientifiques en continu , alors même que son positionnement offre des opportunités pour mieux comprendre les relations océan-atmosphère et le changement climatique dans le Pacifique-nord-oriental. Dans son rapport remis en 2016 au Gouvernement 84 ( * ) , le rapporteur Philippe Folliot recommandait dès lors d'installer une station scientifique française sur l'île de La Passion-Clipperton, qui serait ouverte à la communauté internationale. Alors que les réseaux et laboratoires de recherches disposent de données pour le Pacifique-Sud 85 ( * ) , la création d'une base scientifique sur l'île de La Passion-Clipperton permettrait de compléter utilement les connaissances.

Proposition n° 18 : Rendre obligatoire dans le contrat opérationnel des armées un passage avec débarquement, a minima une fois par an, sur l'île de La Passion-Clipperton et lancer des études en vue de la construction d'une base scientifique.

Un enjeu tout particulier concerne les six frégates de surveillance de classe Floréal 86 ( * ) qui doivent être renouvelées à l'horizon 2035 . L'objectif est de disposer de bâtiments plus crédibles face à un environnement opérationnel plus exigeant. Ces frégates ont été partiellement désarmées ce qui nuit à la crédibilité de la force. Le pavillon français ne paraît aujourd'hui plus dissuasif et ne suffit plus à défendre un bâtiment . Yann Briand, alors commandant du Nivôse, observe qu'« il y a encore cinq ans, on pouvait dire que mon pavillon français était mon système d'armes principal. Aujourd'hui, quand vous vous rendez en mer de Chine méridionale avec une frégate de surveillance et une Alouette 3, notre pavillon n'est plus suffisant » 87 ( * ) .

Pour renouveler ces frégates tout en remédiant aux contraintes budgétaires, les coopérations européennes peuvent constituer une solution , via le programme European Patrol Corvette . Réunissant l'Italie, la France, la Grèce et l'Espagne, ce programme vise à développer un nouveau type de navire de 3 000 tonnes doté de capacités anti-sous-marines et anti-surface. L'accélération du déploiement de ce plan permettrait de répondre dès 2030 à la mise hors d'âge des frégates de surveillance.

Proposition n° 19 : Accélérer le déploiement du programme European Patrol Corvette pour assurer le remplacement des frégates de surveillance.

B. ASSUMER SON RÔLE DE PUISSANCE D'ÉQUILIBRE DE L'ORDRE MARITIME MONDIAL

1. Des outre-mer aux avant-postes pour assurer une meilleure gouvernance des océans
a) Valoriser l'insertion et l'action internationales des territoires ultramarins
(1) Un atout majeur : la présence dans une dizaine d'organisations régionales

Grâce à ses territoires ultramarins, la France est présente dans une dizaine d'organisations de coopération régionale , soit qu'elle en soit elle-même membre soit qu'elle le soit par une de ses collectivités. Cette présence peut lui permettre de défendre des actions en faveur d'une meilleure protection et gouvernance des océans .

Dans l'océan Indien , la France est ainsi membre de la Commission de l'océan indien (COI) , organisation créée en 1982 qui rassemble également l'Union des Comores, Madagascar, Maurice et les Seychelles. Depuis mai 2021, la France assure la présidence annuelle du conseil des ministres de la COI et parmi ses quatre priorités d'action se trouvent la sécurité maritime et le développement de l'économie bleue . La France est également membre de la Commission thonière de l'océan Indien (CTOI) , dont l'objectif est d'assurer la conservation et l'utilisation optimale des stocks et d'encourager à un développement durable des pêcheries. Le 17 décembre 2020, la France est par ailleurs officiellement devenue le 23 ème membre de plein exercice de l' Indian Ocean Rim Association (IORA), qui vise à renforcer la coopération régionale et les actions de développement durable dans la région.

Dans les Caraïbes , la Martinique (en 2015) puis la Guadeloupe (en 2019) sont devenus membres associés de l'Organisation des États de la Caraïbe orientale (OECO) et Saint-Martin en est observateur. Organisation régionale très intégrée , de par l'existence d'une monnaie commune, d'un principe de libre circulation et d'édiction de règles internationales, l'OECO développe plusieurs projets en matière de gouvernance des océans et d'économie bleue 88 ( * ) . Néanmoins, ceux-ci ne concernent pas pour l'heure les territoires français. La France est par ailleurs membre associé de l'association des États de la Caraïbe (AEC) , organisation régionale la plus large comprenant 25 membres et 10 membres associés. La Guadeloupe et la Martinique en sont membres en propre. Pour les territoires ultramarins, cette association constitue un partenariat intéressant notamment en raison de son action de lutte contre l'érosion côtière et pour l'établissement d'une zone de tourisme durable de la Grande Caraïbe .

Enfin, les trois collectivités du Pacifique sont très insérées dans les organisations internationales de la région. Depuis 2016, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie sont membres à part entière du Forum des îles du Pacifique (FIP) , Wallis-et-Futuna ayant quant à elle le statut d'observateur. La France et ses trois collectivités sont également membres de la Communauté du Pacifique (CPS), ainsi que du Programme régional océanien de l'environnement (PROE ), dont l'objectif est de compléter l'action du CPS en matière de préservation de l'environnement dans le Pacifique, notamment s'agissant du dérèglement climatique.

(2) Une insertion régionale des outre-mer encore trop inégale

Bien qu'affichée comme une priorité depuis vingt ans, l'insertion régionale des outre-mer reste encore trop embryonnaire. Si la France pousse à l'adhésion des collectivités ultramarines aux organisations régionales, les projets en matière de coopération régionale maritime sont peu nombreux.

S'agissant des DROM , la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d'orientation sur l'outre-mer (LOOM) a posé les bases juridiques de la coopération régionale ultramarine, en permettant aux autorités ultramarines de négocier au nom de la France des conventions avec des États étrangers et des organisations régionales, compétence s'exerçant cependant sous le contrôle de l'État. La loi n° 2016-1657 du 5 décembre 2016 relative à l'action extérieure des collectivités territoriales et à la coopération des outre-mer dans leur environnement régional a renforcé les compétences des DROM, en instaurant un droit autonome à négocier et prévoit des dérogations supplémentaires à l'interdiction de principe de conclure des conventions avec des États étrangers. Les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution ainsi que la Nouvelle-Calédonie disposent de pouvoirs plus étendus , leur permettant d'entretenir des relations plus nourries avec leur environnement régional. Si la coopération régionale est forte dans le Pacifique, où elle est favorisée par l'autonomie des collectivités, elle est encore trop faible dans le bassin des Antilles . Or, les enjeux maritimes ont besoin de politiques de voisinage ambitieuses et actives . L'appui d'un conseiller diplomatique affecté auprès de chaque préfet en outre-mer , en complément des trois ambassadeurs à la coopération régionale 89 ( * ) , constituerait un atout.

Un soutien du ministère des outre-mer pour promouvoir les actions de coopération régionale est aussi indispensable. Alors que les outre-mer sont de plus en plus au coeur des enjeux géopolitiques , le renforcement des capacités de prospective du ministère des outre-mer apparaît nécessaire. Chargé de la coordination et de l'adaptation de multiples politiques sectorielles, essentiellement dans le domaine socio-économique, ce ministère ne peut consacrer suffisamment de ressources à la réflexion stratégique et prospective globale . Alors que le ministre des outre-mer disposait jusqu'en 2011 d'un conseiller militaire, cette fonction a aujourd'hui disparu. Les capacités du ministère pourraient être renforcées par une cellule consacrée à la réflexion stratégique à laquelle des officiers supérieurs seraient de nouveau associés.

Élie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité de l'Institut français des relations internationales (IFRI), insiste également sur cette nécessité, en notant que « les armées doivent éviter le péché d'orgueil de croire qu'elles pourront relever seules » 90 ( * ) les défis géopolitiques des outre-mer. Il souligne également l'importance d'intégrer ces enjeux dans un dispositif interministériel : « les ministères de l'intérieur et des outre-mer doivent développer de la synergie et de la convergence dans leur vision de la valorisation stratégique des DROM-COM. Il me semble que les visions de Balard (ministère de la défense), Beauvau (ministère de l'intérieur) et du ministère des outre-mer sont encore trop différentes ».

Proposition n° 20 : Dans les DROM-COM, affecter auprès de chaque préfet un conseiller diplomatique, chargé de l'intégration régionale de chaque territoire, en complément des trois ambassadeurs à la coopération régionale.

Proposition n° 21 : Mettre en place, au sein du ministère des outre-mer, une cellule dédiée à la réflexion stratégique, à laquelle des officiers supérieurs seraient de nouveau intégrés.

b) Porter les enjeux de lutte contre le réchauffement climatique et de combat contre la pollution des océans
(1) Des missions de soutien régional en cas de catastrophes naturelles fortement développées dans le Pacifique

Comme rappelé, les outre-mer se situent en première ligne face au changement climatique et sont des territoires particulièrement vulnérables face aux risques naturels .

Les Antilles sont exposées à un risque cyclonique particulièrement important de juillet à octobre et le changement climatique devrait conduire à une multiplication des cyclones de catégorie 4 et 5 91 ( * ) . Dans le Pacifique , l'aléa cyclonique est également particulièrement prégnant et le risque de tsunami apparaît particulièrement dangereux pour Wallis-et-Futuna en raison de l'absence de protection par une barrière de corail et du fait de la concentration de la population sur une étroite bande côtière. Par ailleurs, l'élévation du niveau des océans conduit à des bouleversements majeurs pour ces territoires. Dans le Pacifique sud , cette montée des eaux a été estimée à 12 mm par an, soit quatre fois le taux mondial moyen 92 ( * ) .

Ces enjeux conduisent la France à assurer des missions de soutien régional en cas de catastrophes naturelles . Dans le Pacifique, les accords FRANZ , liant la France, l'Australie et la Nouvelle-Zélande depuis 1992, visent à coordonner et rationaliser l'aide civile et militaire aux États et territoires du Pacifique victimes de catastrophes climatiques. Il s'agit du seul accord civilo-militaire d'envergure outre-mer sur ces enjeux.

Se traduisant par la fourniture d'équipements, par de l'assistance financière et par l'envoi de moyens humains et matériels, les accords FRANZ permettent de venir en aide aux pays insulaires du Pacifique, pour la plupart en voie de développement et dans l'incapacité de faire face avec leurs propres moyens à une crise d'ampleur .

L'assistance aux îles Tonga : un exemple de mission de soutien régional

Situées dans l'Océan Pacifique sud , à un peu plus de 5 000 km à l'est de l'Australie, les îles Tonga, qui comptent 103 000 habitants, sont constituées d'un archipel de plus de 170 îles et îlots répartis en trois groupes principaux 93 ( * ) .

Le 15 janvier 2022, le volcan sous-marin Hunga Tonga-Hunga Ha'apai 94 ( * ) , situé à environ 65 km de la capitale tonguienne est entré en éruption , générant des tsunamis dans tout le Pacifique et des vagues de 1,20 m sur la capitale des Tonga. L'éruption volcanique a engendré une couche de cendre qui a recouvert tout l'archipel, contaminant de fait l'eau potable, détruisant les cultures agricoles et au moins deux villages. L'éruption volcanique à également endommagé un câble sous-marin coupant les Tonga de toute communication.

La France, présente dans cette région grâce à ses collectivités du Pacifique, a rapidement envoyé de l'aide humanitaire sur l'archipel. Sollicités dans le cadre de l'accord de coopération FRANZ , deux patrouilleurs de la Marine nationale basés en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française ont été affrétés pour acheminer 10 tonnes de fret humanitaire . La France a également mobilisé des moyens aériens pour effectuer des vols de reconnaissance.

Toujours dans le Pacifique, l'exercice militaire Croix du Sud rassemble plus de 2 000 militaires , dont une moitié de forces françaises et une moitié de forces partenaires (Australie, Chili, États-Unis, Fidji, Indonésie, Nouvelle-Zélande, Papouasie Nouvelle Guinée, Royaume-Uni, Tonga, Vanuatu). Ayant lieu dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, cet exercice est basé sur un scénario d'intervention humanitaire d'urgence dans le cadre d'une catastrophe naturelle , « entraînant par la suite une détérioration importante de la situation sécuritaire » 95 ( * ) .

La Marine nationale est aussi mobilisée pour intervenir dans la lutte contre la pollution des océans . Ainsi, dans l'océan Indien, elle est intervenue en 2020 lors de l'échouage à l'île Maurice du navire japonais Wakashio , un vraquier transportant 3 800 tonnes de fuel. Un avion de transport militaire (CASA CN-235), acheminant du matériel de lutte contre la pollution, ainsi qu'un bâtiment de soutien et d'assistance outre-mer (BSAOM) transportant du matériel complémentaire ont été mobilisés.

(2) Placer les Antilles et la Guyane au coeur de nouveaux partenariats et de la stratégie européenne pour l'Atlantique

Comme l'avait montré le rapport d'information sur les risques naturels majeurs outre-mer de 2018 de Guillaume Arnell, Mathieu Darnaud et Victoire Jasmin 96 ( * ) , les opérations menées après l'ouragan Irma aux Antilles ont démontré un niveau d'engagement sans précédent, dans un contexte d'extrême urgence. Cependant elles ont aussi montré leurs fragilités , dues à l'absence d'un accord de type FRANZ dans la zone .

Ces situations ont montré « la nécessité de conclure de tels accords dans l'ensemble des bassins océaniques . En effet, ceux-ci auraient vocation à renforcer les capacités d'assistance aux territoires ultramarins français et sécuriseraient également la possibilité de soutien aux petits États insulaires en développement dans les différentes zones, qui disposent de moyens limités ».

Proposition n° 22 : Sur le modèle des accords FRANZ, développer dans la Caraïbe des partenariats régionaux pour mener des opérations d'assistance en cas de catastrophe naturelle.

Par ailleurs, comme le souligne le rapport sur une nouvelle approche de la stratégie maritime pour la région Atlantique 97 ( * ) , présenté par Younous Omarjee au Parlement, il est ainsi regrettable que cette stratégie Atlantique n'ait fait que brièvement référence aux régions ultrapériphériques (RUP) de l'Atlantique , alors même que ces régions abritent une part importante de la biodiversité de l'Union et sont fortement dépendantes de l'économie bleue pour leur développement socio-économique.

À cet égard, le développement d'une stratégie indopacifique, qui concerne les collectivités de l'océan Indien et du Pacifique, ne doit pas éclipser l'importance tout aussi majeure du bassin Atlantique . Il convient d'intégrer pleinement la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon dans cette stratégie européenne pour l'Atlantique.

(3) Une extension des réserves naturelles nationales devant s'accompagner de moyens effectifs de protection

Depuis le début des années 2010, la France mène une politique de création d'aires marines protégées (AMP) . Celles-ci représentaient 0,8 % de la zone économique exclusive française en 2009 contre près de 24 % en 2019. Dans le cadre de la stratégie nationale pour les aires protégées 2030 , la France s'est fixée pour objectif d'atteindre 30 % d'espaces maritimes et terrestres en aires protégées d'ici 2022 , dont un tiers en protection forte .

Les aires marines protégées françaises ont des appellations multiples et regroupent notamment les parcs naturels marins 98 ( * ) dont trois, en 2019, se trouvaient en outre-mer à savoir Mayotte, les Glorieuses et la Martinique ; les parcs naturels qui regroupent notamment celui de la mer de Corail en Nouvelle-Calédonie 99 ( * ) ; les parcs nationaux dont celui de la Guadeloupe et les réserves naturelles. Parmi les réserves naturelles, on compte celle des Terres australes et antarctiques françaises instituée en 2006 et qui occupe une superficie d'environ 673 000 km². En juin 2021, la 170 ème réserve nationale a également été créée avec l'ajout de l'archipel des Glorieuses 100 ( * ) .

En février 2022, à l'occasion du One Ocean Summit , le Président de la République a annoncé l'extension de la réserve naturelle nationale (RNN) des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) sur l'ensemble des espaces maritimes des archipels Crozet et Kerguelen et des îles Saint-Paul et Amsterdam administrés par les TAAF. Avec 1,6 million de km², la réserve naturelle nationale des Terres australes françaises devient la plus grande aire marine protégée française et la deuxième plus grande aire marine protégée au monde . Cette extension a conduit à dépasser l'objectif des 30 % d'aires protégés, pour atteindre désormais 33 %.

Si cette politique est à saluer, il n'en demeure pas moins qu'elle doit s'accompagner de moyens effectifs de protection sans lesquels cette préservation ne serait que virtuelle. Or, comme déjà rappelé, les moyens dont dispose la Marine nationale outre-mer restent aujourd'hui taillés au plus juste . Pour surveiller la ZEE des îles Éparses , le général Laurent Cluzel, commandant supérieur des FAZSOI, assure arriver au total « à une présence effective d'un bâtiment de la Marine nationale 300 jours par an dans le canal du Mozambique » 101 ( * ) et souligne « l'effort quotidien » pour protéger les espaces et la biodiversité autour de ces îles.

Par ailleurs, il est nécessaire de trouver des moyens pour valoriser économiquement la protection de ces réserves marines. Il convient de trouver des solutions pour valoriser ces ressources qui ne sont pas exploitées pour des raisons environnementales et faire de la protection de la biodiversité une source de richesse pour les territoires.

Il est important de noter que plus de 93 % 102 ( * ) de nos aires marines protégées (AMP) sont situées en outre-mer, dans des zones peu fréquentées. Il est plus facile de mettre en place des AMP dans ces zones que dans le golfe de Gascogne ou dans le golfe du Lion.

Proposition n° 23 : Associer des moyens de protection à l'extension des réserves naturelles marines.

Source : Administration supérieure des TAAF

2. Développer une stratégie indopacifique française associant étroitement les territoires ultramarins

Élaborée à partir de 2018, la stratégie française pour l'Indopacifique porte avec elle de grandes ambitions pour les territoires ultramarins mais se limite pour l'heure à son volet militaire .

Deux objectifs majeurs doivent donc être poursuivis pour renforcer cette stratégie : accroître l'implication des collectivités ultramarines et de l'Union européenne et diversifier les alliances après la rupture de confiance avec l'Australie.

a) La construction d'une stratégie ambitieuse, aux matérialisations cependant limitées
(1) Grâce à ses outre-mer, la France, nation souveraine de l'Indopacifique et non « État de passage »

L'Indopacifique est bien le nouveau centre névralgique du monde , constituant un espace de polarisation des tensions et des grands enjeux mondiaux .

Il apparaît de plus en plus comme le centre de gravité de l'économie mondiale . La zone indopacifique concentre ainsi 60 % de la population mondiale , un tiers du commerce international 103 ( * ) et contribuera pour environ 60 % du PIB mondial d'ici 2030 .

Il est également un espace stratégique incontournable, avec la montée en puissance de la Chine et l'accroissement des rivalités sino-américaines dans la région. Comme le signale l'amiral Jean-Mathieu Rey, commandant la zone maritime Asie-Pacifique (ALPACI), « la fréquence cardiaque du Pacifique , coeur du monde, s'accélère au rythme du réarmement des nations, avec des démonstrations de force et un mépris de plus en plus affiché du droit international par certains acteurs, notamment la Chine » 104 ( * ) .

L'Indopacifique est enfin au coeur des enjeux de développement durable : cette zone est marquée par une forte vulnérabilité environnementale et l'intégrité territoriale de nombreux États de la région sont menacées par le réchauffement climatique.

Tous ces enjeux concernent directement la France puisqu'elle est, grâce à ses 6 collectivités 105 ( * ) , une nation souveraine de l'Indopacifique , lui permettant d'assumer pleinement un rôle de puissance régionale .

Cette zone abrite ainsi 1,6 million de citoyens français habitant à La Réunion, à Mayotte, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie. S'y ajoutent également 150 000 Français résidant dans les États de la zone ainsi que 7 000 filiales d'entreprises françaises. Plus de 90 % de la ZEE française se trouve dans l'espace indopacifique . Comme déjà rappelé, les collectivités ultramarines de la zone hébergent des bases et des moyens militaires pour permettre la sécurisation des territoires souverains comme des espaces communs.

La France, grâce à ses territoires ultramarins, n'y est pas un « État de passage » 106 ( * ) . Cette responsabilité est d'autant plus importante que la France est le seul pays de l'Union européenne disposant de territoires dans la zone .

(2) Une stratégie présentée en 2018 pour contrer l'influence chinoise et promouvoir le multilatéralisme

Le cadre et les principes de la stratégie indopacifique française ont été posés lors de la visite en Inde du Président de la République en mars 2018 puis ont été repris lors de son déplacement à Sydney puis à Nouméa en mai 2018 . Depuis lors, cette stratégie a de nouveau été présentée à Tokyo (juin 2019), Saint-Denis de La Réunion (octobre 2019) ou encore à Papeete (juillet 2021) 107 ( * ) . Elle a été déclinée dans plusieurs documents gouvernementaux, à la fois du ministère des affaires étrangères et du ministère des armées 108 ( * ) .

À travers un réseau de partenariats régionaux , cette stratégie a pour objectif de développer un contre modèle face à l'influence croissante de la Chine dans la région et de promouvoir le multilatéralisme et la préservation d'un ordre international fondé sur le respect du droit. Cette stratégie entend s'appliquer en de nombreux domaines : la sécurité, le commerce, la connectivité, la protection de l'environnement, la liberté de navigation... Selon les termes du document du ministère des armées, les outre-mer constituent « la clé de voûte de l'action de sécurité française dans l'Indopacifique ».

Promue pour contrer les ambitions chinoises, la stratégie française vise également à développer une troisième voie face à la rivalité sino-américaine. Christophe Penot, ambassadeur pour l'Indopacifique, indique ainsi que cette stratégie vise à « aider les pays à développer une alternative au modèle chinois, fondée sur le respect du droit et des souverainetés nationales, et sur la promotion d'un multilatéralisme efficace contre la logique de blocs » 109 ( * ) . L'amiral Jean-Mathieu Rey, commandant la zone maritime Asie-Pacifique, mentionne également cette « troisième voie, qui se veut une voie d'équilibre basée sur la défense du droit international, en particulier de la liberté de navigation et de survol » 110 ( * ) .

Comme le rappelle Christophe Penot, les enjeux maritimes de cette stratégie sont considérables : « ils portent sur la liberté de navigation et de survol, la souveraineté - avec nos territoires et ZEE -, l'économie, la protection et la gestion durable des océans, ou l'importance de la pêche illégale » .

(3) Des concrétisations limitées essentiellement au domaine militaire

Si la stratégie indopacifique embrasse de nombreux aspects , allant de l'économie à la défense en passant par le multilatéralisme et le changement climatique, ses réalisations les plus abouties restent circonscrites au domaine militaro-industriel .

Ces réalisations ont ainsi essentiellement consisté en la vente de matériels à des partenaires stratégiques : Rafales à l'Inde (2016) puis à l'Indonésie (2022), sous-marins Attack à l'Australie (contrat finalement dénoncé après l'accord Aukus), frégates Gowind à la Malaisie, hélicoptères NH90 à la Nouvelle-Zélande. En juillet 2021, lors du 5 ème sommet France-Océanie, les annonces du Président de la République ont de même concerné des enjeux militaires, via la création d'un réseau de garde-côtes du Pacifique Sud et l'installation d'un régiment du service militaire adapté (SMA) sur l'île de Hao.

Certes, il existe des initiatives en matière d'environnement , notamment via la tenue du sommet France-Océanie en Polynésie française en juillet 2021. En matière de coopération, on peut noter l'installation d'un observatoire des grands fonds marins à Nouméa , en partenariat avec le Japon. À Nouméa s'est par ailleurs tenue en septembre 2019 la première session du dialogue maritime global entre la France et le Japon . En matière de développement économique, le mandat de l'Agence française de développement (AFD) dans le Pacifique a été élargi afin de lui permettre d'intervenir davantage dans la région 111 ( * ) .

On peut par ailleurs noter que la stratégie française reste floue dans son intitulé . À la différence de la stratégie américaine, qui a développé le concept de « free and open Indopacific » 112 ( * ) , la stratégie française n'utilise pas de qualificatif pour la préciser et reste pour le moment très verbale.

La présence militaire française en Indopacifique

Source : Ministère des armées

b) Renforcer la stratégie indopacifique par une implication plus grande des collectivités et de l'UE et par une diversification des alliances
(1) Faire des outre-mer des acteurs de la stratégie indopacifique grâce notamment à leur relai dans les organisations de coopération régionale

Atouts essentiels et fondamentaux pour la stratégie indopacifique française, les outre-mer peuvent également en être des acteurs via le relai de leur présence dans les organisations de coopération régionale et leur action en matière économique et environnementale .

Comme le précise Sarah Mohamed-Gaillard, « les collectivités françaises sont prises dans le narratif de l'Indopacifique de façon quasiment acquise, sans les impliquer ni faire émerger l'importance de cette implication dans la zone » 113 ( * ) . Christian Lechervy, ancien ambassadeur de France auprès de la Communauté du Pacifique, recommande de « bannir l'idée de tête de pont » car cette expression pourrait laisser entendre que les outre-mer sont « de simples instruments aux services d'intérêts politiques extérieurs » 114 ( * ) .

Dès lors, les outre-mer doivent bien être pensés comme des partenaires impliqués dans l'élaboration et la concrétisation sur le terrain de la stratégie indopacifique. Cette implication peut passer par les enceintes de coopération régionale. Comme déjà rappelé, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie sont ainsi membres à part entière du Forum des îles du Pacifique (FIP ), enceinte pourtant réservée aux États océaniens souverains.

Cette implication plus marquée des collectivités permet de ne pas limiter la stratégie indopacifique à sa dimension militaire et de l'étendre aux enjeux économiques ou environnementaux . L'organisation des Pacific Business Days en Polynésie, rassemblant les chambres de commerce, les organisations patronales des îles Fidji, Samoa ou Cook et celles des territoires français, permet de créer d'autres types de relations, en développant des initiatives économiques . De même en matière environnementale, en juillet 2015, le groupe des dirigeants polynésiens, auquel a pris part la Polynésie française, s'est engagé à lutter contre le changement climatique, notamment en parlant d'une seule voix lors de la COP 21. Cette initiative, connue sous le nom de Déclaration de Taputapuaeta, a été soutenue par la France qui cherchait en prévision de la COP 21 à intensifier le dialogue avec les États insulaires. 115 ( * ) .

Ces initiatives portées par les collectivités offrent l'avantage de développer une stratégie d'action plus fine vis-à-vis de l'influence de la Chine . Comme le rappelle Teva Rohfritsch, sénateur de la Polynésie française, dans le Pacifique , la Chine n'est pas perçue de la même manière qu'en Europe : « elle vient s'installer comme le bon ami, le bon financeur, celui qui participe à la mise en place d'installations sportives... » 116 ( * ) . Cet engagement se traduit « par des financements concrets accompagnant des pays qui n'ont que peu de ressources » . La Chine dispose ainsi d'un navire-hôpital qui sillonne le Pacifique pour aider les populations insulaires. Pour proposer un contre-modèle face à l'influence croissante de la Chine dans le Pacifique, il convient de prendre en compte cette diplomatie douce , économique voire sanitaire . Comme l'indique Teva Rohfritsch, le danger dans le Pacifique n'est pas tant de voir « un militaire chinois arriver, mais un médecin chinois » 117 ( * ) .

Proposition n° 24 : Faire de la présence des outre-mer dans les instances de coopération régionale un levier pour la stratégie indopacifique.

Proposition n° 25 : Via l'action des collectivités, développer les initiatives économiques et environnementales pour ne pas limiter la stratégie indopacifique à sa dimension militaire.

(2) Valoriser les atouts des outre-mer français auprès de l'Union européenne

La diplomatie française a réussi un travail de conviction pour que l'Union européenne adopte une stratégie indopacifique , publiée en septembre 2021 118 ( * ) . Déjà en avril 2021, un document du Conseil de l'Union européenne avait été adopté sur « une stratégie de l'Union européenne pour la coopération dans la région indopacifique » . Ce document reconnaissait que « les États membres sont conscients de l'importance que revêt une présence navale européenne significative dans la région indopacifique ».

S'il convient de se féliciter de cette prise de conscience par l'Union européenne des enjeux de l'Indopacifique, on peut néanmoins regretter que la stratégie de l'UE ne mentionne que brièvement les territoires ultramarins français , ceux-ci ne figurant que dans une note de bas de page. Christophe Penot reconnaît la difficulté à faire comprendre les atouts des outre-mer français dans cette stratégie : « Puisque nous sommes le seul État à avoir des territoires dans la zone indopacifique, nos partenaires ne perçoivent pas les potentialités que ceux-ci peuvent leur offrir » 119 ( * ) .

La publication de la stratégie de l'UE est intervenue au pire moment puisqu'elle a été présentée le 16 septembre 2021, soit le lendemain de la conclusion de l'accord Aukus. Il a fallu par ailleurs attendre le 20 septembre et la réunion des ministres des affaires étrangères de l'Union européenne en marge de l'Assemblée générale de l'ONU pour que se manifeste la solidarité des 27 à l'égard de la France après l'annulation de la vente des sous-marins.

Il est dès lors nécessaire de faire prendre conscience aux États européens que l'Indopacifique ne se résume pas aux coopérations entre États ou à la participation à des forums régionaux. Cette stratégie passe aussi par le relai des collectivités françaises du Pacifique et de l'océan Indien, seuls territoires de l'Union européenne dans la région . Les outre-mer ne sont pas encore suffisamment considérés comme de véritables relais d'influence régionale de l'UE .

Proposition n° 26 : Au cours de la présidence française de l'UE, valoriser le rôle des outre-mer dans la stratégie indopacifique européenne.

(3) Une rupture de confiance avec l'Australie, qui appelle à diversifier les partenariats dans la région

La stratégie indopacifique française a été fortement ébranlée par l'Accord Aukus , rendu public le 15 septembre 2021 et véritable camouflet pour la France. Cet accord de partenariat entre États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie a conduit à une rupture sans préavis du contrat avec Naval group, remplacé par la fourniture par les États-Unis (avec la collaboration du Royaume-Uni) à l'Australie de sous-marins à propulsion nucléaire.

Cette rupture, qui écorne notre confiance avec nos alliés anglo-saxons de la région, doit conduire à rechercher une diversification des partenariats . Une coopération plus nourrie avec l'Inde pourrait ainsi être développée, dans le domaine stratégique comme opérationnel, comme l'avait d'ailleurs recommandé le Sénat 120 ( * ) . Il convient cependant de noter que l'Inde se concentre davantage sur le nord de l'océan Indien et regarde peu vers le Pacifique. L'Indonésie , 4 ème pays le plus peuplé du monde, doit également constituer un partenaire de poids. La vente de 42 avions Rafale à cette « nation-archipel », annoncé le 10 février 2022, place désormais ce partenaire au coeur de la stratégie française. Enfin, l'Association des nations de l'Asie du sud-est (ASEAN) doit occuper une place centrale et les coopérations avec les pays qui la composent doivent s'intensifier. Pour ce faire, la France bénéficie depuis septembre 2020 du nouveau statut de partenaire de développement.

S'ils restent indispensables, ces partenariats stratégiques ont leurs limites . Aukus démontre qu'il est risqué de compter sur les partenariats stratégiques comme démultiplicateurs de moyens, voire comme un palliatif à la faiblesse des moyens permanents dans la région. Comme le rappelle Élie Tenenbaum, « même si la France dispose de partenariats solides, notamment avec l'Australie, l'annulation du contrat de sous-marins montre bien que nous ne pouvons pas nous reposer sur des alliances pour la protection de nos territoires » 121 ( * ) .

Le renforcement de la stratégie indopacifique doit donc également passer par la nécessité de regagner une crédibilité politico-militaire . Si la France veut apparaître comme un partenaire majeur dans la région (et non comme un junior partner selon l'expression de Mikaa Mered 122 ( * ) ), il est nécessaire de réinvestir massivement en termes de déploiement de forces depuis les territoires ultramarins de la zone. Les moyens militaires dans la zone indopacifique sont aujourd'hui loin d'être au niveau. Jean-Mathieu Rey, amiral commandant la zone maritime Asie Pacifique 123 ( * ) , rappelle que « la stratégie de 2018 a redéfini et élargi le périmètre de ma mission, de la zone économique exclusive de Polynésie française à l'Asie Pacifique, la faisant passer de 5 à 165 millions de km 2 , sans pour autant m'octroyer notoirement davantage de moyens ».

Enfin, s'agissant des partenariats à l'échelle régionale, il convient de noter le manque d'échanges entre les bassins Indien et Pacifique . Comme le fait remarquer le sénateur Teva Rohfritsch, « nous parlons d'Indopacifique, mais les relations et la coopération entre ces deux océans sont rares. Si nous souhaitons donner corps à cette zone, nous pourrions éventuellement commencer par leur dédier une plateforme commune ». S'il existe des organisations de coopération régionale dans l'océan Indien et dans l'océan Pacifique, il n'en existe aucun propre à l'Indopacifique. Les collectivités françaises du Pacifique et de l'océan Indien devraient nouer davantage de partenariats , aujourd'hui pratiquement inexistants. Par ailleurs, la France pourrait être à l'initiative de la création d'un forum régional des États de l'Indopacifique .

Proposition n° 27 : Diversifier les partenariats en Indopacifique en l'accompagnant d'un réinvestissement de forces militaires prépositionnées en outre-mer.

Proposition n° 28 : Densifier les échanges entre collectivités françaises des océans Indien et Pacifique et créer un forum régional des États de l'Indopacifique.


* 51 Fréderic Danigo, Contestations de la souveraineté : quelles réponses de la France dans ses outre-mer ? Les cahiers de la Revue Défense nationale, juillet 2020.

* 52 Par une résolution du 12 décembre 1979, l'Assemblée générale des Nations Unies avait invité la France à engager des négociations en vue de la réintégration des îles Éparses au sein de la République de Madagascar.

* 53 L'accord porte par ailleurs sur une durée de 10 ans reconductible alors que les accords de pêche récents limitent la durée entre 3 et 5 ans.

* 54 Rapport : « Valoriser l'île de La Passion-Clipperton par l'implantation d'une station scientifique à caractère international » de février 2016 par Philippe Folliot, parlementaire en mission sur le devenir de l'île de La Passion-Clipperton (remis en juin 2016).

* 55 Audition Annick Girardin, ministre de la mer, 21 octobre 2021.

* 56 Table ronde Guyane, 9 décembre 2021.

* 57 Ibid.

* 58 Audition du 14 octobre 2021, Yann Briand, capitaine de vaisseau, membre du cabinet du chef d'état-major de la Marine.

* 59 Ibid.

* 60 Ibid..

* 61 Audition d'Élie Tenenbaum, 13 janvier 2022.

* 62 Comme le fait remarquer Mikaa Mered, secrétaire général de la Chaire Outre-mer de Sciences Po, la France est aujourd'hui le seul pays du G7 à ne pas disposer en propre d'un brise-glace.

* 63 Adam Mccauley : “Pirates in southeast Asia : the most dangerous waters in the world”, Time, 2014.

* 64 Même si les actes de piraterie et de brigandage dans la Caraïbe sont en hausse régulière depuis 2015, les vols étant passés de 75 en 2015 à 128 en 2019 (Maritime Information Cooperation and Center, Bilan annuel de 2019).

* 65 Le navire océanographique Yantar est ainsi suspecté de se livrer à des opérations d'espionnage de câbles sous-marins (La Tribune, Télécoms : les câbles sous-marins plus que jamais dans le viseur des espions).

* 66 Audition TAAF du 13 janvier 2022 - Paco Milhiet, chercheur au Centre de recherche de l'école de l'air (CREA).

* 67 IFRI, Confettis d'empire ou points d'appui ? L'avenir de la stratégie française de présence et de souveraineté, février 2020.

* 68 Désarmement du premier P400 « La Rieuse ».

* 69 Jusqu'en janvier 2019 les PAG étaient appelés Patrouilleurs légers Guyanais (PLG).

* 70 La même année, en 2017, les 2 P400 basés en Guyane étaient désarmés. Celui basé en Martinique l'avait été en 2009.

* 71 Jusqu'en janvier 2019 les BSAOM étaient appelés Bâtiments multi-missions (B2M).

* 72 Ces patrouilleurs porteront le nom de héros ultramarins de la France libre comme August Bénébig ou Teriieroo a Teriierooterai.

* 73 Audition d'Élie Tenenbaum, directeur du centre des études de sécurité de l'IFRI, 13 janvier 2022.

* 74 Audition du 14 octobre 2021.

* 75 Ibid.

* 76 Le système de surveillance satellitaire de la France, TRIMARAN, a été renouvelé deux fois dont récemment en 2021 pour une période de cinq ans et la dotant du système TRIMARAN III.

* 77 Le projet Ocean Sentinel regroupe notamment des chercheurs du CNRS et de l'université de la Rochelle, associées à l'administration des Terres australes et antarctiques française, et a pour ambition de lutter contre la pêche illégale en utilisant un système de balises embarquées sur des oiseaux marins.

* 78 Audition d'Annick Girardin, ministre de la mer, 21 octobre 2021.

* 79 L'amiral Jean-Mathieu Rey mentionne également l'appui d'entreprises privées comme la société française Unseenlabs , avec laquelle la Marine nationale a travaillé pour la surveillance de l'île de La Passion-Clipperton (Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021).

* 80 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 81 Réponses au questionnaire des rapporteurs.

* 82 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 83 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

* 84 Rapport : « Valoriser l'île de La Passion-Clipperton par l'implantation d'une station scientifique à caractère international » de février 2016 par Philippe Folliot, parlementaire en mission sur le devenir de l'île de La Passion-Clipperton (remis en juin 2016).

* 85 Un observatoire franco-japonais des fonds marins basé en Nouvelle-Calédonie est d'ailleurs en cours de création.

* 86 Floréal (Port-Réunion), Prairial (Papeete), Nivôse (Port-Réunion), Ventôse (Fort-de-France), Vendémiaire (Nouméa) et Germinal (Fort-de-France).

* 87 Audition du 14 octobre 2021.

* 88 Notamment le projet CROP (Caribbean Regional Oceanscape Projet) et le projet ReMLIT (Building Resilience in the Eastern Caribbean through Reduction in Marine Litter Project).

* 89 Il existe un ambassadeur délégué la coopération régionale dans la zone de l'océan Indien, un ambassadeur chargé de la coopération régionale dans la zone Atlantique, et un ambassadeur, représentant permanent de la France auprès de la CPS et du PROE, tous trois placés sous la double tutelle du ministère des outre-mer et du ministère des affaires étrangères.

* 90 Audition du 13 janvier 2022.

* 91 Risques naturels majeurs : urgence déclarée outre-mer - Rapport d'information n° 688 (2017-2018) du 24 juillet 2018, par Guillaume Arnell, rapporteur coordonnateur, Mathieu Darnaud et Victoire Jasmin, rapporteurs.

* 92 Observatoire géopolitique des enjeux des changements climatiques en termes de sécurité et de défense, rapport d'étude n° 8, février 2019.

* 93 Les îles Vava'u au nord, les îles Ha'apai au centre et les îles Tongatapu au sud.

* 94 Ce volcan avait émergé lors d'une éruption en 2009.

* 95 Ministère des Armées, FANC, bilan de l'exercice Croix du Sud, 2018.

* 96 Risques naturels majeurs : urgence déclarée outre-mer - Rapport d'information n° 688 (2017-2018) du 24 juillet 2018, par Guillaume Arnell, rapporteur coordonnateur, Mathieu Darnaud et Victoire Jasmin, rapporteurs.

* 97 Rapport sur une nouvelle approche de la stratégie maritime pour la région atlantique, Commission di développement régional, juillet 2021.

* 98 L'ensemble de ces sites couvrent une superficie de 185 000 km², soit 7,7 % de la superficie totale du réseau d'AMP.

* 99 D'une superficie de 1,3 million de km² et qui figure parmi la plus vaste aire marine protégée dans le monde.

* 100 La création de la réserve naturelle prend le relais du parc naturel marin des Glorieuses créé en 2012.

* 101 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 102 Donnée de 2019. Cette proportion a encore augmenté depuis les créations de la réserve des Glorieuses en 2021 et l'extension de la réserve des TAAF en 2022.

* 103 Avant la crise sanitaire, plus d'un tiers des exportations françaises hors UE étaient à destination de la région tandis que l'Indopacifique représentait 40 % des importations hors UE.

* 104 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 105 Mayotte, La Réunion, TAAF, Polynésie française, Wallis-et-Futuna et Nouvelle-Calédonie.

* 106 Audition du 14 octobre 2021, Yann Briand, capitaine de vaisseau, membre du cabinet du chef d'état-major de la Marine.

* 107 Christian Lechervy, ancien ambassadeur de France auprès de la Communauté du Pacifique, souligne deux originalités de cette stratégie : elle est portée au plus haut niveau, par la voix du chef de l'État et non du ministre des affaires étrangères, à la différence des autres États ; elle est exposée à la fois depuis Paris, depuis les territoires ultramarins et depuis les partenaires stratégiques (Christian Lechervy, La France, aiguillon océanien de la politique Indo-pacifique de l'UE, RJPENC n° 38).

* 108 Stratégie de la France dans l'Indopacifique (Gouvernement) La France et la sécurité en Indopacifique (Ministère des Armées), Partenariats de la France dans l'Indopacifique (ministère des affaires étrangères).

* 109 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 110 Ibid.

* 111 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 112 Repris notamment dans A Free and Open Indo-Pacific , discours d'Anthony Blinken, secrétaire d'État des États-Unis, à Jakarta le 14 décembre 2021.

* 113 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 114 Christian Lechervy, Les collectivités françaises d'Océanie, actrices et atouts en Indo-Pacifique, Revue Défense nationale, 2021.

* 115 Quelques jours avant l'ouverture de la COP, le président François Hollande avait d'ailleurs relancé la pratique du sommet France Océanie afin de poursuivre le dialogue sur ces sujets avec les États océaniens. À cet égard, comme le note Sarah Mohamed-Gaillard, le One Ocean Summit a été une « initiative très bien accueillie par les membres du Forum des îles du Pacifiqu e » (Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021).

* 116 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 117 Ibid.

* 118 Commission européenne et Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, communication conjointe au Parlement européen et au Conseil, septembre 2021.

* 119 Table ronde Indopacifique, 16 décembre 2021.

* 120 L'Inde, un partenaire stratégique , Rapport d'information de Ladislas Poniatowski, co-président, Rachid Temal, co-président, Hugues Saury, Olivier Cigolotti et Joël Guerriau, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, 1 juillet 2020.

* 121 Audition d'Élie Tenanbaum, directeur du centre des études de sécurité de l'IFRI, 13 janvier 2022.

* 122 Audition de Mikaa Mered, secrétaire général de la Chaire Outre-mer de Sciences Po, 14 octobre 2021.

* 123 Cette zone maritime s'étend de Malacca aux côtes ouest des Amériques.

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