II. AXE 1 (STRATÉGIE) - CONCEVOIR UNE STRATÉGIE NATIONALE D'INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE AVEC DES MOYENS À LA HAUTEUR DE NOS AMBITIONS

Pour ne pas rester lettre morte, la mise en oeuvre d'une stratégie nationale d'intelligence économique (SNIE) devrait respecter le caractère résolument pluridisciplinaire de l'intelligence économique. Elle doit donc être définie en concertation avec toutes les administrations concernées - et pas seulement les ministères économiques et financiers - et être formalisée au sein d'un document validé au niveau interministériel. Son pilotage doit également être assuré par une structure interministérielle afin d'aller au-delà du caractère économique ou sécuritaire de l'intelligence économique et d'embrasser tous ses aspects (recherche, enseignement supérieur, maîtrise de risques normatifs, sociaux, industriels, écologiques, etc).

Au-delà de la sécurité économique, volet « défensif » de l'intelligence économique, cette stratégie en intelligence économique devrait intégrer un volet plus « offensif », donnant aux administrations, collectivités et entreprises des capacités d'anticipation et d'adaptation aux évolutions du paysage économique en vue de préserver et renforcer notre compétitivité.

Recommandation n° 1 : concevoir une stratégie nationale d'intelligence économique (SNIE) intégrant les volets défensif et offensif de l'intelligence économique au sein d'un document validé au niveau interministériel. Confier le pilotage de cette SNIE au sein d'un Secrétariat général à l'intelligence économique (SGIE), structure interministérielle rattachée directement au Premier ministre.

A. POURSUIVRE LE RENFORCEMENT DU VOLET DÉFENSIF DE LA STRATÉGIE D'INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE AFIN DE GARANTIR UNE MEILLEURE PROTECTION COLLECTIVE FACE AUX INFLUENCES ÉTRANGÈRES

La politique publique de sécurité économique (PPSE) incarne aujourd'hui ce que devrait être le volet défensif d'une stratégie nationale d'intelligence économique.

L'article 1er du décret du 20 mars 2019 précise ainsi que la PPSE « vise à assurer la défense et la promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques de la Nation, constitués notamment des actifs matériels et immatériels stratégiques pour l'économie française  »9(*). Elle inclut donc aussi bien la défense des entreprises que des acteurs de la recherche française contre des tentatives d'ingérence étrangère.

1. Mieux protéger les entreprises françaises face aux influences étrangères
a) Le dispositif de contrôle des investissements en France a été récemment renforcé

La France, à l'instar de nombreux pays, s'est dotée d'une politique de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) qui repose sur un équilibre entre le principe de liberté des relations entre la France et l'étranger10(*) et la défense des intérêts nationaux. Ainsi, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'économie, le Gouvernement peut soumettre à « déclaration, autorisation préalable ou contrôle » tout « mouvement de capitaux » entre la France et l'étranger11(*).

Certains investissements étrangers sont ainsi soumis à autorisation préalable du ministre de l'économie : les investissements dans des activités participant « même à titre occasionnel » à l'exercice de l'autorité publique ou de nature à porter atteinte à l'ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale, ou relevant d'une activité de recherche, de production ou de commercialisation d'armes et de substances explosives.

L'autorisation peut être assortie de conditions permettant d'assurer que l'investissement projeté ne portera pas atteinte aux intérêts nationaux12(*) - par exemple, des conditions portant sur le maintien et la pérennité des activités sensibles en France, le maintien de savoirs et savoir-faire de l'entité cible, la gouvernance ou encore la communication d'informations à l'État13(*).

La liste précise des activités concernées par le contrôle des investissements étrangers, qui relève du domaine règlementaire, a été progressivement étendue :

- en 2005, le décret dit « Loos-Villepin »14(*) fixe une liste de 11 domaines où les investissements relèvent d'une autorisation préalable, allant des jeux d'argent à la cryptologie en passant par les activités de sécurité privée ;

- en 2014, le décret dit « Montebourg »15(*) a enrichi cette liste pour y inclure les activités portant sur des matériels, biens ou services essentiels pour garantir l'approvisionnement en électricité, en eau ou en énergie, la protection de la santé publique, la sécurité et l'intégrité des réseaux de transport et des services de communications électroniques ;

- depuis le 1er janvier 202016(*), cette liste intègre également les activités de traitement, de transmission ou de stockage de données dont la compromission ou la divulgation est de nature à porter atteinte à l'exercice d'autres activités de la liste ainsi que les activités portant sur des infrastructures, biens ou services essentiels pour garantir la sécurité alimentaire ou encore la publications de presse d'information politique et générale.

Outre les activités concernées, le seuil de détention de droits de vote ou de capital déclenchant une procédure de contrôle des investissements étrangers en France, fixé à 33,33 % depuis 2005, a été récemment abaissé :

- le décret du 31 décembre 2019 précité a abaissé le seuil déclenchant une prise de contrôle, et donc une éventuelle procédure d'autorisation préalable, à 25 % lorsque l'investissement est réalisé par un tiers à l'Union européenne ;

- en juillet 2020, le seuil de 25 % des droits de vote déclenchant une procédure de contrôle des investissements réalisés par des tiers à l'Union européenne au sein de sociétés cotées a été abaissé à 10 %17(*). Cette mesure temporaire, qui devait s'appliquer jusqu'au 31 décembre 2022, a été prorogée jusqu'au 31 décembre 202318(*) et devrait être pérennisée en 2024 conformément à l'annonce du Ministre de l'économie le 5 janvier 2023.

Enfin, le ministre chargé de l'économie a été doté de prérogatives renforcées pour assurer le contrôle effectif des IEF. La loi dite « Pacte » du 22 mai 201919(*) a renforcé ses pouvoirs de contrôle en lui permettant, lorsqu'un investissement a été réalisé sans autorisation préalable, de formuler une injonction à l'investisseur étranger, éventuellement assortie d'astreinte. Il peut également, lorsque les conditions dont était assortie l'autorisation ont été méconnues, prendre des mesures allant de l'injonction au retrait de l'autorisation d'investissement.

Dans le cas où les intérêts nationaux sont susceptibles d'être compromis, le ministre est autorisé à prendre une ou plusieurs mesures conservatoires comme le retrait des droits de vote irrégulièrement acquis. Enfin, depuis le 1er janvier 2020, le ministère de l'économie peut prendre en compte un éventuel « lien avec un gouvernement ou un organisme public étrangers » pour motiver un refus.

En contrepartie, le contrôle et l'information du Parlement sur les activités de contrôle des investissements étrangers ont été renforcés : le Gouvernement publie annuellement des statistiques sur les investissements étrangers en France et adresse aux Présidents des commissions des affaires économiques des deux assemblées un rapport annuel sur l'action du Gouvernement en matière de contrôle des investissements étrangers. En revanche, il apparaît nécessaire de renforcer le suivi des engagements des investisseurs.

b) Malgré ce renforcement récent du dispositif, les entreprises françaises restent vulnérables face aux stratégies de prédation de puissances étrangères

Juridiquement, le cadre du contrôle des IEF confère donc au ministre de l'économie des pouvoirs lui permettant de protéger les intérêts nationaux. En pratique, toutefois :

faute d'inscription du contrôle des IEF au sein d'une stratégie globale d'intelligence économique, les services compétents des administrations se trouvent généralement devant le fait accompli d'une décision d'investissement par un tiers à l'Union européenne alors qu'une stratégie de veille, de partage et de traitement l'information stratégique en matière économique aurait peut-être permis aux services d'anticiper la prise de contrôle ;

les refus d'autorisation sont très rares : ils doivent être motivés par l'honorabilité de l'investisseur ou par le fait qu'assortir de conditions l'autorisation du ministre ne suffirait pas à assurer la préservation de la sécurité publique, de l'ordre public ou des intérêts de la défense nationale. En 2022, les 131 opérations d'investissements étrangers éligibles au contrôle IEF ont été autorisées. Parmi elles, 53 % ont été assorties de conditions pour préserver les intérêts nationaux.

La protection effective des intérêts nationaux dans le cadre du contrôle IEF est donc en pratique conditionnée à la bonne définition de conditions à même d'apporter des garanties aux entreprises françaises et au bon respect de ces conditions par les investisseurs par la suite.

Or, les autorisations peuvent être assorties de conditions insuffisantes au regard de l'enjeu stratégique que représente l'entreprise pour la France.

À cet égard, l'exemple du projet de rachat des Chantiers de l'Atlantique par l'italien Ficantieri est édifiant, même s'il a finalement été abandonné début 2021 après de nombreux atermoiements. L'accord conclu en 2018 entre la société française STX et son principal concurrent italien, Ficantieri prévoyait que Ficantieri obtienne 50 % du capital auxquels s'ajouteraient 1 % sous la forme d'un prêt de long-terme de l'Agence des participations de l'État. Ce prêt lui transférait le contrôle opérationnel de l'entreprise mais était révocable à certaines échéances en cas de manquements aux engagements industriels du groupe italien qui devait, entre autres, ne pas supprimer d'emplois pendant cinq ans, maintenir le carnet de commande existant en France et ne pas transférer de technologies hors d'Europe. Au bout de douze ans, le prêt devait prendre fin et les 1 % être cédés à Fincantieri.

Le contenu lacunaire du compromis de 2018 avait été dénoncé par la commission des affaires économiques du Sénat en 202020(*). Notamment, il ne permettait pas à l'État d'intervenir en cas de menaces graves et imminentes pour l'intégrité des Chantiers de l'Atlantique et ne prévoyait pas de sanction pour Ficantieri en cas de non-respect de ses engagements contractuels.

De même, le rachat d'une partie des activités d'Alstom par General Electric (GE) en 2015 a montré que les engagements à durée limitée sont souvent ignorés dès la fin de l'échéance. En 2019, GE avait ainsi abondé un fonds de réindustrialisation à hauteur de 50 millions d`euros à la suite du non-respect de son engagement de créer un millier d'emplois en France.

L'expérience de la fusion de l'entreprise française Technip et de la texane FMC Technologies en 2017 a quant à elle montré que l'annonce d'un « mariage entre égaux », avec une gouvernance paritaire peut ensuite se traduire dans les faits par une absorption, et ce avec la bénédiction d'un État actionnaire à 5 % de l'entreprise française via Bpifrance. En effet, malgré les annonces de gouvernance paritaire, deux ans plus tard, seuls trois membres du comité exécutif de Technip FMC étaient des anciens salariés de Technip.

c) Le renforcement juridique du contrôle des investissements étrangers en France entamé depuis plusieurs années doit donc être poursuivi et intégré au sein d'une stratégie globale d'intelligence économique

L'abaissement du seuil de détention capitalistique ou des droits de vote déclenchant le contrôle des IEF mis en oeuvre pendant la crise sanitaire est un dispositif bienvenu, qui n'est d'ailleurs pas inédit en Europe :

- l'Espagne a adopté une mesure temporaire d'abaissement du seuil de contrôle des investissements tiers à l'Union européenne à 10 % au début de la crise sanitaire et l'a récemment prolongée jusqu'en 2024 ;

- l'Allemagne dispose également d'un seuil de contrôle à 10 % des droits de vote pour les investissements étrangers dans certains secteurs sensibles comme les technologies militaires.

Recommandation n° 2 : proroger au-delà du 31 décembre 2023, voire pérenniser, l'abaissement de 25 % à 10 % du seuil des droits de vote déclenchant le contrôle des investissements réalisés par des investisseurs tiers à l'Union européenne au sein de sociétés cotées.

Au-delà des seuils de contrôle des IEF, le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre des conditions qui accompagnent les autorisations d'investissement doivent être renforcés.

Les conditions peuvent être fixées sur un horizon de temps long - par exemple, plus d'une dizaine années - et il importe qu'elles soient respectées sur toute la durée fixée, sous peine de remettre en cause la validité de l'autorisation d'investissement. Il est donc crucial que les administrations centrales disposent de moyens suffisants pour contrôler l'effectivité du respect de ces conditions dans le temps et constater, éventuellement sur pièce et sur place, la réalité de la mise en oeuvre des engagements : une déclaration d'intention de l'investisseur ne saurait faire office de preuve de respect des conditions assortissant l'autorisation. Le contrôle exercé par les services du ministre de l'économie doit être à la hauteur des prérogatives étendues dont il dispose pour faire appliquer ces conditions.

Recommandation n° 3 : assurer le suivi dans le temps des engagements des investisseurs dont l'autorisation d'investissement est assortie de conditions en confiant cette mission à la direction générale du Trésor.

De plus, l'évaluation de ces engagements est laissée entièrement à la main de l'administration centrale, sans consultation, association ou information ni des collectivités, ni de la représentation nationale.

Si les publications et les rapports du Gouvernement aux assemblées parlementaires introduits par la loi Pacte sont bienvenus, un temps spécifique de débat annuel dédié au contrôle des IEF permettrait à la représentation nationale d'adresser ses interrogations au Gouvernement et de relayer les préoccupations des collectivités territoriales concernant les investissements étrangers réalisés sur leur territoire.

Recommandation n° 4 : instaurer un débat annuel sur l'intelligence économique au Parlement qui prendra en compte la publication du rapport annuel de la direction générale du Trésor sur le contrôle des investissements étrangers en France (IEF) et le respect des engagements des investisseurs.

2. Mieux protéger le monde de la recherche des influences étrangères

En septembre 2021, le rapport d'André Gattolin au nom de la mission d'information du Sénat sur les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français21(*) dressait le constat d'une large sous-estimation des risques d'ingérences étrangères dans le milieu académique en France. Les rapporteurs souhaitent réaffirmer leur soutien aux conclusions et recommandations de ce rapport, qui démontrent également la nécessité de renforcer nos moyens d'intelligence économique.

En réalité, la France est une cible de choix. Nos établissements universitaires et de recherche sont fragiles : les rémunérations et les conditions de travail y sont moins favorables que dans d'autres pays. Ces établissements sont soumis à des injonctions contradictoires sur l'accueil d'étudiants étrangers et le renforcement des contrôles tout en étant autonomes dans leur gestion administrative. Enfin, la culture de l'ouverture du monde de la recherche le rend réticent à adopter une attitude proactive de détection des tentatives d'ingérences et de défense d'intérêts scientifiques nationaux.

Pour renforcer l'état d'alerte du monde académique face aux influences étrangères, ce rapport recommande par exemple de créer un observatoire des influences étrangères et de leurs incidences sur l'enseignement supérieur et la recherche, qui associerait universitaires et administrations dans une logique interministérielle. Il souligne également l'importance de la sensibilisation des collectivités territoriales, notamment des régions et des grandes métropoles sur ces sujets, compte tenu de leur place au sein des conseils d'administration des établissements d'enseignement supérieur.

Au niveau national, le rapport préconise d'ériger la transparence et la réciprocité en principes cardinaux de toute coopération universitaire internationale et d'étendre le dispositif de protection du patrimoine scientifique et technique de la Nation (PPST) à l'ensemble des disciplines universitaires en les adaptant aux enjeux spécifiques des sciences humaines et sociales, qui en sont exclues.

En effet, les activités de recherche sensibles font partie des actifs stratégiques à protéger. Dans le contexte actuel de tensions sur les ressources énergétiques, les matériaux critiques et les chaînes d'approvisionnement mondiales, la course aux technologies critiques est exacerbée : compte tenu de leur caractère souvent dual, ces dernières génèrent souvent aussi bien un avantage compétitif que stratégique.

Les menaces touchant les acteurs de la recherche peuvent prendre de multiples aspects :

- recrutements de personnels cherchant à capter des savoirs et non pas à faire progresser la communauté scientifique ;

- candidats au parcours brillant dont les performances en poste génèrent un doute sur l'identité ou dont le niveau semble être bien supérieur au niveau requis par le poste ;

- collaborations déséquilibrées ;

- détournement de l'objet initial des recherches à des fins offensives ;

- entretiens contre rémunération avec des experts internes sous couvert d'études de marché ;

- présence dans les locaux à des horaires anormaux ;

- prise de vue dans les laboratoires environnants, etc.

À ce titre, les guides pratiques et vadémécum sur le modèle de celui élaboré en 2015 par la délégation interministérielle à l'intelligence économique (D2IE) sur les principes directeurs pour la mobilité internationale des scientifiques et des experts devraient être largement diffusés par les administrations publiques compétentes auprès des organismes dont elles assurent la tutelle.

La Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) publie chaque mois un « Flash ingérence » présentant des actions d'ingérence économique dont des sociétés françaises sont régulièrement victimes. L'édition de juin 2023 est dédiée aux risques associés aux captations de savoir-faire dans la recherche fondamentale. La DGSI y souligne la forte sous-estimation des risques d'ingérences dans la recherche fondamentale par rapport à la recherche appliquée. La recherche fondamentale est pourtant largement ciblée par des universités étrangères cherchant à combler un retard scientifique ou technologique par rapport à la France. Ces États étrangers peuvent ensuite utiliser le produit de cette recherche fondamentale à des fins appliquées pour développer des produits en toute autonomie : il existe donc un risque non négligeable de captation à des fins militaires de ces recherches, engendrant un risque réputationnel important pour les structures françaises de la recherche.

Exemple d'ingérence étrangère au sein d'une structure française de la recherche.
Source : Flash ingérence DGSI n°95 - Juin 2023

Pour juguler ces risques, la DGSI recommande aux organismes de recherche de sensibiliser tout leur personnel aux enjeux de protection du patrimoine scientifique et technique (PPST) de la Nation, d'assurer un niveau de sûreté suffisant des bâtiments et d'entamer une réflexion sur les risques de détournement à fins militaires de toutes les recherches menées. La création de zones à régime restrictif, à protection administrative définie, peut également être envisagée sur une partie du laboratoire afin d'écarter certains profils risqués.

Le schéma directeur pour l'intelligence économique du CEA

Le commissariat général à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) s'est doté en juin 2022 d'un Schéma directeur pour l'intelligence économique (SDIE) élaboré sous la supervision d'un comité de pilotage réunissant des représentants de la direction générale. Il se structure en deux volets : un volet « stratégique » pour les grandes orientations de la mission « intelligence économique » à court et moyen terme et un volet « opérationnel » pour le plan d'actions de sa mise en oeuvre, notamment concernant les compétences métiers, les outils techniques ainsi que les besoins financiers en investissement et en fonctionnement.

La mise en oeuvre du SDIE repose sur une organisation de la fonction d'intelligence économique en réseau au sein du CEA : plaçant le CEA en « bon élève », le SDIE précise d'ailleurs que « fonction transverse par nature, l'intelligence économique doit participer au décloisonnement sélectif de l'information à travers une organisation en réseau, reposant sur des structures légères en ressources, réparties au sein des différentes Directions opérationnelles et fonctionnelles. » L'animation du Réseau est confiée à un Référent positionné au sein d'une direction transversale, pour dépasser la dimension purement sécuritaire de la discipline.

La structuration de cette démarche d'intelligence économique avait été inscrite dans le contrat d'objectifs et de performance (COP) conclu pour 2021 et 2025 entre l'État et le CEA.

Le développement de démarches d'intelligence économique au sein des organismes de recherche doit donc être encouragé par les pouvoirs publics. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut des contrats d'objectifs et de performance (COP) ou de moyens (COM) avec les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche dont il assure la tutelle. Ces COP constituent un support pertinent pour encourager la mise en place de pratiques d'intelligence économique. De plus, ils représentent un moyen de toucher une large partie de la recherche française à travers les 26 organismes publics de recherche (CNRS, CNES, Ifremer, CEA, INRIA, INRAE, etc.) et les centaines d'universités, de grandes écoles et autres établissements d'enseignement supérieur comme les pôles universitaires d'innovation (PUI).

Recommandation n° 5 : inciter chaque organisme de recherche à se doter d'un schéma directeur pour l'intelligence économique - à l'instar de ce qui a été mis en place au sein du CEA - à l'aide d'un référentiel commun aux organismes de recherche sur les risques de captation des informations scientifiques et technologiques. Les inciter également à nommer un référent pour l'intelligence économique.


* 9  Décret n° 2019-206 du 20 mars 2019 relatif à la gouvernance de la politique de sécurité économique.

* 10 Article L. 151-1 du code monétaire et financier.

* 11 Article L. 151-2 du même code.

* 12 Article L. 151-3 du même code.

* 13 Article R. 151-8 du code monétaire et financier.

* 14  Décret n° 2005-1739 du 30 décembre 2005 réglementant les relations financières avec l'étranger et portant application de l'article L. 151-3 du code monétaire et financier.

* 15  Décret n° 2014-479 du 14 mai 2014 relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable.

* 16  Décret n° 1590 du 31 décembre 2019 relatif aux investissements étrangers en France.

* 17  Décret n° 2020-892 du 22 juillet 2020 relatif à l'abaissement temporaire du seuil de contrôle des investissements étrangers dans les sociétés françaises dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé.

* 18  Décret n° 2022-1622 du 23 décembre 2022 relatif à l'abaissement temporaire du seuil de contrôle des investissements étrangers dans les sociétés françaises dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé.

* 19  Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 20  Rapport d'information n° 84 de Mme Sophie Primas, « Le projet de cession des Chantiers de l'Atlantique : éviter l'erreur stratégique, construire l'avenir », commission des affaires économiques du Sénat, déposé le 28 octobre 2020.

* 21  Rapport d'information n° 873 de M. André Gattolin, « Mieux protéger notre patrimoine scientifique et nos libertés académiques »de la mission d'information du Sénat relative aux influences étatiques extra-européennes sur le monde académique et de la recherche, déposé le 29 septembre 2021.