Rapport d'information n° 72 (1995-1996) de MM. Jacques GENTON et Claude ESTIER , fait au nom de la délégation pour l'Union européenne, déposé le 15 novembre 1995

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N ° 7 2

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996


Annexe au procès-verbal de la séance du 15 novembre 1995.

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne (1)

sur

la XIII e Conférence des Organes Spécialisés dans les Affaires Communautaires qui s'est tenue à Madrid le 8 novembre 1995,

Par MM. Jacques GENTON et Claude ESTIER,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de MM Jacques Genton, président. James Bordas. Claude Estier, Pierre Fauchon, Philippe François, vice-présidents ; Nicolas About, Michel Caldaguès. Jacques Habert, Emmanuel Hamel, François Lesein, Paul Loridant, Charles Metzinger, secrétaires, Robert Badinter, Denis Badré, Gerard Delfau, Mme Michelle Demessine, MM Charles Descours. Ambroise Dupont, Jean François-Poncet, Yves Guéna, Christian de la Malène. Pierre Lagourgue, Lucien Lanier, Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jacques Oudin, Guy Penne, Mme Danièle Pourtaud, MM Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jacques Rocca Serra, André Rouvière, Jean-Pierre Tizon, René Trégouët, Marcel Vidal, Xavier de Villepin.

INTRODUCTION

Mesdames. Messieurs.

Les enseignements que l'on peut tirer de la XIII ème Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) qui s'est tenue à Madrid le 8 novembre, comportent certains aspects positifs. En effet, la délégation du Sénat a pu constater une évolution des esprits, dans diverses délégations, par rapport à la COSAC de Paris. Confrontés au constat d'une faille qui a tendance à s'élargir, dans certains pays, entre les opinions publiques et la construction européenne, nombre de participants ont été amenés à considérer qu'une plus étroite association des Parlements nationaux a la vie de l'Union européenne pourrait être un moyen de rapprocher celle-ci des préoccupations des citoyens et de consolider sa légitimité démocratique.

De nombreux intervenants ont ainsi, insisté sur la nécessité d'introduire dans le traité sur l'Union européenne des garanties de délai assurant aux Parlements nationaux la possibilité de se prononcer sur les propositions de la Commission européenne avant les délibérations du Conseil. Plusieurs ont souligné l'importance d'un meilleur respect du principe de subsidiarité pour apaiser les inquiétudes ou les perplexités des opinions publiques face à un interventionnisme juridique de la Communauté pouvant sembler foisonnant ; le rôle que pourraient jouer les Parlements nationaux dans la concrétisation de ce principe a été évoqué à diverses reprises. Enfin, - une fois les malentendus terminologiques atténués, sinon dépassés - l'idée d'organiser davantage les échanges de vues entre Parlements nationaux et l'expression collective de ceux-ci semble recueillir un plus large écho, dès lors qu'il est admis que cette expression doit se développer à partir des instances existantes, c'est-à-dire de la COSAC. Il reste manifestement bien des méfiances à désarmer, mais cette idée paraît peu à peu pénétrer parmi les thèmes du débat institutionnel communautaire, ce qui constitue un indéniable progrès si l'on se réfère à la situation qui prévalait avant les débats de ratification du traité de Maastricht.

À côté de ces motifs de relative satisfaction, la XIII ème COSAC a également apporté à la délégation française des motifs d'inquiétude.

Il n'est assurément pas facile d'organiser les réunions de la COSAC, qui rassemblent des parlementaires des vingt-quatre assemblées des quinze États membres, auxquels s'ajoute une délégation du Parlement européen. Ces réunions étant organisées à chaque fois par un Parlement différent, celui du pays exerçant la présidence de l'Union, le Parlement organisateur est inévitablement confronté à des difficultés dont il n'a qu'une expérience indirecte ou ancienne.

Le Parlement espagnol est parvenu à assurer dans d'excellentes conditions matérielles le déroulement de la XIII ème COSAC alors que les aléas de la vie politique de l'Espagne avaient fait du 8 novembre une journée particulièrement chargée pour ses propres activités intérieures.

Cependant, alors que la COSAC de Paris avait fait apparaître la difficulté d'organiser convenablement les débats sur une journée et demie, durée qui paraissait à tout le moins le minimum requis pour assurer l'expression de tous et permettre le rapprochement éventuel des positions par le dialogue, des contraintes de calendrier ont conduit la présidence espagnole à ramener la durée des débats à une seule journée, ce qui a quelque peu transformé la réunion en une épreuve d'endurance et n'a pas facilité l'échange constructif des points de vue. De plus, la journée choisie se situait, contrairement à l'habitude, en milieu de semaine : ce choix, comme on pouvait le prévoir, a empêché certaines délégations d'être au complet, voire d'être présentes, comme ce fut le cas pour la délégation allemande.

D'autres éléments ont contribué à ce que la XIII ème COSAC s'achève, aux yeux de certaines délégations, dans un climat de déception ou de frustration.

D'une manière générale, la délégation du Sénat estime que la COSAC a tout à gagner à s'inspirer, pour la direction de ses débats, de la tradition parlementaire qui veut que la présidence d'une assemblée ait un rôle arbitral, qu'elle s'attache avec impartialité au déroulement ordonné de la séance et veille à donner un caractère constructif aux débats, tout en assurant la sérénité de ceux-ci. Quiconque a eu à exercer cette fonction sait sa difficulté et tout ce qu'elle demande de tact et d'effort sur soi. En ce sens, il paraît souhaitable que les fonctions de président et de rapporteur soient nettement distinctes au cours de chaque séance en sorte que la présidence ne puisse donner le sentiment qu'elle s'implique directement dans les débats et qu'elle cherche à faire aboutir ses propres vues quant à la tournure que doit prendre la discussion.

Par ailleurs, on peut souligner la grande efficacité de la coutume, qui s'était dégagée lors des précédentes COSAC d'adresser préalablement aux délégations un questionnaire sur les thèmes retenus par la « troïka », et d'élaborer des rapports introductifs à partir des réponses. Cette pratique permettait d'encadrer les débats et. partant, de leur donner une signification plus claire. Au contraire, des débats non préparés, dont seul le thème est connu, et au sujet desquels quinze délégations nationales sont amenées à s'exprimer, sont toujours menacés de confusion et peuvent donc difficilement avoir toute la portée souhaitable.

On peut même aller plus loin et se demander s'il ne serait pas souhaitable que les débats de la COSAC non seulement se déroulent à partir de rapports introductifs, mais se réfèrent également à un projet de texte.

Le règlement actuel de la COSAC lui permet d'ores et déjà d'adopter un texte, sur la base d'un projet préparé par la « troïka » : cependant le texte doit recueillir un consensus pour être adopté, ce qui explique sans doute que cette procédure n'ait pas été utilisée jusqu'à présent : seules sont éventuellement publiées des « conclusions de la présidence » qui n'engagent qu'elle et qui doivent avoir un caractère limité et nuancé pour ne pas trahir la réalité d'une assemblée que caractérise son fort pluralisme.

Dès lors, sans doute faudrait-il réfléchir à la possibilité pour la COSAC d'adopter, dans des conditions de majorité à définir, des suggestions à l'intention du Conseil des ministres. À la condition d'être encadrée par une procédure suffisamment stricte, une telle formule permettrait aux débats de la COSAC d'avoir une conclusion, quitte à garantir aux délégations la possibilité de notifier leurs éventuelles réserves, en complément du texte qui serait ainsi adopté.

Faute de la perspective d'une conclusion et d'un vote, des débats Parlementaires risquent toujours de paraître académiques pour ne pas dire vains. quel que soit l'intérêt que présentent par ailleurs les rencontres interparlementaires européennes en termes de connaissance réciproque et d'échange d'expériences.

La délégation du Sénat, à l'issue de la XIII ème COSAC, a le sentiment que cette instance coutumière est aujourd'hui à la croisée des chemins :

- ou bien elle parvient à se doter de méthodes de travail efficaces et se fixe pour but d"être un véritable instrument d'association des Parlements nationaux à la construction européenne ; on peut penser que la reconnaissance de son existence et la mention de ses missions par le traité ne pourraient qu'aider à aller en ce sens ;

- ou bien elle pourrait connaître un dépérissement plus ou moins rapide ; l'absence de tout représentant parlementaire, à la XIII ème COSAC, des deux assemblées du pays le plus peuplé de l'Union est à cet égard un « signal » préoccupant, même si l'on s'accorde à penser qu'elle ne résulte que de problèmes d'emploi du temps.

Un dépérissement de la COSAC n'irait naturellement pas dans le sens souhaité par la délégation du Sénat qui, bien qu'ayant eu depuis l'origine de la COSAC des compositions variées, a toujours cherché sous diverses formes à favoriser les liens entre les Parlements nationaux et l'association plus large de ceux-ci au processus européen. Elle forme donc le voeu que la XIV ème COSAC, puis la Conférence intergouvernementale de 1996, soient autant d'étapes dans le développement du rôle individuel et collectif des Parlements nationaux pour réduire le « déficit démocratique » de la construction européenne.

II. LES ACTIVITÉS DE LA XIIIème COSAC

Le 7 novembre au soir, les délégués ont tout d'abord été reçus dans les locaux de la région autonome de Madrid et ont entendu des allocutions de M. Alberto Ruiz-Gallardon, président de la région autonome, puis de Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente de la commission mixte pour les affaires européennes du Parlement espagnol, et à ce titre présidente en exercice de la COSAC. Ensuite, les délégués ont été reçus dans les locaux du Sénat et ont entendu des allocutions de M. Juan José Laborda, président du Sénat, et de Mme Nicole Fontaine, vice-présidente du Parlement européen.

Les débats ont été concentrés sur la journée du 8 novembre.

Les délégués ont tout d'abord entendu M. Juan José Laborda, président du Sénat, qui a souligné que la question du déficit démocratique de l'Union concerne tant les Parlements nationaux que le Parlement européen. L'extension des compétences communautaires a renforcé le rôle des exécutifs. Les Parlements nationaux l'ont accepté implicitement en ratifiant les traités, mais cette situation est vécue de manière différente selon les Parlements nationaux, et les réactions des uns et des autres à cette situation a alimenté un débat permanent au sein de la COSAC depuis plusieurs années. Une évolution se dessine vers une conception du contrôle qui ne soit pas seulement interne à chaque État, mais possède une dimension communautaire. Dans ce domaine, les Parlements nationaux ont été précédés par les régions, qui ont obtenu la création à l'échelon communautaire d'un comité dont l'influence est croissante. Ces difficultés des Parlements nationaux ont lieu alors que la conférence de 1996 et la perspective de l'élargissement confrontent l'Union à des défis majeurs. Dans ce contexte, les Parlements nationaux doivent être à la fois des moteurs de l'intégration européenne et des instances de critique.

Puis les délégués ont entendu M. Félix Pons, président du Congrès des députés, qui a souligné le risque de voir se développer une coupure entre les institutions européennes et les citoyens alors que la construction européenne va aborder les échéances de la conférence de 1996 et de l'entrée dans la troisième phase de l'Union économique et monétaire. Les COSAC doivent favoriser une harmonisation du traitement des affaires européennes au sein des Parlements nationaux ainsi qu'une coopération entre ces derniers. Il existe un large accord pour reconnaître le rôle des Parlements nationaux et souhaiter son renforcement : mais la traduction pratique de ce souhait demeure un problème. L'Union doit être représentative, et donc soumise à un contrôle étroit : les Parlements nationaux, étant proches des citoyens, peuvent beaucoup contribuer à concrétiser cette exigence. La COSAC doit militer pour la simplification du droit communautaire et la clarification des institutions.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a exprimé à son tour le souhait que la COSAC s'efforce de concourir à une clarification institutionnelle.

*

Puis les délégués ont entendu M. Javier Solana, ministre des Affaires étrangères de l'Espagne et président en exercice du Conseil des ministres de l'Union, qui a évoqué le déroulement de la présidence espagnole en apportant notamment les précisions suivantes :

- l'Union continuera à jouer un rôle important dans le processus de paix au Proche-Orient : elle s'efforcera de mettre en place un accord de coopération avec l'autorité palestinienne après les élections.

- la visibilité de l'action de l'Union vis-à-vis de l'ex-Yougoslavie est notamment assurée par le rôle actif du médiateur Carl Bildt ; elle se manifestera également dans l'importance de l'aide à la reconstruction.

- l'Union a respecté ses engagements au sujet des relations avec les PECO et s'efforce de parvenir à un véritable partenariat avec la Russie.

- le Conseil est satisfait des efforts accomplis par la Turquie et souhaite que l'accord de libre-échange avec ce pays soit approuvé par le Parlement européen.

- la politique méditerranéenne se matérialisera dans une déclaration portant à la fois sur les aspects politiques et de sécurité et sur les aspects économiques, avec la perspective d'une zone de libre échange dans quelques années : le programme MEDA constitue le volet « coopération » de cette politique.

- la présidence s'est efforcée de développer les liens avec l'Amérique latine, notamment avec les pays du Mercosur ainsi qu'avec le Chili et le Mexique ; elle a également agi en faveur d'une relance des liens transatlantiques, avec l'objectif de parvenir à une nouvelle déclaration euro-américaine, même si une zone de libre-échange avec les États-Unis n'est pas envisagée pour le proche avenir.

- les doutes des citoyens sur la construction européenne proviennent en partie de l'accroissement du chômage depuis la conclusion du traité de Maastricht ; les efforts des États pour améliorer l'emploi et la croissance doivent converger davantage ; des avancées significatives sont intervenues en vue de la réalisation de l'Union économique et monétaire.

- l'Union sera confrontée dans les prochaines années à de nombreux défis : la conférence intergouvernementale, l'élargissement à l'Est, la mise en place de la monnaie unique, la révision des perspectives financières.

- la présidence a intensifié les relations avec le Parlement européen ; elle souhaite que les quatre Parlements nationaux qui n'ont pas encore ratifié l'accord sur les ressources propres le fassent rapidement.

M . Fernando Moran (Parlement européen) a plaidé pour que la conférence de 1996 procède à un accroissement des pouvoirs du Parlement européen.

Le ministre a souligné la difficulté des problèmes que doit traiter cette conférence. La perspective de l'élargissement rend nécessaires certaines adaptations, mais un consensus n'a pas encore été trouvé. Le renforcement du deuxième pilier pose d'épineux problèmes ; une communautarisation partielle du troisième pilier semble pouvoir être envisagé. Une extension du vote à la majorité qualifiée et une simplification du rôle du Parlement européen sont généralement souhaitées. Un certain consensus semble se dessiner pour un accroissement du rôle des Parlements nationaux, mais des points importants restent en suspens.

M . Robert Urbain (Belgique) a interrogé le ministre sur l'ex-Yougoslavie et sur les relations avec les PECO.

M . Eisso Woltjer (Pays-Bas) a posé des questions sur les entraves israéliennes à l'aide européenne aux Palestiniens, sur le coût de l'aide à la reconstruction de l'ex-Yougoslavie, sur les relations avec la Libye et l'Algérie, et sur les perspectives d'accord avec le Maroc.

M . Romualdo Coviello (Italie) a plaidé pour une politique méditerranéenne plus active, orientée non seulement vers la libéralisation des échanges, mais aussi vers le développement et la coopération. Il a souhaité que la conférence euro-méditerranéenne de Barcelone donne naissance à un forum permanent.

En réponse, le ministre a apporté les précisions suivantes :

- la visibilité de l'action de l'Union vis-à-vis de l'ex-Yougoslavie doit être renforcée ; son rôle est essentiel dans l'aide humanitaire, le financement de l'action de l'ONU et l'aide à la reconstruction : or, ce sont les États-Unis qui occupent le devant de la scène.

- vis-à-vis des PECO, l'Union doit se concentrer sur les problèmes posés par l'adaptation de la PAC et des fonds structurels afin de pouvoir définir des modalités réalistes pour l'élargissement.

- Israël doit assouplir sa position afin de permettre un meilleur acheminement de l'aide dans la bande de Gaza ; la levée des barrages est un des objectifs prioritaires de l'autorité palestinienne.

- le coût de la reconstruction de l'ex-Yougoslavie est impossible à évaluer aujourd'hui ; les États-Unis souhaitent que l'Union assume 60 % de l'aide internationale, l'Union souhaite s'en tenir à un tiers.

- la Libye n'est pas associée à la conférence euro-méditerranéenne ; la situation de l'Algérie, où des élections vont avoir lieu n'est pas comparable.

- l'accord avec le Maroc est bloqué par les Pays-Bas pour un problème dont l'enjeu ne dépasse pas 15 millions d'écus ; la présidence espère un déblocage rapide, après trois ans de négociations. L'objectif est celui d'une zone de libre échange autour de l'an 2000.

- la conférence européenne comprendra, outre les Quinze, douze pays méditerranéens : seule la Libye, qui n'a pas d'accord d'association avec l'Union, en est exclue.

*

Puis les délégués ont entendu M. Carlos Westendorp, président du groupe de réflexion composé des représentants des ministres des Affaires étrangères et chargé de préparer la conférence intergouvernementale de 1996.

M. Carlos Westendorp a indiqué que le rapport du groupe de réflexion serait présenté le 6 décembre en vue du Conseil européen des 14 et 15 décembre. La conférence de 1996 devra être une étape supplémentaire vers une Union plus efficace, plus démocratique et plus transparente ; cette étape s'appuiera sur l'acquis communautaire. La construction européenne sera confrontée dans les prochaines années à une série de rendez-vous entre lesquels il conviendra d'éviter les interférences ; la tâche sera difficile, mais la Communauté s'est montrée capable, dans le passé, de relever des défis analogues. Les opinions publiques des États membres éprouvent un sentiment d'insécurité auquel il convient de répondre tant en ce qui concerne l'emploi et la monnaie qu'en ce qui concerne la criminalité, le terrorisme et la drogue.

Évoquant la réforme des institutions, M. Carlos Westendorp a évoqué la possibilité de communautariser partiellement certains aspects du troisième pilier de l'Union et de renforcer les mécanismes intergouvernementaux pour les autres aspects de ce pilier.

Abordant le contrôle parlementaire, il a souhaité que le Parlement européen soit le colégislateur de l'Union, les Parlements nationaux s'attachant quant à eux à contrôler les Gouvernements. Un délai minimum de quatre semaines devrait être garanti aux Parlements nationaux pour l'examen des propositions d'actes communautaires. La coopération entre le Parlement européen et les Parlements nationaux devrait être développée. Une seconde Chambre pèserait trop sur le processus communautaire ; un congrès rassemblant parlementaires européens et nationaux ne parait pas une solution satisfaisante. Le haut conseil consultatif proposé par la France semble poser beaucoup de problèmes. Sans doute serait-il finalement suffisant de faire en sorte que la COSAC fonctionne mieux : il n'est cependant pas souhaitable d'institutionnaliser cette instance, qui n'a pas besoin de personnel propre.

Enfin, M . Carlos Westendorp a souhaité une amélioration du fonctionnement du Conseil, notamment grâce à une plus juste pondération des voix.

Lord Tordoff (Royaume-Uni) s'est prononcé contre une communautarisation de la PESC et a souligné le rôle irremplaçable des Parlements nationaux dans ce domaine. Il a demandé que les documents que le Conseil examine à ce sujet soient transmis aux Parlements nationaux suffisamment longtemps avant la prise des décisions.

M . Maurice Ligot (France) s'est prononcé en faveur d'une base légale de la COSAC et a souligné l'intérêt de la proposition française de haut conseil consultatif, qu'il a jugé être le meilleur moyen pour mieux garantir le respect du principe de subsidiarité.

M . Umberto Cecchi (Italie) a déploré la timidité de la mise en oeuvre de la PESC et a souhaité que l'Europe devienne plus indépendante des États-Unis. Puis il a plaidé pour la mise en place d'une politique communautaire vis-à-vis du problème de l'immigration.

Mme Nicole Catala (France) s'est inquiétée de la perspective de voir quelques pays seulement participer à la monnaie unique, en soulignant que l'on risquait d'assister à une fragmentation du marché intérieur. Puis elle a rappelé qu'un groupe de travail, composé d'experts parlementaires de plusieurs pays, s'était mis en place à l'issue de la COSAC de Paris, afin de réfléchir sur l'association des Parlements nationaux, et a souhaité que les conclusions de ce groupe alimentent la réflexion de la COSAC.

En réponse, M. Carlos Westendorp a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant de la politique extérieure, il existe un très large accord entre les États membres pour considérer que la politique commerciale doit être menée en suivant la méthode communautaire, alors que la politique diplomatique doit relever d'une approche intergouvernementale avec des mécanismes spéciaux.

- la proposition française de haut conseil consultatif de la subsidiarité suscite de fortes réserves ; un organe composé de deux représentants par pays ne serait pas suffisamment représentatif ; avec un seul représentant, il deviendrait une copie du Conseil. Mais le groupe de réflexion est ouvert aux suggestions et continue à réfléchir.

- des discussions sont en cours pour renforcer les liens avec les États-Unis ; il faut oeuvrer dans le contexte de l'OTAN qui est le principal pilier de la défense de l'Union ; le développement des liens transatlantiques est une des priorités de la présidence espagnole.

- l'Union économique et monétaire est un exemple de géométrie variable transitoire : mis à part le Danemark et le Royaume-Uni, tous les États membres sont appelés à passer à la troisième étape au bout d'un certain temps. Dans l'intervalle, il conviendra de définir un lien entre les pays du « noyau dur » et ceux qui resteront à l'extérieur.

- concernant l'association des Parlements nationaux, le groupe de réflexion manque d'idées et est ouvert à toute suggestion.

Mme Raymonde Dury (Parlement européen) a rappelé que les Parlements nationaux avaient été invités par le Parlement européen à certaines de ses activités concernant la conférence intergouvernementale. Puis elle a souligné que le Parlement européen avait relevé le défi de l'opinion publique en organisant des auditions où de très nombreuses associations avaient pu s'exprimer, et qu'il en était ressorti que les citoyens demandaient avant tout une Europe plus efficace.

Lord Slynn of Hadley (Royaume-Uni) a souligné le rôle important de la Cour de justice et s'est interrogé sur l'avenir de cette institution. Comprendra-t-elle vingt-cinq juges en cas d'élargissement à l'Est ? Comment évoluera le tribunal de première instance ? Le fonctionnement de la Cour deviendra-t-il plus transparent ? La Cour recevra-t-elle compétence pour les matières ressortissant au troisième pilier ?

M. Elmar Brok (Parlement européen) a souhaité que soit garantie l'information en temps utile des Parlements nationaux sur les projets communautaires. Il a jugé souhaitable que les Parlements nationaux puissent se faire entendre au sujet de la subsidiarité et que la déclaration n° 13 annexée au traité de Maastricht soit pleinement appliquée.

M. Luis Manuel Viana E Sa (Portugal) a regretté que la XIII ème COSAC soit trop courte pour permettre un véritable débat entre parlementaires. Il a exprimé la crainte que certains citoyens ne s'écartent de l'Union ; soulignant les dangers du dumping environnemental et social, il a exprimé le souhait que la politique sociale ait une place accrue dans le traité. et la crainte que les programmes de convergence prévus dans le cadre de l'Union économique et monétaire n'aboutissent à une dégradation de l'emploi.

En réponse, M . Westendorp a apporté notamment les précisions suivantes :

- les préoccupations britanniques concernant la CJCE ne sont pas partagées par les autres États membres. La Cour fonctionnera peut-être moins bien avec un nombre de juges élevé, mais on peut imaginer que soient mis en place plusieurs formations de jugement et un tribunal de première instance comportant des chambres.

- la déclaration n° 13 concernant les Parlements nationaux doit être renforcée, afin de donner à l'Union une double légitimité démocratique, à la fois nationale et européenne.

- les questions sociales et environnementales ne sont pas traitées par le groupe de réflexion car elles n'entrent pas, malgré leur importance, dans son mandat.

- la réalisation de l'Union économique et monétaire n'est pas un facteur de dégradation de l'emploi.

M . Michael Ferris (Irlande) s'est opposé à l'idée d'une représentation des Parlements nationaux limitée à deux parlementaires par pays et en a conclu qu'il fallait renforcer la COSAC ainsi que les dispositions figurant dans la treizième déclaration annexée au traité de Maastricht. Il a souligné l'importance capitale du problème du chômage et a souhaité qu'il soit abordé dans le traité révisé.

M . Carlos Westendorp s'est déclaré conscient de ce qu'il serait difficile de faire adopter le traité sans donner des garanties aux Parlements nationaux, mais a souligné la difficulté de trouver une solution satisfaisante à ce problème et a indiqué que la COSAC lui paraissait pour l'instant à cet égard le meilleur point de départ. Concernant le chômage, il a exprimé la crainte de donner de faux espoirs en inscrivant dans le traité des articles supplémentaires qui seraient sans effet.

*

Puis les délégués ont procédé à un échange de vues sur le rôle des Parlements nationaux et du Parlement européen dans la nouvelle Union européenne.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a souligné l'importance de la fonction de relais que remplissent les Parlements nationaux à un moment de la construction européenne où les opinions publiques ont le sentiment d'être mises devant le fait accompli à Bruxelles. La solution réside, selon elle, dans la double fonction législative et de contrôle des Parlements nationaux. Reconnaissant l'existence de dysfonctionnements et de carences dans la fonction législative européenne, elle a souhaité que soient étudiées au sein de la COSAC les relations entre les Parlements nationaux et le Parlement européen. Ainsi, si les pouvoirs législatifs de l'Union doivent être étendus à partir d'un transfert de compétences des Parlements nationaux, il faudrait préciser les instruments de cette extension de pouvoirs afin que les Parlements nationaux n'aient pas le sentiment de voir leurs compétences « rognées ». Elle a regretté que les Parlements nationaux s'en tiennent à des doléances et à des plaintes renouvelées à propos de leur insuffisante participation à la construction européenne. Selon elle, il convient d'abord que chacun examine les faiblesses de son propre système national afin que les commissions compétentes sur le fond soient mieux impliquées. Parallèlement, il lui est apparu nécessaire de transmettre plus rapidement les projets d'actes communautaires en établissant un délai minimum de quatre semaines entre leur transmission aux Parlements nationaux et leur adoption. Elle a souhaité, en outre, que les Parlements nationaux travaillent « de concert » avec le Parlement européen au moyen d'un meilleur échange d'informations qui pourrait être rendu obligatoire dans le cadre de la COSAC. Ainsi, il ne lui semble pas nécessaire de créer une nouvelle chambre, ni un comité spécial restreint représentatif des Parlements de l'Union.

Par ailleurs, elle a estimé que la COSAC pourrait traiter de sujets plus concrets et aller jusqu'à faire des propositions à l'occasion de la Conférence intergouvernementale. Cette intervention permettrait à la COSAC d'être mieux entendue et mieux respectée.

M . Ove Fich (Danemark) s'est inquiété des progrès de l'euroscepticisme. L'Union est considérée comme trop éloignée du citoyen et devrait se rendre plus proche. Chaque Parlement national doit développer son contrôle. Il n'est pas nécessaire d'inscrire la COSAC dans le traité. Il faut avant tout accorder du temps aux Parlements nationaux. La COSAC a un rôle à jouer pour favoriser l'échange d'informations entre Parlements.

M . Joël Hasse Ferreira (Portugal) a indiqué ne pas souhaiter la création d'une seconde Chambre pour ne pas enrayer le processus de décision européen, mais a souhaité que l'on parvienne à un système commun pour le contrôle sur la Communauté. Les réunions de la COSAC sont à cet égard trop courtes ; les procédures de cette instance devraient être améliorées. Le contrôle des Parlements nationaux doit s'exercer prioritairement à l'égard des Gouvernements, mais les Parlements devraient pour cela bénéficier de facilités accrues.

M . Robert Urbain (Belgique) a évoqué les travaux du groupe d'experts parlementaires. Souhaitant que la COSAC parvienne à des conclusions sur l'association des Parlements nationaux, il a souhaité que le résultat de ces travaux soient pris en compte dans le débat.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a déclaré que les travaux de ce groupe informel n'avaient pas de valeur officielle et n'avaient pas à être pris en compte, d'autant qu'ils avaient été portés trop tard à la connaissance de la présidence.

Mme Nicole Catala a rappelé que la Conférence des Présidents des Assemblées parlementaires de l'Union européenne avait invité les délégations qui le souhaitaient à mettre en place ce groupe de travail, la participation étant laissée à l'appréciation de chacun. Plusieurs Assemblées ont participé, et il serait souhaitable que les premiers résultats soient présentés à la COSAC.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a déclaré que les commissions européennes des Parlements nationaux n'avaient pas été informées des résultats de ce groupe de travail et que, de toute manière, le fonctionnement de la COSAC était fondé sur la souveraineté de chaque Assemblée. Toute contribution est bienvenue dès lors qu'elle émane d'une Assemblée, mais seulement à ce titre. De plus, l'adoption de conclusions par la COSAC n'a jamais été envisagée.

À propos des conclusions provisoires du groupe de travail. Lord Tordoff (Royaume-Uni) a tenu à signaler que les réponses aux questionnaires avaient été fournies par le secrétariat de la Commission spécialisée de la Chambre des Lords : or ces réponses semblent avoir été considérées comme résultant de délibérations de la Commission, ce qui n'est pas le cas.

M. Patrick Hoguet (France) a évoqué la frustration des opinions publiques face au fonctionnement de l'Union, en indiquant que cela posait un problème institutionnel et politique. Il est certes nécessaire d'améliorer les procédures de contrôle, de garantir des délais d'examen et de développer des contacts interparlementaires. Mais le problème se pose également de savoir si les Parlements nationaux ne doivent pas avoir une représentation collective face à la représentation collective des Gouvernements. Cette représentation collective ne porterait aucune atteinte au rôle du Parlement européen ; pour faire régresser le déficit démocratique, il faut s'appuyer sur les deux niveaux de légitimité, de manière complémentaire et non concurrente. Deux thèmes devraient être privilégiés pour le champ de compétence de cette représentation collective : tout d'abord l'application du principe de subsidiarité, ensuite le contrôle des domaines couverts par des procédures intergouvernementales. S'agissant du principe de subsidiarité. l'avis du Parlement européen est certes utile, mais également celui des Parlements nationaux. S'agissant des domaines relevant de procédures intergouvernementales, l'Union a adopté des méthodes de décision qui ne se ramènent pas à des négociations internationales classiques, puisque le Parlement européen est consulté ; il serait donc logique que les Parlements nationaux disposent, vis-à-vis des deuxième et troisième piliers, des mêmes possibilités que le Parlement européen.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a estimé inutile de discuter de telles propositions, car l'idée d'une représentation collective des Parlements nationaux a été rejetée par la COSAC de Paris. L'idée d'une représentation des Parlements nationaux, au sein du groupe de réflexion chargé de préparer la Conférence de 1996 a été également rejetée. Il n'existe pas de consensus autour de ces idées.

M. Patrick Hoguet (France) a souligné que sa proposition n'avait rien à voir avec la proposition de créer une seconde chambre.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a estimé qu'il n'était pas utile de revenir sur les résultats de la COSAC de Paris et que, au demeurant, la COSAC assurait déjà une représentation collective des Parlement nationaux.

M. Erkki Tuomioja (Finlande) s'est déclaré opposé à l'inclusion de nouvelles dispositions relatives au rôle des Parlements nationaux dans le traité. En effet, les Parlements nationaux n'entrent pas dans le champ de compétence de l'Union et ne relèvent pas des procédures européennes. Le délai minimum d'examen doit être assuré dans le cadre d'un dialogue avec chaque Parlement national.

Puis M . Erkki Tuomioja, après avoir estimé que le processus d'élargissement serait plus long que prévu, a souhaité que la Conférence intergouvernementale réexamine les règles prévues par l'Union économique et monétaire. Le Parlement finlandais prendra une décision distincte sur le passage éventuel à la monnaie unique, car la dénationalisation de la politique monétaire présente des risques pour l'emploi.

M . Cosimo Ventucci (Italie) a estimé que le traité de Maastricht était suffisamment clair en ce qui concerne la troisième phase de l'Union économique et monétaire. En réalité, certains gouvernements veulent limiter la supranationalité ; la Conférence intergouvernementale doit apporter les précisions qui s'imposent.

M . Demetrio Madrid Lopez (Espagne) a souligné que des réflexions parlementaires très diverses ont été menées sur la conférence de 1996, et qu'il n'est pas possible de s'en remettre à la seule participation de deux parlementaires européens au groupe de réflexion intergouvernemental. La COSAC, en raison de son renouvellement constant et de son pluralisme, est une instance représentative qui doit se faire l'écho des préoccupations des citoyens. Il serait souhaitable que la COSAC exprime un point de vue vis-à-vis de la conférence de 1996, notamment qu'elle exprime le souhait d'une institutionnalisation du rôle des Parlements nationaux, c'est-à-dire d'une reconnaissance du rôle de la COSAC. Le cas échéant, une réunion extraordinaire de la COSAC devrait être organisée à cette fin.

Mme Lydie Err (Luxembourg) a présenté les résultats des travaux du groupe d'experts parlementaires qui s'est penché sur l'association des Parlements nationaux au processus européen. Elle a d'abord fait valoir que, si l'on ne voulait pas créer une nouvelle institution représentant les Parlements nationaux, il fallait mieux impliquer ceux-ci dans le fonctionnement de l'Union par une inscription de leur rôle dans le traité. Elle a ensuite souligné qu'il était important d'inscrire également l'obligation de leur transmettre les propositions législatives de l'Union en précisant le moment de cette transmission, qui doit intervenir le plus tôt possible. Elle a enfin insisté sur la nécessité de donner une base légale à la COSAC, c'est-à-dire de reconnaître formellement ce qui existe déjà. Elle a conclu en signalant que ces trois propositions, qui avaient le mérite d'exister, avaient pour but essentiel de fixer les acquis.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, s'est à nouveau opposée à ce que la COSAC examine les conclusions du groupe d'experts parlementaires.

Mme Berit Löfstedt (Suède) a souhaité que les Parlements nationaux s'attachent principalement à contrôler les Gouvernements nationaux, et que les commissions spécialisées s'efforcent prioritairement de sensibiliser les autres parlementaires aux enjeux européens. Elle a jugé impraticable d'insérer un contrôle du principe de subsidiarité dans le processus de décision, à moins d'en venir à une instance plus lourde qui finirait par nécessiter un secrétariat. Tout en estimant souhaitable de poursuivre les réunions de la COSAC, elle a jugé inutile de l'inscrire dans les traités, mais a exprimé le souhait que soient apportées des garanties pour que les Parlements nationaux disposent en temps utile des documents. Elle a enfin demandé qu'il s'écoule davantage de temps entre les réunions du COREPER et les réunions du Conseil.

M Oreste Tofani (Italie) s'est interrogé sur la notion de déficit démocratique, en se demandant si en réalité elle était autre chose qu'une expression des limites du processus européen. À partir d'un certain moment, celui-ci bute sur l'existence d'une diversité culturelle et institutionnelle qu'on ne peut réduire. Le problème est alors de rendre acceptable les décisions. Par exemple le chômage se présente différemment selon les pays ; il faut donc agir en fonction d'analyses spécifiques. Cela milite en faveur d'une participation accrue des Parlements nationaux.

M . Jimmy Hood (Royaume-Uni) a mis en avant l'exigence d'efficacité. La Chambre des Communes est saisie de rapports sur les questions européennes presque chaque semaine et les discussions dans ce domaine sont nombreuses. Un document de la commission spécialisée de la Chambre des Communes a été consacré à la conférence de 1996 : il souligne les difficultés du contrôle. Trop souvent, la discussion doit s'effectuer sur la base de textes officieux : les délais de transmission et de traduction sont trop longs et le langage adopté souvent obscur. Il est essentiel que les propositions de la Commission européenne soient transmises en temps utile. La Chambre a reçu plus de 90 projets législatifs communautaires depuis le mois de mai : dans de nombreux cas. la décision définitive était déjà prise lorsque la Chambre a pris connaissance de ces projets. Les propositions devraient donc être disponibles quatre semaines au moins avant la décision, pour que les intéressés puissent réagir. La manière dont l'Union fonctionne aujourd'hui tend à la couper des citoyens.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, s'est félicitée du pragmatisme de l'approche britannique et a souhaité à son tour une amélioration des conditions de transmission des documents.

Mme Nicole Catala (France) a noté une certaine évolution des esprits. Le souhait d'une meilleure association des Parlements nationaux est aujourd'hui mieux compris et mieux perçu. La demande de contrôle accru sur Bruxelles qu'expriment les populations est indéniable. Il est souhaitable que les Parlements nationaux et les Cour des Comptes nationales participent au suivi de l'exécution du budget communautaire. Quant au principe de subsidiarité, qui est de nature politique, son contrôle doit être assuré par un organe consultatif émanant des Parlements nationaux. La COSAC doit être mentionnée par les traités pour pouvoir être la base de cet organe dont le besoin est de plus en plus évident dans la mesure où les compétences partagées sont de plus en plus nombreuses, ce qui provoque la confusion. De plus, cette COSAC reconnue permettrait l'expression collective des Parlements nationaux.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a réaffirmé son opposition à ce que la COSAC discute des conclusions du groupe de travail parlementaire. Ceux qui le souhaitent doivent demander une révision des statuts de la COSAC. De plus, l'idée d'intégrer la COSAC dans le traité est rejetée par la plupart des délégations.

M. Bengt Hurtig (Suède) a souligné les incertitudes et les doutes d'une partie de l'opinion. Trop de décisions paraissent prises à huis clos, et cela affaiblit le soutien à l'Union. Aux récentes élections européennes en Suède, 40 % seulement des voix sont allées aux partis favorables à l'Union. Il faut que les Parlements nationaux s'attachent à recréer le lien avec l'opinion publique. Certains aspects de la construction européenne paraissent critiquables, par exemple l'adhésion des États pour une durée illimitée, le recours à l'article 235, ou encore certaines tendances de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes.

M. Eisso Woltjer (Pays-Bas) a estimé que les propositions sur le rôle des Parlements nationaux manquaient souvent de substance. Le problème est de savoir ce que l'on veut traiter au niveau européen. Le Parlement européen a une vision trop extensive des compétences communautaires. Il faut aborder plus à fond le problème de la subsidiarité, car c'est l'intérêt de tous que de faire la clarté sur la répartition des compétences. Une Europe proche des citoyens demande un respect plus strict de la subsidiarité. Il serait souhaitable que celle-ci donne lieu chaque fois que nécessaire à un débat public au sein du Conseil des ministres. Il est regrettable qu'une liste des compétences ne figure pas dans le traité. Les hésitations sur l'institutionnalisation du rôle des Parlements nationaux sont compréhensibles, mais il faut bien se résoudre à affronter le problème de la subsidiarité. Il s'agit là d'un problème à trancher au niveau national car on ne peut demander au Parlement européen et à la Commission de déterminer eux-mêmes ce qu'ils doivent faire. Il est nécessaire de présenter des propositions officielles pour concrétiser la subsidiarité.

M. Maurice Ligot (France) a déclaré qu'il existait une assez large convergence entre les Parlements nationaux sur la question de la subsidiarité. Il faut donner une plus grande portée à la déclaration n° 13 annexée au traité de Maastricht. Le Parlement français s'est doté des moyens de contrôle nécessaires pour l'échelon national. Il faut compléter ce contrôle national par une démarche collective des Parlements nationaux. Cela ne nécessite pas une seconde Chambre, mais pourrait s'effectuer par un renforcement de la COSAC, ce que M. Carlos Westerdorp n'a pas exclu. À l'heure actuelle, la COSAC ne se réunit que deux fois par an, toujours pour un temps très bref. Il faut donner une base légale à la COSAC, prévoir des réunions plus fréquentes, donner la possibilité d'adopter des conclusions. Il conviendrait de mettre en place un groupe de travail chargé de formuler des propositions dans ce sens à la conférence intergouvernementale.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a estimé que cette suggestion avait été rejetée à la COSAC de Paris par la majorité des délégations. Au demeurant, elle devrait d'abord être examinée par la prochaine « troïka ».

M. Maurice Ligot (France) s'est interrogé sur l'utilité de débats ne pouvant conduire à des conclusions.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a indiqué que la suggestion proposée par M. Maurice Ligot, ne figurant pas à l'ordre du jour, n'avait pas à être examinée et devait d'abord être adressée à la « troïka ».

M. Renzo Imbeni (Parlement européen) a considéré que le problème de la coopération entre les Parlements nationaux et le Parlement européen avait été oublié lors des derniers propos, alors qu'il importait de renforcer et de consolider cette coopération. Selon lui, la solution passe par la définition de relations politiques entre les groupes de tous les Parlements. À propos de la subsidiarité, il a déclaré qu'il fallait envisager son contrôle aux trois niveaux existants : européen, national et régional. Il s'est opposé à l'insertion, dans le futur traité, de l'obligation de transmission des projets d'actes communautaires aux Parlements nationaux, arguant que le traité ne doit pas être un règlement intérieur, mais une « quasi-constitution européenne ». Regrettant l'absence de contrôle des deuxième et troisième piliers par les Parlements nationaux et par le Parlement européen, il a milité en faveur de la communautaurarisation de ces piliers, laquelle ne lui semble pas défavorable pour les Parlements nationaux puisqu'ils conservent leur pouvoir de contrôle sur leur gouvernement.

*

Puis les délégués ont entendu M. Marcelino Oreja, commissaire européen pour les relations avec le Parlement européen, sur le thème : « Démocratie, efficacité et transparence ».

M. Marcelino Oreja a abordé tout d'abord le thème de la transparence. La décision de la Cour de justice des Communautés européennes sur le cas « Guardian » est un pas en avant important, qui obligera le Conseil à plus de transparence. La Commission, en généralisant la pratique des « livres verts », a déjà pour sa part opté pour la transparence. Il faut poursuivre l'effort pour rendre les normes plus simples et moins nombreuses, et pour les codifier. Peut-être faudrait-il intégrer les dispositions du traité CECA dans le traité de Rome avant 2002. Par ailleurs, on peut envisager une restructuration du traité, en distinguant un noyau dur constitutionnel dont la révision exigerait l'unanimité, le reste pouvant être modifié à la majorité.

Puis le commissaire européen a évoqué la démocratisation de l'Union. Les Parlements nationaux doivent être davantage informés et consultés. Les dispositions de la déclaration n° 13 devraient être incluses dans le traité en sorte que des normes minimales d'intervention des Parlements nationaux soient posées. Par ailleurs, la Commission devrait transmettre les livres blancs aux Parlements nationaux afin qu'ils puissent être impliqués dans les débats de fond avant le dépôt d'une proposition. Les pouvoirs du Parlement européen n'ont pas suffisamment été augmentés par le traité de Maastricht. Il n'y a pas de contrôle juridictionnel sur le troisième pilier alors qu'il s'agit de matières touchant au droit des personnes ; de plus, les pouvoirs du Parlement européen dans ce domaine sont trop réduits. Enfin, il subsiste une importante « zone grise » où les décisions sont prises par accord entre les administrations sans véritable contrôle.

Enfin, le commissaire européen a plaidé pour une Union plus efficace, plus proche des préoccupations des citoyens. La conférence de 1996 devra aborder les thèmes de l'emploi et des services publics. Par ailleurs, la PESC a montré ses limites dans le cas de l'ex-Yougoslavie : un supplément d'intégration est nécessaire pour que l'Union apparaisse comme un acteur crédible.

En conclusion, M . Marcelino Oreja a plaidé pour un « pacte de citoyenneté » qui conduirait à déterminer l'action communautaire à la lumière de l'intérêt des citoyens.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a déclaré approuver les orientations du commissaire européen. Elle a souhaité que la Commission poursuive la pratique des « Livres verts », et que les commissaires européens puissent à l'avenir s'exprimer à leur sujet devant la COSAC. Enfin, elle a estimé que la COSAC partageait très largement les préoccupations exprimées par M. Marcelino Oreja, plus constructives que les lamentations exprimées par certains Parlements nationaux.

Mme Antoinette Spaak (Parlement européen) a rappelé les positions du Parlement européen concernant la transparence, en insistant sur la nécessité de rendre publics les votes au sein du Conseil. Concluant son propos, elle a souligné que les citoyens européens pouvaient, grâce à l'Union, envisager l'avenir avec optimisme.

M. Marcelino Oreja a déclaré approuver les orientations du Parlement européen concernant la transparence et a estimé que la jurisprudence « Guardian » allait entraîner de grands progrès en ce sens.

M. Patrick Moriau (Belgique) a souhaité que l'Europe se rapproche des citoyens. Une institutionnalisation éventuelle du rôle des Parlements nationaux serait utilisée par certains pour faire de l'Europe un bouc émissaire. Pour beaucoup de citoyens, l'Europe est une source d'inquiétude qu'il s'agisse de l'emploi, du dumping, de la guerre dans l'ex-Yougoslavie. La COSAC traite trop souvent des questions institutionnelles, alors qu'il conviendrait d'aborder les problèmes de l'harmonisation sociale et fiscale, ou encore de la lutte contre la toxicomanie, au besoin en s'organisant par ateliers.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a déclaré partager les vues de l'orateur.

M. Antonio Costa Costa (Espagne) a déclaré approuver les orientations exprimées par le commissaire européen et s'est prononcé pour une clarification institutionnelle. Il faut mettre en place une Commission européenne resserrée et plus cohérente, modifier les conditions d'exercice de la présidence du Conseil et la pondération des voix des États membres. Les pouvoirs du Parlement européen doivent être renforcés ; il serait par ailleurs souhaitable que les projets communautaires soient examinés par les Parlements nationaux avant de l'être par le Parlement européen. Enfin, la mise en avant du principe de subsidiarité ne doit pas masquer l'exigence principale, qui est de donner à l'Union les moyens de l'efficacité.

M . Marcelino Oreja, en réponse, a précisé ses vues sur les questions institutionnelles. L'acquis communautaire doit être sauvegardé, et l'Union doit conserver un cadre institutionnel unique. La transparence doit être renforcée, dans la lignée des efforts actuels de la Commission européenne. Les projets communautaires doivent être rapidement communiqués aux Parlements nationaux. Ceux-ci doivent s'en tenir au contrôle sur les Gouvernements à l'échelon national, car à l'échelon communautaire les peuples sont représentés par le Parlement européen. Il ne faut pas créer de seconde Chambre.

*

À l'issue du débat, M. Pafasanias Zakolikos (Grèce) s'est prononcé en faveur de la réactivation de l'article 11 du règlement de la COSAC et a estimé qu'il appartenait à la Présidente d'appliquer cet article. Il a déclaré que les délégations s'étaient unanimement prononcées pour que la COSAC désormais puisse faire entendre sa voix et, notamment, pour que les Parlements nationaux s'expriment à cette occasion. À cette fin, il a demandé que la Présidente résume, sous forme de propositions de conclusion, les compromis atteints par la présente COSAC et les transmette aux quinze Parlements nationaux de l'Union, à la Commission européenne et à M. Carlos Westendorp, ainsi qu'elle l'avait, elle-même, suggéré au début de cette conférence. Il a suggéré, enfin, que ces propositions soient examinées par la prochaine COSAC.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a déclaré que l'article 11 du règlement autorisait seulement la COSAC à se prononcer sur un projet de communiqué établi sous la responsabilité de la « troïka » et qu'il n'était donc pas applicable en l'espèce.

M . Maurice Ligot (France) a alors demandé que la « troïka » soit réunie en suspendant provisoirement les travaux de la COSAC.

Mme Isabel Tocino Biscarolasaga, présidente, a repoussé cette demande en estimant que la prochaine « troïka » ne pouvait avoir d'autre objet que de fixer l'ordre du jour de la prochaine COSAC.

M. Geert Versnick (Belgique) a estimé intéressantes les idées évoquées au cours de la journée et a souhaité que des conclusions en soient tirées pour les travaux ultérieurs de la COSAC. Il a ensuite profondément déploré la stérilité des derniers débats en se demandant quelle serait la réaction des citoyens s'ils voyaient leurs députés, ici présents, dans l'incapacité d'adopter des conclusions au bout d'une journée de discussion. Regrettant qu'un pays important de l'Union ne soit pas représenté au sein de cette Conférence par des parlementaires et appelant à une structuration de la COSAC, il a souhaité que l'on fasse en sorte que la prochaine COSAC soit en mesure d'adopter des conclusions.

III. LISTE DES PARTICIPANTS

AUTRICHE

Bundesrat

Walter STRUTZENBERGER, Vice-président du Bundesrat

Johann PENZ, Président du Comité

Peter KAPRAL, sénateur

Johannes VOGGENHUBER, député

Friedhelm FRISCHENSCHLAGER, député

BELGIQUE

Chambre des Représentants

Comité d'avis chargé de questions européennes

Raymond LANGEDRIES, Président de la Chambre des Représentants

Geert VERNICK, député

Patrick MORIAU, député

Sénat

Comité d'avis chargé de questions européennes

Robert URBAIN, sénateur

Lisette NELIS-VAN LIEDEKERKE, sénateur

Paul STAES, sénateur

DANEMARK

Folketinget

Ove FICH, Président de la commission des Affaires européennes

Torben LUND, député

Addi ANDERSEN, député

Kent KIRK, député

ESPAGNE

Cortes générales

Isabel TOCINO BISCAROLASAGA, Présidente de la Commission

Demetrio MADRID, Vice-président du Comité

Antonio COSTA, député

Narcis VAZQUEZ, député

Joaquima ALEMANY, député

FINLANDE

Erkki TUOMIOJA, Président de la Grande Commission

Kimmo SASI, Vice-président de la Grande Commission

Maria Kaisa AULA, membre du Parlement

Tuija BRAX, membre du Parlement

Jouko JÀÀSKELÀINEN, membre du Parlement

Outi OJALA, membre du Parlement

Margareta PIETIKÀINEN, membre du Parlement

Jukka TARKKA, membre du Parlement

Raimo VISTBACKA, membre du Parlement

FRANCE

Assemblée nationale

Délégation pour l'Union européenne

Nicole CATALA, Vice-Présidente de l'Assemblée nationale

Patrick HOGUET, député

Maurice LIGOT, Vice-Président de la délégation pour l'Union européenne

Sénat

Délégation parlementaire pour l'Union européenne

Jacques GENTON, sénateur, président de la délégation parlementaire pour l'Union européenne

Claude ESTIER, vice-président de la délégation parlementaire pour l'Union européenne

GRÈCE

Chambre des Députés hellénique

Commission des Affaires européennes

Psanias ZAKOLIKOS, Président de la commission des Affaires européennes

Evangelos ARGYRIS, député

Athanasios DIMITRAKOPOULOS, député

Manolis KEFALOGHIANNIS, député

Antonios SKYI.LAKOS, député

Stefanos STEFANOPOULOS, député

IRLANDE

Oireachtas

Michael FERRIS, Président de la Commission

Desmond J. O'MALLEY, député

Brendan KENNEALLY, député

Pat UPTON, député

Michael CALNAN, sénateur

ITALIE

Camera dei Deputati

Commissione spéciale per le Politiche Comunitarie

Umberto CECCHI, Président de la Commission

Oreste TOFANI, député

Fabio EVANGELISTI, député

Senato

Romualdo COVIELLO, Président de la commission pour les affaires européennes

Paolo PERUZZA, sénateur

Cosimo VENTUCCI, sénateur

LUXEMBOURG

Chambre des Députés

Commission des Affaires étrangères et européennes

Lydie ERR, Présidente de la commission des Affaires étrangères et européennes

Carlo HEINTZ, Vice-président de la Chambre des députés

PAYS-BAS

Eerste Kanter

Minnie LUIMSTRA-ALBEDA, sénateur

Tweede Kamer

Eisso WOLTJER, député

PORTUGAL

Assembleia da Republica

Joël HASSE FERREIRA, député

Luis Manuel VIANA E SA, député

Joao POÇAS SANTOS, député

ROYAUME-UNI

House of Commons

Jimmy HOOD, Président de la Commission

Margaret EWING, membre de la Commission

Rachel SQUIRE, membre de la Commission

House of Lords

Lord TORDOFF

Lord SLYNN OF HADLEY

Lord REAY

PARLEMENT EUROPÉEN

Nicole FONTAINE, Vice-président du Parlement européen

Renzo IMBENI, Vice-président du Parlement européen

Fernando MORAN, Président de la Commission institutionnelle

Elmar BROK, député

Raymonde DURY, député

Antoinette SPAAK, député

IV. LES TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION

La délégation a examiné le présent rapport le mercredi 15 novembre 1995.

M . Jacques Genton a tout d'abord rappelé la nature et la fonction de la COSAC. Celle-ci est née d'une initiative de M. Laurent Fabius, alors Président de l'Assemblée nationale, soutenue par le Président Alain Poher. Cette proposition a obtenu, en 1989, le consensus des Présidents des Assemblées parlementaires de l'Union européenne. Les Présidents avaient alors retenu une série de propositions de nature à encourager la coopération en matière européenne entre les Parlements. Parmi ces propositions figurait l'idée d'une rencontre à intervalles réguliers de représentants de toutes les commissions européennes des Assemblées parlementaires des pays membres de l'Union. La première réunion a eu lieu en novembre 1989, à Paris, à l'initiative du Parlement français. Et, depuis lors, chaque semestre, une réunion se tient à l'invitation du Parlement du pays qui exerce la présidence de l'Union.

La COSAC est d'abord un lieu où les membres des Parlements nationaux échangent leurs expériences et leurs réflexions ; c'est également un lieu de rencontre avec le Parlement européen puisque celui-ci est représenté, comme chaque Parlement national, par six membres. La COSAC est aussi l'occasion de séances de questions-réponses avec le Conseil de l'Union européenne, représenté par les ministres du pays exerçant la présidence de l'Union.

Dans un premier temps, les COSAC ont donné l'occasion de comparer les méthodes de contrôle interne des affaires européennes dans chaque Parlement national. Puis elles ont été le lieu de débats sur des sujets déterminés tels que la politique de sécurité intérieure de l'Union, le principe de subsidiarité et la lutte contre la fraude. Enfin, dans la perspective de la Conférence intergouvernementale de 1996, la COSAC s'est penchée sur le rôle que les Parlements nationaux pourraient jouer au sein de la future Union européenne.

Ce fut notamment le thème principal de la COSAC de Paris, en février dernier. À la suite d'un travail préparatoire fondé sur des questionnaires et sur les synthèses des réponses fournies, une première approche fut tentée pour définir les bases d'un rôle plus affirmé des Parlements nationaux de l'Union. De manière générale, on peut dire que tous les participants à la COSAC de Paris ont jugé les débats fort intéressants ; du point de vue français, force est de reconnaître qu'ils ont surtout montré que nous étions plutôt isolés dans notre souhait d'une Chambre européenne représentant les Parlements nationaux. Mais cela eut le mérite de montrer les limites dans lesquelles il était possible de travailler pour réunir les suffrages des autres Parlements nationaux.

Au cours de la COSAC de Paris, M. Charles Ferdinand Nothomb, alors Président de la Chambre des Représentants de Belgique, a cependant, suggéré la constitution d'un groupe de réflexion informel, constitué de parlementaires nationaux jouant en quelque sorte le rôle d'experts, pour tenter de formuler des suggestions qui pourraient ensuite servir de base à une position commune des Parlements nationaux. Ce groupe s'est réuni à trois reprises et a abouti à des conclusions d'étapes.

Ces conclusions auraient pu servir de base au débat à la COSAC de Madrid qui portait sur le rôle des Parlements nationaux. Or, non seulement la présidence espagnole de la XIII ème COSAC n'a pas cru bon d'adresser des questionnaires aux différents Parlements nationaux afin qu'ils précisent leur position, mais elle a refusé que les conclusions du groupe de réflexion parlementaire soient examinées et débattues par la COSAC. Tout s'est passé comme si la présidence espagnole ne souhaitait pas que l'on puisse aboutir à quelque conclusion commune que ce soit. Certains de ses choix sont au demeurant apparus regrettables. Les travaux de la COSAC ont été regroupés sur une seule journée alors qu'habituellement il est prévu un jour et demi. Cette journée fut un mercredi, jour où les parlementaires sont généralement retenus dans leur Parlement national, alors que la coutume est de retenir un lundi et un mardi matin afin de concilier la présence à la COSAC avec les travaux parlementaires de chacun. Tout ceci explique que le sentiment général fut la déception. Il importe d'ailleurs de noter que l'Allemagne n'a envoyé aucun délégué à la COSAC de Madrid. Sans doute cette absence trouve-t-elle son explication dans des problèmes de calendrier, mais elle n'en est pas moins regrettable.

Dans l'immédiat, ceci complique singulièrement la possibilité matérielle de dégager une position commune - ou majoritaire - des Parlements nationaux d'ici la réunion de la Conférence intergouvernementale. On peut se demander si cela ne va pas. d'une certaine manière, dans le sens que semble privilégier le Parlement européen. Celui-ci agit en effet parfois comme s'il considérait qu'il est mieux placé que les Parlements nationaux pour définir la place des Parlements nationaux dans l'Union et pour assurer à lui seul l'expression des souverainetés populaires et du contrôle parlementaire.

Pour l'avenir, c'est l'utilité même de la COSAC qui paraît être en jeu. Les parlementaires qui se réunissent et engagent un débat entre eux souhaitent toujours, à un moment ou à un autre, pouvoir donner le sentiment majoritaire qui se dégage de la réunion à laquelle ils participent. Dès lors, il semble qu'aujourd'hui l'affirmation du rôle de la COSAC passe par la possibilité pour celle-ci d'adopter des textes qui, bien sûr, ne seraient pas des textes normatifs s'imposant au Conseil, mais des opinions politiques que le Conseil pourrait ensuite prendre en compte.

M . Claude Estier a déclaré que la XIII ème COSAC s'était achevée dans un climat de frustration. Il a souligné toutefois que de nombreuses interventions avaient montré les progrès de l'idée de mieux associer les Parlements nationaux et de réaliser cette association à travers la COSAC, évolution dont il s'est félicité, indiquant que. pour sa part, il avait toujours été sceptique sur l'idée d'une seconde chambre européenne. Abordant `organisation de la Conférence, il a déploré la manière dont la présidence avait été exercée : alors que la présidence d'une assemblée doit être arbitrale, veiller à la bonne marche des débats et amener ceux-ci vers une conclusion, la présidence est constamment intervenue dans les débats pour contredire ou compléter les propos des orateurs, et semble avoir voulu empêcher que la Conférence parvienne à des conclusions qui auraient montré les progrès de l'idée d'une association plus étroite des Parlements nationaux aux activités de l'Union.

Puis M . Claude Estier, après avoir souligné que l'intervention de grande qualité du ministre des affaires étrangères. M. Javier Solana avait cependant contribué à l'intérêt de la XIII ème COSAC, a souhaité que la prochaine COSAC se déroule dans de meilleures conditions, faute de quoi cette instance, a-t-il estimé, pourrait tomber en désuétude.

M. Jacques Genton, après avoir estimé que l'intervention devant la COSAC de M. Carlos Westendorp, président du groupe de réflexion chargé de préparer la Conférence intergouvernementale de 1996, avait également apporté un éclairage intéressant, a regretté à son tour que la manière dont la présidence avait été exercée ait nuit à la marche des débats, qui auraient pu être fructueux.

La délégation a alors adopté le présent rapport.

ANNEXE : CONCLUSIONS DU GROUPE DE REFLEXION PARLEMENTAIRE

Lors de la XII ème COSAC qui s'est tenue à Paris les 27 et 28 février 1995. M. Charles-Ferdinand NOTHOMB, Président de la Chambre des Représentants de Belgique, a proposé que les quinze Parlements nationaux créent un groupe d experts en vue de la préparation de la Conférence intergouvernementale de 1996.

En ce sens, M. Philippe SEGUIN, président de l'Assemblée nationale, a, lors de la réunion des Présidents des Parlements qui s'est tenue à Paris le 19 avril 1995, proposé à ses collègues qui le souhaitaient de désigner un représentant afin de constituer un groupe de réflexion parlementaire.

Ce groupe a tenu une réunion constitutive à Paris le 29 juin 1995, puis deux réunions de travail le 28 septembre à Luxembourg et le 26 octobre à Bruxelles. Il doit se réunir à nouveau ù Athènes le 4 décembre prochain.

En l'état actuel de ses travaux, il a adopté les conclusions suivantes

1. Le rôle général des Parlements nationaux dans le fonctionnement de l'Union européenne doit faire l'objet d'une mention dans le corps même du traité futur régissant l'Union européenne ;

2. La représentation des Parlements nationaux au sein de l'Union est assurée par l'intermédiaire de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) et doit faire l'objet d'une inscription dans le corps même du traité ( ( * )1) :

3. La transmission des propositions d'actes communautaires à tous les Parlements nationaux de l'Union européenne doit revêtir le caractère d'une obligation inscrite dans le traité. Cette transmission est opérée par les instances de l'Union européenne qui en sont l'auteur, et ce dès leur communication aux Gouvernements nationaux ( ( * )2) ;

- il en va de même de l'avant-projet de budget général des Communautés que chaque Parlement national examinera selon ses procédures propres, tant en ce qui concerne les recettes que les dépenses ;

4. Les Parlements nationaux devront être pleinement éclairés sur la mise en oeuvre du budget communautaire grâce à une intensification de la collaboration entre les Cours des comptes nationales et la Cour des Comptes des Communautés européennes :

5. Le traité lui-même doit garantir que les directives sont rédigées comme des lois-cadre, et non comme de quasi-règlements, afin d'assurer le respect du principe de subsidiarité ;

6. Le traité doit prévoir que l'examen politique du respect du principe de subsidiarité par les projets d'acte communautaire sera confié à un organe représentatif des Parlements nationaux, comme la COSAC, lorsqu'une ou plusieurs assemblées parlementaires nationales estiment que ce principe n'est pas respecté ( ( * )3) ;

- Le même organe doit avoir vocation à émettre un avis sur le choix de l'instrument juridique le plus adéquat à un projet d'acte communautaire, directive ou règlement (1) ;

7. Le Groupe parlementaire de réflexion n'est pas favorable à ce que le Comité des régions soit officiellement consulté sur le respect du principe de subsidiarité ( ( * )4).

* (1) Sur ce point. la Commission spéciale sur la législation européenne Je la Chambre des Communes britannique considère que la représentation des Parlements nationaux ne doit pas se faire nécessairement à travers lu COSAC

* (2) Sur ce point, la Commission spéciale sur la législation européenne de la Chambre des Communes britannique souhaiterait que cette transmission soit étendue à tous les documents ayant des implications législatives, tels que les livres blancs, les livres verts et autres rapports de la Commission européenne, ou encore les projets de décision et de résolution du Conseil ; elle souligne que ces documents devraient être envoyés aux Parlements nationaux en même temps qu'ils sont envoyés aux gouvernements

* (3) Sur ce point, le délégué de la Chambre des Représentants de Belgique a émis une réserve

* (4) Dans sa réponse au questionnaire du Rapporteur sur le contrôle du principe de subsidiarité. le Bundesrat avait exprimé une opinion contraire sur ce point

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