B. UN RECOURS À LA FORCE RENDU INÉVITABLE DU FAIT DES DÉFAILLANCES DU SYSTÈME

Les supporters venus au Stade de France et se présentant au point de pré-filtrage prévu dans le prolongement de la sortie du RER D ont fait face à deux risques . Le premier était le risque d'écrasement du fait du blocage du pré-filtrage. Le second était celui de subir les effets du gazage à l'approche des grilles du Stade . Face à ces risques, le préfet de police a d'abord pris la décision de lever, temporairement, le pré-filtrage à 19h39 , puis a assumé le recours au gaz lacrymogène pour faire reculer les personnes proches des grilles du Stade. Ce second choix découlait non de la nécessité de protéger les personnes, mais d'abord d'éviter la chute des grilles et l'envahissement du Stade qui aurait eu incontestablement des conséquences dramatiques. Il était donc légitime que les forces de sécurité interviennent pour préserver l'ordre public. Plus largement, le délégué interministériel aux grands événements sportifs a indiqué lors de son audition : « L'enchaînement des faits n'appelait guère d'autres décisions que celles prises par le préfet de police, dont je pense qu'elles étaient les seules adaptées pour éviter une situation beaucoup plus grave ».

Or, ces décisions, si elles étaient nécessaires pour éviter un drame , sont la conséquence directe des défauts d'anticipation et ont été la cause d'incidents qui ont choqué l'opinion publique nationale et internationale et terni l'image de la France . La décision de lever le pré-filtrage a créé un espace sur le parvis du Stade dans lequel ont pu s'engouffrer les délinquants qui ont agressé les supporters. Il a permis à ceux qui cherchaient à s'introduire illégalement dans le stade de se rapprocher de leur objectif.

Face au risque d'intrusion, les forces de sécurité ont eu recours au gaz lacrymogène pour faire reculer la foule. Cette méthode, qui affecte les personnes présentes au-delà de celles directement visées, a paru particulièrement agressive aux supporters venant de pays où elle n'est pas pratiquée . Elle a contribué au sentiment des supporters d'avoir été exposés à un usage excessif de la force, voire à des violences policières.

Le préfet de police a cependant d'autant plus assumé le recours au gaz lacrymogène qu'il a considéré que c'était le seul moyen à disposition des forces de sécurité de faire reculer la foule, à moins de la charger . Il a également indiqué que, dans la même situation, il préconiserait à nouveau son usage, se contentant de regretter qu'au Stade de France cet usage ait conduit à exposer au gaz des personnes de bonne foi, voire des familles et des enfants.

La question de l'usage du gaz lacrymogène montre les contradictions parmi les responsables des forces de sécurité intérieure . En effet, à l'inverse des affirmations répétées du préfet de police, le ministre de l'Intérieur a admis que le recours au gaz lacrymogène devrait sans doute évoluer .

Outre une réévaluation de l'usage du gaz lacrymogène, la solution réside dans la meilleure gestion des foules de spectateurs des grands événements sportifs en amont par la gestion des flux notamment par le moyen du recours à la vidéo intelligente et le positionnement d'unités équestres , voire de canons à eaux dont le caractère dissuasif est avéré et, sur le moment, par des instructions claires dispensées dans une langue susceptible d'être comprise par les personnes concernées .

Recommandation n° 7 : ° séparer les points de contrôle de validité des billets des points de pré-filtrage mis en place dans le cadre de la prévention du terrorisme (UEFA, préfecture de police) .

Recommandation n° 8 :  définir une doctrine d'emploi du gaz lacrymogène par les agents des forces de sécurité qui prévienne l'exposition de personnes ne présentant pas pour eux un danger immédiat (ministère de l'intérieur).

Recommandation n° 10 : privilégier en matière de gestion des foules le pré-positionnement de moyens dissuadant tout débordement (unités équestres notamment) (préfecture de police).

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